Chaque année, les écrivains de France et de Franche-Comté, reçoivent une injonction de leur éditeur les priant de se la ramener vite fait bien fait à la capitale pour communier avec leurs supposés lecteurs lors de comices littéraires qui prennent place dans un hangar désaffecté de la Porte de Versailles où le tout-Paris culturel vient promener sa mauvaise humeur dans les travées du salon du livre, puisque c’est de lui qu’il s’agit.
Docile par essence et par nature, l’écrivain obtempère tout en passant à sa pharmacie de quartier s’approvisionner en antidépresseurs et autres anxiolytiques avant de s’accorder une halte dans la supérette du coin afin de se ravitailler en mignonette de bourbon. Faute de quoi, après une demie-heure d’exposition dans son stand posté tout au fond des écuries nationales, entre le box réservé à la littérature picarde et celui consacré au renouveau de la langue occitane, ruminant sa solitude, voyant passer ce flot intarissable de lecteurs qui jamais ne s’arrêtent mirer ses œuvres complètes, il abandonnera son poste et se traînera vers l’infirmerie où lui sera administrée dûment une lampée de valium en intraveineuse.
Avant qu’il ne reparte au combat, ce combat perdu d’avance qui se soldera par des ventes approchant le néant, si ce n’est l’exemplaire de son propre ouvrage qu’il se sera acheté avant de se l’auto-dédicacer d’un misérable ” A toi, cancre parmi les cancres, postillon d’écrivain que je méprise du plus profond de mon âme.”
De ces tourments indicibles qui taraudent l’écrivain en perdition, les touristes qui tournicotent dans les allées du salon ne se doutent pas une seule seconde. Ravis de se retrouver dans la plus grande librairie du monde, leur catalogue à la main, le plan de l’exposition dans l’autre, ils s’en vont gambader de stands en stands à la recherche d’un auteur rendu célèbre pour ses frasques télévisuelles.
Souvent un ancien curé qui, fort de son expérience, a composé un serment sur l’onanisme, une actrice porno qui se prend pour la réincarnation d’Anaïs Nin et s’est fendue d’un traité implacable sur la femme phallique ou la décadence du mâle dans nos sociétés occidentales, voire un footballeur inspiré contraint à signer son livre dont il peine à comprendre le titre.
Sous une chaleur étouffante et accablante, les badauds patientent des heures durant à attendre leur tour, anticipant ce moment exquis où la vedette consacrée daignera lever ses yeux de sa pile de livres, se fendra d’un sourire fatigué, s’enquerra du nom du trublion puis torchera d’une écriture illisible un lapidaire ” A Trucmuche, avec mes sentiments distingués ” avant que l’attachée de presse, juchée sur un tabouret, portant haut un mégaphone, ne lance un ” au suivant ” tonitruant qui ne souffre d’aucune contestation.
Au fond, on ne sait pas très bien à quoi sert le salon du livre. Certes le bibliophile averti, versé dans la lecture bourguignonne tendance icaunaise, trouvera son bonheur à hauteur du stand A43-B56 en se procurant un exemplaire unique de l’histoire de la ville de Sens du temps des croisades jusqu’à la chute de l’empire romain. Certes, le lecteur avisé se régalera d’un débat organisé par le Centre National du Livre sur ” le Numérique, une chance pour l’édition ou la fin d’un monde ?”
Mais sinon, à quoi bon risquer une entorse de la cheville en se prenant les pieds dans un crottin de cheval, vestige du salon agricole de la semaine dernière, alors que désormais, de son cabinet de lecture, en deux trois clics, il dispose via son ordinateur de toute la panoplie de la littérature mondiale ?
Il existe enfin une dernière catégorie de visiteurs qui hante sans relâche les travées du salon du livre avec la force du désespoir constituant le cauchemar absolu de l’écrivain rivé à son stand, à savoir le futur prix Nobel de littérature qui, en attendant cette ultime consécration, se cherche encore un éditeur et accapare le premier auteur rencontré sur son chemin de croix pour lui refiler de force son manuscrit épais comme une bible écrite en gros caractères, en le conjurant de le lire avec toute l’attention requise vu que ce livre constitue toute sa vie.
Et c’est ainsi que les éditeurs reconstituent, à moindre frais, leurs stocks annuels de papiers servant au bon fonctionnement de leurs photocopieuses…
lire le billetLes emmerdeurs de boire du Coca à gogo sont de retour. Cancérigène, cancérigène, cancérigène caquètent les caciques corporatistes de consommateurs contaminés par la connerie conquérante de concasseurs constipés concernés par la contamination du coca par des condiments conséquemment consternant pour la continuation de la condition humaine.
Ainsi selon ces nouveaux conquistadors de la pensée unique, se torcher la moelle épinière à grandes rasades de Coca serait potentiellement dévastateur pour nos cellules et raccourcirait de cent cinquante ans notre espérance de vie. Alors qu’on se pensait immortel, voilà que des dauphins de mauvais augure nous ramènent à notre triste réalité : un jour, c’est oracle, nous mourrons.
Et oui, malgré l’iPpad, l’iPod, l’izboub, une nuit, coca ou pas, nous finirons notre parcours à l’ombre d’un cimetière désolé, dans la solitude glacée d’un cercueil capitonné enfoui six pieds sous une terre humide et baveuse comme une omelette de la mère poularde. C’est ainsi.
En attendant il faut continuer à exister malgré l’avalanche des derniers diktats médicaux qui nous compliquent encore un peu plus chaque jour le difficile métier de vivre.
Un jour voilà que des savants assermentés, bardés de diplômes, consacrés par de prestigieuses académies de médecine, nous assènent, à longueur de spots traumatiques, que si nous n’ingurgitons pas quotidiennement un baril de dix litres d’eau minérale en intraveineuse, nous sommes fichus, la lèpre s’abattra sur nous, le cancer se faufilera dans nos chevilles, la syphilis s’amourachera de nos poumons. Avant de se raviser et de nous avertir que la consommation à grandes eaux d’eaux minérales nous amènera simplement à coloniser plus que de raison la cuvette des toilettes.
Si l’on suit à la lettre les recommandations des grands pontes de ces tartuffes de sommités médicales, bientôt nous en serons réduits à nous laisser mourir de faim et de soif de telle façon à nous assurer une fin sans souffrance et à rendre au Créateur une copie des plus propres sous la forme d’un corps impeccable dépourvu de métastases et n’abritant aucune malingre cellule.
Sitôt qu’un chercheur, après avoir conduit une étude auprès de 1258 babouins atteints de rachitisme pré-natal, conclut que manger du poireau s’avère être excellent pour la conduite de balle dans la surface de réparation, un autre s’empresse d’affirmer, chiffres et schémas à l’appui, qu’une consommation trop régulière du même poireau influerait d’une manière négative sur notre façon de tirer des corners à la rémoise.
L’un assure que manger de la betterave crue cuite à la vapeur de riz ougandais augmenterait notre capacité à supporter sans broncher les doctes remontrances de notre belle-mère tandis que son confrère nous assène que tout au contraire ingurgiter de la betterave à haute dose renforcerait notre envie de la décapiter à mains nues.
Le sommet de ces diafoiruseries ayant été atteint lorsqu’une dépêche nous apprit que l’on venait de découvrir que la “conscience de soi se situerait derrière nos yeux” alors qu’on pensait jusqu’alors qu’elle convoitait notre appendice anal.
Notez cependant que les pourfendeurs du coca n’ont pas complètement tort et pourraient même avoir diablement raison. Car les faits sont têtus et laisseraient à penser que leurs recommandations sont plus que fondées. En effet, depuis que le coca existe – plus d’un siècle maintenant – il apparaît d’une manière indubitable que le taux de mortalité du consommateur du soda américain serait de 100%. Aucun survivant. Pas un rescapé. Certains sont morts dans des accidents de voiture, d’autres en tombant au champ d’horreur, quelques-uns en mettant fin à leurs jours, la plupart en cessant un jour de respirer. Effroyable constat.
Tavernier, sers-moi donc un verre d’eau sans eau !
lire le billetLe Crif a encore frappé. Sitôt que Monsieur Fillon a osé babiller autour de la question de la viande casher, vilipendant des coutumes ancestrales peu adéquates avec l’exigence du monde moderne, les soi-disant responsables de la communauté juive ont ravalé leur kippa et s’en sont allés à Matignon pleurnicher leur désapprobation et leur sentiment d’avoir été une nouvelle fois abandonnés par le sommet de l’état. Personnellement, je tiens à préciser que je ne leur avais rien demandé. Pourtant, vu mon pedigree de bâtard de juif, il me semble que j’appartiens aussi bel et bien à cette même communauté d’où cette injonction bonhomme mais néanmoins impérieuse que j’adresse à ces messieurs dames de cesser une bonne fois pour toutes d’arrêter de prétendre de parler au nom de tous les juifs de France.
Il est bien entendu qu’en tant que bon juif impur, je ne me goinfre pas avec de la vache casherisée. Et je ne connais personne dans mon entourage pourtant largement sémite qui carbure à de la viande martyrisée par un coquin de rabbin. En premier lieu, parce que pour une raison mystérieuse, elle n’a aucun goût et deuxièmement parce que les autorités compétentes en charge de l’abattage des bestiaux ont oublié de circoncir les prix.
Et pourtant comme tout bon juif, pur ou impur, qui se respecte, au moment fatidique des fêtes, afin se donner bonne conscience et se faire bien par voir par l’autre empoté dont on ne doit jamais écrire le nom, j’avoue qu’il m’arrive de me traîner à reculons jusqu’au boucher casher qui, retors et roublard comme un voleur de poule estonien, sachant précisément que tous les juifs de pacotille viennent rôder autour de son échoppe lors de ces jours de repentance, en profite pour multiplier par huit le prix de son salami et par quinze celui de son bœuf bourguignon.
Une fois ressorti, je vais directement à ma banque prévenir mon responsable de compte que ce mois-ci mon découvert sera encore plus à découvert, j’avertis mon propriétaire que je paierai le loyer en retard, très en retard voire même pas du tout et j’annonce à mon chat que c’en est fini de ses croquettes diététiques recommandées par le vétérinaire et que désormais il carburera au Whiskas de chez Leader Price.
Ceci dit, les juifs religieux sont à priori des gens très respectables. Certes de tendres fayots qui cherchent à s’attirer les faveurs de l’Éternel en respectant à la lettre ses commandements et ses édits mais pourquoi pas ? Pourtant, étrangement, à ma stupéfaction stupéfaite, à mon ahurissement ahuri, à mon incompréhension incompréhensible, ils ne respectent pas le commandement suprême du grand manitou qui proclame en gros que ” pour l’ensemble de ton œuvre, pour avoir franchi avec succès tous les pièges et autres traquenards que je t’ai tendus, pour avoir sans broncher subi déportations, pogroms, holocauste, je te donne en récompense, la Terre Promise, va te dis-je, établis-toi là-bas, travaille la terre et récolte les fruits de ton labeur.”
Il existe tous les jours des vols pour Tel Aviv. Même des locaust. Pourquoi alors s’entêter à vivre dans un pays honteusement laïc, peuplé de goys sanguinaires, de musulmans atrabilaires, d’athées perfides qui vous mettent des bâtons dans les roues, vous empêchent de vivre votre croyance au grand jour alors qu’il serait tellement plus simple d’émigrer dans ce pays de lait et de miel où tous ces infâmes désagréments disparaîtront d’un coup d’un seul. Hein ? Pourquoi s’obstiner à errer dans une contrée hantée de mécréants alors que cette fichue Terre Promise qui a tant fait rêver des générations et des générations de juifs à travers le cours tumultueux et tragique de son Histoire, cette espérance incarnée par cet incantatoire “l’année prochaine à Jérusalem”, existe désormais et réclame votre présence.
Sinon, si le religieux, parce qu’il trouve que le système éducatif israélien laisse à désirer, que le niveau de ses clubs de football est lamentable, qu’il rechigne à se séparer de sa maîtresse, refuse de retourner là où tout a commencé et où tout finira, persiste à vivre dans un pays où il est juste toleré, il se doit d’obéir à une règle bien simple : se taire, pratiquer sa croyance à l’ombre de la République, et surtout ne pas la ramener à chaque fois que l’on feint de toucher à ses intérêts. Et cesser de parler en mon nom ou en celui de mon chat.
lire le billetEn mai de cette année, Michel Fugain aura 70 ans. Vous vous en foutez ? Moi de même. Mais n’empêche. A regarder son visage épanoui aux yeux farceurs, difficile de deviner qu’il va rentrer dans l’hiver de sa vie. C’est terrible à constater mais les vieux ne vieillissent plus. Bientôt, à ce rythme, ils ne mourront même plus. Les voilà qui s’accrochent à la vie avec une ardeur redoublée. Ils plastronnent comme des jeunes premiers et continuent à rêver à des étreintes sauvages avec des diablesses en mini-jupe. Ils ne prennent même plus le temps de philosopher en regardant la mort s’approcher et remettent sans cesse à plus tard le temps des bilans, des constats et de la confrontation avec soi.
C’est désolant. Où sont-ils nos petits vieux d’antan qui ne bougent plus ou alors seulement pour se mouvoir du lit à la fenêtre puis du lit au fauteuil puis du lit au lit ? Ceux-là sont bien morts. Désormais les nouveaux vieux croquent la vie avec leurs dents même pas avariées, ils s’engagent dans des courses au long cours, ils concourent à des marathons en roller, ils colonisent les salles de remise en forme, ils accaparent les clubs de vacances pour prouver à la mort que l’heure n’est pas venue, qu’elle peut aller se rhabiller ou courtiser des triples centenaires fatigués.
Bientôt, nous prédisent les sommités médicales, nous serons tous des joyeux centenaires. Affreuse perspective. Voir de son vivant ses propres enfants atteindre l’âge canonique de 80 ans et commencer à perdre raison. Ses petits-enfants louvoyer autour de la soixantaine. Ses arrières-petits-enfants s’entasser aux abords de la quarantaine. Ses arrières-arrières-petits-enfants tournicoter autour de la vingtaine. On ne parlera plus de dynasties mais de véritables empires où la mort ne se couche jamais.
L’Alzheimer aidant, leur cerveau ramollissant mais leurs membres toujours fiers et gaillards continuant à pétarader de milles feux, ils s’en iront communier à des orgies familiales sans se douter un seul instant que ces participantes à ses joutes endiablées s’avèrent être leurs filles ou leurs mères. Atroce. Bientôt ils se retrouveront confinés dans des maisons de retraite condamnés à partager leur chambre avec leur propre progéniture, à engueuler le souvenir de leurs fils d’avoir encore omis de tirer la chasse, à se plaindre à l’infirmière des ronflements insupportables du paternel, à avertir la direction que son co-pensionnaire de petit-fils lui vole en douce ses Pépitos pendant qu’il s’exerce avec ses haltères.
” C’était un homme qui avait beaucoup et largement vécu. Il était loin d’être jeune- trente-huit ans ou trente-neuf ans même- et cette vieillesse avait surgi presqu’à l’improviste.” Voilà comme Dostoïevski décrit Veltchatinov, le héros de L’éternel mari. Le récit date de 1870 ! Aujourd’hui notre Fédor serait obligé d’écrire ” C’était un homme qui avait beaucoup et largement vécu. Il était loin d’être jeune – quatre-vingt-quatorze ans ou quatre-vingt-quinze ans.”
En moins d’un siècle et demi, le vieux a gagné un demi-siècle. Certains s’en réjouiront. Pas moi. C’est long un siècle d’existence, surtout vers la fin. Les infanticides et les parricides tripleront de fréquence. Pour un enterrement, il faudra réserver le Stade de France afin d’accueillir toute sa descendance. La bar mitzvah du petit coûtera les yeux de la tête avec tout ce cortège de vieux débris à parquer à la table d’honneur. Les mariages nécessiteront la réquisition du château de Versailles pour abriter toute la flopée d’invités grabataires.
Et à ce rythme-là, l’auteur de ce blog, centenaire bondissant, continuera à emmerder son petit monde avec sa rengaine nostalgique d’un monde d’avant supposé meilleur tandis que ses lecteurs, encore plus décatis que lui, s’entêteront à laisser des commentaires encore plus abscons qu’aujourd’hui. Ca promet.
lire le billetQuelle mouche a donc piqué l’autre soir François Hollande lorsqu’à brûle-pourpoint, sans avoir consulté personne pas même Madame Royale, il a décidé, sur un coup de tête, de taxer le pauvre travailleur qui cravache comme un damné pour péniblement arriver à disposer en fin d’année d’un misérable petit million d’euros ? A-t-il seulement réalisé ce gougnafier bolchevique qu’en édictant cette proposition grotesque, il allait mettre à bas le football hexagonal, ce trésor national que nous envient les peuples du monde entier ?
Et de se demander si l’ancien premier secrétaire du parti socialiste a déjà été condamné à se farcir en entier un match de ligue 1 ? A-t-il déjà eu à subir, par un dimanche soir pluvieux, sur l’écran de son téléviseur déprimé, cette avalanche d’occasions avortées, ces transversales qui arrivent dans les tribunes, ces coups francs qui terrorisent les ramasseurs de balle, ces tirs qui martyrisent les panneaux publicitaires, cette litanie de passes manquées, de dribbles morts-nés, de contre-attaques qui, à peine déclenchées, s’enterrent déja au niveau de la ligne médiane ?
Hein, Monsieur Hollande, il est facile de s’ériger en pourfendeur intraitable des hauts salaires, mais avez-vous déjà posé votre séant dans un stade désolé de ligue 1 pour assister à une rencontre de notre championnat avec ces équipes qui mettent une bonne mi-temps à s’observer avant de pencher au final pour un armistice généralisé, ces rencontres mortifères aussi réjouissantes à regarder qu’une échappée de moineaux anorexiques dans la campagne sarthoise, ces matchs étriqués et poussifs, aux occasions de but si rares et éparses qu’elles semblent obéir à une loi scélérate visant à rationner les tentatives de déranger dans sa sieste dominicale le gardien de but adverse, cette litanie de matchs qui déroulent un football monotone et moribond aussi grisant à contempler qu’une étape de repos du Tour de France ?
On se le demande.
Parce qu’avec votre scandaleuse mesurette qui va priver nos méritants footballeurs du neuf dixième de leur revenu déjà maigrichon, les condamnant à mener une vie sans relief, les obligeant même à prendre un deuxième boulot pour boucler leurs périlleuses fins de mois, à jongler avec les traites impayées de leurs châteaux en Espagne, on va assister à un exode comparable à la fuite des cerveaux allemands lors de l’âge d’or du troisième Reich.
Bientôt, accompagnés de passeurs aguerris, comme de vulgaires travailleurs clandestins, on les verra franchir de nuit les Pyrénées, transis de froids,emmitouflés dans leurs cardigans de chez Fauchon, avec femmes et enfants et maîtresses et escort girls, emportant avec eux leur carriole de Ferrari, leur carnaval de Bentley, leur ribambelles de Rolls.
Et ils ne reviendront pas.
Et alors que restera-t-il au peuple de France à mater comme football ? Des footballeurs aux pieds encore plus carrés pas foutus de déclencher un une-deux sans se percuter de plein fouet avec l’arbitre, dispensant des passes postales qui n’arrivent jamais à destination, des bourrins mal dégrossis qui passeront leur temps à courir après un ballon insaisissable, des clones de Brandao s’égayant sur une pelouse hostile à la recherche d’un paradis même pas perdu puisque jamais connu.
C’est pourquoi je vous en conjure Monsieur Hollande de revenir sur cette proposition qui ne vous honore pas. Il est encore temps. Entendez ce cri de désespoir qui monte des vestiaires de ligue 1, cette plainte gémissante de footballeurs qui ont tout sacrifié, leur adolescence, leur jeunesse, leurs nuits, pour vivre le rêve éveillé d’une vie passée à mater des films pornos sur des écrans géants, à disposer d’une bibliothèque lambrissée garnie des seuls films de Bruce Lee en version originale, à posséder un garage grand comme le petit palais.
M. Hollande quand on possède un patronyme comme le vôtre, on ne peut pas considérer le football comme un simple divertissement destiné à divertir les masses. On possède aussi des droits et des devoirs. Quand on peut se targuer d’avoir la chance d’être affublé d’un nom de famille qui pour tous les amateurs de ballon résonne encore et toujours des noms enchanteurs de football total, de l’Ajax Amsterdam, de Johan Cruyff, de Rensenbrik, de Neeskens, de Rudy Krol, de Johnny Reep, de Marco Van Basten, de Dennis Bergkamp, on respecte ce sport, on le révère, et au lieu de l’assassiner lâchement, on le salue bien bas et on le laisse tranquillement prospérer.
lire le billetDe tous les saperlipopettes de diktats que nous infligent nos parents, ne mets pas les genoux sur la table, tiens-toi voûté, mange ta glace avant qu’elle ne refroidisse, les plus pernicieux sont ceux qui investissent le champ du politique. Ces banalités que s’échangent nos parents autour du banquet familial, entre la poire et la salade de crudités, s’incrustent si profondément dans les replis de notre mémoire qu’avec le temps, elles deviennent si prégnantes qu’il devient quasiment impossible de s’en débarrasser.
Je ne suis pas versé dans les statistiques mais je serais bien curieux de savoir combien de fils et de filles de déportés (tic de language, désolé) dérogent aux recommandations parentales et s’en vont gambader, en franchissant la ligne de démarcation, émancipées comme des girafes éprises de liberté, pour goinfrer une urne électorale d’un bulletin de vote contraire aux prédispositions familiales.
Les parents nous suivent jusque dans l’isoloir. D’ailleurs comment pourrait-il en être autrement ? A partir du moment où n’importe quel jouvenceau débarqué à peine de ses dix-huit ans a le droit de postillonner un avis, on imagine mal comment il pourrait ne pas s’inscrire dans la droite lignée de la tradition politique de ses géniteurs. A moins de lire en cachette la feuille de chou d’un opus révolutionnaire ou d’être cornaqué par un infâme professeur gauchisant ou droitisant, c’est selon, le bambin votera très exactement comme papa et maman.
Pour la simple raison que depuis qu’il a été admis à vivre parmi les siens, il aura eu pour seule lecture, celle du nouvel obs ou du fig mag, c’est encore selon, comme seul interlocuteur pour son journal télévisé, la tronche du présentateur de TF1 ou de France 2 ou pour les fils de paysans, celle de Soir 3. Autant de petits cailloux qui finissent à la longue par former ce qu’il convient de nommer l’ébauche d’une conscience politique. Avant d’être éventuellement pollué, mais rien n’est moins sûr, par la fréquentation de directeurs de consciences situés à l’opposé du spectre familial des convenances politiques : une amitié nouée avec un fils de cheminot et conclue par des weeks-ends passés dans la maison familiale du retraité cégétiste dans sa maison de la Garenne Colombes, une amourette clandestine avec une fille de sénatrice marquée à droite, parachevée par une visite du palais du Luxembourg et des alentours, une rencontre au bout de la nuit avec un compagnon de beuverie qui s’avère être légionnaire, fils de français de souche, amourtié d’une nuit s’achevant par un pèlerinage en grandes pompes sur la tombe du maréchal.
Ainsi qu’adviendrait-il du brave fils d’une famille d’enseignant qui, cheval rebelle et fougueux, réfractaire à toute forme d’autorité, s’en irait donner de la voix du côté d’un parti prônant la supériorité de la vache charolaise sur celle du limousin ? Et que dire du sort d’un rejeton d’une famille de grands argentiers qui, défiant les lois de la génétique, s’énamourait d’un parti vantant la prépotence de la vache du limousin sur celle du charolais ?
Vu la pertinence incontestable de la réflexion ci-dessus, il s’avérerait donc que le destin d’une élection présidentielle ne se jouerait que sur le nombre de fornications réussies entreprises par les adhérents d’un courant politique, quel qu’il fut. Aussi comme conseil aux futurs candidats à une prochaine élection, on proposera non pas le ringardisé et tristounet slogan de Votez pour moi mais bel et bien le plus juteux, Baisez pour moi, reproduisez-vous sans compter, vos spermatozoïdes seront la France de demain.
lire le billetLe cinéma a ses César, le théâtre ses Molière, la télévision ses Gérard, il est grand temps que la littérature adopte un rituel annuel pour décerner son lot de récompenses et autres trophées à ses écrivains les plus méritants. L’idée étant lancée et déjà adoptée, ne reste plus qu’à la baptiser et lui trouver une appellation percutante pour convaincre le PDG de France Télévision ou d’Arte de retransmettre la cérémonie en direct.
Les Proust ? Certainement pas. D’abord parce qu’on ne peut pas décemment organiser une soirée de prestige en remettant des distinctions se référant à un écrivain semi-juif et totalement inverti, et secondement ce serait faciliter de trop la tâche au critique paresseux qui ne manquerait pas de rivaliser de bons mots en circoncisant le nom de Proust de son r ce qui permettrait à Libération de titrer : “Quand les Proust font prout, prout.” Camus ? N’étaient-ce ses origines algériennes et arabisantes, son goût pour les voitures trop rapides, la faiblesse affichée de son œuvre romanesque, il eût été le candidat idéal. Les Céline ? Impossible. Le CRIF irait sur-le-champ cafarder auprès de l’Élysée et déclencherait dans la foulée une nouvelle guerre de religion. Je propose donc, animé d’un véritable esprit de concorde, les Chateaubriand en hommage à ce grand écrivain français, catholique et chrétien irréprochable, à la prose chatoyante et à la chevelure désordonnée. Va donc pour François-René de Chateaubriand.
Le lieu de la cérémonie ne peut-être que l’Académie Française. Ne serait-ce que parce qu’elle possède déjà des infrastructures de premier plan pour tous les grabataires d’écrivains perclus de rhumatismes qui composent en majorité la république des lettres : ascenseurs ultra-modernes, rampes d’accès sophistiquées pour atteindre sans trébucher l’estrade, personnel déjà formé aux vieillards acariâtres et retors.
Évidemment, le rôle de maître de cérémonie idéal devrait revenir à Bernard Pivot mais il serait capable au beau milieu du déroulé de la manifestation d’infliger une punition collective à son auditoire sous la forme d’une dictée carabinée qui laisserait à découvrir que la plupart des écrivains possèdent des lacunes majestueuses en orthographe et maîtrisent mal la conjugaison du subjonctif passé.
On optera donc pour un tandem détonnant D’Ormesson/Beigbeder couvrant un large spectre des lettres hexagonales, le premier nous abreuvant de “vous savez, comme disait Mirabeau quand on l’interrogeait sur…” tandis que le second renchérira en citant les deux seuls écrivains qu’il a lus, Breat Easton Ellis, Jay Mc Innerney, Breat, Jay, Jay, Breat.
La tenue de soirée ne pouvant en aucun cas être le smoking – les écrivains étant fauchés comme les blés – on adoptera le classique pantalon de velours côtelé, assez chic pour donner le change, en promotion chez Emmaüs, accompagné d’une chemise blanche mal boutonnée et tachée de disgracieuses auréoles avinées.
L’avantage de cette cérémonie sur ces concurrentes des autres disciplines artistiques, sera sa remarquable brièveté : les écrivains étant alcooliques, asociaux, pas rasés, souvent mal réveillés, mal lunés, d’humeur chagrine, en pleine dépression, divorcés, orphelins, encalés au milieu de l’écriture d’un manuscrit qui n’avance pas, accepteront leurs récompenses en reculant, vendangeront un discours incompréhensible mais surtout, ils ne perdront pas de temps à remercier leurs parents “qui ont toujours cru en eux ” vu que lorsqu’ils ont annoncé à leurs géniteurs leur désir d’embrasser une carrière littéraire ils se sont vus traiter de futurs ratés, de chômeurs en devenir, de cadavres à la renverse, de parasite incommodant, de pédérastes dépravés.
De surcroît, pour vaincre leur timidité maladive, les attachés de presse les auront abreuvés d’un mélange détonnant de vodka et de bourbon, agrémenté d’un litron d’absinthe de contrebande, si bien que la plupart seront excusés de leur absence, remplacés au pied levé par leur éditeur à moins que ce dernier ne les ait accompagnés dans leur beuverie vomitive.
La cérémonie ira bon train. On décernera le Chateaubriand du meilleur roman, du meilleur premier roman, du meilleur deuxième roman, du meilleur septième roman, du meilleur dernier roman d’un écrivain devant décéder dans l’année, de la meilleure traduction d’un roman anglais, allemand, albanais, autrichien…mexicain, moldave, mauricien…vénézuélien, zimbabwéen, du meilleur personnage de tenancier de bistrot, de l’héroine la plus nunuche, du dialogue le plus enlevé, de la fin la plus réussie, du début le plus envoûtant, du milieu le plus captivant. Sans oublier le Chateaubriand très couru de l’écrivain ne vivant pas à Paris.
Puis viendra le temps des récompenses techniques : meilleure couverture décernée chaque année à Actes Sud, meilleure quatrième de couverture remise invariablement aux éditions de Minuit pour leur implacable sobriété (une page blanche), meilleur imprimeur, meilleur livre numérique pour rester à la page, remise d’un Chateaubriand d’honneur à Philippe Roth ou Jim Harrison qui dans un français impeccable remercieront la France d’avoir su conserver son indéfectible attachement à la littérature tandis que “chez nous en Amérique on préfère remettre des récompenses aux prédicateurs les meilleurs “, ah ah ah rires gras de l’assistance, standing ovation, gros plan sur le ministre de la culture aux anges.
Enfin pour faire plaisir au CRIF et au lobby judéo-maçonnique, on remettra chaque année, en coulisse, un Chateaubriand spécial pour un écrivain d’origine sémite remis par BHL ou Finkelautre.
La soirée s’achèvera aux alentours de 21h30 pour permettre aux honorables membres de l’Académie de s’endormir comme de coutume à une heure décente.
lire le billetVoulant m’entretenir avec mon neveu des chances de Saint-Etienne de terminer dans les trois premiers de la Ligue 1 (à mon humble avis, aucune) j’ai été estomaqué d’apprendre que non seulement le bougre se trouvait en vacances mais que de surcroît ses vacances s’allongeaient sur deux semaines. Il faut dire qu’au kanada, les vacances de février n’existent pas, et que celles de Pâques ne s’éternisent que sur une semaine. Pourtant à les regarder paître sur les patinoires ou patiner sur des étangs gelés ou kakayaker sur les eaux du Pacifique océan, on ne peut pas vraiment dire qu’ils arborent des tronches d’enfants battus ou maltraités voire maladifs.
Ne voulant pas me lancer dans une étude comparée des systèmes scolaires de ces deux pays amis d’où il ressortirait que la France a encore tout faux, il n’en demeure pas moins que je ne peux passer sous silence le crime perpétré par les autorités françaises auprès de leurs écoliers, collégiens et autres lycéens. Meurtre de masse orchestré par l’ensemble du système éducatif qui condamne des générations d’enfants innocents à se gaver, le temps de leurs pléthoriques études, de connaissances parfaitement inutiles.
Comme d’apprendre que Napoléon est né à Sainte-Hélène, que les grecs mangeaient du tofu au petit déjeuner, que le carré de l’hypoténuse équivaut à la somme des sinus multipliés par le cosinus de la racine carrée du pape Pie XII, pape ayant aboli l’esclavage du temps de la conquête de la Bretagne par l’armée austro-hongroise lors de la guerre de cent ans qui vit éclore l’anéantissement de la civilisation byzantine, rendue fameuse par sa découverte du génome de la tuberculose que combattit en son temps Charles Martel, en parcourant les fangeuses étendues de la Mongolie intérieure, vaste métropole de bocages septentrionaux où naissent des roches volcaniques remontant au Néolithique supérieur lorsque l’homme entreprit de se livrer au commerce d’épices rares venues d’Inde et ramenées en Europe par l’entremise du Douanier Rousseau, compagnon de route de Jean-Paul Sartre qui s’illustra par ses travaux sur le gérondif participatif du verbe verboten que la langue latine traduisit par rosa, rosam, rosarum, s’opposant en cela à Euclide qui fut le premier à penser que la terre tournait autour de la lune et ce en une révolution des mœurs si éclatante qu’elle conduisit les Visigoths à se passionner pour l’étude de la perspective en tant que principe de la métaphysique copernicienne mise à l’œuvre par le Général de Gaulle qui collabora étroitement avec Graham Bell pour édicter le théorème de Pythagore, serpent appartenant à la famille des orchidées sévissant dans les rizières indochinoises au temps de la mousson, période propice à la reproduction de l’hypothalamus gauche, vecteur de synapses essentielles à la compréhension de l’art Maya en tant que représentation de l’homme moderne en prise directe avec le complément d’objet direct auquel rendirent hommage les romantiques, notamment Sophocle qui épousa en secondes noces Chrétien de Troyes, en la cathédrale de Reims sous les yeux de l’empereur d’Autriche, fils putatif de Pépin le bref, lui-même fils d’immigrés polonais, qui découvrit le premier l’Arkansas, troisième producteur de minerai argenté selon la terminologie de la classification de Medvedev, juste derrière le Chili, pays exportateur de vapeurs dues à la condensation de plantes aborigènes…
Post écrit au lait chaud avec du miel de Tanzanie, sous une température de 39.5 dégrés à l’ombre du cerveau embrumé de l’auteur de ces lignes, avec la complicité de son chat et de la chanson Idiot Wind, auteur que l’infirmiere va maintenant reconduire à son lit, lit ou bed en anglais, langue vernaculaire que Brutus apprit à apprendre lors de son expédition lunaire de 1648.
lire le billetPour ma part, et en ce qui me concerne, selon moi, à vue de nez, au regard de mon année de naissance, j’appartiens de plain-pied à la génération X, celle décrite avec brio par Douglas Coupland, esprit très éclairé par principe puisque élevé au bon air de Vancouver, dans son roman éponyme où, si je me souviens bien, il racontait la non-histoire de jeunes gens désillusionnés qui glandouillaient au bord d’une piscine en sirotant des cocktails tout en se cherchant une raison d’exister. Ou du moins quelque chose d’approchant.
Après, en toute logique, il a dû donc y avoir la génération Y et maintenant la génération Z. Ou le contraire ? Je m’y perds. Typiquement le genre de papiers qui pullulent dans les pages sociétales des hebdos et que je ne lis par principe jamais. Avec des interviews fadasses de sociologues à la petite semaine qui décortiquent les comportements des nouvelles générations, aidés en cela par une batterie de psychiatres dévoyés qui en rajoutent toujours une couche sur ” le retour du meurtre originel du père opéré par la transformation radicale de la femme en tant que matrice générationnelle du comportement déviant de la société du paraître qui caractérise la jeunesse défragmentaire.” Ou du moins quelque chose d’approchant.
Je me propose donc d’inventer à mon tour une nouvelle génération et de la baptiser génération XFGT (choix intuitif de mon clavier envers qui je fais toujours montre d’une confiance absolue) et dans la foulée de cette découverte décisive, je déclare ici, en ce jour du 20 février de l’an 12 d’après le changement de millénaire, qu’appartient à cette génération toute personne ayant connu le monde d’avant internet et celui d’après.
A savoir tous les garçons et les filles de mon âge qui un jour se sont servis d’un téléphone avec un cadran pour souhaiter bon anniversaire à tata Raymonde ou pour demander à Véronique si elle voulait bien sortir avec moi (Non). Qui ont dû s’engoncer un écouteur en fil jaunâtre au creux de l’oreille venant se brancher sur le cul de la radio pour écouter les commentaires hallucinés d’Eugene Saccomano en direct de Marcel Saupin. Qui ont connu les premiers jeux vidéos sous la forme de deux barrettes blanches qui inlassablement se renvoyaient une balle carrée sur l’écran noir et blanc de leur téléviseur. Ou quelque chose d’approchant.
Et qui du jour ou lendemain ou presque ont dû s’adapter à des bidules révolutionnaires permettant de converser en temps réel avec des chinois éveillés. Vendre leur encyclopédie Universalis en 21 volumes pour se fournir sans débourser un franc chez Wikipédia. Découvrir, ahuris de stupéfaction jalouse, des vidéos de quadruple pénétration anales. Apprendre un nouveau langage pour demander à Véronique tu ve sortir avé mwa ? (toujours non). Rassembler toute sa collection de vinyles des 45 tours des Smiths dans une barrette grande et seyante comme un mini-carambar. Ou quelque chose d’approchant.
Depuis l’avènement de l’électricité, et encore, jamais bipède à forme humaine n’avait eu à changer d’une manière si radicale son mode de vie, sa façon de communiquer, d’échanger, d’être. Son rapport au monde, à la sexualité, à l’autre, à Dieu, à l’absence de Dieu. A soi. A trouver l’équilibre entre la relecture du bruit et la fureur et la nécessité impérieuse de savoir de quoi est morte Whitney Houston. De tenter de s’accrocher à ces anciennes croyances en un monde où le temps prenait son temps pour se raconter à une époque où le temps n’a plus le temps pour perdre son temps à temporiser. De composer avec une structure mentale façonnée par l’écrit et d’essayer de l’adapter à un univers où l’image prédomine. De continuer à essayer de réfléchir au sens de sa propre vie tout en se sentant perpétuellement dépassé et écrasé par une société qui n’a plus le temps de se formaliser avec ce genre de pensées. Ou quelque chose d’approchant.
Dans une saison en Enfer, Rimbo écrivait : “La science, la nouvelle noblesse ! Le progrès. Le monde marche ! Pourquoi ne tournerait-il pas.” En effet, pourquoi pas ?
lire le billetA priori je n’ai aucune compétence particulière pour traiter de l’épineux sujet du mariage gay : je ne suis pas marié pas plus que je ne suis gai. Concernant cette dernière non-qualification, je n’ai aucun mérite. Il est bien connu que, de toute éternité, enfin mettons depuis l’éradication sauvage et radicale de Sodome et Gomorrhe, il n’existe pas, bien entendu, de juifs gays. Ça se saurait. Aussi impossible à dénicher qu’un catho qui vote à droite ou qu’un musulman qui supporte le PSG. Une impossibilité métaphysique passible de provoquer chez la mère juive une envie irrépressible de défénestration voire d’un génocide de toute la famille, chats et chiens compris.
J’avoue, fort de mon ignorance crasse sur le sujet, que je ne comprends pas bien cette obsession enragée de la communauté gay de vouloir à tout prix s’en aller saluer Monsieur le maire avant de se rouler une pelle devant le parterre de la mairie sous une pluie de riz basmati. Être gay pensais-je c’était comme être punk.
L’affirmation enragée d’une rébellion à l’ordre public, un crachat envoyé à la face de la bourgeoisie bien-pensante, un bras d’honneur adressé à l’endroit de l’ensemble des corps constitués. Le refus obstiné des conventions. Une manière de vivre bien à soi qui n’admet aucune concession. Vivre à la marge tout en assumant pleinement sa différence. Effrayer le bourgeois et s’en féliciter. Se rire des regards offusqués de la concierge de l’immeuble.
Au lieu de quoi, une frange non négligeable de la communauté gay et lesbienne réclame à cor et à cri sa part de normalité. Les voilà qui veulent à tout prix rentrer dans le rang. Se fiancer, publier des bancs, se marier, s’endetter pour s’offrir une soirée de gala dans un hôtel des beaux quartiers, s’emmerder à aller de table en table pour s’assurer que le saumon est bien goûtu, se trémousser en cadence sur C’est bon pour le moral de la Compagnie Créole, s’enquiquiner avec des marmots de substitution, régler ses impôts sous le régime commun, s’acoquiner avec un plan d’épargne, s’acheter une concession commune au cimetière municipal.
Arthur Rimbaud acceptez-vous de prendre pour époux Monsieur Paul Verlaine ? Gertrude Stein acceptez-vous de prendre pour épouse Mademoiselle Alice B.Toklas ? Steve Morrissey acceptez-vous de prendre pour époux Steve Morrissey ? Non, messieurs dames, je refuse. De toute mon âme. Je ne suis pas comme vous. Je ne veux surtout pas être comme vous. J’ai en horreur tous ces protocoles sentencieux qui ne sont là que pour rassurer la société et l’empêcher de dérailler. Je suis un hors-la loi.
En voulant renoncer à leur pouvoir de provocation, les gays ne sont-ils pas en train de se perdre et perdre de leur force de déstabilisation ? Ne sont-ils pas désireux avant tout de s’embourgeoiser, de se normaliser au risque se de détourner de ce versant sulfureux qui les rend si indispensables au bon déroulement de la vie moderne ? A l’image des juifs qui veulent à tout prix s’assimiler, se fondre dans le décorum et le grand barnum de la République, au risque de se diluer et in fine de disparaître, de renoncer à ce qu’ils sont : des empêcheurs de tourner en rond, des êtres impossibles, inclassables, dérangeants, des êtres du dehors voués à servir de repoussoir et de bouc-émissaires.
Le juif assimilé est tout autant utile à la société qu’un gay banalisé. Il rejoint le troupeau des masses bien-pensantes, propres sur elles, impeccables de rectitude, pétries de sens commun, réduites à mastiquer une existence sage comme la mort, sans aspérités, sans heurts ni fracas.
Une vie peureuse qui n’engendre que des comportements rassis et des sentiments moisis.
Des vies au rabais.
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