Prénoms: Avant l’affaire Titeuf, il y a eu le petit Astérix ou Valérian

Prénom copy

La justice a interdit à des parents d’appeler leur enfant Titeuf parce que ce prénom semblait au juge «contraire à l’intérêt de l’enfant». Mais Titeuf n’est pas le seul personnage de bande dessinée dont les parents s’inspirent pour nommer leur progéniture, et la justice ne les en empêche pas toujours, comme l’expliquait cet article en mars 2010.

∗∗∗

De Laureline à Jolan en passant par Astérix, comme le cinéma ou la littérature, la bande dessinée inspire certains parents au moment de nommer leur progéniture.

On connaît tous la blague des parents qui appellent leur fils “Kintis” pour rendre hommage au célèbre acteur américain “Kintis Wood”. Et celle des parents qui appellent leurs jumeaux “Astérix et Obélix”, vous la connaissez? A en croire (sic) ce qu’on peut lire sur le (par ailleurs terrifiant) forum Doctissimo consacré à la natalité, ce n’est pas une blague. Ce n’est même pas étonnant. La bande dessinée devenue un genre culturel dominant peut, à l’instar du cinéma ou de la littérature, servir de réservoir à prénoms pour jeunes parents. Pour le meilleur comme pour le pire.

Bien entendu, là où ça se voit le plus, c’est quand la bande dessinée qui sert de source d’inspiration est très connue et que les prénoms n’existent pas ailleurs que dans cette BD. Ainsi, nos jumeaux Astérix et Obélix auront du mal à cacher à leurs petits camarades de classe que le neuvième art n’est pas à l’origine de leurs noms. Reste à espérer qu’il n’y ait pas un petit blond et un gros roux… Dans une moindre mesure, c’est le cas de Jolan B. Il y a 18 ans, ses parents ont choisi de puiser dans Thorgal pour prénommer leur enfant comme le fils du héros éponyme. Mais à en croire le principal intéressé, l’hommage à la BD n’est pas ce qui frappe les gens : “A vrai dire je connais très peu de personnes qui connaissent Thorgal et ceux qui le connaissent ne font très rarement le rapprochement avec “Jolan” qui n’est au départ que le fils de Thorgal donc peu mis en avant dans les 30 premières BD, ce qui n’est plus le cas après avec le titre Moi, Jolan.” Même s’il confie ne pas ressembler à l’archer blondinet, Jolan B. aime bien son prénom.Le seul truc qui le dérange un peu avec le prénom Jolan, ce sont ses profs qui prononcent pas le J à la scandinave (à prononcer comme un Y, Yolan).

Jolan est l’exemple typique du prénom inventé de toutes pièces par la bande dessinée. D’après Prenoms.com, qui se base sur le répertoire national d’identification des personnes physiques, nulle trace de garçons prénommés Jolan avant 1988. D’ailleurs, Jolan B., né en 1991, fait un peu partie des précurseurs puisque le prénom “Jolan” a connu une explosion au début des années 2000. Autre exemple de prénom inventé stricto sensu par la bande dessinée… le mien! Laureline sonne traditionnel, parce qu’il est issu de la contraction de deux vieux prénoms, Laure et Line. Mais il n’a été inventé qu’en 1967 par Pierre Christin, le scénariste de l’épopée Valérian et Laureline. D’ailleurs, les premiers bambins à s’être fait appeler Laureline l’ont été au tout début des années 1970 Mais la grosse vague date de la fin des années 1980. C’est justement à cette période qu’est née Laureline M., ainsi prénommée par des parents qui ont tous les albums de Valérian et Laureline chez eux. De Laureline, Laureline ne partage finalement que le prénom, car elle se souvient d’un personnage “avec de l’assurance et de la confiance en elle, téméraire, aventurière, séductrice aussi et consciente de ses charmes. Moi c’est tout le contraire!” (je trouve personnellement que pour moi cette description me correspond assez bien). Aujourd’hui, il y aurait près de 2000 Laureline en France, dont la dessinatrice de BD Laurel.

Corentin comme… Corentin

Image 3

Et puis, il y a aussi les prénoms “normaux”, mais qu’on donne en référence à une oeuvre littéraire. J’ai une amie que ses parents ont appelé “Scarlett” (bon, ok, ce n’est pas si normal que ça comme prénom) en référence à Scarlett O’Hara, l’héroïne d’Autant en emporte le vent. En BD, l’exemple serait d’appeler son fils Jérôme en référence à Jérôme K Jérôme Bloche. Ou Corentin en référence à… Corentin. Les parents de Corentin B., informaticien, ne l’ont, entre autres, prénommé ainsi car “ils ont tous les tomes du Corentin de Cuvelier“. Mais là aussi, le prénom ne prédestine pas le caractère puisque, d’après Corentin B., le Corentin de bande dessinée “a un aspect explorateur qui m’est complétement étranger“. C’est d’ailleurs pour ça qu’il a “toujours préféré la dernière aventure de Corentin, Le Royaume des Eaux Noires, aux autres. Il y est plus sédentaire que dans les autres, il se frotte à la science et en même temps au fantastique sur fond de flirt romantico-tragi-fataliste (Zaïla, quelle femme !) … Tout ceci me correspond plus que le Corentin qui traverse un huitième du monde dans chaque aventure, qui ne faillit sur rien : allant jusqu’à sauver une princesse dans une apparente indifférence vis-à-vis d’elle …“.

Toujours sur Prenoms.com, on peut s’amuser à mesurer l’influence de la bande dessinée sur certains prénoms “traditionnels”. Ou du moins, à le supposer. Est-ce Jacques Martin qui a fait décoller les “Alix” masculins à partir des années 1980? Est-ce la série de science fiction Travis qui a fait doubler le nombre d’enfants à qui on attribue ce prénom depuis 2000? Et la poignée d’Archibald qui vivent en France, ont-ils été nommés ainsi en référence à Archibald Haddock? Autant de questions sans réponses, mais pour lesquelles ont peut tout imaginer… Et vous, si vous deviez donner un nom issu d’une BD à un enfant, lequel choisiriez-vous?

Laureline Karaboudjan

Illustration :  Le Fils d’Astérix, par Uderzo

lire le billet