Par E.C
Les Cahiers du Cinéma sortent ce mois-ci une nouvelle collection de beaux livres intitulée « Anatomie d’un acteur ». Le principe est original : analyser en dix rôles phares le travail de jeu d’un acteur. Un acteur est d’habitude conçu comme un instrument dont se sert le réalisateur, créateur absolu de son œuvre, plutôt donc comme un agent passif dans le processus artistique. Cette nouvelle collection affirme que certains grands acteurs parviennent dans la construction de leur carrière, dans le choix de leurs rôles et dans l’interprétation qu’ils en livrent, au statut de créateur à part entière. Dix rôles de l’acteur choisi sont donc passés à la loupe, agrémentés d’une recherche iconographique impressionnante. Photos rares, captures d’écran viennent soutenir le propos de l’auteur.
Il n’est guère étonnant que les deux premiers acteurs choisis par les directeurs de la collection soient le légendaire Marlon Brando et l’immense Al Pacino. Père et fils à l’écran dans Le Parrain de Coppola, voilà les deux génies père et fils d’une génération d’acteurs-créateurs.
Le livre sur Marlon Brando est une merveille de découvertes. Des rôles connus comme le célèbre Stanley Kowalski d’Un Tramway nommé désir ou l’inoubliable Colonel Kurtz d’Apocalypse Now, en passant par des rôles méconnus, un peu oubliés, comme celui de Napoléon Bonaparte dans Désirée. La journaliste Florence Colombani – auteur de ce premier livre – passe au crible chaque geste, expression, impulsion du visage et de la voix de Brando. Ainsi, la manière précise dont l’acteur saisit le bras de ses partenaires féminines dans le Tramway permet à Brando d’annoncer subtilement la fin tragique de la pièce ; le masochisme dont il fait preuve dans La Vengeance aux deux visages à la fois sur le tournage et dans le film, livre la clé de l’autoportrait de l’acteur dans ce film qu’il a lui-même réalisé. Des photographies en noir et blanc et couleurs (dont l’une de Brando et James Dean, étonnante) viennent accompagner cette analyse fouillée. On apprend avec émotion la relation forte qu’entretenait Brando avec un autre géant du cinéma, Montgomery Clift. C’est par amitié pour Clift que Brando reprend le rôle de l’acteur décédé avant le tournage dans Reflets dans un œil d’or de John Huston : « Quel plus bel hommage pouvait-il rendre à Montgomery Clift qu’en montrant les tourments d’un homosexuel ravagé par la culpabilité, cerné par un monde hostile qui juge ses désirs et les refuse ? », écrit Florence Colombani.
Mon Top 5 des rôles de Marlon Brando
Autre lecture fort agréable, celle de l’ouvrage sur Al Pacino de la journaliste américaine Karina Longworth. Dix rôles encore forts impressionnants : des trois âges de Michael Corleone dans la trilogie des Parrains, au Tony Montana de Scarface, sans oublier l’incroyable Francis « Lion » Delbuchi de l’Epouvantail. Seul erreur au palmarès, l’oubli de l’interprétation phénoménale de l’acteur dans Looking For Richard, film qu’il a lui-même réalisé. Il aurait été intéressant dans cet esprit de filiation Brando-Pacino, de pousser le parallélisme jusqu’au bout et de souligner le caractère révélateur de cette véritable leçon de théâtre d’Al Pacino. Les photographies sont une fois de plus magnifiques et explorent la multitude de visages livrés par Pacino au cinéma pendant des décennies. « Comme l’homme », écrit Karina Longworth dans son introduction, « le personnage typique de Pacino s’avère complexe, combinant des éléments apparemment contradictoires en une seule âme tourmentée. Si un trait particulier peut résumer le style de jeu de Pacino, un élément caractéristique présent d’une certaine façon dans toutes ses apparitions à l’écran, ce serait le crescendo et le decrescendo – une sorte de flux et reflux affectif perceptible dans le langage corporel et les cadences vocales de l’acteur. »
Mon Top 5 des rôles d’Al Pacino
Anatomie d’un acteur – l’idée était belle, le résultat l’est plus encore. Ces livres sont des petits bijoux pour tous les cinéphiles. Faites donc de la place dans votre bibliothèque, car suite à ces deux numéros sur Brando et Pacino paraîtront en novembre deux ouvrages sur d’autres légendes, à savoir Jack Nicholson et Meryl Streep !
Viddy Well !
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Par E.C
Un article enchanté !
1. Mettez l’amour au premier plan.
« Amour, amour, je t’aime tant…” Quand on pense à Jacques Demy, difficile de ne pas penser à l’amour, et pas n’importe lequel ! L’amour romantique dont même le perroquet de Peau d’âne chante les louanges, l’amour qui unit à jamais les amants des Parapluies de Cherbourg, l’amour qui fait les marins des Demoiselles de Rochefort parcourir le tour du monde pour trouver leur dulcinée … Qui n’a pas versé de chaudes larmes en entendant Geneviève supplier Guy : « Mon amour je t’attendrai toute ma vie » sur la musique enivrante de Michel Legrand ? Comment ne pas se pâmer devant Maxence, jeune marin en quête de son idéal féminin, chantant que un air mélancolique : « Je l’ai cherchée partout, j’ai fait le tour du monde » ? Chez Demy, l’amour « dicte sa loi » et c’est pour ça qu’on l’aime.
http://youtu.be/T2l7jRLkOq0
2. Amusez-vous!
C’est Delphine des Demoiselles de Rochefort qui le dit le mieux : « Le temps mon ami, pour moi c’est de l’amour. C’est rire, c’est chanter tant que dure le jour.». On va rire et virevolter, annonce Lola tandis que les jumelles, elles, sont des artistes passionnées, musiciennes, acrobates ! La vie, selon Demy, c’est des couleurs et de la joie, des chants et des rires de femmes jeunes et jolies. C’est les voir danser au beau milieu de la rue juste parce que vivre est une fête. Voir les choses du bon côté est une philosophie de vie pour les forains qui préfèrent le pire au meilleur et le plaisir à la douleur. Il faut butiner, parcourir le monde, et quand le moment vient, savoir reconnaître l’amour au premier regard. “Aimer la vie, aimer les fleurs, aimer les rires et les pleurs, bref, aimer la terre pour être heureux”. Alors, faisons comme Peau d’âne et son prince ! Fumons nous aussi la pipe en cachette et gavons nous de pâtisseries en nous roulant dans l’herbe !
3. Respectez l’interdit de l’inceste
La Fée des Lilas l’explique mieux que personne : « Mon enfant, on n’épouse jamais ses parents » En effet, épouser ses parents ne mène qu’à des malheurs ! Un échec assuré, une progéniture altérée ! La marraine assure même que ce sont là des fantasmes démoralisants et qu’il vaut mieux attendre de croiser un charmant va-nu-pieds ou un prince mendiant. S’il faut l’intervention de la marraine la fée pour préciser ce que d’aucuns pourraient croire évident, c’est que l’inceste est toujours une tentation dans l’univers par ailleurs si ludique de Demy. Voyez dans Les Demoiselles de Rochefort Monsieur Dame (Michel Piccoli) séduit par celle dont il ignore qu’elle est sa fille, Solange (Françoise Dorléac). Et Trois places pour le 26, le tout dernier film de Demy, va jusqu’à transgresser le tabou en unissant Yves Montand et sa fille Mathilda May… Bref, Delphine Seyrig a bien raison de rappeler de sa voix inimitable qu’il faut oublier “cet hymen insensé” !
4. Restez sur vos gardes!
« Et il faisait des manières pour découper le gâteau ! Le salaud… », constate Danielle Darrieux dans Les Demoiselles. Méfiez-vous donc ! Car derrière la politesse et l’amabilité pourrait bien se cacher un sadique furieux, fou métaphysique, auteur du découpage d’une certaine Lola-Lola ! C’est le fait divers qui bouscule la petite ville de Rochefort, et tout le monde s’interroge sur ce criminel. Certains le trouvent assassin sale, quand d’autres argumentent le contraire puisqu’il prit la précaution de ranger les morceaux dans la malle. Il y a aussi ceux que le mystère enchante et qui se pressent d’aller sur les lieux du crime. En revanche, hâte à la paranoïa ! Ne pas soupçonner les hommes qui n’aiment que les blondes, ou les Américains qui s’accusent d’être criminels parce qu’ils ont bousculé une femme dans la rue !
Allez donc vite rire et chanter à la rétrospective Jacques Demy de la Cinémathèque !
Viddy Well !
lire le billetPar E.D.
Avant le retour tant attendu de Game of Thrones, c’était la série dont tout le monde parlait. Produite par Netflix, une plateforme de visionnage en ligne, ainsi que par d’autres producteurs dont David Fincher et Kevin Spacey, la première saison de House of Cards a connu un succès fulgurant.
Adaptée d’une série du même nom de la BBC, elle-même inspirée d’un roman de Michael Dobbs, politicien et auteur Britannique, l’intrigue se passe cette fois à la Maison Blanche, avec en acteur principal Kevin Spacey. Le premier épisode magistral réalisé par David Fincher donne le ton, la série ne s’essouffle pas au fil des épisodes d’une première saison que l’on dévore en quelques jours.
De quoi ça parle ?
Frank Underwood (Kevin Spacey) est un homme politique Démocrate qui se voit refuser une promotion longuement attendue, le poste de Secrétaire d’Etat. C’est alors qu’il entreprend de parvenir à cette fin par d’autres moyens.
Véritable requin politique d’un sang froid glaçant, rôle qui lui sied à merveille, il utilise l’analogie lui-même en parlant de sa femme interprétée par l’excellente Robin Wright ; « J’aime cette femme comme les requins aiment le sang ». L’acteur manipule et abat ses cartes une par une dans cette course au pouvoir calculée que la morale ne freine pas. Un jeu marqué par des regards caméra de l’acteur qui mène la danse ; technique originale dans un drame, nous avions l’habitude de voir ce procédé dans des comédies comme The Office ou Parks and Recreation. Voilà que la complicité créée avec le spectateur devient tout autre ; sans nous en rendre compte, nous devenons complices de Frank, et par là même, délicieusement coupables. C’est un compliment que Frank nous fait, car il choisit méticuleusement qui il inclut dans son jeu, il nous fait confiance, nous prend sous son aile, nous explique qui sont les membres du gouvernement et qui va lui servir d’appât, comment il compte remplacer un pion par un autre ou comment les détruire sans laisser de traces.
Nous assistons à cette course au pouvoir sans avoir conscience que pour Frank, le spectateur est aussi un pion (futur électeur ?) qui valide ses actions par son silence, tout simplement parce qu’il le regarde faire en y prenant plaisir.
Mais on ne peut s’empêcher de penser à l’ambiguïté du titre. Un « Château de Cartes » est mené à s’écrouler un jour, mais au détriment de qui ? Est-ce le gouvernement en place à la Maison Blanche qui va perdre la main au profit de celle de Frank qui remplace les cartes comme bon lui semble ? Ou bien Frank qui mène un jeu qui ne peut que se retourner contre lui ?
Nous attendons avec impatience la deuxième saison pour le découvrir… En attendant, voici la bande-annonce de la première :
Viddy Well !
@ViddyWellmovies
http://youtu.be/n6wytrQo-UE
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Par E.C
Avec Effets Secondaires, Steven Soderbergh fait un premier bel adieu au cinéma. On annonce son « Liberace » (Behind the Candelabra) tourné au départ pour la chaîne HBO dans la sélection cannoise 2013… On attendra donc encore un peu, histoire de voir ce biopic autour d’un personnage flamboyant de la télévision américaine, pour faire le bilan d’une œuvre riche de films aussi différents que séduisants. Reste que ce Soderbergh-ci – un thriller magistral – est l’avant-dernier et mérite d’autant plus qu’on s’y arrête. Emily (Rooney Mara) lutte contre la dépression alors que son mari (Channing Tatum) sort tout juste de prison. Après une tentative de suicide, elle rencontre un psychiatre (Jude Law) qui la met sous antidépresseurs, lesquels ont des effets secondaires inattendus et effrayants… L’intérêt du film ne tient pas tellement au scénario, assez basique dans ses retournements incessants, mais bien à la mise en scène. Le film commence par un superbe hommage à Psychose, et par la suite le film d’Hitchcock apparaît comme la matrice de l’histoire. Comme chez Hitchcock en effet, les femmes ont plusieurs visages, les hommes ordinaires se retrouvent pris dans un cercle infernal, et doivent user de toute leur intelligence et leurs ressources pour s’en sortir. Bref, rien n’est comme il y paraît.
Le grand plaisir d’Effets Secondaires réside dans son casting impeccable (si l’on oublie l’interprétation botoxée de Catherine Zeta-Jones) : Jude Law est toujours meilleur quand il ne doit pas jouer les jolis cœurs, et Vinessa Shaw (l’autre femme du Two Lovers de James Gray) est une présence toujours appréciable. Tous sont pourtant éclipsés, écrasés même par la géniale Rooney Mara. On se souvient des premières minutes de The Social Network où la jeune actrice interprétait la petite amie de Mark Zuckerberg. La scène avait un impact considérable sur tout le film, et la découverte de Fincher trouva ensuite dans Millenium un rôle d’exception, celui de Lisbeth Salander, cachée derrière ses piercings et ses sourcils rasés.
Tout le génie de Soderbergh est là : contrairement à Fincher, il ne dissimule pas son actrice derrière des artifices. Bien au contraire : il expose son visage à la lumière, la filme en gros plan comme pour tenter de percer le mystère de ce visage étrange, indéchiffrable. La peau diaphane, de grands yeux bleus, le teint délicat : le visage est celui d’un ange. Au début du film, Rooney Mara est une femme en proie à une dépression terrible, désarmée face aux démons qui l’envahissent. Sereine un instant, le visage est défiguré par les larmes, défiguré par l’angoisse, et cette déconstruction ne dure que quelques secondes. Dans la deuxième partie, en revanche, la jeune fille se fait séductrice, puis féroce et glaciale. C’est le talent des grandes actrices de l’âge d’or hollywoodien qu’on retrouve dans ce visage étonnant : celui des Vivien Leigh, ou des Elizabeth Taylor, de ces femmes qui pouvaient tout jouer, dont l’intelligence et l’instinct de jeu atteignaient les sommets. On pense aussi à Jean Simmons dans Un si doux visage de Preminger… Voilà bien le vrai sujet d’Effets Secondaires : le visage, ou plutôt les visages, d’une actrice hors du commun. Car ce visage fascine, on pourrait le regarder des heures tant chaque expression est embuée de mystère.
Aujourd’hui icône de mode, sujet photographique passionnant pour les magazines (voir les photos splendides du magazine Interview), Rooney Mara n’a pas fini de nous étonner. Elle a déjà fait grand bruit au festival de Sundance, où elle a présenté Ain’t Them Bodies Saints avec Casey Alffleck. Elle sera aussi en tête d’affiche du prochain Terrence Malick aux côtés de Ryan Gosling et Michael Fassbender. On l’attend bien sûr dans la suite de Millenium, pour lequel on espère la voir refaire équipe avec David Fincher. Préparez-vous donc, l’addiction Rooney Mara ne fait que commencer !
Viddy Well !
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Par E.D.
Avis à tous les Français de Los Angeles et à ceux de passage, le COL.COA (Festival du film français de Los Angeles) se déroulera du 15 au 22 Avril.
Le programme est désormais disponible sur le site avec une sélection prometteuse accompagnée de débats, de projections de courts-métrages et de rétrospectives sur Jacques Demy, Maurice Pialat, André Téchiné et Louis Malle. Parmi les réalisateurs/scénaristes invités, seront présents:
– Alain Resnais, pour Vous n’avez encore rien vu en avant-première à Los Angeles.
– Régis Roinsard, Populaire, également en avant-première.
– Stéphane Brizé, Quelques heures de Printemps.
– Philippe Godeau, pour 11.6.
– Philippe Le Guay, Alceste à Bicyclette.
– Anne Novion, Rendez-vous à Kiruna.
Le festival ouvrira ses portes avec le film de Danièle Thompson, Des gens qui s’embrassent.
Quant au film de clôture, ce sera Jappeloup, écrit par Guillaume Canet et réalisé par Christian Duguay.
Précipitez-vous en ligne pour l’achat de billets, certains, dont Thérèse Desqueyroux de Claude Miller, sont déjà épuisés…
Rdv le 15 Avril pour plus de news en direct du festival !
Voici le lien vers le programme du festival :
http://www.colcoa.org/2013/program/daybyday.asp
Viddy Well !
lire le billetPar E.C
Quelle idée de faire un « prequel » ?
Le film se veut la genèse du Magicien d’Oz (1939), à savoir comment le magicien est devenu magicien et pourquoi il se cache obstinément derrière son rideau. Mais le problème est de taille : n’apprenait-on pas à la fin du film de Victor Fleming que tout était un rêve de la jeune Dorothy ? Le film occulte la révélation et prétend qu’Oz est un endroit réel auquel on accède mystérieusement en étant pris dans l’œil d’une tornade. Car force est de constater que la mode d’aujourd’hui est au conte (les Cendrillon, Belle au bois dormant qui nous attendent, et les récents Blanche-Neige) : après le succès d’Alice au pays des merveilles, les studios ont tous copié l’idée et se lancent dans des films conçus avec des effets spéciaux titanesques. Le problème est le même que dans Alice : la laideur esthétique. On ne peut s’empêcher pendant l’intégralité du film de penser que toutes ces images sortent d’un ordinateur, c’est à peine si l’on ne voit l’écran vert qui se cache derrière les acteurs. On devrait s’émerveiller, mais la laideur envahit trop l’écran et finit par heurter le spectateur. Où est donc passé l’artisanat qui fit pendant longtemps le charme de ce cinéma ? Où sont les délicieux décors de studio du Magicien d’Oz originel ? On a beau dire, une sorcière à la peau maquillée en vert n’est pas la même qu’une sorcière colorée en vert par des moyens technologiques.
Pourquoi un héros, et non plus une héroïne ?
Ah qu’elle nous manque la jeune Dorothy, interprétée par Judy Garland dans le Magicien d’Oz ! Écoutons-la chanter « Somewhere over the rainbow » et rêvons avec elle à un ailleurs en Technicolor, où épouvantail, Homme de fer, et lion parlent et dansent comme des humains. La poupée de porcelaine du film de Sam Raimi n’arrive pas à la cheville de ces héros peu traditionnels. On ne dira jamais assez à quel point la présence physique d’un acteur s’avère essentielle au cinéma. Applaudissons donc Ray Bolger, Jack Haley, et Bert Lahr, les trois interprètes du Oz originel, qui même s’ils vécurent des moments bien difficiles dans leurs costumes, peuvent se targuer d’avoir livré des performances historiques. Dans le Magicien d’Oz, c’était Dorothy qui menait ces trois personnages vers leur destin, qui leur permettait d’obtenir ce qu’ils avaient désiré le plus au monde. C’était Dorothy la plus courageuse, la plus volontaire, la plus forte. C’était Dorothy qui tuait la méchante sorcière de l’Ouest. Ici nous n’avons guère qu’un James Franco grimaçant, obsédé par l’argent et les femmes, lesquelles ne cessent de se pâmer devant lui, chacune désespérée de ne pas avoir un homme à ses côtés. Et qu’arrive-t-il lorsque le malheureux Oz se comporte comme Dom Juan ? Les femmes se transforment littéralement en sorcières, deviennent affreuses, laides à l’extrême, et jurent de mettre à feu et à sang tout ce qui osera désormais leur résister. Quelle morale !
Où sont-les acteurs ?
Ils s’avèrent bien décevants. James Franco ne possède guère de présence et agace plus qu’il n’amuse. Les pourtant splendides Michelle Williams et Rachel Weisz ne semblent pas s’amuser dans leurs rôles de bonne et mauvaise fées. L’une se contente de sourire tandis que l’autre demeure rigide pour montrer sa froideur. Quant à Mila Kunis, elle nous fait seulement regretter la machiavélique Margaret Hamilton, sorcière géniale dont le rire résonne encore à nos oreilles. Ces performances plates et sans relief reflètent le manque d’originalité du scénario. L’histoire se déroule paresseusement, alternant entre comédie et action, celles-ci ne visant qu’une simple distraction. Le film de Victor Fleming en était une aussi, mais dans le meilleur sens du terme. Avec Le Magicien d’Oz, on s’envolait réellement au-delà de l’arc-en-ciel, on rêvait avec Dorothy, on frissonnait à ses côtés. Et la marche de la jeune fille le long du petit chemin de briques jaunes était bien plus complexe – comme l’a récemment analysé le New York Magazine – que la marche inéluctable de Oz-James Franco vers des piles d’or massif. « There’s no place like home » affirmait Dorothy à la fin du Magicien d’Oz. Après avoir vu le film de Sam Raimi, une chose est sûre: « There’s nothing like old cinema. »
Viddy Well !
lire le billetPar E.C
À la surprise générale, Steven Spielberg a annoncé qu’il comptait adapter le scénario de Napoléon abandonné par Stanley Kubrick, en mini-série télévisée. Spielberg est un habitué puisqu’il avait déjà adapté un autre scénario laissé par le génie du 7ème art avec Intelligence Artificielle. À l’époque où il travaillait sur le projet, Kubrick avait envisagé Jack Nicholson ou Al Pacino pour interpréter l’empereur français. Les deux acteurs ayant aujourd’hui passé l’âge du rôle, qui pourrait interpréter le grand homme pour Spielberg ? Viddy Well a réfléchi à la question…
POUR BONAPARTE…
On a déjà pu admirer l’humour de ce jeune comédien de 24 ans dans Star Trek. Né en ex-URSS mais aujourd’hui américain, l’acteur a le talent et le charisme nécessaires au rôle. On pourra le voir faire ses preuves dans le prochain film de Jim Jarmusch, Only Lovers Left Alive. Reste que, malgré son intelligence et son charme qui conviennent au jeune Bonaparte, Yelchin serait un choix osé : après tout, la fréquentation des Russes n’a guère réussi à Napoléon!
Le petit frère de Ben est un acteur confirmé et terriblement sous-exploité par l’industrie du cinéma. Épatant dans L’Assassinat de Jesse James où il jouait “ce lâche de Robert Ford”, solide comme un roc dans Gone Baby Gone… On verrait bien Casey jouer les premiers consuls ! Seul petit bémol : sa voix fluette pourrait se révéler problématique. Car notre Bonaparte conquérant doit en imposer : pas sûr que le jeune Affleck y arrive!
Jason Schwartzman
Il a déjà joué Louis XVI pour Sofia Coppola. Alors, pourquoi pas Bonaparte ? Avec son air de jeunesse éternelle, sa petite bouille adorable et sa chevelure noir corbeau (sans parler de sa petite taille), on verrait bien Jason se frotter à ce rôle sur-mesure, et nous montrer qu’il est aussi capable d’interpréter des hommes forts et ambitieux. Petit bémol : on a tellement l’habitude de voir Jason Schwartzman dans des rôles comiques, notamment dans la série Bored to Death, ou en petit dernier écrasé par ses aînés (A bord du Darjeeling Limited) qu’on a un peu de mal à le visualiser dans son costume de général sans esquisser un sourire.
POUR NAPOLÉON
C’est notre proposition la plus crédible, celle qui vient immédiatement à l’esprit. Dans Master and Commander de Peter Weir, Russell Crowe voguait sur les mers pour combattre l’Empereur français. Quoi de plus juste que de le voir interpréter le chef du camp ennemi ? D’autant que Russell est un acteur subtil, dont la brutalité se mêle à une grâce virile. De quoi satisfaire les admirateurs de Napoléon donc.
Gary Oldman
Voilà un choix qui nous ferait plaisir même si Gary frise la limite d’âge pour le rôle. C’est vrai qu’on l’imagine plus à Sainte Hélène que jeune empereur. Mais Gary Oldman n’a cessé de nous prouver tout au long de sa carrière qu’il pouvait tout faire. Son physique très distingué et son intelligence ne pourront que lui servir pour interpréter le fin stratège qu’était Napoléon.
Giamatti nous amène dans le réalisme. On délaisse le glamour pour arriver à une interprétation terre à terre. Dans John Adams, l’acteur montrait qu’il avait la stature des grands hommes. Sa voix délicate et sa douceur offriraient une vision bien originale de Napoléon.
Depuis Lincoln, Day-Lewis doit figurer sur toutes les listes de biopics. Alors pourquoi pas celle-ci ? L’acteur est le caméléon que l’on sait : passant de la noblesse la plus haute (Le Temps de l’innocence) à la brutalité la plus crue (Gangs of New York). Le seul problème s’avère physique : Day-Lewis est bien trop grand pour interpréter un empereur bien souvent raillé pour sa petite taille.
Viddy Well !
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Par E.D.
Voici le compte-rendu des Oscars pour ceux qui n’ont pas voulu se coucher à 4h du matin :
Vous avez bien fait de ne pas regarder jusqu’au bout car cette 85ème Cérémonie des Oscars était un peu longue, il faut le dire… Entre-coupée de pubs pour shampoings toutes les 10 minutes, c’est grâce à plusieurs tasses de café que nous avons tenu le coup.
En résume : Une soirée très chantante qui a rendu hommage aux comédies musicales, ce qui laissait présager la victoire des Misérables pour meilleur film… Mais double-surprise : c’est Michelle Obama qui a présenté l’oscar du Meilleur film et Argo qui l’a remporté ! Ben Affleck gagne ainsi la statuette pour la seconde fois depuis Will Hunting en 1997.
Autre surprise : Ang Lee remporte l’oscar du meilleur réalisateur pour L’Odyssée de Pi.
On s’y attendait :
– Daniel Day Lewis, toujours très classe et modeste, a raflé le milkshake du meilleur acteur. C’est Meryl Streep qui a remis cet oscar, le troisième dans cette catégorie pour Daniel Day Lewis. Il faut dire au passage que les deux acteurs vont très bien ensemble sur scène… Avis au directeurs de castings, à quand un film avec ces deux étoiles d’Hollywood ?
– Anne Hathaway a remporté l’oscar du meilleur second rôle pour sa performance de 10 minutes dans Les Misérables…
– Toujours aussi subtile, la musique des Oscars s’est amplifiée lors des discours trop longs pour chasser de la scène les vainqueurs qui ont à peine eu le temps de remercier leur mère ou de souhaiter joyeux anniversaire à un cousin que nous ne connaissons pas. Petite touche d’humour, c’est la musique des Dents de la Mer qu’ils ont choisi pour le rôle ingrat de faire taire les vainqueurs.
La musique de John Williams a d’ailleurs servi de fond sonore pendant toute la Cérémonie, pour finir par perdre l’oscar avec Lincoln, puisque c’est L’odyssée de Pi qui l’a emporté pour meilleure bande-sonore.
Voici le reste des vainqueurs, et pour ceux qui veulent voir des photos des belles robes sur le Red Carpet… retrouvez-nous sur twitter @ViddyWellmovies
Meilleur film : Argo, produit par Ben Affleck, George Clooney et Grant Heslov
Meilleur réalisateur : Ang Lee pour L’odyssée de Pi
Meilleur acteur : Daniel Day Lewis pour Lincoln
Meilleur acteur dans un second rôle : Christoph Waltz pour Django Unchained
Meilleur actrice : Jennifer Lawrence, Happiness Therapy
Meilleure actrice dans un second rôle : Anne Hathaway, Les Misérables
Meilleur film étranger : Amour, Michael Haneke
Meilleur film d’animation : Rebelle, Mark Andrews
Meilleur scénario original : Django Unchained, Quentin Tarantino
Meilleur scénario adapté : Argo, Chris Terrio
Meilleurs décors : Rick Carter, Jim Erickson, Lincoln
Meilleur montage : William Goldenberg, Argo
Meilleur court-métrage d’animation : Paperman, de John Kahrs
http://youtu.be/f3WVAR1McO4
Meilleure Photographie : Claudio Mirando, L’odyssée de Pi
Meilleurs effets spéciaux : L’odyssée de Pi – Bill Westenhofer, Guillaume Rocheron, Erik De Boer, Donald Elliott
Meilleurs costumes : Jacqueline Durran, Anna Karenine
Meilleure coiffure et maquillage : Lisa Westcott and Julie Dartnell pour Les Misérables
Meilleur court-métrage : Curfew, de Shawn Christensen
Meilleur documentaire : Sugar Man
Meilleure Bande-sonore : Life of Pi, Mychael Danna
Meilleure musique originale : Skyfall. Adele, Paul Epworth (“Skyfall”)
Meilleur mixage de son : Les Misérables
Meilleur montage de son : Paul N.J. Ottosson, Zero Dark Thirty et Per Hallberg, Karen M. Baker Skyfall ex-aequo !
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Par E.C
Pour l’air de chien battu d’Anne Hathaway :
Penser que l’actrice américaine va sans doute recevoir l’Oscar du meilleur second rôle féminin pour son interprétation de Fantine laisse pantois… Même si l’on sait bien que la combinaison prostitution + perte de poids + mort tragique est idéale pour décrocher la statuette ! Les parodies pleuvent sur internet tant l’interprétation de la fameuse chanson « I Dreamed a Dream » est ridicule. Anne Hathaway a certes perdu du poids, s’est coupé les cheveux très courts, et pleure beaucoup (et trop). Mais son visage qui ne quitte pas une seconde un petit air de chien battu montre une interprétation bien faible et caricaturale du rôle légendaire de Fantine.
Pour admirer la nullité de la comédie musicale :
La musique de Claude-Michel Schönberg se révèle accablante… Trois mêmes accords la plupart du temps, ou bien des lignes mélodiques statiques pendant quinze minutes d’affilée… Au bout d’une heure de ce tintamarre, on a envie de se mettre à genoux pour supplier que ça s’arrête, en prenant l’air halluciné de Hugh Jackman (Jean Valjean) lorsqu’il s’interroge sur son existence (voir les nombreux « Who Am I ? » chantés dans les églises) ! Quant aux paroles en anglais de Herbert Kretzmer, elles sont consternantes. On se croirait dans le fameux sketch de Gad Elmaleh sur les comédies musicales. C’est du genre « Vivre dans un donjon, c’est difficile ». En voici quelques exemples : lorsque Valjean adopte Cosette, la petite fille lui demande subtilement « Will you be like a papa to me? » Notez l’utilisation délicate du français ! La palme revient au duo d’amour entre Marius et Cosette (à prononcer C’sette, apparemment) : Lui « I am lost » Elle « I am found »…
Pour la « subtilité » de la mise en scène :
Une chose sûre, Tom Hooper aime le gros plan. Le très très gros plan. Si bien qu’il arrive à rendre tout le monde très moche. Au moins, il traite tous ses acteurs de manière égale ! De la sueur qui perle sur le front de Russell Crowe (Javert), au sourire illuminé de Eddie Redmayne (Marius), en passant par les grands yeux tristes d’Anne Hathaway (décidément, de cette expression on ne se remet pas). Hooper filme, il faut bien le dire, un peu n’importe comment. Certains plans sont plus qu’étranges, comme celui du début où l’on voit Valjean marcher péniblement dans ses chaînes de prisonnier. On a également A-DO-RÉ la représentation de la Révolution de 1832 : Les étendards sont élevés, (comme dans la Marseillaise), les révolutionnaires sont tous de jeunes hommes vigoureux, qui se dressent sur les barricades en entonnant leur chant incompréhensible de « Red – the blood of angry meeeen. Black – the dark of ages paaaaaast !!!». Et nous qui pensions naïvement qu’ils allaient chanter en utilisant les couleurs du drapeau français… Quelle déception !
Pour la représentation inoubliable de Javert :
C’est Russell Crowe qui interprète le célèbre ennemi de Jean Valjean. Le pauvre Russell, anciennement Gladiateur qui faisait plier l’Empire Romain, fait peine à voir. Lui aussi arbore un petit regard tristounet, parfois rageur lorsqu’il croise celui de Valjean. Des rimes étonnantes sont trouvées pour sonner avec le nom de Javert (« monsieur le maire », entre autres). Pour souligner l’ego surdimensionné du bonhomme, on le fait parler de lui-même à la troisième personne. Et pour montrer ses tendances auto-destructrices, on le voit régulièrement marcher au bord d’un balcon en face de Notre-Dame, au-dessus d’un précipice menaçant : la Seine. Comme ça on ne sera pas surpris si un jour il décide de sauter.
Pour écouter la non-voix de Hugh Jackman :
La question qui se pose régulièrement pendant les 2h30 de projection, c’est celle-ci : Comment, mais COMMENT, Hugh Jackman a-t-il pu faire carrière dans la comédie musicale ? À Melbourne ainsi que dans le West End, à Londres, Hugh Jackman était réputé pour ses talents musicaux. Mais ses vibratos sont plus qu’épouvantables, et vers la fin du film, on se demande comment ses poumons vont survivre ! Jackman semble persuadé qu’il possède de fortes capacités lorsqu’il n’a en fait aucune puissance vocale. Sans compter les fois où il chante faux. Arrive un moment où on voudrait lui dire d’arrêter pour respirer un bon coup, de peur de le voir s’effondrer à tout moment !
Vous l’avez donc compris, n’allez voir Les Misérables que si vous désirez rire un bon coup. En revanche, si vous pensez aller voir une adaptation du roman de Victor Hugo, passez vite votre chemin.
Viddy Well !
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La cérémonie des BAFTA (l’Académie britannique des arts de la télévision et du cinéma) a eu lieu dimanche soir. En voici le palmarès, sans trop de surprises. Des résultats assez similaires à ceux des Golden Globes à l’exception du BAFTA de la meilleure actrice, accordé à Emmanuelle Riva à l’hommage pour son rôle dans Amour !
Une bonne année également pour Ben Affleck qui remporte encore une fois la récompense de Meilleur film avec Argo.
Meilleur film : Argo.
Meilleur film britannique : Skyfall.
Meilleur film étranger: Amour.
Meilleur documentaire: Sugar Man.
Meilleur réalisateur : Ben Affleck pour Argo.
Meilleur acteur : Daniel Day-Lewis, Lincoln.
Meilleure actrice : Emmanuelle Riva, Amour.
Meilleure actrice dans un second rôle : Anne Hathaway, Les Misérables.
Meilleur acteur dans un second rôle : Christopher Waltz, Django Unchained.
Meilleur espoir : Juno Temple.
Meilleur scénario original : Django Unchained.
Meilleur scénario adapté : Happiness Therapy.
Meilleure musique originale : Skyfall.
Meilleur film d’animation : Rebelle.
Meilleurs effets spéciaux : L’Odyssée de Pi.
Meilleurs costumes : Anna Karenine.
Meilleur montage : Argo.
Quand au BAFTA de la robe la plus “flashy”: ils n’ont pas su départager.
Viddy Well !
E..D.
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