Appellation saluant le “fait maison” dans les restaurants: les avis critiques

15 grands chefs ont lancé en début de semaine une nouvelle appellation, “restaurant de qualité”, saluant le “fait maison” et l’hospitalité, on en parlait ici lundi.

Mais les critiques n’ont pas tardé à arriver. Xavier Denamur, d’abord, dans une interview pour le journal Métro, a vite fustigé une «véritable supercherie».

Le restaurateur parisien, qui dénonçait les plats industriels dans le film La République de la Malbouffe, expliquait que «cette initiative est privée et va permettre à des riches de savoir ce qu’il y a dans leur assiette, mais que fait-on des autres ? Tous les citoyens ont le droit de savoir ce qu’ils ont dans leurs assiettes, cela ne doit pas être un privilège réservé à une élite».

Pour lui, ces 15 grands chefs s’accordent purement et simplement le droit de contrôler les autres restaurateurs. Alors Xavier Denamur pense que «c’est l’Etat, et seulement lui, qui doit régler ces questions», via un système d’étiquetage clair.

Un risque de confusion?

Mardi, Francis Attrazic, Président de l’Association Française des Maîtres restaurateurs (autre “label”, décerné par l’Etat depuis 2008) a publié sur la page Facebook de l’association un communiqué pour réagir.

Il rappelle qu’ «aujourd’hui, plus de 2700 Maîtres Restaurateurs ont le titre. C’est un label officiel, contrôlé et décerné par l’Etat après un audit externe, démarche volontaire qui valorise le professionnalisme et le “fait maison”». D’autres “labels” régionaux existent également, même s’ils ne sont pas forcément connus des consommateurs.

Et le président de l’asso demande: «Veillons à ce que des initiatives ayant à priori le même objectif ne provoquent pas de confusion supplémentaire chez le consommateur»

Dans une interview accordée au blog Les bonnes tables (ou pas) de Jack et Walter (à lire en entier !), Francis Attrazic précise aussi que la démarche ne semble «pas suffisamment bordée, cette idée de “grand jury”, ça fait un peu Top Chef !».

Ensuite, on a pu lire hier la position du chef Georges Blanc sur le site Cuisiner en ligne. Pour lui, «c’est comme une porte ouverte que l’on enfonce bruyamment (…). S’en remettre à un organisme certificateur s’appuyant sur une déclaration sans contrôle semble utopique voire sans fondement. Pourquoi devoir payer pour prouver que l’on fait bien les choses ???».

Quand on lit le dossier expliquant les démarches à suivre pour obtenir l’appellation, on ne trouve en effet pas vraiment de procédure de contrôle. Les dossiers de candidature sont étudiés par le comité de sélection du Colléège culinaire, et le restaurateur concerné prend un certain nombre d’engagements.

Ensuite, le maintien de l’appellation est tout de même subordonné “aux résultats de l’évaluation clients” (mais aussi “à l’appréciation des chefs fondateurs du Collège culinaire de France” et… “au règlement de la cotisation d’adhérent”).

Un “label bidon”?

Enfin, on revient à Xavier Denamur puisque Rue 89 publie ce matin sa tribune dénoncant «un label bidon qui s’offre des publi-reportages». Pour lui, c’est de l’hypocrisie complète puisque ces grands chefs sont partenaires de grandes marques de l’industrie agroalimentaire (Ducasse et Sodexo, Marx et Danone…).

Il fustige une «Haute Autorité des Gamelles, élite autoproclamée, qui indique au bon peuple argenté où aller casser la croûte en toute sécurité», car il aurait aimé que les chefs se fassent entendre pendant la crise des lasagnes pour «déclarer le droit à savoir ce qu’il y a dans les assiettes de tous les Français comme priorité nationale».

Et de rappeler sa volonté de vrai «débat de fond sur la transparence dans les assiettes». Tout le monde est d’accord? En attendant, observons la mise en place de ce label et voyons si les consommateurs s’y attachent…

Photo: Cooking at Konstam Restaurant, London/  Lplatebigcheese via FlickCC License by

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