Un article publié dans le quotidien anglais The Guardian le 11 août 2012 révèle que 900 km3 de glace ont disparu de l’océan Arctique par rapport à l’an dernier. Cette donnée révèle un taux de perte de la calotte glaciaire 50% plus fort que celui que les scientifiques prenaient en compte jusqu’à présent. Ce constat provient des mesures effectuées par le satellite CryoSat-2 lancé par l’Agence spatiale européenne (ESA)en 2010, spécialisé dans le mesure de l’épaisseur des glaces polaires. Le volume de glace de mer dans la partie centrale de l’Arctique serait ainsi passée 17 000 km3 au cours de l’hivers 2004 à 14 000 km3 cet hivers, selon les mesures effectuées par le satellite.
A ce volume réduit en hivers, s’ajoute une fonte plus forte en été. Seymour Laxon, chercheur du Centre pour les observations et les modélisations polaires (CPOM) à l’Université College London (UCL) qui traite les données fournies par CyoSat-2, indique que “les analyses préliminaires montrent que le taux de réduction du volume de glace en Arctique semble beaucoup plus élevé que prévu”. Selon The Guardian, il ajoute: “Très bientôt, nous pourrions vivre ce moment symbolique où, un jour d’été, les images satellites ne montreront plus aucune glace sur l’Arctique, juste de l’eau liquide”.
Déjà, les glaces de mer en été sont passées d’un volume de 13 000 km3 en 2004 à 7 000 km3 en 2012, soit une réduction de près de 50% en 8 ans. A la vitesse de 900 km3 de glace fondue de plus chaque année, il faudrait moins de 10 ans pour atteindre la disparition totale des glace en été. Seymour Laxon a beau appeler à la prudence en raison du caractère préliminaire des résultats de CryoSat ainsi que d’éventuelles modifications de l’évolution du taux de fonte au cours des prochaines années, il est difficile de ne pas constater que ces nouvelles mesures vont dans le sens des précédentes. Toutes les prévisions concernant l’évolution de la calotte glaciaire arctique se sont révélées trop optimistes, c’est à dire qu’elles ont sous-estimé le phénomène, preuve que les modèles climatiques actuels ne sont pas bien adaptés au cas particulier des pôles.
Si les mesures de CryoSat-2 sont confirmées, elles sonneront une nouvelle fois l’alerte au réchauffement climatique. Mais il ne s’agira plus d’un problème pour les générations futures ou pour la fin du siècle. La disparition des glaces couvrant l’Arctique en été pourraient avoir des conséquences très importantes sur le climat et la météo des prochaines décennies. En effet, moins de glace induit un changement d’albédo de la surface terrestre qui favorise son échauffement (la mer ou la terre absorbent plus de chaleur que la glace dont la couleur blanche réfléchit les rayons solaires). Un réchauffement du pôle Nord réduira la différence de température avec l’Equateur ce qui influencera les grands courants aériens (jet stream) en rendant la météo plus instable. Le réchauffement de océans favorisera les relâchements dans l’atmosphère du méthane stocké au fond des océans. Or, le méthane a un impact beaucoup plus fort sur l’effet de serre que le CO2…
Si la glace de l’Arctique est un indicateur du réchauffement climatique, elle en est également un acteur important. Lorsque la Nasa a révélé que 97% de la surface des glaces du Groenland s’est mise à fondre en juillet 2012, certains ont pu comprendre qu’il ne restait que 3% de la surface couverte par les glaces. C’était faux, bien entendu, en 2012…
Michel Alberganti
[…] mesures vont dans le sens des études précédentes. Toutes les prévisions concernant (…) Lire la suite sur Slate.fr Posté dans Actualités Tags: arcti, Arctique, fin du monde arctique, fonte arctique, […]
Ce qui est aussi important, c’est qu’au final les mesures réalisées par Cryosat 2 confirment les calculs de l’évolution du volume de glace en Arctique du modèle Piomas :
http://psc.apl.washington.edu/wordpress/research/projects/arctic-sea-ice-volume-anomaly/
Sachant qu’on est probablement partis pour un minimum inférieur à 3600 km^3 cette année (l’article évoque seulement les moyennes de l’été, bien supérieures du fait qu’elles prennent en compte les valeurs de juin qui sont encore bien élevées), à 900 km^3 par an de baisse du volume il ne resterait plus rien non pas dans 10 ans mais dans 4 ans. Et si l’on se tape l’année prochaine une bérézina comme en 2011 (presque 2500 km^3 de perte de glace par rapport au minimum 2010), cela va déjà faire un sacré ménage.
Bon, tout cela c’est avec des “si”, mais je pense sérieusement que 10 ans avant de voir un Arctique presque libre de glace en fin d’été est un grand maximum. On est plutôt parti pour y arriver d’ici 5 à 8 ans.
En ce qui concerne le Groenland, dans la foulée de son dégel temporaire de surface presque intégral en juillet, le volume de glace fondue cette année dépassait déjà au 8 août tout ce qui avait pu être observé depuis le début des mesures satellites, dans la foulée d’un effondrement de son albedo :
http://climatechangepsychology.blogspot.co.at/2012/08/marco-tedesco-2012-goliath-melting-year.html
http://climatechangepsychology.blogspot.co.at/2012/08/jason-box-greenland-albedo-lowest-since.html
Merci Michel (si je peux me permettre) pour la précision.
Je crois que la confusion sur les “glaces de l’Arctique” vient de ce que les gens n’ont pas une idée très claire de la géographie autour du pôle nord.
D’une part on a le Groënland, un quasi-continent, recouvert presque entièrement de glaciers énormes, plusieurs milliers de mètres d’épaisseur. La glace y est très ancienne, on fait des forages pour analyser l’atmosphère pré-historique. C’est l’accumulation de la neige tombée pendant des centaines de milliers d’années. Ces glaciers coulent très lentement vers la mer, puis flottent dessus et enfin se fracturent en énormes icebergs.
D’autre part on a la glace de mer, ou banquise, qui se forme sur l’océan glacial arctique. C’est de l’eau salée, elle fait entre un demi et maximum 4 mètres d’épaisseur. Elle fond et se reforme en permanence. Quand elle se brise, elle ne forme pas d’iceberg, à peine quelques glaçons plus ou moins denses. Les sous marins nucléaires peuvent se cacher dessous et tirer leurs missiles à travers. Le meilleur moyen de se rendre compte, de visualiser, c’est de la voir par dessous (par exemple là : http://www.underthepole.com/fr/actualites/teaser-du-film-on-a-marche-sous-le-pole/).
En Antarctique, il y a surtout des glaciers sur le continent, et très peu de banquise.
Je crois que c’est important de bien distinguer les deux.
@cagouilles Merci beaucoup pour ces précisions très utiles en effet. La distinction est très importante. Il va de soi que la fonte de la banquise ne se produit sans doute pas seule. Les conditions de température qui la provoque affectent également l’inlandsis du Groenland.