Après Londres, Tel Aviv?

 

Pour l’instant, Tel Aviv ne brûle pas. Pas encore. Elle se contente de grommeler sa colère à coups de manifestations monstres. Ce qui est déjà en soi remarquable. S’en aller défiler dans des rues accablées de chaleur, sous les coups de tonnerre d’un soleil brûlant comme de l’acier trempé, martelant sa loi martiale dans un ciel d’un bleu métallique, force l’admiration. Les petites frappes londoniennes et mancunnienes devraient en prendre de la graine au lieu de plastronner comme des starlettes de télé réalité sur youtube ou sur Facebook.

 

Pour l’instant, aux dernières nouvelles, les manifestants israéliens se tiennent à carreau. Pas de débordements intempestifs, pas de saccages de vitrines, aucun vol de falafel n’a été encore signalé. Pourtant Dieu sait que les tentations sont grandes. Si vous n’avez jamais encore mis les pieds en terre promise, ce qui était encore mon cas il y a quelques mois de cela, il est difficile de s’imaginer combien Tel Aviv ressemble à un fantasme de succursale à ciel ouvert d’un capitalisme onaniste versé dans l’achat compulsif de biens de consommation.

Tout au long d’avenues plombées de soleil, planté comme un demeuré dans un ciel sans nuage, des magasins de fringues aussi vulgaires que coûteuses interpellent des devantures de boutiques de chaussures, des dizaines de centaines de milliers de marchands de sabots suédois tiennent la dragée haute à des échoppes vendant des falafels à tour de shekel ; des bijoutiers font la nique à des distributeurs de montres, des supérettes qui ne vendent que des barquettes de Houmous, 24 heures sur 24,(juste au cas où vous seriez pris d’une soudaine attaque de panique en constatant à trois heures du matin que la purée de pois chiche s’est évaporée pendant votre sommeil)  concurrencent des échoppes clinquantes où des téléphones portables, clapets grand ouvert sur des claviers rutilants, se font admirer comme des dames de petites vertus dans le quartier rouge d’Amsterdam.

Bref, si vous mettiez un bâtard de clébard de kleptomane d’anglais dans les rues de Tel Aviv, il attraperait vite un torticolis à donner le vertige à sa pomme d’Adam et, la langue pendante d’envie, se convertirait vite fait bien fait au judaïsme auprès du premier larbin de rabbin de service.

Donc les israéliens ne sont pas contents et ont sûrement des bonnes raisons de l’être. N’étant pas sociologue en psychologie appliquée de la foule israélienne, je me garderais bien de tout commentaire à ce sujet. Je sais seulement qu’on ne ne sacrifie pas des longues heures à paresser sur une plage paradisiaque à mater des mannequins venus de Sibérie juste pour avoir le plaisir de gâcher les vacances de Bibi. On ne renonce pas aux joies infinies de la baignade dans une eau turquoise ou presque, à se la raconter, entre deux coulées de brasse, comment on a réussi à berner le fils Benchétrit, en lui refilant des toques de fourrure venues tout droit de Shanghai, juste pour meubler les heures molles et creuses de l’après midi quand les touristes, abrutis de chaleur, colonisent les terrasses climatisées des grands hôtels qui sont plantés comme des grands dadais tout le long de la promenade qui ne porte pas de nom ou alors je ne m’en souviens pas et j’ai la flemme de m’en aller rechercher sur google. D’ailleurs je ne lis pas l’hébreu et le comprends encore moins. Enfin cela ressemble à ça :

Ceci dit, si je vivais à Tel Aviv, Dieu m’en garde, je serais le premier à manifester. Il suffit de se promener quelques minutes dans la ville pour se rendre compte que l’argent amassé par le trésor public n’a pas été reversé depuis des lustres dans des plans d’urbanisme coûteux. Les immeubles partent en lambeaux, les façades des maisons tirent toute la gueule et déclinent des mines fatiguées et vétustes avec des murs décrépits et fissurés, les balcons tanguent et branlent à tout va, les volets pendent comme une paire de couilles d’éléphants agoraphobes claquemurés dans un zoo de la banlieue de Damas.

Les bus se traînent comme des limaces et gémissent tels des asthmatiques privés de ventoline. Les poubelles volent au vent et vous claquent à la figure, les voitures s’enterrent sur place tellement le trafic se congestionne et se pétrifie, et pendant ce temps là, sur la promenade machinchouette, des nymphettes avec des jambes longues comme un discours de Fidel Castro, se déhanchent sur des paires de talons aiguilles fines comme des colonnes de Buren tout en jouant au jokari avec leurs chiens de traineaux et bovarysent à tout crin en se disant tiens si on prétendait que je vivais à Paris ou à Milan.

 

Oui j’exagère mais à peine. Il existe aussi des coins charmants et paisibles, tranquilles et suaves, coquets et coquins, refaits à neufs où l’on se surprend à penser que si jamais la vieille Europe se repassait en dernière séance nuit et brouillard, ma foi, on se terrerait bien volontiers dans une de ces jolies bicoques avec leurs cours ombragées et leurs petits jardins potagers. Sauf que bien sûr, ça coûte aussi cher d’habiter dans ce genre d’endroit que d’offrir à son dernier nouveau-né une circoncision opérée par le rabbin de Bernard Maddof.

17 commentaires pour “Après Londres, Tel Aviv?”

  1. Il est rare que la forme soit plus intéressante que le fond. Tel est le cas.

  2. puis-je le prendre comme un compliment?

  3. je ne connaissais pas la Tel Aviv girl, eh bien je remarque qu’elle est aussi ringarde que la rangée de pom pom
    et aussi qu’il n’y a pas une seule ligne sur le foot.. pourtant il existe bien un club : Hapoil Tel Aviv (ça ne s’invente pas)

  4. Hapoel pas hapoil! Il y a deux autres clubs résidents. Le maccabi et le Bnei Yehuda. Désolé pour cette absence de foot…

  5. Partisan?
    M. Sagalovitsch je ne vous reconnais pas. Heureusement que la photo de cette jeune femme est là pour rattraper le tout.
    Vous saviez que j’avais roulé ma première pelle à une feuj? Délicieuse…(oui je sais c’est péché!!!)

  6. partisan de quoi au juste?

  7. c’est une variante “lolita”, style vestimentaire à porter pour la japan expo, à la limite…
    Laurent (je peux?), à votre palmarès de la meilleure révolte, vous mettriez qui : 1. les révolutions arabes 2. los indignados 3. les manifestants israéliens 4. les pillards anglais 5. les pyromanes de banlieue (ah c’est vrai, jamais entendu parler:)

  8. anna,
    (on se tutoie?) Tu fais quoi comme boulot? Traductrice? Si ce n’est pas le cas tu as -à mon humble avis- raté ta vocation 😉

  9. le texte original est toujours le meilleur;)

    à quoi reconnaît-on un streaker juif ?

  10. hé oh c’est un espace de reflexion ici pas de drague derriere un blog. Non mais!

  11. M. Sagalovitsch,
    les règles sont faites pour être transgressées sinon c’est pas drôle 🙂
    Pour répondre à anna : il porte une Kippa?

  12. C’est quoi un “streaker”?

    PS: excellent article!

  13. c’est vrai ca anna, il a raison Mike c’est quoi un streaker au sujet?

  14. au juste pas au sujet cretin de saga que je suis

  15. non ce n’était pas le début d’une histoire drôle, encore que il y a sûrement quelque chose à faire avec les mots circoncision et Hapoil 😉 pardon, je m’égare…enfin..voyons! c’est un va-cul-nu! pour une femme qui n’y connaît rien en foot c’est encore le spectacle le plus plaisant qu’on peut voir sur un terrain^^

  16. je sens que vous y venez au foot… Dans quelques temps, vous serez convertie!

  17. non j’en doute mais faut peut être que je réactive mon immunisation, en me repassant l’intégrale des archives du hooliganisme par exemple et je reviens..
    c’est exactement la réflexion que je me faisais en postant;)

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