Echirolles, Texas

C’est étrange parfois l’imaginaire collectif.  Ainsi la personne qui a osé interpeller notre brave président en l’alertant sur l’état de déliquescence où se trouvait sa ville d’Echirolles a eu recours l’autre soir à une métaphore des plus étonnantes.

” C’est devenu le Texas ici ! ” s’est-elle écriée comme pour mieux dire son dépit devant l’état de délabrement de sa commune où deux jeunes gens venaient de trouver la mort dans des circonstances dramatiques.

Il est incongru somme toute ce Texas, non ?

Dans une situation pareille, même si jamais je n’aurais eu la témérité et la hardiesse de cette courageuse habitante, n’aurais-je pas plutôt usé d’un ” c’est devenu le Bronx ici ! “, voire pour rester dans le registre outre-atlantique et évoquer les heures sombres de la prohibition, se fendre d’un ” c’est devenu Chicago ici ! “.

Mais le Texas ?

Il me semblait que jusqu’alors on associait à cet état américain vaste et sauvage comme la Picardie l’image toute pimpante de ses champs pétrolifères s’étendant à perte de vue avec comme seul horizon ses colonies de derricks s’élevant haut dans un ciel bleu assassin. Sauf que, jusqu’à preuve du contraire, du pétrole, il n’y en a point à Echirolles. Ou alors cette dame est la seule à le savoir, et anticipant la possibilité que cette nouvelle engendrerait comme possible jalousie, elle s’est fendue d’un lapsus que je suis bien le seul à avoir deviné.

Ou bien se peut-il que dans cette envolée lyrique, elle a voulu signifier que sa cité était en train de devenir une ville digne d’être le théâtre d’une séquence tirée d’un film de Far West,  peuplée par de vilains bandits qui ne connaissent ni foi ni loi ?

Sauf que le Texas, à ma connaissance, s’encastre en plein milieu du grand sud américain et que la plupart des grands westerns se déroulent plutôt dans le décor aride du Nouveau-Mexique, de l’Arizona voire de la Californie.

Perplexe, je me suis même demandé si cette personne, entichée de l’œuvre de Win Wenders, n’avait pas voulu rendre un hommage subtil à son réalisateur préféré. Séduisante déduction mais non advenue puisque Paris, Texas se contente de raconter une histoire d’amour déchirante, certes passionnée, certes tumultueuse, certes destructive mais qui ne  sombre jamais dans la violence gratuite.

Il y a bien la scène mémorable et inoubliable dans le Peep show, entre Travis et sa femme, mais même là, la caméra reste des plus pudiques puisqu’on ne voit jamais hélas la poitrine qu’on imagine délicieuse et émouvante de Nastasia Kinski.

Il fallait donc chercher ailleurs.

Il se peut tout à fait que cette dame sache que la capitale du Texas soit Dallas. Qui dit Dallas dit assassinat de JFK. Voilà qui commence à prendre tournure. D’autant plus lorsqu’on sait qu’elle s’adressait au chef de l’état. Et que même si F.H a une élégance et une plastique autrement plus attrayante que celle de JFK, du haut d’un balcon, la différence ne saute pas forcément aux yeux.

Toutes ces explications seraient pertinentes si je n’avais occulté le principal responsable de cette singulière comparaison géographique : le fameux feuilleton télévisé, Dallas, avec son non moins fameux générique où l’on scande ce refrain que personne, possédant ou ayant possédé un poste de télévision, ne peut et ne doit ignorer :

Dallaaaaaasssss/Ton Univers impitoyaaaaaaable/Glorifie la loi du plus fort/Dallas et sous ton soleil implacable/Tu ne redoutes que la mort

Dallas patrie du dollar du pétrole/Dallas tu ne connais pas la pitié/Dallas le revolver est ton idole/Dallas tu te raccroches à ton passé.

Difficile d’être plus explicite.

Il y a sûrement là une conclusion à tirer à ce billet qui brille par sa sagacité – mise en abîme gidienne, tropisme trompeur d’une realité incarnée par le médium télévision, reflet dans un oeil de verre –  mais je passe mon tour, j’ai la tête à l’envers.

 

Dis donc mon coco la prochaine fois que tu t’essayes à jouer à Roland Barthes, tâche de te montrer un brin plus inspiré parce que là franchement, tu moulines à perdre haleine.

40 commentaires pour “Echirolles, Texas”

  1. Paris Texas…ou l’absence du père
    Quête du père, éperdue…

    Et perdu le père dû
    De ces meurtriers indus
    Jamais contenus

    C’est la mère justice qui sera le père
    Ultime autorité qui servira de repère
    A cette jeunesse perdue

  2. d’accord le Texas n’est pas le far far west mais fait peut être partie, dans l’imaginaire de nombreux français, de ces immenses territoires hostiles où il vaut mieux ne pas croiser le regard des billy-the-kid à la gâchette facile au détour d’un ranch

  3. Peut-être aussi qu’elle voulait faire référence à un autre chef d’Etat bien plus récent et à sa p***** de guerre d’Irak… Violences gratuites envers de méritants citoyens.

  4. bof.

    ainsi donc l’auteur s’aperçoit que ces banlieues sont peuplées de ploucs et de beaufs.

    heureusement, cette mise au point donne une bonne leçon à cette imbécile inculte…

    bel exemple de racisme social ordinaire.

  5. Texas funeral

    http://www.youtube.com/watch?v=gcoJyvxlbCI

  6. fin de race texane ? merci burt pour cet excellent choix musical

  7. Avec un billet comme ça vous avez perdu au moins 10 000 lecteurs. La conquête de l’Ouest ça me fait penser à la construction du rail et aux attaques des trains qui transportaient l’or et à l’harmonica des 4 non Blonds dans Train (j’aime bien les chansons sur les trains et l’harmonica aussi) http://www.youtube.com/watch?v=uMezg45JI7Y mais on ne peut pas citer les 4 Non Blonds sans s’écouter What’s up. http://www.youtube.com/watch?v=6NXnxTNIWkc Vous me direz quel est le rapport entre les 4 Non Blonds et les cow boys? Aucun mis à part qu’ils sont de San Francisco. Je m’adapte au sujet, je mouline. 🙂 Un petit dernier pour la route. http://www.youtube.com/watch?v=JEQ9iDNsrNY

  8. Sauf que la capitale du Texas n’est pas Dallas mais Austin…

    Fred

  9. Et oui, les gens disent de plus en plus “ici c’est le texas” au lieu de dire “ici, c’est la far-west” en banlieue (et peut être ailleurs, je sais pas, mais je l’ai entendu qu’en banlieue jusqu’ici.)
    C’est dingue, ils ne savent même pas que le Texas ca n’a rien à voir avec le Far west, c’est au sud, il n’y a pas de western, il y du pétrole et des gros américain chrétiens réacs.
    Les gros beaufs.

    Bref, je trouve que Jourdan a raison.

  10. Tout a fait d’accord avec Jourdan. L’auteur nous fait perdre notre temps avec un article totalement denue d’interet qui n’a pour but que de le flatter lui meme. Moi le grand et o combien cultive auteur je deverse toute ma meprise sur le peuple. On s’en fout, et vraiment c’est ridicule.

  11. Ou peut être veut elle simplement parler d’un Etat dans lequel les étudiants ou enseignants vont pouvoir porter des armes à feu (si ce ‘est déjà voté…cf un ancien article de Slate d’ailleurs) , un bastion de la toute puissante NRA, où l’on ressence plus d’armes en circulation que de nombre d’ habitants…

  12. Si vous lisez bien, vous comprendrez que l’auteur de ce billet n’est guere satisfait de sa prestation. Ca arrive.

  13. Je suis parfaitement d’accord, ce Texas est tout à fait interpellant

  14. Et pourquoi pas tout simplement “Texas chainsaw massacre” ? Tiens oui c’est cohérent. Ah bah voilà, tout un article pour rater une réponse cohérente. La prochaine fois, abstenez-vous.

  15. Bah non. D’après moi la référence au Texas vient de la violence issue de Walker Texas Rangers.

  16. Bien vu pour la série TV, mais au jeu des références télévisuelles, cette dame paraît encore assez jeune (même si déjà mère) pour avoir en tête cette série qui date tout de même de la fin des ’70 pour ces 1ers épisodes…

    Texas ou Arizona, l’univers des westerns évoque surtout, beaucoup, le justicier plus ou moins solitaire. A la sauce des années 2000 et, personnellement j’ai plutôt entrevu dans cette image lancée à la volée la figure de Walker Texas Ranger , incarnée par Chuck Norris, sur TF1.

    Car dans cette interpellation que demandait justement cette femme s’adressant au Président ? Non pas la mort pour les assassins, mais la justice pour les victimes qui ne” doivent pas être mortes pour rien”.

    or, à lire le fil twitter via #Vitrolles #texas, on voit bien dans quel contresens se sont plutôt engouffrés les commentateurs qui se voulant drôle, valorisaient sans vergogne la peine de mort que les années Bush, gouverneur du même état, symbolisent hélas si bien.

    Pour un peu, la scène, rappelant si bien la sortie de Sarkozy à Argenteuil, aurait paru monté de toutes pièces. Ou préparée, disons. Dont cette caméra si opportunément placée serait alors l’indice.

    Foin de paranoïa.. Voir Hollande érigé l’air de rien en Texas ranger pour en finir avec les ruines et les larmes dispersées (entre autres à Grenoble lors d’un fameux discours) , avouons que c’est assez bien vu. Et que ça indique aussi que les esprits sont autrement tournés, désormais.

    http://www.tpwd.state.tx.us/learning/webcasts/texas/images/56_ranger_badge.jpg

  17. La référence au Texas est, je pense, à lier directement à George W. Bush et à sa politique de cow-boy.

    (cf les Guignols, le jour de la mort de Ben Laden, qui avait faire dire à la marionnette d’Obama : “ça y est les mecs, j’ai buté Ben Laden, j’suis un putain de Texan !”)

    Le Texas, dans un imaginaire collectif français, popularisé en grande partie à la fois par Deubeuliou et Chuck Norris, c’est cet état américain où on sort les carabines pour tout et n’importe quoi. Il ne faut pas chercher plus loin (les références au Bronx ou à Chicago ne correspondent pas à un cadre rural).

  18. J’avoue avoir des lacunes concernant Chuck Norris…

  19. La capitale du Texas est Austin, c’est pas Dallas. Évidemment l’auteur lui-même ne connait rien du Texas.

  20. Alors bien entendu qu’avec des references plus vieille que moi on peut faire passer tout le monde pour un inculte, mais en considerant ce qu’est le texas aujourd’hui, je veux dire non d’un point de vue cinematographique ou musical, on ne peut pas dire que ce soit vraiment l’exemple qu’on souhaite a une quelconque region francaise. L’article aurait pu faire deux lignes et s’arreter a la difference de temperature ou de langue qu’il n’aurait pas ete moins interessant. Vive le franchouillard qui se nourrie de ses vieux “tele magazine”, on ira loin dans la reflexion comme ca…
    (ah oui sur les claviers du texas il n’y a pas d’accent aussi)

  21. Article complètement nul. Que l’auteur lui-même n’en soit pas satisfait prouve que son mauvais goût a quand même des limites, mais cela n’excuse en rien le constat.
    Une habitante excédée témoigne de la situation déplorable de son quartier, d’une violence généralisée qui vient de tuer deux jeunes et…L’Auteur de ce blog se fout d’elle parce qu’elle n’a pas Sa culture générale.
    On étale son Wim Wenders, on exhume Gide et Barthes, on affiche fièrement ses lacunes en Chuck Norris…Mais le message de cette habitante, on s’en cogne. Elle n’avait qu’à habiter dans le même quartier que l’Auteur; les loyers sont sans doute plus élevés, mais on y est plus en sécurité, entre gens bien élevés et pleins d’humour “second degré”.
    Sans doute se billet se veut-il décalé, rempli d’esprit et de tout ce qu’on veut, mais son mépris rappelle surtout le légendaire “mangez de la brioche” de Marie-Antoinette aux parisiens qui se plaignaient de ne plus avoir de pain.

  22. Heu, non pas que je veuille me défiler, mais jamais jamais je n’ai voulu me moquer de cette dame. Encore moins la mépriser. Comme quoi, oui, je le reconnais, ce papier est raté. Mais oui, en toute franchise, cette réference au Texas, de prime abord, je ne l’ai pas comprise. Quand au quartier de l’Auteur…

  23. Ah ça, Laurent, on doit être les deux seuls à avoir parlé de Dallas quasiment en même temps sur nos blogs… Marrant.
    Sinon, le Texas, champion de la chaise électrique et des prez pétroleux néo-conservateurs, ça sonne région pleine de criminels et de gens qui se défendent carabine au poing, dans l’imaginaire collectif, probablement.
    En attendant, les puits de pétrole se tarissent, et les fermiers deviennent des champions de l’éolienne. Désormais, les hélices remplacent peu à peu les derricks. (Je parie que vous ne le saviez pas, hahaaaa !) 🙂

  24. (Sinon, le coup de la brioche, c’est du Jean-Jacques Rousseau, Jerem, pas du Marie-Antoinette.)

  25. Pourquoi le publier dans ce cas ?

  26. Parce que vous êtes sur un blog et que cela fait partie du jeu.

  27. Y’a de la grosse question existentielle dans l’air. Moi aussi j’ai une super théorie. La country envahit nos campagnes (ce qui est un progrès, même si cette musique est infâme c’est toujours mieux que la bourrée), dans l’énervement cette brave dame a juste fait un petit lapsus. Les gens n’ont vraiment rien d’autre à foutre? Pour valider ma théorie il suffit de lui demander si elle est allée danser le weekend dernier. http://www.youtube.com/watch?v=9_DxGJh3FkU Yeeeeeeeeeepaaaaaaaaa!!!!

  28. Comme nous l’apprennent Wikipedia et les Animaniacs, la capitale du Texas est Austin, pas Dallas…

  29. Le texas, car comme dans Texas Ranger ça flingue à tout va, et ce sont toujours les noirs les criminels.

    A sa place , j’aurai plutôt crier , au choix c’est :
    – le Rwanda
    – le Mali
    – le Darfour
    – l’Angola
    – etc
    ici!!

  30. @ Sophie K:
    Exact!
    J’avais écrit “légendaire” car cette phrase avait été attribuée à Marie-Antoinette sans que l’on ait jamais pu le démontrer, mais je ne savais pas que l’origine de l’anecdote était dans les Confessions de Rousseau.
    Merci d’avoir corrigé cette erreur d’autant plus impardonnable que j’ai étudié ce livre au lycée…Il faut visiblement que j’y retourne.

  31. @ Jerem : Meuh non, pas la peine de vous infliger ça. 😀

  32. (PS : On l’a aussi attribué à la Princesse de Lamballe, ce mot…)

  33. Sauf que la capitale du Texas est Austin, pas Dallas…desole de tuer l’article:) mais j’habite a Austin…

  34. I know! Mais j’ai la flemme de changer

  35. Austiiiiiiin, ton univers impitoyââhâbleuuuu…

  36. Vous êtes tous à côté de la plaque, il n’aura échappé à personne que cette dame est nord africaine, sans doute immigrée récemment et il se trouve que dans le langage populaire, en Algérie notamment, Texas fait référence aux Western. Libre à vous ensuite de trouver que les algériens ont des notions sommaires de géographie, que le Far West ce n’est pas ça…il reste que des grands westerns comme Alamo ou Rio Grande sont censés se dérouler au Texas. A beauf, beauf et demi.

  37. Merci pour cette info ! Pour le reste, je ne savais même pas que cette dame était d’afrique du nord quand j’ai écrit ce papier. L’ai entendu à la radio. Ne dites donc pas de betises…

  38. J’allais vous reprocher de ne pas respecter vos contradicteurs avec votre dernière phrase, mais il est vrai que j’ai ouvert le feu avec mon expression. Un partout donc. Toutefois, mon propos vous semble peut être bête, votre réplique est, elle carrément faux-cul. A moins que vous soyez complètement exempt de clichés et dénué de toute sensibilité aux accents, même en n’ayant pas la télé la dame était affublée d’un tel accent qu’on aurait difficilement pu la prendre pour une allemande par exemple. Du reste, même à la radio on a beaucoup insisté sur la composition socio-ethnique de cette banlieue. Enfin, avant d’écrire sur un sujet pareil, plutôt que de répondre comme vous le faites prenez plus de temps pour interroger l’arrière plan linguistique du locuteur et vous aurez une argumentation plus convaincante.
    Allez à votre décharge, je retiens que si vous n’aviez pas écrit ce billet, je n’aurais pas eu de raisons de l’ouvrir. Salutations.

  39. Et étant moi même d’origine nord africaine et fier de l’être, mere tunisienne, grands parents tunisiens…

  40. Et donc? Voulez vous dire qu’en plus vous n’avez aucune excuse de n’avoir pas deviné derrière cet accent les origines (au moins linguistiques) de cette dame?

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