Le webdocu qui met nos frigos à nu

Nos façons de faire les courses, gérer nos frigos ou cuisiner nous disent beaucoup sur nos rapports avec l’alimentation et plus largement avec la société de consommation. Le frigo est même «un objet intime ». Voilà la grande idée de Frigos à nu, beau webdocu réalisé par Gaël David, photographe, et Antoine Veteau, journaliste et réalisateur.

Au cœur de ce projet multimédia financé par KissKissBankBank, une série de portraits, montrant l’intérieur de 7 frigos (pour le moment!) et suivant leurs propriétaires, des personnes bien différentes, pendant leurs courses et dans leurs cuisines… On saisit des personnalités touchantes, chacune avec une vision bien particulière de l’alimentation, des moyens différents, des façons de cuisiner distinctes.

Par exemple, Nadège et Bryan, artistes de spectacle vivant, gèrent leur alimentation dans l’espace d’une caravane. Christine et Patrick font leurs courses tous les week-ends au marché et dans des petits commerces de bouche. Adama met beaucoup de son pays d’origine dans sa façon de cuisiner. Papyves adore éplucher les légumes en écoutant la radio et recherche toujours le goût des tomates de son grand-père…

Quand l’idée a germé, en 2010, il s’agissait surtout de parler de pouvoir d’achat, ébranlé en période de crise. Il s’est vite avéré qu’ouvrir un frigo, c’était raconter beaucoup plus de choses: le rapport avec la société de consommation, les habitudes, la gourmandise, les manières d’accueillir, les rôles familiaux… Comme le précise Antoine Veteau, ouvrir un frigo c’est aussi deviner des choses sur «la personnalité, l’éducation, la profession, la manière de gérer son argent, l’hygiène de vie…».

L’exercice n’est pas aisé. Le journaliste-réalisateur explique qu’il y a «une certaine pudeur à ouvrir son frigo, cela dévoile énormément les personnalités. Alors on rassure les gens, on prend le temps. Nous ne voulons pas de voyeurisme ni de mise en scène. Nous voulons décomplexer les gens, casser ces barrières, se retrouver à travers l’alimentation, au-delà des clichés».

L’objectif à moyen terme c’est de «créer et concrétiser des rencontres, des échanges», précise Antoine, au-delà du virtuel, notamment à travers le site ami Beyond Croissant (autre initiative très intéressante dont on parlera ici prochainement!).

Frigos à nu est donc «une expérience frigorifique et participative». En plus des grands portraits multimédia, le site propose une carte des Frigos à nu. Chacun est donc invité à poster une photo de son frigo, depuis les 4 coins du monde. De quoi enrichir ce passionnant projet, qui montre encore que nos manières de manger et de cuisiner racontent beaucoup, beaucoup de choses sur nous et nos sociétés…

Lucie de la Héronnière

Photos: Gaël David pour Frigos à nu
Vous pouvez aussi les suivre sur Twitter et Facebook.

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Le retour des gadgets des années 1970 en cuisine

Retour vers les années 1970. The Guardian nous explique que les ventes de teasmades, sodastreams et autres robots électriques sont largement à la hausse. Des classiques ressortent en version moderne. Mais de quoi s’agit-il au juste ? De trucs bien bien old school et plutôt pratiques…

– le teasmade : très apprécié autrefois aux Royaume-Uni, cet ingénieux dispositif fabrique le thé automatiquement, en étant relié à un réveil-matin. Résultat, le breuvage est tout prêt, bien chaud et sur la table de nuit quand on ouvre les yeux. Ce génial engin a connu ses heures de gloire dans les années 1960 et 1970. Vous pouvez voir de splendides spécimens ci-dessus.

– le sodastream : une machine à gazéifier l’eau du robinet ou tout autre boisson sans bulle… Inventé par Guy Gilbey en 1903, le sodastream a fait fureur avant de tomber en disgrâce… « La version réincarnée est noire et lisse », explique The Guardian. Même si l’investissement est important, avec le temps la limonade maison revient moins cher… Avec un marketing visant à convaincre les gens de fabriquer eux-mêmes leurs boissons gazeuses, et d’éviter de jeter des milliers de bouteilles de soda en verre, le principe plait. La croissance du chiffre d’affaire de l’entreprise a été de 46% en 2012.

– le robot électrique : Le grand symbole de ce retour du old school en version ultra-perfectionnée, c’est le Kenwood chef, robot multi-fonctions né dans les années 1950, popularisé dans les années 1970, au top des ventes aujourd’hui, souvent à prix d’or comme tous ses cousins multicolores.

On peut trouver facilement toutes ces précieuses reliques remises au goût du jour.  Mais aussi, dans le même genre, des toasters à sandwichs, des mijoteuses, des cuit-vapeur, des «hostess trolley», espèces de placards qui gardent les plats préparés à l’avance bien au chaud…

Ils sont de retour grâce certains ambassadeurs, explique The Guardian. Comme par exemple Jamie Oliver qui a fait buller du vin blanc pendant une démonstration. Ceci provoqua d’ailleurs une augmentation de 85% des ventes de sodastream en seulement une semaine…

Le distributeur John Lewis a ainsi vu les ventes de cuit-vapeur augmenter de 136%, celles des “hostess trolleys” de 114% et celles de teasmade de 102%.

Et pourquoi donc? Nostalgie? Retour aux basiques efficaces? Un acheteur explique au Guardian: « Il y a de la nostalgie dans ces appareils. Mais ils bénéficient désormais de nouvelles technologies et d’un design contemporain, et sont ainsi plus faciles à utiliser et plus élégants dans nos cuisines ».

Merci Mamie, ebay et les brocantes, il y a plein d’autres instruments que l’on trouve dans les cuisines françaises rétro et/ou à la pointe: tout un bataillon de gadgets tupperware, ou encore le thermomix… D’autres idées de trouvailles vintages qui trônent dans votre cuisine ?

Photo: IMG_0339 / superb_ via FlickCC License by

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63% des Français cuisinent par gourmandise

Quand on leur demande pourquoi ils font la cuisine, 63% des Français invoquent en premier “pour la gourmandise d’un plat”. Viennent ensuite le plaisir ressenti en cuisinant (52%), la qualité des produits utilisés (51%), la diététique (30%) et le prix (23%). C’est une des conclusions d’une étude comportementale sur les habitudes culinaires des Français réalisée par Gira Conseil pour le salon Cuisinez By M6.

Les Français aiment donc toujours la cuisine, mais «ont une nouvelle façon de la percevoir et d’en interpréter les codes». 65% des Français cuisinent par loisir ET par nécessité.

Pendant la semaine, c’est plutôt la nécessité: moins de 30 minutes y sont consacrées pour plus de la moitié de sondés, avec un budget de moins de 5 euros par personne pour 67% d’entre eux.  Le week-end, c’est le contraire, on cuisine plus d’une heure par repas (pour 80% des gens), avec un budget de plus de 5 euros pour 90% des sondés.

Le contenu des assiettes n’est pas le même selon le contexte: quand ils cuisinent par loisir, les Français préfèrent préparer la pâtisserie, la viande, la volaille et les plats en sauce. Dans la cuisine de nécessité, les soirs de semaine, les pâtes sont numéro 1, suivies des viandes et volailles, des légumes et des salades composées.

Fait maison

82% des sondés affirment faire “fréquemment” la cuisine. Même si la quasi-totalité des Français utilise des produits surgelés, le succès de ces derniers concerne surtout les produits bruts (paquets de légumes par exemple) et un peu moins les plats semi-préparés et cuisinés.

D’ailleurs, la notion de «fait maison» n’est pas la même pour tous… L’étude distingue trois catégories. D’abord, les «créateurs» (57% des Français) pour qui cuisiner signifie mélanger des produits bruts avec des produits finis ou semi-élaborés.

Ensuite, les «cuisiniers» (40% des français) définissent la cuisine comme un assemblage de produits bruts. Enfin, les «pressés» (3% des Français) cuisinent en mettant un plat tout prêt au micro-onde…

Côté sources d’inspiration, la principale reste le livre de recette pour 65% des sondés, suivi par les recettes familiales (55%) et les sites web de cuisine (53%). Malgré leur succès, les émissions de télé culinaires inspirent peu les Français dans la réalisation de recettes.

Enfin, 78% des Français préfèrent cuisiner seuls plutôt qu’en binôme ou à plusieurs. La fameuse convivialité du “repas gastronomique des Français”, inscrit au patrimoine culturel immatériel de l’Unesco, semble donc plus concerner la dégustation des repas que la préparation des mets…

Photo: Time to cook / Robbert van der Steeg via FlickrCC License by

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Trompez votre boucher, devenez “carnivore infidèle”

Si vous vous nourrissez essentiellement de légumes, de fruits, de céréales et de légumineuses, mais que vous ne vous faites pas prier pour un bon barbecue ou quelques tranches de saucissons à l’apéro, vous êtes sans doute un peu flexitarien. Un mot qui vient de l’anglais flexitarian, «végétarien qui mange occasionnellement de la viande», néologisme approuvé en 2003 par l’American Dialect Society.

L’idée du flexitarisme est donc de réduire la consommation de viande, sans la faire disparaître tout à fait, en prenant en compte les bénéfices pour la santé et la planète. Un beau livre de cuisine est sorti cette année à ce sujet: Les Carnivores Infidèles, 60 recettes végés pour tromper votre boucher, publié aux Editions Cardinal. L’auteure canadienne, Catherine Lefebvre, n’est pas végétarienne, elle prône plutôt la modération et l’équilibre et explique dans l’introduction que «le but de ce livre est de mettre fin aux fausses idées à l’égard du végétarisme, d’arrêter d’avoir peur du tofu et de ses acolytes et d’essayer de manger un peu moins de viande, moins souvent».

Catherine Lefebvre est nutritionniste, auteure, conférencière et blogueuse. Grande voyageuse, elle sait que la viande n’est pas toujours la base de la cuisine du monde… Elle sait aussi expliquer les bénéfices de la diminution de la quantité de viande. En rappelant notamment que la production de viande engendre 18% des gaz à effet de serre. Et en montrant, exemples à l’appui, qu’on trouve aussi du fer et des protéines dans une alimentation sans viande…

De bien belles recettes donnent envie de tromper son boucher plus souvent. Il s’agit de créations, concoctées spécialement pour ce projet par des collaborateurs, amis, blogueurs ou journalistes: «humus des bois», «conte de féta», «risotto saignant», «guacamole nippon et pitas piquants»… Le chapitre «ils n’y verront que du feu» est particulièrement intéressant à cuisiner, avec par exemple des «faux fish n’chips et véganaise», la «côte de tofu grillée au whisky». Ou encore un «chili sin carne pour machos»… J’ai testé le «burger avec pas d’viande». Bien sûr, on ne retrouve pas le goût d’un steak saignant, même si de loin l’apparence est presque la même. La garniture est une sorte de galette aux haricots rouges, avec des champignons, du parmesan et du piment. Figurez-vous que c’était très bon (surtout avec un gros morceau de Morbier pour remplacer le fromage à burger).

Une cuisine végétarienne goûteuse et pas fade est donc un bon moyen de réduire doucement la consommation de viande, sans renoncer à vie à la côte de boeuf… Les Québécois ont plein d’autres idées pour développer le flexitarisme, comme par exemple le Lundi sans viande

Lucie de la Héronnière

Photo: Une gentille viande saignante/ Олександр via FlickCC License by

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Pas besoin d’avoir une cuisine pour cuisiner

Ou l’art de la cuisine guérilla…

Quand j’étais en CE2 (3d grade aux Etats-Unis, NDLE), nous devions choisir chaque soir un mot nouveau dans le dictionnaire et recopier sa définition. Un jour, le gamin à côté de moi a oublié de faire ses devoirs. Alors que l’institutrice passait dans les rangs pour lire à haute voix nos trouvailles du jour, il m’a emprunté mon dico et a gribouillé quelque chose sur son cahier.

«Cuisiner: préparer les aliments au moyen de la chaleur», a lu l’institutrice.

Je ne me rappelle aucun autre mot de vocabulaire appris cette année-là, mais je me souviens très bien de cet incident: le dico de poche, le nom et le visage de mon camarade de classe (qui déménagea l’été suivant), le regard réprobateur de l’institutrice. Je me souviens m’être demandé pourquoi les auteurs des dictionnaires s’embêtaient avec des mots aussi banals que «cuisiner». Tout le monde savait ce que cela voulait dire. À quoi bon gâcher de l’encre?

Pourtant, cette définition a marqué mon esprit, parce qu’elle rappelle l’essence même de cette activité qui peut vite devenir complexe.

Cuisiner = aliments + source de chaleur

Aucune référence aux acides aminés ou aux Amap. Rien sur les couteaux en céramique et les machines à pain.

Tout comme on peut dormir n’importe où…

Surtout, rien sur la nécessité d’une cuisine. Les cuisines sont, il est vrai, des endroits fort pratiques pour cuisiner, comme les lits sont de super endroits pour dormir. Mais tout comme on peut dormir n’importe où quand le besoin s’en fait sentir, on peut cuisiner n’importe où dès qu’on a l’essentiel, à savoir des ingrédients et une source de chaleur. Je peux cuisiner du riz pilaf, des légumes sautés ou des tacos n’importe où, n’importe quand. J’appelle ça «la cuisine guérilla».

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Comment cuisiner pour bien manger même en étant précaire

Comment bien manger lorsque l’on vit en situation d’extrême précarité, souvent dans un hôtel social sans autre instrument de cuisine qu’un four à micro-ondes ou une bouilloire électrique coincés entre le lit et la table de chevet?

L’équation n’est pas simple à résoudre, mais elle mérite pourtant que quelques cuisiniers futés se la posent: car précarité rime aujourd’hui plus souvent avec déstructuration des repas, voire avec obésité, qu’avec dénutrition, même si ce dernier phénomène, bien sûr, n’a malheureusement pas complètement disparu.

Mais lorsque l’on a peu d’argent et aucune cuisine à disposition, que faire d’autre que grignoter des aliments tout préparés?

«Et lorsqu’une maman ne peut pas réunir ses enfants autour d’un plat chaud à l’heure du dîner, elle compense souvent en leur offrant les gâteaux et sucreries dont ils ont tant envie», constate Clara Same-Romain, diététicienne-nutritionniste qui intervient beaucoup dans les milieux précaires.

Cours de cuisine au micro-ondes

Aider ces personnes à bien s’alimenter ne se résume donc pas à leur fournir un sac de denrées ou les moyens financiers pour faire leurs courses. Il faut aussi les aider à bien faire à manger.

C’est l’initiative qu’a prise Fernanda Marruchelli, coordinatrice à la Fasti (la fédération des associations de soutien aux travailleurs immigrés). Depuis l’été dernier, tous les mercredis matins, une dizaine de femmes –et quelques hommes– habitués de l’association viennent suivre les cours de cuisine de Clara Same-Romain.

Au menu de ce mercredi: flan à la provençale, paëlla et galette des rois, «même si celle-ci n’est pas forcément très diététique», s’excuse Clara. Particularité de ce menu: exceptée la galette des rois, imposée par l’actualité, tous les plats sont bon marché, et surtout cuisinés au four à micro-ondes.

La tâche n’est pas compliquée, bien qu’un peu fastidieuse: pour la paella, il faudra en effet mettre, tout à tour, les légumes (poivron-échalotes), le poulet, les fruits de mer, puis le plat entier, au micro-ondes pendant de longues minutes. Mais le résultat n’a rien à envier avec une préparation classique.

Bientôt un livret de recettes

Des recettes un peu déconcertantes pour le public de ce mercredi, presque exclusivement composé de femmes nigérianes: si la paella et la galette rencontrent un franc succès, le flan à la provençale –qui contient un peu de fromage de chèvre– fait moins l’unanimité.

N’empêche: le public de l’atelier est régulier. Comme Faith, qui vit avec son bébé de 10 mois dans une chambre à la limite de la salubrité et affirme avoir refait chez elle plusieurs recettes réalisées ici.

L’expérimentation va cependant plus loin que le public de la Fasti: subventionnée par la ville de Paris, l’Agence régionale de santé, Paris Santé Nutrition et la mutualité française, l’initiative permet de tester les 20 recettes les plus faciles et les plus appréciées, mais aussi de calculer leur coût réel, avant de les regrouper dans un petit livret qui sera ensuite édité à 10.000 exemplaires et distribué notamment aux assistantes sociales.

L’initiative commence déjà à faire parler d’elle: l’atelier a déjà reçu la visite d’une chercheuse américaine, et Orange a prêté au Fasti une tablette permettant de poster des vidéos «live» des ateliers sur Internet.

Pour ceux et celles qui auraient des moyens encore plus limités, Clara Same-Romain propose régulièrement des recettes réalisables avec une simple bouilloire électrique. Par exemple, un filet de poisson à la normande accompagné de coquillettes à l’emmental:

Recette à tester: le filet de poisson à la Normande

Ingrédients pour 1 personne

100g de filet de poisson

4 champignons moyens

1/2 échalote

1 pot de 50g de crème fraîche

2 cuillères à soupe de jus de citron (frais ou en bouteille)

2 pincées de sel

2 pincées de poivre

1 litre d’eau

Temps de réalisation: 30 minutes

Prix: 1,71€ par personne

Matériel nécessaire:

1 bouilloire

1 saladier

2 sacs de congélation de 1 litre

2 assiettes

1 fourchette

1 couteau

Les étapes de la recette:

  1. Dans une assiette, couper le filet de poisson en deux dans le sens de la longueur. Mettre les deux morceaux obtenus dans un sac de congélation, bien appuyer pour chasser l’air et fermer avec l’attache.
  2. Laver et sécher les champignons. Jeter les pieds. Couper les champignons en fines lamelles, puis en 2.
  3. Ciseler l’échalote.
  4. Mélanger les champignons, l’échalote, la crème fraîche, le jus de citron, le sel et le poivre dans une assiette et verser le tout dans le deuxième sac de congélation. Bien appuyer pour chasser l’air et fermer avec l’attache.
  5. Faire bouillir 1 L d’eau dans une bouilloire.
  6. Mettre les sacs au fond du saladier, ouvertures vers le haut.
  7. Verser l’eau bouillante dans le saladier. Couvrir avec une assiette.
  8. Après 6 minutes de cuisson, jeter l’eau.
  9. Verser le poisson et sa sauce dans une assiette.

Catherine Bernard

Photo: Nom nom nom / melindarae via Flickr CC License By

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Les ventes de bières et fromages locaux en hausse aux Etats-Unis, grâce à la crise

Alors que la crise s’est officiellement terminée en 2009, le Wall Street Journal rapporte que les américains continuent de dépenser moins et d’épargner plus. Et pourtant un rapide coup d’œil dans les rayons des supermarchés aux Etats-Unis révèle que les ventes de yaourts grecs et de bières et fromages artisanaux grimpent. Pourquoi l’appétit des américains augmente pour ces mets luxueux quand leur budget diminue?
Parce qu’ils se privent de luxes encore plus chers. Comme les Américains vont moins au restaurant, ils sont plus enclins à dépenser davantage pour la variété, le côté pratique, et peut-être même pour leur santé. La multitude apparente des différents goûts, textures et formes des yaourts grecs, du fromage artisanal et de la bière locale leur donne l’impression de choisir dans un nouveau menu à chaque fois qu’ils vont au supermarché, alors qu’ils passent moins de temps à choisir un véritable menu.

«Il n’y aura jamais de crise pour la nourriture. Juste des gagnants et des perdants», affirme Harry Balzer, vice-président du groupe NPD, une entreprise de recherche en marketing pour consommateurs. Sans surprise, le plus gros perdant a été le restaurant. Les restaurants sont plutôt chers: les Américains mangent au restaurant un quart de leurs repas, pour à peu près la moitié de leur budget nourriture selon NDP.

Les gagnants ne sont pas seulement les produits les moins chers, mais ceux qui procurent de nouvelles expériences –et prennent moins de temps. «Les Américains sont toujours en quête de nouvelles versions de plats qu’ils aiment déjà», explique Balzer. «Mais ce n’est pas assez en période de crise, donc on voit des gens demander ‘Est-ce que ça va rendre ma vie plus facile?’»

Ceux qui travaillent dans ce secteur sont d’accords pour dire que les consommateurs trouvent que ces produits gourmets ont quelque chose de plus. «Le succès des fromages artisanaux ne vient pas simplement des gens riches qui ne savent pas quoi faire de leur argent», affirme Paul Kindstedt, auteur du livre American Farmstead Cheese. «Les gens recherchent de la meilleur nourriture, et un lien plus sain et naturel avec la production locale».

Les yaourts grecs satisfont cette envie de produits meilleurs pour la santé et plus pratiques à manger. «Les yaourts peuvent remplacer tout ce que vous prenez au petit-déjeuner- et même au déjeuner», remarque Harry Balzer. Les multiples variétés permettent aussi d’avoir une nouvelle expérience bien ciblée: telle marque pour les enfants, telle autre pour ceux qui sont au régime, les yaourts buvables pour ceux qui mangent en conduisant. Le fromage et la bière artisanaux sont tout aussi flexibles. On peut déboucher une bouteille avec un sandwich au fromage fondu – ou bien se servir une bière d’une édition limitée vieillie en barrique avec un plateau de gruyère affiné en cave.

La bière et le fromage artisanal et les yaourts grecs se mangent aussi bien en version sophistiquée que pour un repas simple. On peut les voir un peu comme la version culinaire d’un autre produit qui survit à la crise: la petite robe noire.

Cindy Y. Hong, traduit par Alexis Boisseau

Photo: Rayon de bières artisanales, le 6 octobre 2010. Beaufort’s TheDigitel  via Flickr CC Licence By

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Quand le cannabis envahit la gastronomie

Plantation de marijuana au Swaziland, en 2005. REUTERS/Mike Hutchings

Cuisiner avec de la marijuana ne se limite pas au célèbre space cake qu’on mange souvent moins pour le goût que pour ses vertus planantes. Il existe en effet des plats raffinés proposés par certains restaurants, et même des alcools comme la bière ou le vin, qui sont préparés avec les arômes des feuilles de cannabis selon le site Gourmet.com.

Aux Etats Unis, la consommation de cannabis à des fins thérapeutiques est autorisée dans 16 Etats. Aujourd’hui le développement de ce secteur est tel qu’à Denver, par exemple, «il y a désormais plus de dispensaires à marijuana que de starbucks», comme nous l’écrivions en juillet dernier. Le succès de cette tendance pousse même certains journaux, comme le Denver Westword, l’hebdo local, à embaucher des journalistes «pour critiquer les diverses variétés de bongs, de pipes, et d’inhalateurs».

Or ces dispensaires ne vendent pas que de l’herbe à fumer, puisqu’on peut aussi y découvrir des plats aux noms évocateurs, «LaGanga» (des lasagnes), ou la «Tarte à l’œil rouge», tous conçus pour que la dose de THC prise n’ait pas ce goût fort et amer traditionnellement associé à l’herbe.

Le Gourmet.com affirme même que l’utilisation du cannabis en gastronomie est de plus en plus la règle que l’exception, même si pour l’instant les critiques culinaires de nourriture à base de cannabis ne sont pas légion. Venant à l’origine d’Asie du sud-est, la pratique qui consiste à parfumer certains plats à l’aide des puissants arômes de la plante de cannabis, s’est aussi répandue aux Etats-Unis.

Jeremiah Tower, l’un des pionniers de la nouvelle cuisine américaine, et chef Chez Panisse puis chez Stars, des restaurants renommés de la côte est, a été l’un des premiers à utiliser les parfums de la plante de cannabis. Il avait même conçu en 1969 un plat, baptisé le «Consommé d’herbe», ou le Plat Californien, qui faisait partie d’un menu «volontairement décadent» selon ses mots, qui proposait pas moins de 11 plats à la suite. Jeremiah se souvient que le Plat Californien «provoquait une autre sorte de stimulation. Pas de la défonce. La mixture mettait 45 minutes à atteindre le cerveau, et à ce moment, comme c’était prévu dans le menu, le dessert arrivait, des framboises à la crème comme vous n’en aviez jamais goûté avant».

Selon le site Gourmet.com c’est pourtant la bière qui a le plus d’affinités avec le cannabis, puisque d’un point de vue botanique ils sont cousins. Dans des boutiques en Europe, ainsi que dans certains bars, notamment en Californie, on vend de la bière au chanvre ou on infuse des feuilles de cannabis, ce qui donne à la bière un léger goût de noisette.

En Californie, la vinification, étape essentielle pour transformer le raisin en vin, se fait aussi parfois à base de feuilles de cannabis. Un chef cuisinier qui a voulu rester anonyme d’après Gourmet.com explique que certains viticulteurs s’en servent pour rendre les vins plus forts:

«Je connais un viticulteur qui choisit deux tonneaux de vin par an, met dedans une grande quantité d’herbe et laisse le mélange tremper, le vin est alors ultra-puissant.»

Mais la plupart des viticulteurs qui utilisent de l’herbe pour la vinification le font surtout avec des petites quantités pour créer de nouvelles saveurs plus subtiles explique Gourmet.com. Le propriétaire d’un vignoble sur la côte californienne, qui considère les vins fait avec de la marijuana comme des apéritifs, «comme un fernet», une référence à l’alcool italien le Fernet-Branca, produit par exemple un Riesling qu’il mélange avec quelques grammes de marijuana très sèche.

A.B

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Un McDo coûte-t-il plus cher qu’un plat fait maison?

Longtemps, un des arguments justifiant la grande consommation de nourriture de type fast-food a été celui du coût: cela serait plus économique de manger un hamburger et des frites que de concocter un repas à la maison, qu’il soit plus équilibré ou non, en termes d’argent et de temps (Le temps, c’est de l’argent, dit-on). Pourtant, Mark Bittman, journaliste culinaire au New York Times, explique que des menus classiques de McDonald’s pour une famille composée de 4 personnes coûteront 2 plus cher qu’un poulet rôti accompagné de pommes de terres ou 3 fois plus cher qu’un riz aux haricots noirs avec lardons et poivrons (rice and pinto beans) préparés à la maison.

L’article de Mark Bittman a suscité de nombreux commentaires d’internautes, dont le New York Times a repris les plus éloquents. A l’image de ce témoignage d’une mère de famille qui pointe du doigt l’oubli principal de Mark Bittman, à savoir le temps passé à faire les courses, le temps à éplucher, couper, faire sauter des légumes ou autre tâche culinaire et le temps passé à débarrasser la table et nettoyer la cuisine alors qu’«une sortie au McDonald’s permet à la famille de passer du temps ensemble, que la nourriture leur soit apportée, qu’ils profitent du repas et quittent le restaurant tous ensemble en beaucoup moins de temps». Comme le remarque Mother Jones, si l’on se rapporte aux statistiques du salaire horaire médian américain, il faudrait ajouter près de 32 dollars pour deux heures passées à cuisiner un poulet-pommes de terre.

Mark Bittman le reconnaît, les personnes ne se rendent pas au fast-food seulement parce que la nourriture y est bon marché mais parce qu’ils sont fatigués et qu’ils ont été habitués à penser, à l’ère de la restauration rapide et des surgelés, que cuisiner des repas est un travail comme un autre.

Par ailleurs, comme le souligne Phil Covington pour TriplePundit, en référence au livre Le dilemme de l’omnivore de Michael Pollan, tant le marketing des chaînes de fast-food que la disposition des menus au comptoir incitent les consommateurs à consommer plus (le prix d’un simple hamburger est indiqué en petit à la différence des menus comprenant un hamburger, une frite et une boisson) et à avoir l’impression d’avoir un bon rapport quantité-prix. Par ailleurs, comme le souligne Mark Bittman, cela n’est pas partout aisé de trouver une épicerie à proximité de son domicile avec des prix abordables (le food desert, «désert alimentaire»), ne serait-ce même pour cuisiner des plats aussi caloriques que ceux des chaînes de fast-food.

Au-delà de l’argument financier ou géographique, la question est aussi celle des habitudes culinaires familiales: «Elever nos enfants à la maison de manière à ce qu’ils ne soient pas programmés à consommer de la nourriture rapidement préparée, mangée sur le pouce, calorique, faible en apports nutritionnels: leur donner le plaisir d’apprécier de se nourrir correctement en famille.»

J.C

Photo: Un hamburger yoppy via Flickr CC License by

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Vous mangeriez de la viande synthétique?



De la viande de synthèse créée en laboratoire à partir de cellules animales pourrait bientôt être servie dans nos assiettes, d’après le New Scientist (relayé par notre grand frère Slate.com).

Des scientifiques hollandais de l’université de Maastricht ont en effet annoncé qu’à l’aide de cellules de cochons ils seraient capables de faire des saucisses synthétiques dans les six prochains mois. Pour des hamburgers cela prendra probablement un an.

Le quotidien britannique The Telegraph explique qu’avec la croissance actuelle de la population mondiale, on ne pourra bientôt plus produire assez de viande pour nourrir tout le monde. La viande de synthèse semble donc être une solution adaptée au futur problème de sous-production alimentaire.

Produire de la viande en laboratoire présente aussi l’avantage d’être plus écologique selon le Telegraph:

«Déplacer la production de viande de la ferme vers les laboratoires va aussi aider à diminuer les milliards de tonnes de gaz à effet de serre que les bétails relâchent, et permettre d’utiliser 99% de terre en moins qu’avec les élevages.»

Cependant, le Telegraph ajoute que cette viande de synthèse ne semble pas encore prête pour la commercialisation. Mark Post, professeur en charge des recherches sur la création de nourriture de synthèse à l’université de Maastricht, précise que la production du premier hamburger coûtera en effet plus de 250.000 euros.

De plus, en raison de règles d’hygiène et de procédures de contrôle très strictes, personne n’a pu pour le moment essayer cette nourriture de synthèse, on ne sait donc pas non plus si elle a du goût. La couleur est aussi un problème: la viande de synthèse n’ayant pas de sang, l’équipe de Mark Post n’a pas encore réussi à faire autre chose que de la viande blanche ou grisâtre.

Slate souligne le fait que cette nouvelle technique, si elle se diffuse, pourrait créer polémique: de plus en plus d’adeptes de la nourriture bio ou «naturelle» dénoncent la production d’aliments génétiquement modifiés, il ne serait donc pas étonnant que des produits qui n’ont absolument rien de naturel provoquent des débats encore plus enflammés.

Malgré tous ces bémols, Slate finit sur une note mi-optimiste mi-ironique:

«Mais peut-être que si le bacon sent suffisamment bon, il y aura assez de demande pour qu’un marché de la viande de synthèse se développe.»

A.B.

Photo: Blackened burger Louisiana cajun dust garnished with lettuce / pointnshoot via Flickr CC License By

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