
Par Toutatis! L’enseigne McDonald a récupéré le village d’irréductibles gaulois pour sa prochaine campagne de pub. Choquant? Non, totalement habituel.
La nouvelle est tombée lundi 16, suite à un petit article de emarketing.fr et de fastandfood qui signalaient que la campagne de publicité de McDonald, “venez comme vous êtes“, menée par l’agence française BETC Euro RSCG se déclinait en une nouvelle série d’affichage. On y retrouve notamment notamment, Cendrillon, le héros de Scream et, surtout, les irréductibles gaulois.
Astérix,”symbole“ de l’exception culturelle française, au service d’un des géants de la malbouffe? Scandale. Bakchich.info et l’un des blogueurs du Post se sont déjà empressés de critiquer cette initiative. Sur LePost, le blogueur sirchamallow n’a pas peur des mots:
“Comme l’envie de vomir, un dégoût si profond que je ne peux le retranscrire… Le héros de mon enfance sacrifié comme un sanglier ! Mais MERDE quoi ! MERDE ! Je suis pas de nature vulgaire, mais ça m’a littéralement foutu hors de moi et j’écris sous le coup de l’émotion.”
Si on prend un peu de recul, tant d’émotions peuvent apparaître un peu ridicule. D’une part, comme le rappelle Bakchich, Astérix a déjà participé à une campagne pour McDo, c’était en 2001 pour tenter de contrer l’influence grandissante de José Bové. D’autre part, il faut vraiment vivre sur une autre planète pour penser qu’Astérix n’a pas encore succombé aux sirènes du capitalisme, américaines ou pas. Entre des derniers albums mauvais, juste bons à faire des ventes faciles, des licences de dessin-animés, de films et un nombre incalculable de produits dérivés, le personnage et ses amis sont depuis de très nombreuses années une machine à faire de l’argent facilement pour les éditions Albert Réné. Ah, j’oubliais que le gaulois avait aussi son parc d’attractions, comme Mickey. S’offusquer de sa collaboration avec une marque américaine, même si l’écart entre le sanglier rôti et le big mac paraît immense, c’est râler contre une petite pluie sans avoir remarqué le passage du cyclone.
La BD et la publicité, une vieille histoire d’amour.
De plus, que des personnages de BD participent à des campagnes de pub, c’est très habituel. Cela dure même depuis des décennies. Des auteurs adulés aujourd’hui comme Franquin, notamment par moi, n’ont pas hésité à une époque à vendre leur personnage au premier commercial venu. Ainsi, ce brave garçon, écolo avant l’heure, chantre pourtant de la décroissance, a particulièrement été mis à contribution. Signalons par exemple cet album sorti en 1985 pour le compte des fromageries Bel et de sa célèbre Vache qui rit.

Franquin a aussi utilisé Gaston pour Kodak, n’hésitant pas à créer une page complète.

Il créera également de nombreuses inventions grâce aux piles Bidules, gags tout d’abord destinées à une grande marque puis publiés en album. Le site Toutspirou.fr recense ainsi tous les personnages du magazine de Spirou qui se sont retrouvés à vanter des produits de marques, celle avec les petits hommes bleus par exemple:

Les exemples sont presque aussi nombreux que les héros de bandes dessinées, et des panneaux le long des stations service aux verres de moutarde, les collaborations ont pris toutes les formes. Plus proches de nous, signalons ainsi une grande banque française qui a bien rentabilisé l’image de Blake et Mortimer. Pour le publicitaire, la BD est un bon produit, surtout pour l’affichage. Cela change de la photo habituelle et cela crée un lien de proximité immédiat avec le consommateur. Ce dernier connait les héros, les aime bien, et sa sympathie pour eux peut se transférer assez facilement vers le produit qu’ils recommandent. Les enfants sont d’ailleurs souvent la première cible visée, mais pas seulement, les publicitaires pouvant aussi jouer sur le lien de communion que crée le personnage de BD avec un public adulte.
La plupart du temps, ce sont des “gentilles marques”, des marques françaises bien de chez nous. Ce ne sont pas ces grands méchants de McDo. Certains rêveraient qu’Astérix soit du côté de José Bové et qu’ils défende la bonne gastronomie contre la malbouffe supposée des Américains, en ces temps où notre identité nationale est malmenée par la crise et les supposés voleurs de poules. Sur le principe, c’est possible, Astérix pourrait rejoindre le député européen dans ses combats. Il faudrait juste que José Bové paye plus cher que la chaîne de fast food.
Laureline Karaboudjan
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