En allant au fast-food, il semble évident qu’un enfant consomme plus de calories que pendant un repas préparé par ses parents… Cela ne vous surprend pas, c’est simplement du bon sens.
Mais Reuters rapporte qu’une étude appuie désormais ces craintes évidentes. Lisa Powell et T. Nguyen Binh, de l’Université de l’Illinois à Chicago se sont penchés sur les les conséquences du fait de manger souvent dehors – dans des fast-foods et des restaurants «classiques» – particulièrement sur les enfants. Ils dévoilent leurs résultats cette semaine dans Archives of Pediatrics and Adolescent Medicine.
Les chercheurs ont analysé les données d’une étude nationale sur la nutrition et la santé, réalisée sur plusieurs années sur 4717 enfants (âgés de 2 à 11 ans) et 4699 adolescents (âgés de 12 à 19 ans).
Ils ont examiné l’alimentation de chaque jeune sur deux jours séparés, en examinant différents facteurs: la quantité de nourriture venue du fast-food, celle venue de restaurants «classiques», s’ils ont choisi des menus à emporter ou pas, les boissons et les éléments du menu (gras, gras saturé, sucre, sodium…). Les repas consommés chez les copains ou à la cantine ont aussi été pris en compte.
Bilan, les ados ont consommé 309 calories de plus les jours où ils ont mangé au fast-food. C’est 126 calories pour les enfants qui sont passé par un restaurant rapide… Les enfants qui ont mangé dans un restaurant «classique» ont consommé 126 calories de plus, et les ados 267 de plus qu’un repas à la maison.
Ceux qui ont mangé dehors ont bu moins de lait que d’habitude et deux fois plus de soda. “Les jours où les jeunes vont au fast-food, ils ne réduisent pas les calories dans d’autres moment de leur alimentation”, explique Lisa Powell. Elle dénonce les pubs des fast-food qui bombardent les enfants, et les restos à proximité des écoles. Pour elle, «les parents doivent réaliser qu’un repas à l’extérieur n’est pas un bon substitut à un repas à la maison» et que «la consommation au fast-food et au restaurant ne devrait pas être la norme».
Tout cela n’est pas surprenant, mais Sara Bleich, prof à l’Université de Baltimore, précise à Npr que «ce qui est remarquable dans cette étude, ce n’est pas sa conclusion, c’est sa signification politique. Elle s’adresse aux décideurs». Pour elle, aborder la question de l’obésité n’est pas aussi simple que d’interdire les sodas XXL: “Nous devons changer d’environnement, travailler avec des restaurants pour qu’ils vendent des produits plus sains à des prix attractifs”. Elle rappelle que 12,5 millions de jeunes Américains de 2 à 19 ans sont obèses.
Photo: Fast Food/ SteFou! via Flickr CC License by
lire le billetMange pas ci, mange pas ça, mange ci, mange ça, les jeunes sont souvent confrontés à des normes contradictoires en matière d’alimentation. Le Fonds français Alimentation et santé organisait ce jeudi une conférence sur le thème: “L’alimentation des enfants et des adolescents: des normes aux représentations”.
Véronique Pardo, chercheur à l’Ocha (Observatoire Cniel des habitudes alimentaires) s’est notamment attardée sur l’exemple du gras, «au cœur des conflits entre normes et représentations», en s’appuyant sur la grande étude Alim’ados. Les ados et le gras, c’est un peu «Je t’aime, moi non plus». Il est intéressant de voir comment le gras est perçu selon certains critères de texture, d’aspect, qui ne correspondent pas forcément à la réalité.
D’après les enquêtes, pour les 12-19 ans, les gras, «c’est mou». Par exemple, des frites molles sont souvent considérées comme plus grasses que les frites croustillantes.
Le gras est aussi associé à un «fort dégoût», un côté gélatineux, souvent appliqué à certains produits carnés. Mais aussi à un aspect transparent, toujours suspect dans l’assiette… Un jus transparent va être analysé comme de la matière grasse fondue, alors qu’il peut s’agir d’un bouillon tout léger.
Enfin, «le coulant» est connoté gras. Par exemple, un camembert bien crémeux est classé par les ados comme un produit très gras, un camembert plus ferme et perçu comme plus léger!
Plus largement, Véronique Pardo explique que souvent, pour les ados, la définition du gras c’est «tout ce qui n’est pas jugé comme étant sain». Y compris certains produits ne contenant pas de matières grasses, comme les pâtes ou la semoule. «L’idée de saleté s’associe aussi au gras», puisque selon des verbatim d’ados, on a les mains sales après en avoir avalé…
Par contre, le gras de la cuisine des grands-parents est connoté positivement. L’étude a notamment été réalisée en Alsace… Les plats régionaux, pourtant très riches, ne sont pas perçus comme gras, car là, le gras donne du goût ! Ces plats sont aussi liés à des souvenirs d’enfance et des préparations familiales…
Au final, le gras est perçu par les ados comme bon ou mauvais en fonction du lieu, du mode de consommation, des personnes avec qui on mange… Les ados sont tiraillés entre le rejet des corps et aliments gras et leur goût pour ces aliments.
Filles et garçons n’ont pas le même discours sur ce rejet du gras (physique et dans l’alimentation) et sur les normes de minceur. Pour certains garçons, ingurgiter plus de gras peut même être «lié à l’image de virilité». Au final, il existe dans les sphères collégiennes et lycéennes une sorte de “spectre du gras, lié à un jugement moral de la personne pour les ados. Pour eux, avoir un corps ferme est comme une obligation vis-à-vis des autres. D’ailleurs, ils parlent plus d’aspect esthétique que de poids».
Lucie de la Héronnière
Photo: cordon bleu / kochtopf via Flickr CC License By
lire le billet«Evitez de grignoter entre les repas», «évitez de manger trop gras, trop salé, trop sucré»… Nous sommes exposés à de nombreux messages censés raisonner nos choix alimentaires et lutter contre l’obésité, en réalité pas toujours utiles pour nous faire changer de comportement…
Jeudi dernier, le Fonds français pour l’alimentation et la santé organisait une conférence intitulée «Efficacité des campagnes de prévention de l’obésité: mesure des attitudes et comportements alimentaires». Carolina Werle, prof à l’Ecole de management de Grenoble, présentait ses dernières recherches en marketing social, discipline qui utilise les principes de base du marketing pour la promotion d’idées sociales, comme la lutte anti-tabac par exemple, ou en l’occurrence la prévention de l’obésité. L’objectif, c’est de «changer les comportements, et pas seulement les croyances».
Les campagnes de prévention de l’obésité semblent efficaces puisqu’il est prouvé que les gens mémorisent plutôt bien les messages. Mais il ne suffit pas de connaître les recommandations en vigueur pour les appliquer dans la vie de tous les jours… Carolina Werle s’est donc intéressée aux effets des campagnes de prévention sur les changements dans les choix alimentaires, sur la conséquence concrète en terme de comportement. Ses recherches ont été publiées dans Archives Of Pediatric & adolescent Medicine, Obesity, Appetite, Food Quality & Preference.
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