Revoir Manhattan un soir d’été

 

C’est dimanche.

Il doit être sept heures passées.

Il y a dans l’air cette atmosphère de fin de semaine quand l’allégresse du week-end arrive à son terme, remplacée par la perspective de recommencer dès le lendemain une nouvelle virée dans la morne routine d’un carnaval de jours passés à l’ombre d’un bureau solitaire.

A l’intérieur de votre appartement, malgré les volets tirés et le murmure du ventilateur, la chaleur rôde, l’esprit s’engourdit, le corps s’alourdit, les paupières se ferment, c’est l’été, le chat dort d’un sommeil profond et désœuvré comme jamais, voilà que vous feuilletez d’un air distrait la gazette de la ville et découvrez que Manhattan passe à la cinémathèque du coin.

Vous revoyez encore l’affiche du film qui trônait dans votre chambre d’étudiant, cette image d’un New York en noir et blanc, avec deux ombres assises sur un banc, tout à côté d’un pont, devant une balustrade, dans un clair-obscur propice à toutes sortes de rêveries.

Comme vous ne l’avez pas revu depuis un certain temps, vous décidez, malgré la chaleur, malgré la pesanteur de la ville figée dans la torpeur de l’été, de vous rendre à la projection.

La salle est presque comble, ce qui ne manque pas de vous étonner.

Il y a là des jeunes gens, des gens de votre âge, des gens plus âgés.

Dès les premières images, à vrai dire dès le premier plan panoramique sur New York suivi bientôt d’une succession d’instantanés montrant la ville sous tous aspects, les rues enneigées, Central Park au printemps, le stade des Yankees un soir de match, la sortie d’un cinéma, la musique virevoltante de Gershwin, vous savez que vous avez eu raison de quitter la touffeur de votre appartement pour revisiter ce film qui a tant compté pour vous.

Que vous avez dû voir la première fois dans un cinéma du Quartier latin.

Ou alors à Montparnasse.

Au Lucernaire peut-être.

Ou bien dans ce petit cinéma tout près de la rue Vavin qui ne doit plus exister aujourd’hui où vous avez visionné les premiers films de Cassavetes,  ceux de Wenders et de Jarmusch qui ont formé votre amour pour l’Amérique, Stranger than Paradise, Alice dans les villes, Husbands, Annie Hall, Manhattan…

Et même si vous n’avez jamais été un grand cinéphile, que les films n’ont jamais occupé dans votre vie la même place que les livres, vous vous souvenez que ces films ont compté lors de vos inquiètes années adolescentes quand le monde vous débordait de toutes parts.

Le film a commencé, vous redécouvrez ces personnages qui sont comme des membres d’une famille lointaine mais pourtant proche que vous n’avez pas vu depuis longtemps mais auxquels vous repensez sans cesse avec émotion et nostalgie.

Vous retrouvez la parfaite orchestration de la mise en scène, l’alignement de scènes aussi cocasses que tendres, ces personnages pris au piège de leurs passions et de leurs pulsions, leurs amours aussi fragiles qu’incertains, l’âpreté de la vie, la légèreté aussi, la drôlerie des dialogues, l’adorable minois de Mariel Hemingway dans l’un de ses tout premiers rôles, la loufoquerie irrésistible de Diane Keaton, celle plus inquiète de Woody Allen.

Ce ballet de personnages scandant la vie intellectuelle de New York, la vie d’avant quand on prenait encore le temps de se disputer au sujet de Bergman ou de Norman Mailer, les machines à écrire, les cigarettes, les téléphones manuels, le portrait d’une ville tumultueuse, indomptable, romantique à sa façon, vibrionnant de mille pulsations, véritable Vienne des temps modernes.

Un autre monde.

Celui d’autrefois.

Quand la technologie n’avait pas encore tout envahi et que les vies se faisaient et se défaisaient lors de conversations interminables, de ballades impromptues dans la ville endormie, au détour d’une exposition, d’une visite au musée, le temps béni où les existences se détricotaient à l’allure d’une voiture décapotable filant lentement sur un pont de Brooklyn plongé dans la nuit merveilleuse et intemporelle de l’Amérique.

 

Le film fini, vous rentrez chez vous, le velours de la nuit vous accompagne; dans les rues désormais désertées par les touristes, il fait bon, une brise légère tourbillonne le long des avenues redevenues paisibles, la musique de Gershwin tonne dans vos oreilles, et vous n’avez plus qu’une seule envie : être la semaine prochaine.

 

Stardust Memories est au programme de la cinémathèque.

 

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Et pourquoi pas un deuil perpétuel ?!

 

Les temps sont durs.

Vraiment durs.

Cette impression de dévaler à tombeau ouvert les sentiers de l’incontinence intellectuelle sans plus pouvoir actionner le frein à main et arrêter cette course infernale de l’universelle bêtise, où chacun rivalise d’initiatives afin d’apparaître encore plus crétin que son voisin.

A ce petit jeu, notre Président de la République, a une nouvelle fois fait résonner le gong de son incroyable propension à adopter des décisions d’une telle extravagance qu’on se demande parfois s’il ne souffre pas d’une sorte de syndrome de Tourette venant altérer, à intervalle régulier, le bon fonctionnement de son esprit.

Après l’invraisemblable saillie Léonardesque, voilà qu’il s’en est venu proclamer trois jours de deuil national afin d’honorer la mémoire des victimes de l’accident d’avion Ouagadougou-Alger.

Il est vrai qu’il n’est jamais drôle de mourir.

A fortiori dans un accident d’avion.

Que de telles tragédies collectives, à chaque fois qu’elles surviennent, nous frappent toujours en plein cœur, nous atteignent au plus profond de nos êtres, nous rappellent avec une cruauté infinie la fragilité de toute vie humaine.

Nous nous mettons à la place de ces malheureux ou de leurs familles et nous pleurons sur leurs infortunes tout en éprouvant une sorte de peur rétrospective comme si nous avions réchappé de peu à cette épouvantable catastrophe.

Les morts en avion sont toujours des morts anormales.

Des morts scandaleuses.

En apprenant leurs nouvelles, nous mourrons nous aussi un peu.

Nous imaginons l’incroyable douleur des proches, leur désespoir d’avoir à reconnaître un corps atrocement défiguré, leur agonie d’apprendre que la dépouille de l’être aimé ne sera jamais retrouvée, leurs cris, leurs sanglots, leurs tristesses infinies que rien ne pourra jamais consoler.

Il est alors du devoir du Président de la République de dire, en notre nom, notre chagrin, d’adresser aux familles nos condoléances les plus sincères, de tout mettre en œuvre afin de tenter d’expliquer la raison de cette catastrophe.

Mais aussi atroces que ces morts puissent être, elles demeurent jusqu’à nouvel ordre des morts accidentelles, dues à une combinaison de facteurs qui mis bout à bout ont provoqué la chute de l’avion.

C’est du moins à ce jour l’hypothèse retenue comme la plus vraisemblable par nos ministres.

Dès lors qu’il n’existe pas de volonté de s’attaquer à la France par le biais d’un attentat qui aurait visé ses ressortissants, on ne comprend pas bien la nécessité de proclamer un deuil national de trois jours.

Tous les jours, à n’importe quelle heure du jour ou de la nuit, sur nos routes nationales, des vies sont fauchées dans le fracas de tôles froissées.

Des gens chutent dans des escaliers. Des homicides sont commis. Des incendies surviennent.

La mort ne prend pas de vacances.

Au nom de quoi va-t-on décréter que des morts sont plus importantes que d’autres ?

Parce qu’elles sont simplement plus spectaculaires?

Parce qu’elles envahissent à satiété nos écrans de télévisions ?

Parce qu’elles suscitent un émoi considérable ?

On demande à un Président de la République de précisément ne jamais verser dans la dictature de l’émotion, cette engeance des temps modernes synonyme de la défaite de la pensée, de prendre de la hauteur et d’eviter d’adopter des mesures putassières juste déclenchées parce qu’on suppute qu’elles vont rencontrer l’adhésion de la population meurtrie à juste titre par ce drame.

La mort n’est pas un argument électoral.

On ne peut pas transformer une simple catastrophe aérienne en une démonstration de pathos national aussi lourdaude qu’inappropriée.

Mettre les drapeaux en berne signifierait que d’une manière ou d’une autre on a tenté de porter atteinte à l’intégrité de la nation.

Qu’on a voulu la blesser. La souiller. La meurtrir.

Que des Français sont morts parce qu’ils étaient Français.

Et que la nation meurtrie, touchée dans son identité menacée, prenne le temps de se rassembler pour mieux communier avec la mémoire de ses enfants tombés au champ d’honneur.

 

On ne déclare pas la guerre au hasard ou à la malchance.

Sinon, on se condamne à plonger le pays dans un deuil éternel…

 

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Je m’étais juré de ne pas écrire sur Israël

 

Je m’étais juré sur les moustaches de mon chat que mon prochain papier ne porterait pas sur Israël.

J’avais déjà dit ce que j’avais à dire.

Je ne ressentais pas la nécessité d’en remettre une couche même si plus d’une fois en lisant un article dans un journal ou en écoutant la réaction d’un de nos édiles, ébaubi par leur mauvaise foi crasse, j’avais dû serrer les dents, encaissant en silence ces tartinades d’approximations historiques et ces partis-pris écœurant de mauvaise foi.

Mais une promesse étant une promesse, je m’étais résolu à taire, du moins le temps de la rédaction de ce papier, ces énervements et à déverser ma mauvaise humeur sur un sujet tout autre.

Jusqu’à 12 heures, François Fillon tenait la corde.

En apprenant la nouvelle du crash de l’avion Ouagadougou-Alger, il avait senti l’impérieux besoin de se fendre d’un tweet destiné à rester dans les annales nationales : ” Que s’est-il passé ? Quelles leçons tirer de cet accident ? Tout doit être entrepris pour avoir des réponses rapides ”

J’avais été soufflé tout à la fois par la profondeur de sa réflexion, la puissance évocatrice de ses interrogations, le délicat ourlet de sa prose aussi elliptique que descriptive.

Bref un poète était né et je n’allais pas manquer de lui régler ses comptes.

Une sieste plus tard, comme à mon habitude, avant de me mettre à crachoter mon venin, je décalottais le libé de demain (oui avec le décalage horaire c’est possible, si vous êtes sages, je vous expliquerai un jour comment), histoire de me tenir au courant des dernières affaires du monde.

J’enfilais les pages sur l’accident d’avion, Israël, la fiscalité écologique, le Tour de France, avant de tomber sur une tribune intitulée : Si j’étais né à Gaza…, signée par Michael Smadja, présenté comme étant philosophe, auteur et comédien.

Ah.

On connaît tous un fils Smadja autour de soi mais celui-là je l’avoue en toute humilité je n’en avais jamais entendu parler.

Ce qui m’étonnait quelque peu, considérant qu’avec des attributs si triomphants, j’aurais dû être familier de l’ensemble de son œuvre.

Après tout, être à la fois sépharade et philosophe ne va pas forcément de soi. (Oui Maurice je taquine).

Curieux d’en savoir un peu plus – ce n’est pas tous les jours qu’on découvre au détour d’un article un fils Smadja doté de talents si multiples – je convoquai dans la foulée un moteur de recherche et j’appris que le dénommé  Michael Smadja, né en 1977, était effectivement philosophe puisqu’il avait enseigné cette matière à des lycéens et que partant il pouvait se vanter d’être l’égal de Michel Foucault. La preuve, un jour, lui ou son homonyme, avait écrit un article pour Philosophie magazine.

Tout comme n’importe quel professeur de mathématiques a le droit de se prétendre mathématicien, tout professeur de physique, physicien et tout professeur de gymnastique, gymnaste.

C’est bien connu.

Auteur ? Tout aussi parfaitement exact. Il a participé à la rédaction des répliques de Miss Météo de Canal plus et tient aussi une chronique hebdomadaire dans Grazzia.

Comédien ? Oui. Il a décroché un rôle (le premier il paraîtrait) dans un court métrage signé par Massimiliano Camatti.

Il se dirait aussi qu’il cuisine comme personne le couscous, auquel cas il pourrait ajouter maître-cuisinier à ses titres de noblesse.

On comprend bien donc là qu’on a affaire à la fine fleur de l’intelligentsia juive française.

Un mélange d’Emmanuel Levinas, de Tristan Bernard et de Roger Hanin.

D’ailleurs ses propos l’attestent : ils sont tout aussi éloquents de naïveté adolescente que ceux de Jean-Jacques Goldman dans la chanson la plus confondante de niaiseries jamais écrite de la musique française, j’ai nommé le légendaire Si j’étais né en 17 à Leindenstat.

Bref pour résumer (lisez l’article si vous pouvez) s’il était né à Gaza, Michael il n’aurait pas aimé les juifs : ” En réalité, si, aujourd’hui, j’étais palestinien et que je considérais l’Etat d’Israël comme terroriste (au sens d’une organisation qui provoque la terreur en ciblant indifféremment civils et combattants, créant une insécurité permanente) je n’aurais pas tort. ”

Je tiens à dire que moi si j’étais né chien, je n’aurais pas aimé les chats.

Et si j’étais né à Rome, à l’époque de César, je n’aurais pas aimé la Gaule.

Tandis que si j’étais né à Alésia, je n’aurais pas aimé les Romains.

Bref, Libé, après l’avoir longtemps cherché, a trouvé son ” con “ de juif.

La caution intellectuelle dudit Michael Smadja démontrant que, même dans les plus hautes sphères du judaïsme français, des voix, et quelles voix !, s’élèvent contre le sort réservé à la Bande de Gaza.

J’ai déjà écrit ici combien, en tant que juif français, je trouvais maladroit et illégitime de dire sur la place publique aux Israéliens ce qu’ils doivent accomplir.

Je suis persuadé que Michael avait des intentions plus que louables.

Je suis convaincu par ailleurs que c’est un charmant garçon et je m’excuse d’avance si mes propos ont pu le heurter d’une quelconque manière.

Mais il me semble que de jouer ainsi au juif de service qui du haut de son nulle part vienne écrire ” Moi, palestinien, je n’aurais connu que le visage militaire d’un Israël construit dans un état de siège permanent, et dont la population s’est fabriqué un pragmatisme de survivant, aujourd’hui changé en virilisme froid. Je saurais seulement que les terres de mes aïeux sont occupées par d’autres. Je saurais que l’Etat d’Israël, loin de tenter de m’aider à construire un pays aux côtés du sien, au contraire, par la division, l’humiliation, le contrôle et la colonisation, rendrait pour les miens un avenir prospère impossible ” me semble, pas nécessairement faux, mais pour le moins inapproprié.

Pour la simple et bonne raison que cette oraison, au lieu de convaincre les Israéliens de la nécessité de changer de paradigme, ne fera que redonner du crédit à ceux qui, en France, seul endroit où cette tribune sera éventuellement lue, voient en Israël l’incarnation du mal absolu.

Je suis un Juif de la diaspora.

Je vis dans le douillet confort d’une société occidentale où jamais je n’entends résonner des sirènes d’alerte, où je n’ai pas perdu d’amis dans des attentats commis dans des bus, où mes éventuels enfants n’auront pas à accomplir leur service militaire.

A ce titre, je réserverai mes éventuelles critiques au sujet d’Israël à la seule sphère privée.

 

Simple question de décence.

 

P.S : Si Michael Smadja n’est pas celui que je crois qu’il est, s’il a publié sous pseudonyme sa Phénoménologie de l’Esprit en trois volumes, s’il a joué sans le savoir dans des films posthumes d’Ingmar Bergman, alors je me confonds en excuses et je reprends mon sceptre du ” con ” de service. Ce qui ne me changera guère.

 

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Deux, trois choses que je sais d’Israël et des Juifs

 

C’est entendu.

Les Hébreux, les Juifs, les Israéliens ont été, sont, et seront toujours coupables.

Coupables de vouloir continuer à exister.

Qu’ils fussent dans des temps reculés d’infâmes usuriers suppliciant les petites gens, avant-hier de dangereux agitateurs bolcheviques ou des argentiers taxés de cosmopolitisme, hier des cobayes de l’extermination de masse option conduit de cheminée, aujourd’hui des massacreurs d’enfants palestiniens, ils demeurent obstinément coupables.

On aura beau chercher dans leur histoire récente ou passée une période où on n’eût rien à leur reprocher, on n’en trouvera pas.

Ballotés d’un pays à l’autre, sommés de se convertir ou de disparaître, subissant continuellement pogrom sur pogrom, servant de bouc émissaire à des peuples perpétuellement insatisfaits de leur condition, connaissant des ribambelles d’assassinats de masse, de déportations et de génocides, la persistance même de leur existence demeure tout à la fois une énigme absolue et un affront presqu’insupportable à tolérer.

Un scandale en soi.

Ils sont le poil à gratter de l’humanité.

De cette humanité qui s’est égarée à tout jamais dans les four crématoires d’Auschwitz d’où elle n’est jamais vraiment revenue ou alors tellement effrayée par ses propres agissements que depuis elle ne cesse de chanceler, luttant de toutes ses forces pour ne pas retomber dans le fossé de sa propre inhumanité.

C’est évidemment à Auschwitz que l’humanité a cessé de croire en elle et cette faute en incombe encore et toujours au Juif.

C’est là qu’elle s’est abîmée pour ne jamais se relever.

Que l’idée même de Dieu a été assassinée.

Qu’on a tenté de réduire en poussière ceux-là qui avaient reçu de Dieu ou de son incarnation ou de l’imagination des hommes, les Tables de la Loi, ce sang de toute morale humaine.

Et tout découle d’Auschwitz.

Les Juifs ont eu ce tort immense, cette insolence inouie de ne pas tous mourir à Auschwitz.

Disparus, l’occident aurait pu finir par oublier le crime imprescriptible qu’il avait commis ou laissé commettre.

Ce crime perpétré non seulement contre les Juifs mais contre l’Homme en général, c’est-à-dire contre Soi.

Alors pour se racheter une conscience, pour s’amender, pour continuer malgré tout à exister, il a fallu se résoudre à donner une patrie à ces orphelins de l’Histoire.

Au détriment d’un autre peuple.

Dès le début les dés étaient pipés.

Même si on se disait qu’entouré par des ennemis si nombreux, outragés de devoir subir la présence de ce peuple tout sauf bienvenu, refusant à juste titre de servir de caution morale à cet Occident en perdition, ce nouvel état, issu des braises de la seconde guerre mondiale, serait un état mort-né.

Et d’évidence, là aussi, là encore, Israël n’aurait jamais dû exister plus que quelques années.

Si les armées des pays arabes n’avaient pas fait preuve d’une telle incompétence, si les israéliens n’avaient pas fait montre d’un courage et d’une inventivité redoutable, le sort d’Israël eut dû être réglé en quelques jours.

On avait oublié une seule chose : consciemment ou pas, après Auschwitz, le Juif avait juré que plus jamais il ne se laisserait mener à l’abattoir en courbant le dos.

Plus jamais, il ne creuserait des fosses communes avant de s’enterrer dedans.

Plus jamais, il ne serait une victime presque consentante de sa propre annihilation.

On ne peut pas comprendre Israël sans cette donnée fondamentale.

Ce refus obstiné de tendre le bâton pour se faire battre.

Cette rage de prendre son destin en main.

Cette certitude de ne pouvoir accorder sa confiance à personne.

Aujourd’hui cette impossibilité de tendre la main à une organisation terroriste qui non seulement ne reconnaît même pas cette main mais jure de la décapiter un jour.

Un mouvement dont la devise est : ” Dieu est son but, l’Apôtre son modèle, le Coran sa constitution, le jihad son chemin et la mort sur le chemin de Dieu la plus éminente de ses  espérances “.

Au fond, on demande à Israël d’accepter d’avoir comme voisin un pays qui, avant de se soucier du bien-être de son peuple, entend éradiquer toute trace juive de la Palestine reconstituée.

C’est-à-dire de signer son propre arrêt de mort.

A plus ou moins brève échéance.

Il n’est pas besoin d’être un grand stratège en géopolitique pour réaliser qu’un jour, immanquablement, Israël disparaîtra.

Dans un siècle ou dans dix siècles.

Quand les masses arabes s’extirperont de leurs obscurantismes pour embrasser la modernité.

Quand elles comprendront que c’est par l’éducation que l’on accède à la prospérité et à la vraie liberté.

Quand elles maîtriseront la technologie qui leur permettra de réduire en poussière Israël fusse au prix d’un holocauste nucléaire.

 

Les Israéliens le savent trop.

 

On ne peut pas demander à un peuple d’anticiper ses propres funérailles…

 

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Oui, je suis élitiste et alors ?

 

Je sais.

Cette affirmation peut me valoir la guillotine.

En ces temps bâtards où chacun se décerne des Prix Nobels d’intelligence à la louche, où fleurit sur les réseaux sociaux l’affirmation de sa propre capacité à disséquer avec une pertinence rare les évènements surgissant à la une de l’actualité, où n’importe quel clampin peut se vanter de théoriser ses fulgurances sur un blog lu par le seul cousin de son chien, se prétendre élitiste relève du suicide mental.

C’est que tout se vaut aujourd’hui.

On assiste à la victoire éclatante de la culture de masse, de cette culture en mignonnette qui permet à un pétomane de rappeur de souffrir la comparaison avec n’importe quel Fils de la Poésie sans que personne ne s’en offusque puisque désormais il suffit d’aligner deux rimes pour être consacré comme le nouvel ensorceleur de mots célébré par toute la place de Paris.

Il paraît qu’il faut s’en réjouir.

Que l’on assiste à la désacralisation du savoir, à la démocratisation de la connaissance, à la fabuleuse redistribution de la culture.

 

D’ailleurs il suffit de se promener sur n’importe quel site pour s’en convaincre.

Là jaillissent des saillies à l’éloquence si gracile, à l’intelligence si éblouissante, à la profondeur si abyssale que l’on se surprend à penser que finalement le genre humain a encore de beaux lendemains à célébrer.

Ce n’est qu’invectives doucereuses, réparties délicates, réponses argumentées.

La fête de l’esprit à jamais recommencé tout au long de ses commentaires déclinés avec un tel à-propos que l’on se demande encore comment on a pu vivre en restant sourd à cette voix venue des entrailles de la France profonde à laquelle jusqu’alors on ne pouvait goûter que quand saoul de désespoir on s’en allait noyer son chagrin au fin fond d’un bar crasseux hanté par des sociétaires de l’infinie et intarissable connerie humaine.

Maintenant ils sont partout.

Et ils osent tout.

Sans jamais se douter un seul instant qu’ils appartiennent à cette triste confrérie, qu’eux-mêmes sont les récipiendaires tout choisis de cette répartie,  ils se balancent au visage, sûrs de leur effet, la cinglante et savoureuse citation de Michel Audiard : ” Les cons ça ose tout, c’est à ça qu’on les reconnait “.

A quoi ledit con balance généralement son scud placé sous les auspices de ce brave Albert Einstein qui un jour a eu le malheur de dire ou d’écrire ” qu’il n’existait que deux choses infinies : l’univers et la bêtise mais pour l’univers je n’ai pas de certitude absolue “.

Gérard en reste bouche bée avant d’appeler à la rescousse Coluche : ” l’intelligence c’est pas sorcier, il suffit de penser à une connerie et de dire l’inverse “.

Il est à noter que les deux gusses en question sont en train de disserter doctement sur la politique étrangère mise à l’œuvre par le nouveau gouvernement indien ou s’apostrophent à grands coups d’arguments triomphants au sujet de la possible dévaluation de la roupie et de ses conséquences voire à propos du rôle de la religion dans les sociétés tribales situées au nord du 41ème parallèle.

Sans parler des petits dieudonistes de service qui au plus fort de la mise en cause de leur maître à penser s’étaient soudainement découvert une passion pour Voltaire dont la veille encore ils associaient le nom à une seule station de métro ou à un boulevard, inondant les réseaux sociaux de  ” Pour savoir qui vous dirige vraiment il suffit de regarder ceux que vous ne pouvez pas critiquer. ” Ou de ” Je ne suis pas d’accord avec ce que vous dites, mais je me battrai jusqu’au bout pour que vous puissiez le dire …”.

Citations balancées d’un air martial suivies juste du nom de l’auteur de Candide comme pour mieux souligner que maintenant, après une telle charge signée de l’un des plus grands esprits français, ” le débat est clos, tu peux la boucler, la culture tu l’as ou tu l’as pas.”

Sans se douter un seul instant que ce même Voltaire pouvait aussi tenir des propos aussi inspirés que : ” Nous n’achetons des esclaves domestiques que chez les Nègres ; on nous reproche ce commerce. Un peuple qui trafique de ses enfants est encore plus condamnable que l’acheteur. Ce négoce démontre notre supériorité ; celui qui se donne un maître était né pour en avoir.”

 

Alors oui, je réitère cette assertion haut et fort : plus que jamais je me revendique élitiste, je vomis toute cette bêtise crasse qui un jour sera le terreau de nouveaux dérèglements de l’histoire, je me replonge dans la correspondance de Flaubert (Tome 2, pléiade), j’écoute en boucle le dernier Lloyd Cole et j’emmerde mon monde.

 

Bonne journée.

 

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Le feuilleton de l’été

 

A dire vrai, avec la fin du Mondial, je craignais de vivre un été assommant d’ennui, sans relief, ronronnant des journées abrutissantes de banalité, ressassant la vieille rengaine d’une actualité condamnée à attendre la rentrée pour reprendre des vraies couleurs.

L’affreux ressac de ces cieux ensoleillés que rien ne vient troubler dans sa parfaite monotonie, l’entassement de nouvelles aussi passionnantes que le nombre de kilomètres bouchonnés aux alentours du Tunnel de Fourvière, les bébés oubliés à l’arrière des voitures, les bancs de méduses, les alertes aux noyades dans les piscines, les reportages sur le prix du melon, sur le coût d’achat d’un ventilateur et, enfer des enfers, la reprise de la Ligue 1 avec un tonitruant Evian contre Caen comme affiche suprême.

Heureusement, afin de nous sauver de cette léthargie ambiante, nous avons droit aux derniers chapitres du grand roman de la Bande de Gaza et avec eux la garantie de vivre un été des plus palpitants.

Avec le comptage scrupuleux des victimes dont désormais les sites d’information continue font leur miel, nous entretenant minute par minute du score de la rencontre, réinitialisant toutes les dix minutes le funèbre décompte, s’impatientant dès qu’un temps mort intervient, réclamant son lot de nouvelles sanguinolentes afin de satisfaire le lecteur se paluchant de plus belle au fur et à mesure que s’élève le nombre des tués.

La joie des commentateurs et experts de tout poils, capables de résoudre en deux minutes un conflit si ardu à déchiffrer, engoncé dans des problématiques si complexes à définir que les protagonistes même de cette guerre sans issue en sont à ignorer jusqu’à la raison de leurs agissements.

Une guerre impossible où il ne peut y avoir de vainqueur.

La lutte toujours recommencée entre la modernité et l’obscurantisme, entre l’idée de progrès et l’ancrage dans un monde figé, obtus, régi par des lois appartenant à une autre époque, le combat perdu d’avance d’une démocratie opposée à une certaine forme de dictature religieuse où, pour faire triompher ses idées, on n’hésite pas à sacrifier ses propres enfants afin de s’attirer la sympathie de la communauté internationale.

Des échelles de valeurs si diamétralement opposées que tout espoir de dialogue se retrouve mort-né.

Et sur les champs brûlants de cette désespérance dansent et ricanent les esprits dérangés de ceux qui depuis toujours pensent, affirment, décrètent que la faute originelle ne peut, par simple principe métaphysique, être attribuée qu’au juif dont on continue à se demander par quel impossible et scandaleux miracle il souille encore de sa présence malfaisante la surface de la Terre.

De ce juif qui après des siècles d’humiliation, d’exil, de déportation, n’aspire plus qu’à une seule chose : s’endormir tous les soirs dans le périmètre sécurisé de sa propre terre en ayant l’assurance que demain il ne faudra pas à nouveau reprendre les routes de la désolation.

De ce juif qui a tant apporté à l’humanité et a reçu si peu.

De cet être insaisissable, effrayant par nature parce qu’indomptable, ayant toujours refusé de se laisser apprivoiser et payant depuis le prix de son obstination.

L’antisémitisme est une drogue dure.

Qu’on a consommé depuis des siècles dans des proportions si démesurées qu’il demeure désormais impossible de vivre sans.

Si puissante qu’elle provoque des ravages dans des contrées où pourtant on n’a jamais vu le moindre prépuce circoncis d’un juif.

Et pour lequel, comme la méthadone pour l’héroïne, on a trouvé un substitut plus convenable à s’injecter dans les veines : cet antisionisme de bon aloi qui permet aux bonnes consciences d’épancher leur fiel sans avoir mauvaise conscience.

 

Ainsi soit-il.

 

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…et à la fin c’est Israël qui perd

 

Ne comptez pas sur moi pour tenter de proposer le début d’une solution au conflit israélo-palestinien.

Je ne suis pas Superman. Ni Jokerman. Ni Zuckerman.

Autant me demander de résoudre le problème de la faim dans le monde.

Ou de tenter d’apporter la preuve de la supériorité pourtant manifeste du chat sur le chien.

Ce sont là des notions qui dépassent ma maigre intelligence.

Les faits sont pourtant têtus.

Tous les deux, trois ans désormais, on a droit à un remake de la bataille d’Hernani : les maudits et sanguinaires Israéliens s’amusent au Pac-Man avec des agnelets palestiniens en détruisant une par une leurs habitations, tout en prenant bien soin de s’assurer auparavant que toute la famille est bien présente dans leur logis histoire de dégommer avec certitude la cervelle des enfants gazaouis.

La question des enfants est évidemment centrale : tout comme les thuriféraires joyeux du Troisième Reich, les Israéliens, en dignes successeurs de ces sinistres personnages, ont le souci, en éradiquant un par un les nouveaux-nés palestiniens de la surface de la terre, d’empêcher une nouvelle génération d’apparaître, sachant pertinemment que la démographie joue contre eux.

D’ailleurs, mais cela les journaux occidentaux, aux mains des petits caporaux sionistes, ne le diront jamais, les instructions données aux pilotes de chasse israéliens sont des plus claires : viser en premier lieu les salles de travail où les femmes palestiniennes accouchent de leurs descendants, ensuite les maternités, après les nurseries, et enfin les écoles maternelles.

Après tout, c’est de bonne guerre.

Certes, dans la situation inverse, les Palestiniens, pétris d’une sagesse millénaire, éduqués à l’école de la démocratie, conduits par des idéaux moraux d’une rectitude irréprochable, agiraient d’une toute autre manière, en accord avec le respect de toute vie humaine, notion qu’ils ont développée tout au long de leur tragique histoire.

Sensibles et précautionneux comme ils sont, ils prendraient d’abord le soin d’avertir les habitants de l’immeuble destiné à être bombardé de bien vouloir quitter les lieux, ils lanceraient encore un autre avertissement sous la forme d’un coup de semonce afin de s’assurer que les consignes d’évacuation ont bien été respectées, sait-on jamais, puis ils procéderaient enfin à leurs frappes.

Le tout pour éviter un carnage et réduire au maximum le nombre de victimes.

Evidemment une telle façon de mener une guerre obligerait leur armée à procéder avec une lenteur inouïe et à obtenir des résultats équivoques.

Là où les Israéliens bombardent à tout-va sans se soucier un seul instant du nombre de victimes, rasant sans sommation ce qui doit être rasé, accumulant les bavures et les atrocités, les Palestiniens seraient condamnés à mener une guerre au rabais, obsédés d’épargner au maximum les victimes civiles.

Si bien qu’incapables de mener d’une manière efficiente leur mission d’éradiquer les lanceurs de roquettes israéliens, ils devraient à intervalles réguliers recommencer cette guerre sans issue, en déclenchant à chaque fois la réprobation de la communauté internationale, jamais assez prompte pour villipender les méchants Palestiniens en prise aux pacifistes Israéliens.

Lesquels, d’une fourberie inouie, n’hésiteraient pas à se servir de leurs enfants comme bouclier humain afin de démontrer l’incroyable cruauté de leurs agresseurs.

 

L’histoire est un pérpetuel recommencement.

 

Au Proche-Orient, c’est même un bégaiement continuel.

 

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Trois ans de blogitude

 

Il y a trois ans jour pour jour j’écrivais le premier billet de ce qui allait devenir le blog le plus vu, le plus connu, le plus lu par mon chat rejoint dans cet exercice douloureux par quelques amis lointains.

Depuis, à ma stupéfaction ahurie, j’en ai composé 346 autres.

Je ne m’en pensais pas capable.

Je le pense toujours.

Je crois pouvoir me vanter que, hormis une poignée, je n’en ai bâclé aucun.

Certains étaient assurément moins inspirés que d’autres.

Nombreux ont dû paraître bien poussifs ou sans grand intérêt.

Mais tous ont été écrits, l’angoisse cintrée au cœur, la peur au ventre, certain que j’étais que, cette fois, je n’aurais rien à dire, que je n’avais aucune légitimité à m’exprimer sur tel ou tel sujet, que je n’étais qu’un faussaire dont bientôt on finirait par découvrir  la réelle identité : celle d’un usurpateur à la petite semaine sans envergure aucune.

Je ne connais pas la recette pour être un tenancier de blog respectable.

A chaque fois que j’achève et publie un papier, je savoure quelques heures de repos, je m’adresse des félicitations sincères, je me flatte d’être arrivé encore une fois à produire un papier qui, s’il ne brille pas par son éloquence, demeure tout de même écrit dans une langue assez honnête pour ne pas susciter l’ennui ou la désolation.

Puis passées ces quelques heures, lancinant et redondant, le doute revient.

Toujours.

Que vais-je bien pouvoir écrire la prochaine fois ?

En quoi mon avis pourrait-il donc intéresser un éventuel lecteur ?

Quelle légitimité ai-je à m’exprimer sur des sujets dont parfois, souvent même, je ne sais pas grand-chose.

C’est que je suis un expert de rien ou sinon de moi-même.

Je n’ai pas une intelligence très profonde, je n’entends rien à la marche du monde, je ne possède pas assez de connaissances pour juger de la manière dont les grands argentiers conduisent leurs affaires ou les politiques leurs barques, je mène une existence des plus banales, je me sens tout le temps dépassé par mon époque, j’ai une tendresse rentrée pour le genre humain et, surtout, je n’ai même pas de compte twitter.

Je possède juste assez de roublardise pour apparaître comme un amuseur public dont on se plaît à lire les billets sans toutefois y attacher trop d’importance.

Ce qui me convient et me correspond.

Tenir un blog, avec la régularité qui est la mienne et dont je m’honore (si j’ai le droit), demande une énergie folle, un investissement total, une disponibilité d’esprit entière, et pourtant, paradoxalement, depuis que je me suis lancé dans cette entreprise inconsidérée, j’ai aussi publié un roman et me retrouve en train d’en achever un autre.

Comme si le fait de pouvoir cracher mes colères, clamer mes  indignations, pousser mes petits jappements de douleur avaient contribué, par une étrange alchimie, à me stabiliser, me permettant de jouir d’un calme intérieur assez souverain pour mener de front ces deux activités que tout oppose mais qui se retrouvent dans l’amour des mots que j’essaye de ne pas maltraiter de trop.

Le malheureux qui, pour une raison biscornue, souffrant d’une incontinence mentale considérable, ambitionnerait de se farcir l’intégralité de ce blog devrait avaler plus de deux cent mille mots, soit un livre de six cents pages.

C’est colossal et franchement inattendu venant de ma part.

Parallèlement, douze mille commentaires ont été postés.

Par dizaines, j’ai reçu des invectives, des injures, des insultes, une fois un compliment, des crachats, des postillons, des mises en garde, des mises en bières, des mises à mort, aucune demande en mariage, des doigts d’honneur, des sermons, des avertissements, des injonctions, deux remerciements, des baffes virtuelles, des menaces de procès, des promesses de castration.

On m’a traité de sale juif. De sémite enragé. D’israélite de souche.

De petit con.

De grand con.

De con tout court.

De vrai connard.

Je l’ai bien cherché.

Et j’ai adoré cela.

 

Et si ça se trouve, je vais même continuer.

 

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Quand l’Elysée choisit ses morts

 

Je ne comprends  pas.

A peine la nouvelle de la disparition aussi soudaine que tragique de Benoît Duquesne était-elle tombée que dans la foulée notre Président de la République suivi de son Premier Ministre se fendaient, l’un d’un tweet, l’autre d’un communiqué de presse pour mieux dire leur tristesse et leur affliction.

Je ne voudrais surtout pas jouer au populiste de caniveau mais j’ai beau chercher et chercher encore, j’ai du mal à me figurer en quoi la mort de ce journaliste, de n’importe quel journaliste d’ailleurs, possédait-elle plus d’importance que le décès d’un professeur ou d’un boulanger qui hélas a bien dû survenir dans la même journée ?

Autrement dit, suffit-il donc d’être un personnage public pour que les plus hauts sommets de l’état s’émeuvent de votre mort, tandis qu’ils demeureraient d’une parfaite indifférence dès lors qu’il s’agirait de la disparition d’un citoyen des plus anonymes, étant il est vrai dans l’impossibilité de le connaître puisqu’il a eu le mauvais goût de vivre sa vie en catimini.

A dire vrai, je ne réalise pas bien en quoi la vie de Benoît Duquesne, aussi exemplaire a-t-elle été posséderait-elle plus de valeur que celle d’un quelconque ouvrier, d’un agriculteur méritant, d’un épicier travailleur, d’un maçon valeureux, d’un pompier courageux, d’un chômeur, d’une femme de ménage, d’un cycliste du dimanche, d’un carreleur, d’un bateleur, d’un affabulateur ?

On tient là, dans cette déclamation de la République attristée, la victoire ultime de la société du spectacle où, mélangeant célébrité et respectabilité, visibilité et honorabilité, on en vient à hiérarchiser son émotion en fonction de la notoriété du défunt.

Le même Benoît Duquesne, très exactement le même, avec les mêmes qualités humaines, avec la même intelligence, la même rigueur professionnelle, la même opiniâtreté, eût-il choisi d’embrasser une carrière tout autre que, l’Exécutif, à l’annonce de sa disparition, se serait montré d’un silence d’outre-tombe.

On me dit que l’Élysée n’a pas vocation à saluer la mémoire de tous les morts de France.

J’en conviens aisément.

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Mais alors pourquoi précisément prendre la peine de pondre un communiqué pour dire sa peine, au nom du peuple Français, faut-il le rappeler, lorsque disparaît un journaliste, aussi talentueux fut-il ?

Rien n’empêchait me semble t-il notre président, attristé personnellement par l’annonce de sa disparition, d’écrire à la malheureuse veuve pour lui confier sa peine et lui dire son chagrin au lieu de venir pétarader sur l’estrade de la République médiatique.

Que je sache, Benoît Duquesne ne se situait pas dans l’expression d’une pensée si originale ou radicale qu’elle aurait révolutionné les sciences humaines, il n’est pas venu bouleverser le champ de la connaissance médicale ou scientifique, il n’incarnait pas le Génie de la nation, il ne sauvait pas des vies, il ne se battait pas pour l’honneur de la nation, il n’œuvrait pas à l’élévation des âmes par la production d’écrits ou de peintures immortelles, autant de dispositions qui auraient pu légitimer les plus hautes personnalités de l’État à venir saluer, au nom de la République endeuillée, sa mémoire.

On me dit qu’il était connu, à la différence de l’instituteur de la rue  Saint-Pierre le Vif à Sens qui lui, pauvre malheureux, n’était connu que de ses élèves.

C’est parfaitement vrai.

Encore faudrait-il m’expliquer en quoi la notion d’être connu serait une qualité qui par nature serait exceptionnelle et à même de susciter un tel émoi du côté de l’Elysée.

 

Etre connu, apparaître à la télévision, converser à la radio suffirait-il donc pour qu’automatiquement on reconnaisse en vous des qualités attribuées d’ordinaire à des êtres visités par la Grâce ?

Suffit-il donc de tenir un micro, d’être connu de la mère Michu, reconnu par Monsieur Martin, pour que d’emblée, vous apparteniez au corps d’élite de la République et que cette même République s’afflige, en des termes circonstanciés, de votre décès ?

 

Que la République ne s’afflige que des disparitions relatives à des êtres aux parcours vraiment hors-normes, consacrés par les lauriers du Temps.

 

Pour les autres, le dernier salut du fossoyeur suffira.

 

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Je suis foutu : je suis plus gros que grand

 

Ils vont continuer encore longtemps les nouveaux Diafoirus des temps modernes à nous martyriser avec leurs avertissements à gogo repris en chœur par tous les sites cassandresques de la planète ligués entre eux pour mieux nous empêcher de vivre en rond ?

Ainsi, il apparaîtrait selon les grandes papesses de la médecine moderne alliées pour la circonstance avec les plus éminents chercheurs de la glose thérapeutique que près de 30% de la population mondiale se trouverait en surpoids et partant en danger de mort.

Bon.

Personnellement, je me suis senti en danger de mort le jour de ma naissance, la faute à un traumatisme familial, la résurgence d’une histoire forcément tragique que mes ancêtres se seraient amusés à m’infuser dans les veines, histoire de s’assurer que je ne devienne pas un imbécile heureux.

Ce en quoi, concernant ma qualité d’heureux, ils ont parfaitement réussi.

Pour imbécile, c’est plutôt variable.

Désœuvré comme je peux l’être parfois, souvent même diront certaines mauvaises langues crachotant leurs vipérines remarques au sujet de ma paresse supposée, je me suis donc amusé à calculer l’indice de ma masse corporelle afin de de savoir si j’allais mourir un jour ou si j’étais bon pour glandouiller une vie de patachon jusqu’à la fin des temps.

Evidemment je n’aurais pas dû.

Le résultat a été sans appel.

Avec un résultat de 25.1, je suis officiellement déclaré en surpoids et j’ai reçu dans la foulée un mail de l’Organisation Mondiale de la Santé m’avertissant que l’heure de ma mort se rapprochait à grand pas.

Si seulement Dame Nature avait eu la bonne idée de rajouter un malheureux centimètre à ma taille pourtant déjà lilliputienne, ou si je ne m’étais pas resservi hier soir une triple portion de carottes râpées, ou si j’avais pris la peine de descendre à cloche-pied les escaliers avec la poubelle juchée sur mes épaules, je m’en sortais.

Là, non.

Il est vrai que je souffre d’une pathologie rare et franchement honteuse qui m’handicape grandement dans ma vie de tous les jours, notamment au moment de décliner mes mensurations au préposé de la préfecture à l’heure du renouvellement de mon passeport : je suis plus gros que grand.

Je l’ai toujours été.

Jusqu’à mes treize ans, j’étais si minuscule que ma mère, craignant que je ne finisse, à force, par rapetisser au point de disparaître, avait fini par convaincre le docteur de famille de m’administrer des pilules d’hormones de croissance manquant par ailleurs en agissant de la sorte de commettre un infanticide auquel j’ai pour l’instant réchappé.

Et de doubler mes rations quotidiennes de couscous, convaincue que la graine contenue dans la semoule possédait des vertus magiques, de celles qui permettent par exemple à un adolescent haut comme trois briques au miel de se métamorphoser en un adulte capable de rivaliser avec les grands de ce monde.

Et miracle je crûs.

Pas de beaucoup mais je crûs tout de même assez pour que ma mère ne crut plus (ah ah ah) que j’étais destiné à vivre une existence misérable où, petit parmi les petits, je n’aurais jamais pu m’élever plus haut que le rang de simple tâcheron tout juste bon à cirer les chaussures des puissants de notre stratosphère.

Je crûs donc et en parallèle je développais ma masse musculaire par la pratique assidue de nombreux sports avec comme conséquence que mon poids crût, crût si fort, crût si vite, crût si haut qu’il finit par dépasser ma taille, réduisant donc à néant mes chances d’inscrire ma destinée dans le marbre de l’éternité.

Je suis donc coupable.

Et je donne le mauvais exemple à toute cette jeunesse moribonde qui se paluche le cervelet en lisant mes niaiseries.

Remarquez bien, je ne suis pas le seul.

federer

Bien qu’il soit deux fois plus grand que moi Roger Federer souffre du même mal que le mien : 1m86 pour85 kilos.

Pas étonnant après cela que sa carriere tennistique n’ait jamais vraiment décollé.

Plus proche de mes standards, je trouve aussi comme compagnon d’infortune Eden Hazard qui fort de son 1m73 pour 74 kilos le condamne à être un footballeur du dimanche.

 

Le monde moderne est devenu un enfer climatisé où l’idée de la mort même est devenue scandaleuse.

A force de vouloir coûte que coûte allonger la durée de la vie, il arrivera un jour où, dans les tribunaux, des morts viendront porter plainte auprès de leurs docteurs pour promesses non tenues…

 

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