En Californie, dans les années 1960-1970, les jeunes hippies ne font pas que l’amour, de la musique et du militantisme. Ils cuisinent et mangent aussi, souvent bio, souvent végétarien.
Dans son dernier ouvrage, Peace’n’food, la cuisine des hippies en 40 recettes, la journaliste Elsa Launay nous embarque dans l’histoire de la culture hippie, côté cuisine.
Quand les jeunes américains commencent à imposer leur contre-culture et leurs idées révolutionnaires, «tout acte quotidien devient politique: on ne peut décemment pas lutter contre la guerre et donner de l’argent aux industries qui la soutiennent, en s’alimentant de sodas et de plats préparés!».
Bio et végétarisme vont avec les idées de respect de la nature. Fermes, jardins communautaires, vente directe et recherche de l’autosuffisance commencent à s’implanter quand débarque Alice Waters, «pionnière du bio» et «mère nourricière de toute une révolution».
Chez Panisse
La jeune étudiante cherche un moyen d’appliquer les idées hippies à la réalité. Fascinée par le discours du leader Mario Savio, elle s’imprègne de sa pensée:
«Dans un de ses discours mémorables, il a dit: “l’Amérique est plus que jamais l’utopie de la stérilisation, de la satisfaction automatisée” et entendre cela m’aiderait plus tard à trouver le courage de chercher une satisfaction qui ne serait pas stérile, mais fertile et faite maison, une satisfaction que je trouverais quelques années plus tard dans la cuisine, une satisfaction qui durerait toute ma vie». (extrait de 40 years of Chez Panisse, the power of gathering, Alice Waters, Clarkson Potter, 2011, cité par Elsa Launey)
Peu après un échange universitaire en France où elle découvre de nouveaux goûts et aliments, Alice Waters, de retour en Californie, commence à écrire des recettes pour le San Francisco Express Times. Et ouvre le restaurant Chez Panisse en 1971 (en hommage aux films de Pagnol!). L’endroit devient vite un lieu de rassemblement et de réflexion, entre autres sur l’alimentation et le bio.
A la maison
En même temps, dans les foyers hippies, on mange végétarien, bio, des soupes, des ragouts, de la raw food (nourriture crue). «Le blé et le riz complets, le soja (et surtout le tofu), la luzerne et le granola jouaient un rôle important dans cette cuisine». Et le partage des tâches reste très traditionnel, note l’auteur. Les femmes font la cueillette dans le jardin et cuisinent…
On lit même quelques anecdotes culinaires sur Woodstock, en août 1969… Car 400 000 bouches à nourrir, ce n’est pas rien, et le cours du hot-dog montera très vite pendant le festival. Après quelques péripéties et problèmes d’organisation, Lisa Law, la “Queen of granola”, prendra les choses en main et servira des milliers de bols de granola et de boulgour aux courgettes.
Elsa Launay nous livre aussi quelques petites citations bien trouvées sur l’alimentation hippie, issues de ses recherches. Par exemple, un extrait de Hippie of the Haight de Sherri Cavan nous apprend qu’ “une journée hippie inclut généralement ce qu’on appelle parfois le scarffing ou le eating head food ; le scarffing est connu des membres pour avoir lieu quand quelqu’un mange une certaine nourriture, considérée par la communauté hippie comme étant particulièrement délicieuse lorsqu’on est défoncé aux drogues”.
Parmi ces aliments, sachez que l’on trouve “la glace et le beurre de cacahouètes, mais la liste peut s’étendre au gré des découvertes”.
“Hippy Hours” et “Peace of Cake”
Le livre nous propose donc aussi plein de recettes des plats communautaires, tous végétariens: granola, salade de quinoa aux airelles et amandes, corn on the cob, pois chiches à la mode cajun, chili végétarien, veggie pot pie, cookies au beurre de cacahouètes, banana bread…
Mais aussi des inventions rigolotes et référencées, comme la Tarte Peace aux framboises, le Flower Power cake ou les cocktails «Imagine» ou «Purple Haze». Des recettes accompagnées d’une playlist bien choisie, à écouter en cuisinant ou en mangeant. Il est ainsi conseillé d’écouter So long Marianne avec une salade de tomates et pastèque ou Strawberry Fields avec les quesadillas aux poivrons…
De jolies recettes pour s’imaginer en Californie. Et pour appliquer chez vous le slogan du livre: “Make food, not war”. En attendant, 40 ans plus tard, le restaurant d’Alice Waters, aux plats bio er locaux, marche toujours aussi bien.
Lucie de la Héronnière
Elsa Launey, Peace’n’Food, la cuisine des hippies, Editions Alternatives, mars 2013
Photo : Elsa Launay, image issue du livre.
64% des Français ont consommé bio en 2012. C’est l’un des résultats du 10ème baromètre Agence Bio/CSA 2012. Pour l’Agence Bio (qui a notamment pour tâche de promouvoir l’agriculture biologique), c’est «une vraie tendance de fond qui s’affirme».
71% des sondés déclarent privilégier les produits respectueux de l’environnement et/ou du développement durable, c’est 5 points de plus qu’en 2011. «Cette conscience environnementale croissante est en harmonie avec la montée en puissance de l’agriculture biologique en France», commente l’Agence.
L’Agence Bio distingue 5 profils de consommateurs (ou non-consommateurs!) bio :
Les «Bio-quotidiens» ou «les précurseurs», 8% des Français: ils consomment bio chaque jour, et sont acquis à la cause depuis longtemps… 18 ans en moyenne! Il s’agit pour eux d’une habitude familiale. Pour eux, le bio ce n’est pas que l’alimentation, et pas qu’à la maison. Enfin, ces “Bio-quotidiens”, qui ont 52 ans en moyenne, s’estiment bien informés sur le sujet, plus que le reste des Français (75% contre 54%).
Les «Bio-Hebdos», des «Bio-quotidiens en devenir», 15% des Français: ils consomment bio une à plusieurs fois par semaine et ont « une connaissance très pointue des qualités et principe de la Bio ». 97% connaissent le logo AB (contre 93% des Français) et 61% le logo bio européen (contre 42% des Français).
Les «Bio-mensuels», «les plus récents», 20% des Français: ce sont des consommateurs bio plus nouveaux, qui achètent bio au moins une fois par mois, «à l’image de la population française en moyenne». Le bio n’a pas encore beaucoup changé leurs habitudes alimentaires, et l’Agence bio estime qu’ils ont «besoin d’informations complémentaires».
Les «Bio-occasionnels», «des consommateurs désireux d’information complémentaire», 21% des Français: ils consomment bio moins d’une fois par mois. 50% d’entre eux s’estiment insuffisamment informés sur le bio. Ils trouvent que le prix du bio est trop élevé (pour 83%) ou «n’ont pas le réflexe d’acheter» (76%). Mais les parents «Bio-occasionnels» souhaitent en large majorité plus de bio pour leurs enfants, à l’école.
Les «Non-consommateurs», les «désintéressés », 36% des Français: cette catégorie rassemble une grande part de 15-24 ans. Ils s’estiment mal informés (54%), mais n’attendent pas spécialement plus d’informations…
Notons que pour ces différents consommateurs, la part du «bio made in France» gagne du terrain, sans doute grâce au développement de circuits courts. L’année dernière, le cabinet Xerfi diagnostiquait un ralentissement du bio, peut-être évincé par le locavorisme. Mais bien entendu, les deux ne sont absolument pas contradictoires.
Photo: Small deluxe organic box/ WordRidden via FlickCC License by
lire le billetUn certain nombre de contre-vérités circulent sur l’alimentation, sur le web, dans les supermarchés, et dans les magasins de «nourriture saine». Jane Brody, du New York Times, a décidé de s’attaquer à quelques unes de ces informations douteuses…
«Pour commencer, quand est-ce que «chimique» est devenu un mot sale?», se demande-t-elle. Joe Schwarcz, directeur de l’Office for Science and Society de l’Université Mc Gill à Montréal s’est posé la question. La journaliste a lu deux de ses livres, Science, Sense and Nonsense, et The Right Chemistry, et a assisté à un symposium organisé par le scientifique. Et en tire plusieurs éléments pour nous aider à faire de meilleurs choix de «bien manger» en 2013…
Les acides gras trans, pas tous des démons
On connaît la réputation des acides gras trans sur la santé, et notamment les risques cardio-vasculaires. Mais pour le Dr. Schwarcz, «tous les gras trans ne sont pas des démons». Certains peuvent être des composants naturels de produits laitiers par exemple.
Voilà l’explication:
«Le mot «trans» se réfère à la disposition des atomes d’hydrogène et de carbone dans un acide gras. La formation des gras trans liés aux maladies cardiaques arrive quand les huiles végétales sont durcies pour prolonger la durée de vie de produits, avec un procédé de fabrication industriel appelé hydrogénation. Les gras trans naturels, comme ceux des produits carnés et laitiers, prennent une forme différente, avec des conséquences tout à fait différentes sur la santé».
Le plus consommé des «bons» gras trans est l’acide linoléique conjugué, qui selon diverses études peut aider à perdre du poids et gagner du muscle, mais aussi réduire l’athérosclérose, l’hypertension artérielle et les inflammations.
Bio ou pas bio?
On s’est déjà posé la question ici, est-ce que la nourriture bio, certes meilleure pour l’environnement, est également plus nutritive? Pour le Dr Schwarcz, certains produits biologiques peuvent contenir des niveaux légèrement plus élevés de micro-nutriments essentiels, comme la vitamine C. Mais la différence peut dépendre davantage du lieu de culture que du mode de production.
En outre, les producteurs bios sont évidemment contre les modifications génétiques. Cependant, selon Schwarcz, celles-ci peuvent être utilisées pour améliorer le contenu nutritionnel d’une culture, améliorer la résistance aux rongeurs et diminuer ses besoins en eau. Ainsi, une tomate OGM développée à l’Université d’Exeter contient 80 fois plus d’antioxydants qu’une tomate normale. En poussant le raisonnement jusqu’au bout, elle est en effet très nutritive, mais pas le moins du monde bio…
Le saumon d’élevage, un beau rose trop louche?
La plupart des saumons consommés aujourd’hui naissent dans des élevages. Ce qui provoque des préoccupations légitimes sur les polluants éventuels présents dans nos assiettes.
Une inquiétude concerne aussi la jolie couleur du saumon, produite par ajout d’astaxanthine à l’alimentation des poissons. Mais ce pigment est un anti-oxydant présent naturellement dans certaines algues. Et il est donc aussi présent naturellement dans la chaîne alimentaire pour donner au saumon sa couleur rosée.
Les noix, pleines d’avantages
Elles sont souvent accusées d’être trop grasses. Mais des recherches montrent que les gens qui mangent régulièrement des noix en quantités raisonnables pèsent moins, en moyenne, que ceux qui évitent les noix…
Le gras des noix est insaturé et sain pour le cœur. Elle sont en outre de bonnes sources de protéines, d’antioxydants, de vitamines et de minéraux. Tout cela est vrai également pour les avocats. Il suffit de ne pas en abuser…
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lire le billetLe «bio» envahit les supermarchés, les étales et les cantines. Plus cher que les produits traditionnels, les aliments bios ont-ils des vertus spécifiques? Une étude publiée le 4 septembre dans les Annals of Internal Medecine et relayée par le Los Angeles Times et le New York Times, montre que les produits «bio» sont plus sûrs, mais qu’ils ne contiennent pas plus de nutriments que les aliments «non-bios».
Conduite par Crystal Smith-Spangler, cette méta-analyse de l’université de Stanford aux Etats-Unis a utilisé les résultats de 17 études sur des humains et de 223 études sur les composants nutritifs et contaminants présents dans les aliments. Les chercheurs américains concluent que:
L’enjeu est de taille: l’économie du bio prend chaque année plus d’ampleur. Fin 2011, en France, les surfaces bios représentaient 3,5% de la surface agricole utile (SAU), soit plus d’un million d’hectares, et 24.000 exploitations biologiques, selon le ministère de l’Agriculture.
Une autre enquête avait conduit à la même conclusion en 2009. «Il n’y a pas de preuve de différence en matière de qualité nutritive entre les aliments issus de l’agriculture biologique et ceux provenant de l’agriculture conventionnelle», concluaient les chercheurs. Cette étude britannique avait créé la polémique. Sur Slate.fr, Jean-Yves Nau, journaliste et docteur en médecine, titrait «Le bio est-il un leurre?». «L’absence totale ou presque de pesticides justifie-t-elle de payer notablement plus cher les aliments du quotidien? Faut-il accepter la différence de prix en postulant que les végétaux bios recèlent plus de magnésium, de zinc ou de polyphénols que ceux issus des cultures intensives et grassement azotées?», s’interrogeait Jean-Yves Nau. Trois ans plus tard, la question se pose toujours.
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Mise à jour le 04/09/2012 à 15h47 : les aliments «bios» ne sont pas plus «nourrissants» mais plus «nutritifs»
lire le billetLes mangeurs bio deviennent-ils peu à peu prétentieux et arrogants? C’est la thèse que défend une étude américaine parue dans le journal Social Psychological and Personality Science. Selon un article paru sur le site de 20minutes, les consommateurs de produits issus de l’agriculture biologique «seraient moins altruistes et porteraient des jugements moraux plus durs que les autres».
Kendall Eskine, prof de psychologie à l’Université de la Nouvelle-Orléans et directeur de cette étude, explique à MSNBC qu’il avait remarqué que beaucoup d’aliments biologiques portaient des terminologies morales, comme le Honest Tea (ou Thé Honnête). Il a donc voulu savoir si les consommateurs de bio étaient plus altruistes que les autres…
Il est arrivé à la conclusion suivante: «lorsque les gens s’auto-félicitent de leur comportement, ils deviennent moralisateurs et suffisants». En bref, l’auto-satisfaction rendrait méprisant envers les gens qui consomment moins «vert» ou «durable»… Selon les auteurs de l’étude, manger bio donnerait une «caution morale» qui inciterait ensuite à moins bien se comporter, tout en regardant de haut les mangeurs de fast-food et en jugeant sévèrement les acheteurs de légumes non bio.
Kendall Eskine ajoute que «les gens se sentent comme après avoir fait une bonne action. Ils ont ensuite comme une permission d’agir de manière non éthique par la suite. C’est comme quand vous aller à la salle de gym ou courir, après vous vous sentez bien dans votre peau et vous mangez une barre de chocolat»…
C’est ce qu’on peut appeler «l’équilibrage moral» ou «l’éthique de compensation». Pour arriver à ce résultat, les chercheurs ont divisé un groupe de soixante personnes en trois: le premier groupe a regardé des photos d’aliments bio. Le deuxième a eu droit à des images d’aliments «réconfortants» comme des cookies ou des brownies. Le dernier a pu observer des images de produits courants comme du riz ou de la moutarde. Après, les participants ont dû noter sur une échelle de 1 à 7 des situations moralement répréhensibles.
Conclusion, les personnes exposées au bio sont beaucoup plus sévères dans leurs jugements. Enfin, les chercheurs ont demandé aux participants combien de temps ils seraient prêts à accorder de l’aide à quelqu’un dans le besoin: la moyenne est de 13 minutes pour les «bio», 19 minutes pour les «produits courants» et 24 minutes pour les «gourmands».
Ceci dit, cette première étude observe des personnes qui ont été exposées à des images de certaines catégories d’aliments, et non des consommateurs réguliers… Kendall Eskine espère justement faire d’autres études complémentaires sur le sujet.
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lire le billetQuelques piécettes dans le distributeur automatique et voilà une botte de poireaux ou deux kilos de patates, pour des mangeurs ayant des envies de soupes nocturnes ou n’ayant pas le temps d’aller au marché. Dans le Gers, Les Jardins de Mesples alimentent le seul distributeur de légumes de la région (mais les distributeurs de lait et de yaourts existent déjà!), comme l’explique Sud Ouest.
Sonia Coron et Sébastien Lasportes sont agriculteurs associés sur la ferme bio de Mesples, à Castéra-Verduzan. Chaque jour, ils ravitaillent le distributeur avec des légumes du jour et de saison, lavés et préparés… Ils ramassent au fur et à mesure, pour remplacer ce qui a été pris dans le distributeur. Les pertes et le gaspillage sont ainsi minimisés. Et le consommateur mange des légumes extra-frais, cueillis il y a quelques heures.
C’est le garage de Sonia Coron qui accueille le distributeur de légumes, cultivés à quelques kilomètres de là. Comme pour acheter un Coca dans un distributeur classique, on glisse quelques pièces dans la machine, on tape le numéro souhaité et un des 36 casiers en inox s’ouvre sur une botte de radis ou des topinambours, parfois accompagnés d’idées de recettes ou d’indications de cuisson.
C’est un exemple de circuit court intéressant: pas d’intermédiaire entre l’agriculteur et le consommateurs, les prix sont donc raisonnables pour les deux… Les producteurs expliquent à Sud Ouest: «Ce système de vente nous permet de vendre notre production directement au consommateur sans devoir passer tout notre temps derrière un comptoir. Les clients y trouvent aussi leur compte avec la fraîcheur et les horaires d’ouverture très larges». Un circuit court bien commode pour les clients, qui peuvent passer presque tous les jours entre 8 heures et 21 heures, et pour les agriculteurs, qui passent ainsi plus de temps sur leurs exploitations. Après, il y a sans doute moins de ce lien entre producteurs et consommateurs propre à la vente directe…
Ce n’est pas le premier distributeur de produits fermiers en France. Entre autres exemples, un maraîcher des Yvelines utilise la machine (accessible 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7) depuis 2010. Daniel Pasquier a aussi installé un distributeur à Cour-Cheverny (Loir-et-Cher) pour permettre aux “rurbains” pressés de s’approvionner en produits frais. C’est Didier Filbing qui a importé et commercialisé ce système en France. Un système déjà très répandu en Suisse et en Allemagne… Pour lui, cette forme de vente directe marche de mieux en mieux puisqu’elle correspond à la montée d’inspirations locavores.
Photo: Tomates du jardin/ fred_v via FlickrCC License by
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«L’insolente santé» de l’alimentation bio risque de se ternir quelque peu, selon un article du monde.fr basé une étude du cabinet Xerfi (un document destiné aux exploitants agricoles, aux industriels de l’agroalimentaires, aux distributeurs et à la restauration). La croissance de ce marché va ralentir, pour plafonner à 5% en 2015. C’est largement moins bien que dans les dernières années: entre 2006 et 2010, les taux de croissance du secteur se situaient plutôt entre 10 et 25%…
Selon le cabinet, c’est la faute à la crise: les consommateurs établissent des priorités. Et comme les produits biologiques restent plus chers… Autre tendance du bio pour les prochaines années, la grande distribution va continuer à élargir sa gamme et à augmenter sa part de marché.
Le diagnostic établit que le locavorisme (privilégier les achats de produits locaux) va peut-être même évincer le bio… Pour Xerfi, la notion de proximité est devenue incontournable dans la filière alimentaire. Bref, le cabinet enfonce le clou sur le “made in France”, déjà installé comme un des thèmes de la campagne présidentielle. Bien sûr, bio et locavorisme ne sont absolument pas contradictoires. Mais l’étude affirme que “ce «locavorisme» montant est une opportunité pour les acteurs du bio «made in France» mais aussi une menace dans la mesure où il représente une offre concurrente pour le consommateur souvent infidèle et zappeur”.
Xerfi avait d’ailleurs publié en 2010 une autre étude intitulée «Locavores, «Régions & terroirs», «Made in France»: les nouveaux Eldorados de la filière alimentaire?». Une tendance favorisée par deux facteurs, «la montée en puissance de tendances socio-comportementales axées autour du locavorisme» et, «en lien avec la crise, le penchant au repli sur soi qui tend à favoriser le made in France». Pour Xerfi, c’est une «aubaine incontestable pour les industriels de l’agroalimentaire, les exploitants agricoles et les distributeurs»…
Mais c’est bien sûr aussi une occasion de développer d’autres modes de production, distribution et consommation des denrées alimentaires. A ce propos, je vous parlerai la semaine prochaine de la Ruche qui dit oui, un moyen de combiner circuits courts et achats groupés, pour “manger mieux, manger juste”.
Photo: Ready for the shop/ hardworkinghippy via Flickr CC License by
lire le billetLa réglementation du commerce des semences favorise une agriculture productiviste et gorgée de pesticides. Inadaptée aux enjeux sanitaires et environnementaux, et de plus en plus restrictive, elle finira par pousser les paysans qui veulent «cultiver la biodiversité» à désobéir.
Clé de voûte de l’agriculture, la semence est le tout premier maillon de la chaîne alimentaire. La contrôler, c’est régner sur l’ensemble de la filière agricole et pouvoir jongler avec les marchés de la fertilisation, des produits chimiques et des équipements. Les cadors de l’agroalimentaire l’ont bien compris. Et pour s’assurer que l’agriculture conventionnelle prospère, ils se sont dotés d’un outil imparable: la loi.
En France, seules les variétés inscrites au Catalogue officiel des espèces et variétés peuvent être échangées, gratuitement ou non, en vue de cultures commerciales. Géré par le Gnis (Groupement national interprofessionnel des semences), le Catalogue a été créé en 1932 pour remettre de l’ordre sur ce marché alors désorganisé. Variétés différentes vendues sous le même nom ou variétés identiques aux appellations variables… Il était nécessaire de clarifier l’offre et d’assurer l’identité de la semence achetée par l’utilisateur.
Au fil des ans, le Catalogue est devenu une pomme de discorde entre les semenciers et les paysans non conventionnels. Pour ces derniers, il n’aurait servi qu’à évincer les variétés paysannes traditionnelles, inadaptées aux cultures intensives, à la mécanisation et aux pesticides. Freinant par ailleurs l’essor de l’agriculture biologique, dont les semences sont fréquemment éliminées par les critères DHS (distinction/homogénéité/stabilité), auxquels elles doivent répondre pour être inscrites et commercialisées légalement.
Selon Guy Kastler, membre de la Confédération paysanne, «une semence industrielle, homogène et stable, ne peut pas s’adapter aux différents territoires sans produits chimiques, contrairement aux semences paysannes, parfaites pour l’agriculture biologique». Pour le ministère de l’Agriculture, le problème ne vient pas des critères du Catalogue, mais du marché morcelé de l’agriculture bio, et des difficultés à rentabiliser son développement.
«Alors que la France possédait la plus forte diversité de fruits au monde il y a quelques décennies, seulement cinq variétés de pommes sont commercialisées dans l’Hexagone aujourd’hui. Celles qui résistaient naturellement aux aléas climatiques et aux insectes ont été éliminées. Pourtant fragile, la fameuse Golden a été imposée sur le marché. Réclamant une trentaine de pesticides par an, elle représentait une manne financière pour les grands groupes de l’agrochimie», dixit l’ingénieur agronome Claude Bourguignon dans le film de Coline Serreau Solutions locales pour un désordre global.
Gâteaux, produits à base de céréales, légumes et fruits frais ou en conserve… Les pesticides sont présents dans tout ce que nous mangeons, ou presque. Car le Catalogue compte essentiellement des semences «standardisées», destinées aux cultures conventionnelles.
lire le billetAlors que le gouvernement américain s’attèle à mettre en place des réductions de budget qui toucheront tous les domaines, des dépenses militaires à l’assurance maladie en passant par la réparation des ponts, une des réductions envisagées, correspondant à 0,00025% de la valeur de réduction du déficit d’un montant de deux mille milliards de dollars a particulièrement retenu l’attention du public: le soutien aux marchés de producteurs locaux.
Ces 5 millions de dollars de subventions risquent de disparaître du budget agricole de 2012 et provoquent une grande inquiétude. La Farmers Market Coalition affirme que ce programme est «un succès unique dans l’histoire des politiques agricoles états-uniennes».
Est-ce si surprenant? Les chaînes de supermarchés, de Whole Foods à Safeway ne cessant de proclamer qu’elles vendent des produits sains issus d’exploitations agricoles voisines, acheter localement et consommer des produits bios et non-génétiquement modifiés semble être une excellente idée pour vous comme pour la planète.
Voilà bien quelque chose que le gouvernement devrait soutenir, n’est-ce pas?
Et bien, pas vraiment. Car ces fétichistes du retour aux sources de l’alimentation sont un danger pour les personnes les plus pauvres à la surface du globe. Si vous voulez faire un vrai geste, laissez tomber le bio et l’achat local et devenez un consommateur global, mais averti. Nous devrions entrer dans l’ère des cosmovores –les consommateurs cosmopolites de la nourriture mondiale.
Commençons par les modifications génétiques –les gènes d’un organisme sont insérées dans d’autres organismes par des scientifiques dans des laboratoires. Le ministre de l’agriculture de Pologne, Marek Sawicki, a récemment demandé que l’Europe interdise la culture et l’importation de produits génétiquement modifiés.
Mais pourquoi de nouvelles cultures labellisées OGM seraient-elles plus risquées que les anciennes semences «traditionnelles», dont les graines sont régulièrement bombardées de radiations afin de provoquer des mutations?
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Suite et fin notre série sur le bio à la cantine, où Camille Bosqué réinvente son éco-cantine idéale.
Ma proposition de design global pour une éco-cantine vise à réinventer le scénario de ce service, de ses coulisses jusqu’à table et enfin dans l’école en général. J’ai pris comme cantine témoin l’une de celles du 12e arrondissement, cantines en gestion directe avec cuisines traditionnelles, qui me semblait être un contexte favorable à ce type de démarche, et dont j’ai observé le fonctionnement sur le terrain.
En coulisses
En assistant à la livraison et à la gestion des stocks, j’ai constaté que les cagettes qui arrivent tous les matins sont pour la plupart dépareillées, en carton ou en bois, et jetées après livraison.
Les informations sur l’origine des produits ne sont pas toujours indiquées de la même manière, ce qui rend le travail d’inventaire plus difficile pour le personnel de service, qui doit répertorier les arrivages et archiver les références de chaque livraison.
Un label. Ma première action est d’imaginer un nouveau label pour le 12ème arrondissement de Paris. C’est une manière fiable de lier les producteurs, fournisseurs et cuisiniers et de les fédérer autour du même engagement de qualité, en le rendant visible.
Ce label figurerait sur toutes les cagettes et documents:
Grâce à un nouveau système d’étiquettes (à droite), les informations sur l’origine des produits peuvent apparaître plus clairement : on y trouve le nom du fournisseur, et le nom et l’adresse du producteur, accompagnés d’un pictogramme qui indique en un coup d’œil le type de produit concerné (fruits et légumes, viande, poulet, fromages et produits laitiers…).
Dans le cadre de ce nouveau fonctionnement, des cagettes peuvent être données à l’ensemble des fournisseurs associés, qui les transmettraient à leurs réseaux de producteurs. Elles seraient consignées et standardisées pour éviter des déchets inutiles.
La nouvelle étiquette comporte des volets détachables, à la fois pour l’archivage des références et des données liées à chaque produit livré, mais aussi pour une diffusion de ces informations sur le menu, au self, et à table:
Le menu est un des moyens principaux de communication vers les parents. Il se résume souvent à la liste des plats servis, sans plus de détails. Il peut être amélioré.
Ici, chaque jour a une colonne colorée dans laquelle les plats servis peuvent être inscrits:
Cliquez sur l’image pour l’agrandir
Mais en plus de ce menu à la semaine, on trouve aussi une feuille supplémentaire (ci-dessous).
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