De la culotte aperçues sous la jupe plissée d’une innocente collégienne jusqu’à l’orgie la plus perverse impliquant, à tout hasard, une pieuvre (dans la grande tradition d’Hokusai), la bande-dessinée et les films d’animation japonais regorgent de représentation sexuelles. Parce qu’elles sont très variées, ces évocations rendent parfois assez difficile de distinguer une oeuvre “friponne”, d’un manga “osé” voire complètement pornographique (que l’on désigne sous le terme d’hentai, “perversion” en japonais). Et puis, comme l’explique Agnès Giard, auteur de L’imaginaire érotique au Japon, “dans tous les cas, c’est kawai, c’est-à-dire mignon. Les Japonais rendent tout mignon, même le hardcore”. Bref, dur de faire le tri…
C’est pourtant ce que la municipalité de Tokyo s’apprête à faire dès l’an prochain. Les élus de la capitale nippone ont adopté, le 15 décembre dernier, une réglementation limitant aux plus de 18 ans les mangas et animations où sont représentées des scènes de sexe jugées trop violentes. Le texte prévoit un meilleur contrôle de la vente et la location de mangas et d’animes où figurent notamment des incestes, des viols, des actes sexuels avec des enfants ou autres scènes jugées exagérément obscènes. Et, donc, la ville de Tokyo s’est arrogée la tâche de désigner quelles oeuvres seront interdites à la vente au jeune public.
Malgré les promesses de “tenir compte de la valeur artistique”, la décision a évidemment déclenché la fureur des éditeurs. En début de mois, dix des principales maisons d’édition nippones qui s’opposent à ces restrictions ont publié un communiqué commun menaçant de ne pas participer au salon annuel Tokyo Anime Fair, la vitrine de l’animation japonaise. Les dessinateurs se joignent également à la fronde, estimant qu’il en va de leur liberté d’expression.
Changement de mentalité
Le lecteur européen ne s’en rend peut-être pas compte, mais c’est un véritable coup de tonnerre au Japon. Si elles choquent au-delà des frontières de l’archipel, les scènes pédo-pornographiques (par exemple les Lolicon) sont non seulement acceptées mais protégées par la loi au Japon. La loi japonaise écarte ainsi les mangas et l’illustration en règle générale du champ des images pédophiles dont la diffusion est prohibée.
Dans son ouvrage, Agnès Giard explique que l’érotisme pré-pubère ou tout juste adolescent est une composante majeure de la culture japonaise. Elle cite ainsi Takashi Tanaka, un scénariste de jeux vidéos érotiques : “Les jeunes adultes veulent du sexe avec du romantisme, des histoires d’amour à l’école et des héroïnes mignonnes, à l’aspect enfantin, parce que cela les rassure de voir une jeune fille fragile, inachevée. Les Japonais ont d’ailleurs toujours aimé les jeunes filles inachevées”. Et note que le goût pour les femmes “en devenir” est très ancien au Japon. “En Japonais, le verbe « devenir » occupe la place royale dévolue au verbe « être » dans notre langue” remarque Alain Rocher dans son introduction à l’autobiographie de Dame Nijo (Splendeur et misères d’une favorite), que cite Agnès Giard. Le livre en question est consacré à Nijo, favorite de l’Empereur au XIIIème siècle alors qu’elle n’avait que 13 ans. Il l’appelait Agako, “mon enfant”, en témoignage de son affection, et cela ne choquait personne: à l’époque, on pouvait épouser une fille à 14 ans selon le mode de calcul japonais (12-13 ans selon notre mode de calcul occidental).
Dans ce panorama, Agnès Giard fait de l’écolière à jupe plissée la suite logique de cette tradition pour l’érotisme pré-pubère. Elle explique d’ailleurs qu’elle est née en avril 1984 avec une série de dessins animés grand public – Crime Lemon – dont le premier épisode – Be my baby – provoque un véritable scandale. Il faut dire que l’épisode raconte l’histoire d’un jeune et beau garçon qui tombe amoureux de sa sœur, une petite fille de 11 ans… “Les scènes d’inceste, très érotiques, suscitent à l’époque de vives protestations de la part des associations de parents, explique Agnès Giard dans son livre. Mais son succès propulse l’image de l’écolière en tête des fantasmes au Japon. Vêtue d’une jupe plissée bleue marine, d’un chemisier à col marin et de soquettes blanches montants jusqu’aux genoux, elle apparaît désormais dans une énorme majorité de productions érotiques qui mettent en scène son initiation à toute la gamme des pratiques sexuelles”.
Le fait que la première collectivité locale du pays prenne ainsi position pour freiner la diffusion de ces oeuvres est significatif d’un changement des mentalités. Comme souvent, c’est un faits-divers sordide qui a servi de déclencheur. Début 2005, Kaoru Kobayashi,coupable d’avoir kidnappé, violé et tué une fillette de 7 ans, justifie ses actes lors de son procès par l’influence d’un dessin animé pornographique qu’il a vu étant lycéen. La ministre Seiko Noda, membre du PLD, le parti de droite au pouvoir déclare alors: “Je crois que l’animation pornographique, bien qu’il s’agisse de fiction, est un problème que nous ne pouvons plus ignorer”. Dès lors, la guerre aux dessins est déclarée.
Laureline Karaboudjan
Illustration : Extrait d’un manga hentai, DR.
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Petite sélection pour ceux qui ne savent pas quoi acheter.
Je sais pas si vous avez remarqué, mais il paraît que c’est Noël. Il y a des lampions partout, la neige fait la une des JT et des foules hystériques envahissent les grands magasins à la recherche du cadeau idéal, tel les zombies de Walking Dead à la recherche de chair fraîche. D’ailleurs, vous en faîtes probablement partie, tout comme moi. Sauf que cette année, je ne m’attaque qu’aux librairies de bande-dessinée. Et je compte bien trouver des albums pour toute ma famille. Bref, vous l’avez compris, vous n’échapperez pas à la traditionnelle liste de conseils pour Noël. Le tout à travers quelques archétypes que vous reconnaîtrez peut-être dans votre entourage. Précision: je ne conseille que des BD sorties cette année.
Pour votre grand-père
S’il est plutôt Pervers Pépère
Malgré son âge avancé, il est resté très jeune dans sa tête. Peut-être un peu trop. En tous cas, il aime la BD, surtout quand il y a de belles pépées. Heureusement que la BD érotique est de nouveau en plein boum.
Le classique: Le Déclic (en couleur), Milo Manara, Drugstore
La BD qu’on était bien content de piquer dans les étagères du père d’une copine. Ultra-classique et connue, la colorisation redonne un coup de jeune. A avoir si vous ne la possédez pas encore.
L’inattendu: Les Recueils Fripons, Collectif, Les Humanoïdes Associées
Au début des années 90, des grands noms de la bande dessinée comme Gibrat ou Baru se sont essayés à la nouvelle érotique pour les HA. Réédition en trois tomes de ces petites histoires.
Mon coup de coeur: Coney Island Baby, Nine Antico, L’Association
Retour en BD sur l’histoire de Playboy et de Deepthroat, deux phénomènes cultes de la pornographie (attention: ça ne parle que de cul mais ce n’est pas très érotique).
S’il est plutôt Père Castor
Les “bandéssinées”, il aime bien, mais disons qu’il en est resté à Tintin (si ses parents étaient gaullistes), Placid et Muzo (si ses parents étaient communistes) ou Astérix (tous les autres). Mais même certaines nouveautés sont délicieusement classiques dans leur style. D’ailleurs, j’ai pas fait exprès, mais mes trois conseils sont des BD historiques que j’ai beaucoup aimé. Tant mieux, ça lui rappellera sa jeunesse…
Le classique: Il était une fois en France, Aux armes citoyens, Nurry et Vallée, Glénat
On traverse toute la Seconde Guerre Mondiale à travers le destin d’un homme tour à tour collabo et résistant, tout en étant juif. Une fresque impressionnante de maîtrise historique et scénaristique.
L’inattendu: Matteo Deuxième époque, Gibrat, Futuropolis
La suite des aventures de Matteo, l’anarchiste romantique du début du XXème siècle qui part s’engager dans les tourments de la révolution russe. Le dessin élégant de Gibrat sert une histoire romanesque, voire un peu naïve, mais portée par un véritable souffle.
Mon coup de coeur: Commando Colonial, Le fort de Thélème, Brüno et Appollo, Dargaud
Quand un mauricien et un réunionnais s’engagent comme agents secrets dans la France libre, ça donne une des meilleures séries de BD en cours, servie par un dessin simple et agréable. Le troisième tome nous la rejoue Lawrence d’Arabie et Eden perdu au fond du désert. Tout simplement génial.
Pour votre grand-mère
Si elle est plutôt Soeur Marie-Thérèse
Vous avez une mamie rock’n roll et vous avez bien de la chance. Mais attention parce qu’elle est du genre exigeante niveau BD: faut que ça déménage, qu’il y ait du sang et de l’humour. Du polar au gore, elle adore lire tout ça en écoutant AC/DC à fond.
Le classique: Rockabilly Zombie Superstar T2, Lou et Nikopek, Ankama
Des zombies, des bananes et des rouflaquettes, du rock et des rednecks: la série mélange, à la manière de Tarantino au cinéma, toutes sortes de références pulp pour créer un univers décoiffant.
L’inattendu: La mort de Staline, Nury et Robin, Dargaud
Derrière cette BD historique se cache en fait un excellent polar dont les protagonistes ne sont autres au Béria, Khrouchtchev ou Molotov. D’autant plus glaçant que tout est véridique.
Mon coup de coeur: La position du Tireur Couché, Tardi, Futuropolis
Tardi qui reprend Manchette. On l’avait déjà vu avec Le Petit Bleu de la Côte, mais ça ne cesse d’être un enchantement. Comme quoi, les têtes de rayons de la Fnac sont parfois justifiées…
Si elle est plutôt Laureline Karaboudjan
C’est bien simple, votre grand-mère est une esthète de la bande-dessinée, qu’elle lit comme elle dévore Proust. Car pour elle, le neuvième art est comparable à la littérature, et si le fond est essentiel, elle est très attentive à la forme. Évidemment, elle a probablement déjà tout lu, mais au pire, elle ira échanger votre cadeau contre un ouvrage de théorie narrative de la BD.
Le classique: Asterios Polyp, David Mazzucchelli, Casterman
De l’avis général, elle devrait remporter le Grand Prix d’Angoulème le mois prochain. Devancez la mode et offrez cet exercice de style narratif audacieux et réussi autour de la figure d’un professeur d’architecture. La bande-dessinée aborde des thématiques philosophiques classiques mais avec une maîtrise formelle impressionnante.
L’inattendu: Château de Sable, Peeters et Levy, Atrabile
Bon, ce n’est pas si inattendu que ça, on commence à le connaître Peeters. A chaque fois c’est excellent, même quand il tente l’exercice difficile du huis-clos. C’est philo, glauque et sexy comme j’aime.
Mon coup de coeur: Les Derniers Jours d’un Immortel, Wehlmann et de Bonneval, Futuropolis
De l’excellente science-fiction, philosophico-poétique sans être chiante, un brin tordue pour être gênante. La meilleure BD de l’année, peut-être.
Pour votre mère
Si elle est plutôt Yoko Tsuno
Vieille routière de la BD, elle a été biberonée aux grandes séries d’aventures franco-belge: Blake et Mortimer, Jérôme K Jérôme Bloche voire Michel Vaillant n’ont aucun secret pour elle. Le défi, c’est de parvenir encore à l’étonner.
Le classique: Blacksad, l’enfer, le silence, Canales et Guarnido, Dargaud
De mon avis personnel et de lecteurs proches de moi, le moins bon de tout les Blacksad, mais peut-être qu’on en attendait un petit peu trop. Ca reste une bonne BD et c’est à avoir si la personne a déjà les premiers.
L’inattendu: L’OuvreTemps, Mézières et Christin, Dargaud
La fin de Valérian et Laureline, j’étais obligée de le mentionner. C’est pas au niveau des meilleurs albums de la série, mais c’est tout de même une BD agréable à lire.
Mon coup de coeur: Panique en Atlantique, Trondheim et Parme, Dupuis
Dur de passer après les deux derniers Spirou par et les deux auteurs ont été pas mal critiqués pour l’apparente facilité du scénario et des dessins. Pourtant, si l’on s’y attarde un minimum, c’est un excellent hommage à Spirou et Fantasio, très rondement mené.
Si elle est plutôt Pénélope Jolicoeur
La BD a priori, c’est pas trop son truc, mais elle aime beaucoup les dessins dans ELLE. En fait, de Pénélope Bagieu à Aurélia Aurita, elle adore la BD girly, celle qu’on peut lire en attendant que sèche le vernis à ongles avant une séance de shopping. Ca vous exaspère, mais si ça peut lui faire plaisir…
Le classique: Cadavre exquis, Bagieu, Gallimard
On dit qu’un auteur est grand s’il est capable de terminer admirablement ses livres, puisque les commencer est assez facile. A ce niveau là, Pénélope Bagieu est encore loin d’être grande, puisque son Cadavre exquis termine un peu en eau de boudin. Pour le reste de la BD, c’est bien, voire parfois pas mal du tout et il est incontestable qu’au fil de ses albums, Pénélope Bagieu s’améliore. Bientôt tout le monde aura oublié que c’était une blogueuse.
L’inattendu: La Comtesse, Picault, Les Requins Marteaux
Un petit bijou érotique sans paroles. Les amours d’une comtesse, entre devoirs conjugaux et amants fougueux.
Mon coup de coeur: La Parenthèse, Durand, Delcourt
Je vous ai déjà parlé plusieurs fois de cette BD cette année, sans conteste l’une des meilleurs. «Ce récit est une bataille contre l’adversité», raconte l’auteure qui est tombée à 20 ans gravement malade et raconte ce périple dont on a peur de ne pas revenir. Fort, émouvant sans être larmoyant.
Pour votre père
S’il est plutôt Largo Winch
Parce qu’il est cadre dans le privé, expert comptable ou je ne sais quoi, votre père fait toujours un peu trop sérieux et ne lit des BD que très épisodiquement. Et encore, c’est pour lire des trucs qui lui rappellent un peu le boulot inconsciemment: Largo Winch ou IR$ plus pour la finance que pour l’action ou alors du reportage en bande-dessinée moins pour voyager que se tenir au courant de l’état du monde.
Le classique: Gaza 1956, Joe Sacco, Futuropolis
Joe Sacco s’est fait une spécialité du journalisme en bande-dessinée dans les zones de conflits. Dans son dernier ouvrage, il raconte le massacre de 275 personnes en 1956 dans la bande de Gaza à travers de nombreux témoignages et une narration et un dessin toujours appropriés. Classique, mais excellent.
L’inattendu: La Droite ! Petites trahisons entre amis, Ploquin, Boisserie et Gros, 12Bis
Un journaliste d’investigation qui s’associe à un scénariste et un dessinateur pour retracer 60 ans d’histoire de la droite. Le tout à travers un personnage central forcément passionnant: Charles Pasqua, entre affaires et politique, faiseur de carrières, détricoteur de destins. Si papa vote UMP, il va adorer. S’il vote à gauche aussi.
Mon coup de coeur: Quai d’Orsay, Blain et Lanzac, Dargaud
Vous allez lui retourner la tête à votre père. Vous la jouez cool, “tiens papounet une BD sur de Villepin“, il pense lire sur une BD politique satirique classique et là il tombe sur l’immense talent des deux auteurs qui créent un nouveau genre, une fiction politique moderne plus vraie que nature. Les séries françaises n’arrivent pas à égaler leurs homologues américaines dans leur capacité à traiter l’histoire du temps présente. La BD francophone, oui.
S’il est plutôt Hyacinthe de Cavallère
Très porté BD, il a lu beaucoup de choses et il faut parvenir à lui fournir des albums de qualité. Mais attention, il ne faut pas que ça soit ennuyeux: s’il aime autant la bande-dessinée, c’est pour ses fondamentaux: de l’aventure, de l’action, de l’évasion… Son idéal pourrait être la série Donjon de Sfar et Trondheim. Du coup il faut lui trouver à la fois des albums qui racontent une histoire mais qui sont aussi bien écrits et bien dessinés avec plusieurs niveaux de lecture.
Le classique: La Voie du Rige, Le Tendre, Loisel et Maillé, Dargaud
En terme de combat épique, celui qui vous pousse à la fin de lecture à vous lever, à aller à la fenêtre et à regarder, pensif, les étoiles à travers la vitre, on fait difficilement mieux que la Quête de l’Oiseau du Temps dont la Voie du Rige est le dernier album sorti.
L’inattendu: Toxic, Burns, Cornélius
Charles Burns s’attaque à une trilogie très étrange où un héros partageant la houppette de Tintin se promène dans un monde où il croise, par exemple, des champignons géants rouges et blanc. Cette promenade onirique, remplie de références à Hergé mais aussi à Burroughs, ravira les fans de BD comme elle déroutera les autres.
Mon coup de coeur: Pour l’empire, Les Femmes, Merwan et Vivès, Dargaud
Le deuxième tome de la série écrite et dessinée à quatre mains par Merwan et Bastien Vivès confronte les soldats de l’Empire à un drôle d’adversaire: des amazones. Des combats bien-sûr, mais aussi de grandes questions comme les rapports entre sexes, la sexualité et l’amour, la violence et la mort. Du grand art, en attendant l’ultime tome de la série.
Pour votre petit frère
S’il est plutôt Lanfeust
S’il lit de la bande-dessinée, c’est avant tout pour l’aventure. Mondes médiévaux-fantastiques ou univers de science-fiction, peu importe tant qu’il y a de la baston, des héros charismatiques et de belles princesses à sauver. Bref, il faut lui en mettre plein la vue parce que sinon, votre cadeau a toutes les chances de prendre la poussière entre son livre de biologie et son cahier de maths.
Le classique: Cixi de Troy, l’ombre ténébreuse, Arleston et Vatine, Soleil
Après avoir terminé les aventures de Lanfeust, l’avoir envoyé dans les étoiles ou continuer de s’amuser avec les trolls du monde de Troy, Arleston consacre une série à la sulfureuse Cixi. Le deuxième tome vient justement de sortir et si votre petit frère est fan de l’univers, il n’y a pas de raisons que ça lui déplaise.
L’inattendu: Trois Christs, Mangin et Bajram, Soleil
Au premier abord, c’est un album de plus qui explore la thématique bien connue du complot mystico-religieux. Mais en fait, à travers trois histoires différentes autour du Suaire du Christ racontées avec sensiblement les mêmes cases et les mêmes dialogues réorganises, les auteurs montrent que la vérité est relative, dans une démarche proche de l’OuBaPo. Une manière de rendre votre petit-frère adulte.
Mon coup de coeur: La Zone, Stalner, Glénat
Angleterre, 2067. Le pays est en ruines. 48 ans auparavant, 95% de la population a péri dans diverses catastrophes et depuis, plus rien n’est comme avant. Thématique post-apocalyptique classique, mais l’esthétique et la bonne construction de l’ouvrage le font sortir du lot.
S’il est plutôt Spiderman
Rien à y faire, la BD franco-belge ne mérite même pas un regard de sa part. Votre petit frère ne jure que par les comics, seules vraies bande-dessinées à ses yeux. Ce n’est pas très grave, il aura tout le temps d’apprécier le génie de Larcenet ou de Franquin en grandissant. Et puis, ce ne sont heureusement pas les bons comics qui manquent.
Le classique: Walking Dead 12, Adlard et Moore, Delcourt
Un mec se réveille après avoit été dans le coma. Il y a des zombies, il court, il les tue. L’horreur n’aura jamais de fin, blabla, vous connaissez le topo. Ultra-efficace.
L’inattendu: Martha Washington, Miller et Gibbons, Delcourt
Martha Washington est une vieille série, qui date des années 90, mais Delcourt l’édite cette année en France. Bonne suprise de se plonger dans ces Etats-Unis apocalyptiques que je ne connaissais pas. Le déclin de l’empire américain en avant-première.
Mon coup de coeur: Incognito, Brubaker et Phillips, Delcourt
Dur de vivre comme un pusillanime petit greffier quand on a été un super-méchant. Mais une étape peut-être nécessaire pour repasser du bon côté. Sombre et mordant, le meilleur comics que j’ai lu cette année.
Pour votre petite soeur
Si elle est plutôt Sailormoon
Rien à y faire, la BD franco-belge ne mérite même pas un regard de sa part. Votre petite soeur ne jure que par les mangas, seules vraies bande-dessinées à ses yeux. Ce n’est pas très grave, elle aura tout le temps d’apprécier le talent d’Hergé ou de Baru en grandissant. Et puis, ce ne sont heureusement pas les bons mangas qui manquent..
Le classique: Ashita no joe – Tomorrow’s Joe, Chiba et Takamori, Glénat
L’histoire d’une petite frappe boxeur, l’un des grands classiques du manga japonais, ici réédité.
L’inattendu: Dossier A, Osamu et Garaku, Delcourt
Dans la grande tradition des mangas policiers qui poussent le lecteur à résoudre pratiquement l’énigme en même temps que le détective, Dossier A se fait une bonne place. De l’ésotérisme et l’énigme de l’Atlantide comme terrain de jeu.
Mon coup de coeur: Le Voyage de Kuro, Kiyuduki, Kana
Le cheminement d’une voyageuse étrange, entre dessins ultra-mignons et scènes parfois tragiques. Bien plus qu’un simple “manga pour filles”.
Si elle est plutôt Aya de Yopougon
Toute en rondeurs et en couleurs, c’est ainsi que votre petite soeur aime la BD. Et puis, pourquoi toujours des drames et de la violence? La bande-dessinée a ce charme de pouvoir rendre extraordinaires ou drôles des scènes quotidiennes, depuis la banlieue de Cédric jusqu’à l’Abidjan d’Aya.
Le classique: Aya de Yopougon 6, Arbouet et Oubrerie, Gallimard
Alors que la Côte d’Ivoire se déchire, qu’il est bon de se réfugier dans l’univers d’Aya, qui retranscrit à merveille l’ambiance de l’Abidjan des 1980’s sans tomber dans les clichés ou la carte postale. Le dernier tome vient de sortir, il devrait être promis au même succès que ses prédécesseurs.
L’inattendu: La Carotte aux Etoiles, Lejonc, Murat et Riff Reb’s, La Gouttière
C’est l’histoire d’un lapin savant qui invente une fusée qu’il baptise logiquement «Carotte aux étoiles». Mais -les lecteurs de l’Affaire Tournesol le savent bien- comme toute invention révolutionnaire, elle attire diverses convoitises. «On se demande s’il est bon qu’un rêve se transforme en argent» se demande le héros de cette très belle BD, vrai conte philosophique coloré.
Mon coup de coeur: Alerte aux Zorkons, Vehlmann et Chivard, Dupuis
J’avais un peu laché la série principale de Spirou et Fantasio, les derniers épisodes étant de mon point de vue assez faibles. Et puis j’ai été agréablement surprise par ce dernier épisode, qui donne un nouveau coup de fouet à la série. Le titre de l’album était au départ, Il y a des monstres à Champignac, et cela veut tout dire sur ce qui vous attend…
Pour votre chien
Le Chat acte XVI, Gelluck, Casterman
Chaque année , peu avant les fêtes, c’est la même chose, un album du Chat squatte les présentoirs de la Fnac. Et à chaque Noël, on en retrouve un au pied du sapin. Offrez le à votre chien, tout le monde pourra lui piquer.
Laureline Karaboudjan
Illustration : Joyeux Noël Oncle Picsou, DR.
lire le billetLa crise économique est partout, même dans la BD. Comme n’importe quel autre medium d’importance, il était prévisible que le neuvième art s’empare de ce fait d’actualité qui nous touche depuis deux ans maintenant. Comment la BD parle-t-elle de la crise économique? C’est bien simple, elle est mangée à toutes les sauces, de l’action à l’humour en passant par le dramatique.
Ca peut paraître improbable, mais on parle de la crise actuelle dans le dernier album du Petit Spirou. Sorti il y a une poignée de semaines, Tiens toi droit, le tome 15 des aventures du groom en culottes courtes, paru chez Dupuis, s’ouvre l’habituelle histoire un peu longue qui introduit un nouveau personnage. Il fallait bien un peu de place pour la venue de Malogrodo, l’assistant de l’abbé Langelusse. Avec sa bosse, ses yeux en biais et sa tête de simplet, il a tout du personnage qui l’a inspiré: le Quasimodo de Victor Hugo. Mais avant de devenir un sacristain bossu, Malogrodo a connu une autre vie puisqu’il était… trader. L’histoire est un peu bossue tordue, mais, en résumé, il n’avait pas d’amis et ses yeux partaient de travers, donc son maître se moquait de lui. Du coup, comme il venait d’une famille pauvre, il décida de “d’vnir trader. Spéculer en bourse avec l’argent des vieux qui épargnent. Acheter et vendre en empruntant et me barrer sans rembourser“. Il réussit, devient célèbre, sauf qu’à force de délocaliser et de chercher toujours le profit immédiat, les épargnants se retrouvent au chômage, perdent confiance dans les banques et retirent tous leurs sous: c’est un bankrun, ce que proposait Cantona. Faillite, crise, Malogrodo tente d’échapper à ses créanciers, il saute par la fenêtre, chute et se retrouve avec une énorme bosse et des neurones en moins et de la gentillesse en plus. L’abbé Langelusse le recueille alors. Et comme dit le petit Spirou: “Et vous les copains, si vous croisez une âme perdue, soyez sympas…c’est peut-être un pauvre milliardaire malchanceux!”
Rire de la crise, c’est aussi ce qu’a fait Fuide Glacial en sortant il y a tout juste un an une “Série Or” (une compilation des meilleures planches des albums édités chez Fluide) consacrée à la crise financière. “Votre rire vaut de l’or” titrait la couverture de ce numéro 49 qui figure un trader aux dents longues en train de gérer des “fonds de pensions Jean-Yves Ferri”, des “placements Edika” et de consulter le “listing Clearstream Soeur Marie-Thérèse”. Dans ce hors-série plutôt drôle, outre les planches classiques, on trouve quelques dessins et autres strips directement inspirés par la crise financière actuelle. Ainsi Lindingre, qui n’y va jamais avec le dos de la cuillère, nous apprend que “contrairement aux idées reçues, le bouclier fiscal ne fait pas le bonheur”. Dans le dessin qu’il légende ainsi, on voit une famille manifestement fortunée au pied d’un sapin de Noël. Le père, cigare aux lèvres et impassible, est entouré de ses enfants qui lui demandent : “Hé Daron! Quand est-ce que tu te fais lourder de ton job?”, “Putain, fais péter le parachute doré. Merde!!!” et “Y’en a marre de tes cadeaux de daube à même pas 20 briques”. Ce n’est pas fin, mais moi ça me fait rire.
Largo Winch est évidemment touché par la crise
La crise économique actuelle est aussi directement évoquée dans le dernier Largo Winch, Mer Noire, également chez Dupuis, qui est sorti le mois dernier. Alors que le héros de Jean Van Hamme fête ses vingt ans d’existence avec cet album, tout se passe mal ; comme d’habitude.
Le groupe W, que dirige Largo Winch, est en effet pris lui aussi dans la tourmente financière consécutive à la crise des subprimes. La page d’ouverture de Mer Noire rapporte une longue lettre qu’écrit Largo à ses 480.063 salariés dans le monde entier (presque la rédaction de Slate.fr, quoi). Le patron, 7ème fortune mondiale, explique assez précisément l’origine de la crise actuelle qui fait couler “26.000 milliards de dollars en bourse”. Puis, plus loin dans l’album, il explique sa stratégie pour faire face à la crise. Et c’est là qu’on se rappelle que Largo Winch est une BD.
Plutôt que de licencier à tour de bras comme le ferait n’importe quel chef d’entreprise du monde réel, Largo décide de réduire de moitié les revenus de ses présidents de filiale pour préserver l’emploi et le salaire des autres. Comme si François-Henri Pinault, qui dirige le groupe PPR, décidait de sucrer la moitié des appointements d’Alexandre Bompard, le nouveau PDG de la Fnac. Au-delà de la gestion de la crise, cela reste un Largo très classique, des explosions, du complot, des comptes en Suisse et des jolies pépés.
La Grande Dépression en BD
ll n’est pas étonnant que les cases et les bulles aient été utilisés pour tenter d’expliquer les ressorts de la crise financière. Dès le déclenchement de la crise des subprimes, un dessinateur amateur s’est amusé à en décortiquer tout le mécanisme à travers une bande-dessinée. Le dessin est très, très sommaire mais le fond est vraiment exprimé clairement. Les petits camarades de Rue89 l’ont même traduite en français pour les anglophobes. Bref, c’est pas très beau, mais c’est bien plus digeste que le bouquin d’un analyste financier.
Et puis, si la crise économique actuelle inspire les auteurs de BD, ce n’est pas la seule. La banqueroute de 1929 a évidemment connu un certain nombre d’échos, directs ou indirects. Signalons par exemple l’excellente série Berlin, de Jason Lutes, où l’auteur décrit dans une élégante ligne claire la capitale allemande pendant l’entre-deux guerres. La misère qui frappe le peuple allemand et la montée du nazisme concomitante sont très bien racontées, dans une saga passionnante. La BD s’est aussi intéressée aux Etats-Unis pendant la Grande Dépression. Si l’ont peut penser à la bonne adaptation des Souris et des Hommes de Steinbeck chez Delcourt, citons également Toute la poussière du chemin, paru cette année chez Dargaud. Wanter Antumes et Jaime Martin racontent l’histoire de Tom, un américain qui a tout perdu suite à la crise de 1929.
Il erre sur les routes du sud des Etats-Unis où il ne voit que violence et ségrégation. Dans ce contexte très difficile, c’est son humanisme qui va l’empêcher de perdre pied. Les bourses peuvent s’effondrer, il restera toujours le cœur des hommes.
Laureline Karaboudjan
lire le billetLe livre “La propagande dans la BD“, récemment sorti chez Eyrolles, explore les très nombreux liens qu’entretiennent bande-dessinée et la propagande. L’auteur, Fredrik Strömberg y donne un sens très large au mot “propagande”, en ce sens qu’il y inclut toute bande-dessinée dont la vocation est de répandre une opinion. Parfois, on parlerait plutôt de “BD à message” pour qualifier les ouvrages qu’il mentionne. Mais après tout, comme il l’écrit en avant-propos de son livre, “la propagande n’est pas l’apanage des seuls racistes, totalitaristes ou fondamentalistes religieux“. Entre les classiques comics parus pendant la Seconde Guerre Mondiale (et leurs pendants nazis) et ceux de la Guerre Froide (et leurs pendants pro-communistes) l’auteur n’hésite pas à faire cohabiter des bandes-dessinées anti-drogues ou féministes.
Le bouquin fourmille de références et est abondamment illustré. Certaines sont connues, et j’ai même déjà eu l’occasion d’en évoquer dans mes chroniques (V pour Vendetta ou Breaking Free comme oeuvres de propagande anarchiste par exemple). D’autres le sont beaucoup moins, et certaines sont vraiment étonnantes. J’ai décidé de vous en faire partager cinq qui m’ont vraiment marquée.
Shaloman contre les arabes terroristes
Vous avez sûrement déjà vu des images de Superman ou de Captain America en train de casser la trombine d’Hitler (pour le deuxième super-héros, il s’agit même de la couverture de son tout premier comic). Mais, dans une veine similaire, connaissez vous Shaloman, le super-héros israëlien qui n’aime pas les méchants arabes terroristes? On croirait une parodie, mais c’est en fait très sérieux. Celui qu’on connaît comme “le Défenseur des Opprimés” ou “le Croisé Casher” (si, si) est aussi appelé “l’Homme de Pierre”. Et pour cause, quand il n’est pas un décalque de Superman en tenue moulante, Shaloman est un simple rocher en forme de Shin, la 21ème lettre de l’alphabet hébreu qui a une forte valeur religieuse puisque c’est la première du nom divin Shaddaï. Il se transforme si quelqu’un dans le besoin crie “Oy vey“, une expression yiddish typique qu’on pourrait traduire par “Oh ennui”.
Et pouf, ça fait des Chocapic…
Dans les faits, quand il ne vit pas des aventures fantastiques comme dans “La kippa du destin, Shaloman aime à se battre avec des terroristes arabes. Dans un des épisodes, il est tout simplement engagé par le premier ministre israélien pour mettre fin aux agissements de “la main dAllah”, un super-terroriste palestinien. A la fin, Shaloman finit par le coincer et en le démasquant façon Scoubidoo, découvre que derrière “la main d’Allah” se cache un activiste qui prétendait militer pour la paix. Moralité : on ne peut vraiment pas faire confiance aux Palestiniens. On pourrait croire que ce super-héros est une création maladroite des services de communication du gouvernement israélien. Pas du tout. C’est un dessinateur américain, Al Wiesner (ne pas confondre avec Will Eisner) qui est à l’origine de Shaloman en 1985. L’auteur trouvait qu’il n’y avait pas assez de super-héros authentiquement juifs. Du coup, Shaloman compte pour 100.
Le crime ne paie pas
Parce que son public traditionnel est avant tout celui des jeunes garçons, la bande-dessinée est un médium très utile pour délivrer des messages de propagande. Fais pas çi, fais pas ça, le crime ne paie pas. Le crime ne paie pas, c’est justement le nom d’une série de comics créée en 1942 aux Etats-Unis, inspirée par des docu-fictions éponymes de la MGM tournés dans les années 30 avec la bénédiction de J. E. Hoover, le célèbre patron du FBI. Les bandes-dessinées racontaient des faits-divers réels avec, comme le nom de la série l’indique, toujours le même message final : les gangsters se font arrêter, ils finissent en prison ou pendus. Bref : le crime ne paie pas.
Le crime ne paie pas. En tous cas, il fait mal à la main.
Le succès de la série est retentissant : elle sera tirée à un million d’exemplaires et engendrera des dizaines d’émules d’autres maisons d’édition, comme… Le crime ne peut pas gagner. Comment expliquer l’essor de ces BD morales dans les années 1940, où l’on répète inlassablement le même message de propagande policière en tête de chaque page? Tout simplement parce que la destinée propagandiste des opuscules n’est probablement qu’une façade pour s’attirer les bonnes grâces des autorités. Et pouvoir ainsi raconter plein d’histoires réelles de crimes aux plus jeunes. Même (surtout?) si, j’en suis sûre, beaucoup s’identifiaient plutôt aux aventureux criminels qu’aux braves forces de l’ordre.
Le pape, c’est l’antéchrist
D’après Fredrik Strömberg, parmi les auteurs de propagande en BD les plus actifs, on trouve l’Américain Jack Chick. Fondamentaliste protestant (il est baptiste indépendant), ce dessinateur et éditeur s’est fait le spécialiste de petits formats à l’italienne, les Chick tracts, consacrés chacun à une thématique précise : l’argent, l’islam, Satan, l’avortement, la théorie de l’évolution… Dedans, on y trouve des cases qui délivrent un message intégriste et péremptoire. Le pire c’est que ça marche : vendues à des temples ou des associations religieuses qui les distribuent ensuite gratuitement, il s’en serait écoulé quelque 500 millions d’exemplaires.
Pour l’ultra-protestant Jack Chick, le pape mange à tous les rateliers.
Mais Jack Chick a aussi produit des comics au format plus traditionnel… et au message pour le moins non-conventionnel. Une série de 6 albums intitulée Alberto, sortie entre 1979 et 1988, reprend le pseudo-témoignage d’un ancien prêtre jésuite du nom d’Alberto Rivera. Celui-ci entreprend de révéler la prétendue nature du catholicisme, qu’il accuse de conspirer dans l’ombre depuis toujours. Le catholicisme aurait ainsi créé l’islam et le communisme, assassiné Lincoln et Kennedy, déclenché les deux Guerres Mondiales… Conclusion de la BD : le pape, c’est l’antéchrist. Ce qui est drôle, c’est que la BD affirme haut et fort être “basée sur une histoire vraie” et reproduit la carte d’identité d’Alberto Rivera… tout en précisant “Toute ressemblance avec des personnages, noms ou institutions existant ou ayant existé n’est que pure coïncidence“. Pour Fredrik Strömberg, “Alberto est un exemple fascinant de théorie de la conspiration mise en image par des spécialistes de la propagande religieuse“.
Les enfants, c’est l’heure de chasser
On l’a vu, l’auteur ne s’intéresse pas qu’à la propagande politique ou religieuse. Il évoque ainsi les publi-BD publiées abondamment dans les années 1950 et 1960 aux Etats-Unis, des albums créés par des marques pour faire la promotion de leurs produits. Certains exemples semblent aujourd’hui particulièrement étranges, comme les publications de la marque de fusil Remington destinées à la jeunesse. Le genre d’albums qui raconte des parties de chasse avec des dialogues aussi recherchés que “Dans le mille, Billy! Pas étonnant avec ton nouveau Remington… quelle précision!”
Puisqu’on vous dit que la chasse, c’est fun…
Dans l’une d’entre elles, Let’s go shooting, Bill et Judy rendent visite à leur oncle Fred qui est chasseur. Celui-ci entreprend alors de leur montrer comment manipuler, démonter et remonter une arme. Puis il se lance dans de grandes tirades sur la beauté de la chasse, du tir et des armes à feu. L’auteur note que “Pour un résident des Etats-Unis, où le port des armes à feu fait partie de la culture, rien que de très normal. Le lecteur européen sera sans doute plus perplexe à la vue d’un récit où un monsieur tente de communiquer sa passion des armes à deux préadolescents“. Je confirme. A noter que d’autres publi-BD sont présentées dans l’ouvrage de Strömberg, notamment quelques unes consacrées à la cigarette, qui sonnent délicieusement anachronique aujourd’hui.
L’Obamania touche même la BD
La propagande en BD n’est pas forcément l’apanage de décennies depuis longtemps passées. On en trouve encore une foule d’exemples aujourd’hui. Ainsi par exemple l’élection de Barack Obama en 2008, qui a initié une vague d’enthousiasme dans tous les Etats-Unis et qui a fini par atteindre le monde de la bande-dessinée. Rien de plus normal: les auteurs de comics sont de toutes façons souvent démocrates et la personnalité de Barack Obama, fan déclaré de Spiderman, a pu les séduire. Si l’homme-araignée finira d’ailleurs par rencontrer le président noir (Amazing Spiderman #583), le premier super-héros à lui rendre hommage est Savage Dragon, qui opère dans la ville de Chicago, d’où est originaire Obama.
Concours de cravates.
Barack Obama a aussi eu l’honneur de prêter ses traits à Alfred E. Neuman, la mascotte du magazine satyrique Mad. S’il est courant de voir nombre de bandes-dessinées sortir à chaque élection américaine (notamment celles, réversibles, où sont présentées à égalité les biographies du candidat démocrate et du candidat républicain), rarement un candidat puis un président comme Barack Obama eut autant d’honneurs. Et mine de rien, c’est autant de frais de campagne en moins…
Laureline Karaboudjan
Illustration : Extrait d’une couverture de Shaloman, DR.
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