La petite graine des hauts plateaux andins, désormais en rayon dans n’importe quel supermarché, a vu son succès mondial s’accroître très rapidement. Dans le magazine Terra Eco du mois de février, Hélène Binet nous raconte que même des producteurs français se lancent dans l’aventure…
La «graine sacrée des Incas» à la française…
La famille Rochefort, dans le Loiret, a expérimenté la culture bio du quinoa. Jacques, qui aime les challenges agronomiques, a acheté 10 kg de graines et les a tranquillement semées dans ses champs. Et ça a marché ! Il ne faut pas non plus se réjouir trop vite, car selon lui, «les ennuis commencent généralement la deuxième année».
Dans le Maine-et-Loire, près d’Angers, 30 agriculteurs préparent déjà leur quatrième récolte. C’est l’américain Jason Abbott qui fait en 2008 le pari d’un quinoa à la française. Après de nombreux essais, observations et analyses, la Coopérative agricole du Pays de Loire l’aide à développer l’exploitation. La première récolte est décevante… Mais grâce à des chercheurs néerlandais, des croisements et sélections sont réalisés, pour arriver à 3 variétés qui s’adaptent bien à la France.
Résultat, à l’automne dernier, 300 tonnes de quinoa on ne peut plus local on été commercialisées dans les supermarchés de la région. De quoi satisfaire les locavores amateurs de quinoa?… En tous cas, Jason explique à Terra Eco qu’il ne s’agit «en aucun cas de concurrencer le marché bolivien», puisque le potentiel de développement du quinoa est énorme et que la commercialisation va rester locale.
La graine de la discorde dans l’Altiplano
Le Pérou et la Bolivie assurent en effet 92% de la production mondiale. En 5 ans, le prix du quinoa a doublé et sa consommation dans les Andes à baissé d’un tiers. La petite graine devient même problématique: les cultures sont descendues vers les plaines, faisant reculer l’élevage. Donc les terres s’appauvrissent car elles ne sont plus fertilisées par le fumier des lamas.
Selon l’Institut de Recherche pour le développement (IRD), le boom de la production de quinoa «met en péril la durabilité du système agricole de l’Altiplano bolivien». En plus, l’extension des champs accroîtrait les conflits d’usage de terres et altèrerait le lien social au sein de communautés. Un troupeau a une fonction d’épargne et de «sécurité agro-climatique» tandis que la production de quinoa est irrégulière, la surface saturée et les prix volatiles.
Mais l’IRD précise que la culture du quinoa permet quand même à des milliers de familles de se maintenir sur leurs terres, d’augmenter leurs niveaux de vie et d’attirer de nouveaux investissements en infrastructures. La drôle de petite graine, héritière de modes de production millénaires, est devenu en quelques années une grande actrice de la mondialisation.
Photo: Quinoa flowering/ netefekt via Flickr CC License by
Et si j’ai bien saisi au fil de mes lectures sur ce sujet, les producteurs péruviens et boliviens ne peuvent même plus se permettre de manger leur graines ancestrales devenues trop chères pour eux, un comble !