Fantômette, 50 ans et quelques couvertures détournées

Des détournements de couvertures pour célébrer l’anniversaire de Fantômette et quelques théories sur le bondage.

Fantômette fête en ce début d’année 2011 ses cinquante ans. La célèbre héroïne masquée, créée en 1961 par Georges Chaulet, a vécu en plus une cinquantaine d’aventures, vendues à plus de 15 millions d’exemplaires. Si aujourd’hui elle peut faire un peu ringarde, il ne faut pas oublier qu’elle fut l’un des premiers rôles féminins actifs et intelligentes de la littérature pour jeunesse. Pour célébrer cet anniversaire, Hachette réédite aujourd’hui dans les classiques de la bibliothèque rose le premier titre de la série, paru en 1961, Les exploits de Fantômette.

La plupart d’entre nous (s’ils ont plus de 25 ans) se souviennent des couvertures colorées. Un style de dessin sans doute encouragé par Georges Chaulet, qui a lui-même tâté de la BD comme scénariste de la série Les 4 As (ce qui ne nous rajeunit pas non plus). Aujourd’hui, elles ont un look sérieusement vintage qui ne laisse pas indifférent.  Certains internautes se sont par exemple amusés à détourner ces couvertures un peu désuètes pour y passer des messages humoristiques, voire sexuels, à la manière des célèbres détournements de Martine. C’était d’ailleurs au même moment, en 2007. Petite sélection (toutres prises sur l’album Picasa de Sarkotiques).

Des pilules partout, pleins de pilules.

Ca roule pour elle.

En parlant de bondage, justement, le sociologue Baptiste Coulmont s’est demandé sur son blog si «Fantômette finit-elle toujours ligotée, à un moment où à un autre de ses aventures?» Pour lui, le fait qu’elle se retrouve très souvent entravé serait un symbole des années 60:

«Ce serait à la fois étrange, mais attendu pour un personnage féminin né au tout début des années soixante, c’est à dire quand les jeunes filles pouvaient à la fois espérer des études bien plus longues que celles de leur mère, mais aussi une carrière, bref, un peu plus de pouvoir — mais aussi savoir, peut-être inconsciemment, que le monde social resterait dominé par les hommes…

Il note également que sur un forum pour adultes, on peut lire:

«J’ai découvert le bondage ( je ne savais pas ce que c’était à l’époque) dans les livres de la bibliothèque rose et verte…
La lecture des passages ou l’héroïne (Alice ou Fantômette* par exemple) se faisait capturer provoquait un je ne sais quoi de fort agréable en moi. Et j’enrageais secrètement quand elles parvenaient a se libérer.
*Surtout Fantômette en fait, je crois même qu’elle est responsable en grande partie de certains de mes fétichismes… Il faudrait toujours se méfier de ce que l’on donne à lire à ses enfants…

A lire aussi, le deuxième article de Baptiste Coulmont où il recense les différents ligotages de Fantomette.

Ces suppositions sont amusantes, j’ai d’ailleurs envie d’y croire. Après, sans nier le potentiel érotique de notre héroïne, on peut ainsi être un peu plus terre à terre et considérer que le ligotage est une constante narrative des héros pour jeunesse. Tintin doit être entravé à peu près une ou deux fois par épisode. Cela donne du suspense, une tension dramatique tout en restant une torture acceptable pour la jeunesse: les liens n’abîment pas le corps. Dans les séries/romans/Bds pour adultes, si l’on veut arrêter quelqu’un, on le tue directement ou on lui coupe un doigt, on lui casse une jambe, etc. Bref, on l’abîme. Là, les liens permettent d’être en danger tout en étant complètement sain et sauf à la fin de l’aventure.


A force de sortir avec des Ken, aussi.

Un pet surpuissant.

Ou alors elle squatte Les Cigares du Pharaon

Ca me rappelle mon réveillon.

Laureline Karaboudjan

Illustration : Extrait de la couverture de Fantômette se déchaîne. DR.

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Mâtin, quel journal !

Ce mois d’octobre, c’est un peu la folie des anniversaires dans le monde de la BD. Il y a bien sûr celui d’Astérix, sur lequel je vais revenir dans une prochaine chronique. Mais il y a aussi celui du journal Pilote, où officiait René Goscinny, qui est né il ya pile 50 ans aujourd’hui. C’est donc le 29 octobre 1959 qu’est paru le premier numéro de ce journal qui fut longtemps hebdomadaire, avant de passer en mensuel jusqu’en 1989. A l’occasion de ces 50 ans, la galerie Slomka, à Paris, présente une exposition temporaire consacrée aux artistes ayant publié dans Pilote et évidemment, j’y ai traîné mes guêtres.

Pilote1

Une cinquantaine d’oeuvres sont visibles, originaux de planches, de couvertures ou simples dédicaces d’auteur. C’est proprement foisonnant : Gotlib, Tabary, Uderzo, Morris, Gibrat, Pétillon, Godard, Moebius ou Franquin, tout le monde est là! Et on est frappé par la diversité de styles qui a pu s’exprimer dans Pilote, certains grotesques, d’autres plus réalistes. Logique: bien plus que Tintin ou Spirou, “Pilote était un journal qui parlait aux enfants comme des adultes, et qui parlait aux adultes tout court. Une vraie révolution” selon Sarah Topolanski, gérante de la galerie. “C’est un journal mythique, tout les plus grands y sont passés et quand on voit l’exposition, on reconnaît, qu’on soit petit ou grand, des personnages de bande dessinée“. Ici c’est Iznogoud, là c’est Astérix, plus loin l’inspecteur Palmer…

Pilote2Comme on est dans une galerie, la plupart des oeuvres présentées sont à vendre. Ca va de 500€ pour une planche en noir et blanc de Tabary à 18 000€ pour un Blueberry en couleurs par Moebius. C’est hélas bien au-delà de ma pauvre bourse, reste le “plaisir des yeux”, comme on dit dans les souks marocains. Par contre j’ai de quoi m’acheter Pilote car le  journal n’est pas complètement mort puisqu’il sort maintenant en one-shot.  L’an dernier c’était un numéro spécial Mai 68 qui avait été édité et cette année, le journal a rendu hommage à l’érotisme en BD pour un numéro spécial 69. Avant, qui-saît, de connaître de nouveau un publication régulière…

Laureline Karaboudjan

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