Pourquoi l’homme ne galope pas…

Oui, pourquoi l’homme ne galope-t-il pas ? Une réponse hâtive serait sans doute : “Parce qu’il n’a que deux jambes…”. Trop hâtif pour trois chercheurs des universités d’Anvers et de Gand. “Le saut unilatéral et le galop bipède sont des types de démarche que les humains sont capables d’effectuer”, assurent Pieter Fiers, Dirk De Clercq et Peter Aerts dans l’article publié par le très sérieux Journal of Experimental Biology du 13 décembre 2012. “Contrairement à de nombreux animaux, qui préfèrent le galop comme leur course rapide, le galop bipède humain ne se produit que dans des conditions très particulières, comme la descente de la pente d’une colline”. Étonnant, en effet…

12 volontaires au galop

Pour en avoir le cœur net, les scientifiques belges se sont lancés dans une expérience scientifique permettant d’examiner la mécanique des membres inférieurs de l’être humain et d'”explorer les possibles raisons pour lesquelles des humains n’optent pas spontanément pour le galop pour leur déplacement en régime stable  sur terrain plat”, précisent les auteurs. Afin de tirer ce mystère au clair, les chercheurs ont fait appel à 12 volontaires auxquels ils ont demandé de courir et de galoper à la vitesse de leur choix. Pendant ce temps, ils ont enregistré une série de données cinématiques et cinétiques ainsi que les valeurs du travail mécanique produit par les jointures des membres inférieurs (hanche, genou cheville). Grâce à cette analyse, les scientifiques ont pu découvrir que les principales différences entre la course et le galop se situent au niveau de la hanche.

En effet, le galop, du fait de sa configuration asymétrique, induit des actions de la hanche et des positions des pieds différentes. A ce stade, il est bon de rappeler la définition du galop. Pour ceux qui ne sont pas familiers de cette démarche, il s’agit d’une “allure sautée, basculée, diagonale et asymétrique à trois temps inégaux suivis d’une phase de projection”. Les scientifiques belges notent que “la jambe trainante freine le corps dans la direction verticale mais le propulse vers l’avant tandis que la jambe qui mène agit en sens opposé”. Cela se complique donc un peu. D’autant que les chercheurs ajoutent que “bien que chaque jambe conserve l’énergie mécanique en échangeant l’énergie mécanique externe avec l’énergie potentielle élastique, l’orientation spécifique de la jambe entraine plus de dissipation et de production d’énergie dans le galop que la course“. Dont acte…

Les chercheurs belges ont installé sur la piste d’essai de 30 mètres des capteurs pour mesurer les forces exercées par les pieds des volontaires équipés, par ailleurs, d’un système de capture de mouvements en trois dimensions qui a permis de réaliser un modèle numérique animé du galop bipède (vidéo ci-dessus). Tous comptes faits, le galop consomme donc plus d’énergie que la course pour un être humain. Nous voilà rassurés. Imaginons que les chercheurs aient découvert que nous aurions tout intérêt à galoper… Nous aurions soudain dû admettre quelques millions d’années d’erreur.

Il existe toutefois de rares exceptions. Ainsi, les Chevaliers de la table ronde, revus par les Monty Python (Sacré Graal), n’hésitaient pas à galoper au son de noix de coco…

Michel Alberganti

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Le saut du mur du son en direct

Suivez la tentative de franchissement du mur du son en chute libre par Felix Baumgartner en direct:

Les données de l’exploit:

Altitude du saut : 38,750 km
Vitesse à atteindre : 1087 km/h

Les images de la montée (captures d’écran):

 

 


Les épisodes précédents:

Périscope : Chute libre, OGM, Nobel…

“Périscope” est une nouvelle rubrique régulière que vous propose désormais Globule et télescope. Un coup d’œil rapide devant, derrière et parfois sur les cotés sur ce qui va se passer, s’est passé ou aurait dû se passer dans les domaines de la science, de l’environnement et de la technologie. Pour le plaisir des découvertes avec […]

Felix Baumgartner va tenter de franchir le mur du son en chute libre

La date est fixée : cela doit se passer le lundi 8 octobre au dessus du Nouveau Mexique, un Etat du sud-ouest des Etats-Unis. Felix Baumgartner, 43 ans, va monter à l’altitude de 36,5 km dans une nacelle soulevée par un ballon d’hélium. Là, dans la stratosphère, équipé d’une combinaison de cosmonaute, il va plonger […]

Un homme en chute libre peut-il franchir le mur du son ?

Felix Baumgartner rêve de devenir le premier homme à franchir le mur du son. Jusqu’à présent, seuls les pilotes d’avions militaires y sont parvenus, à l’exception de ceux du Concorde dont les vols se sont arrêtés en 2003 et de Andy Green qui a atteint 1227.99 km/h le 15 octobre 1977. Mais tous ces pilotes étaient […]

Michel Alberganti

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L’effet placebo fonctionne aussi sans passer par la conscience

Avec l’effet placebo, on va de surprise en surprise. On a d’abord cru qu’il fallait que tous les protagonistes croient profondément à l’efficacité d’un  produit ou d’un traitement pour que le patient en bénéficie. C’est à dire qu’il soit soigné malgré l’absence de tout principe actif. D’où les précautions prises pendant les essais en double aveugle pour tester l’efficacité d’un nouveau médicament. Le médecin prescripteur ne devait surtout pas savoir s’il prescrivait la nouvelle molécule ou un placebo.

Inutiles mensonges

Ensuite, on a découvert que tous ces mensonges ne servaient à rien. Et même que, lorsque le patient sait qu’il prend un placebo, l’effet positif se produit quand même. Difficile à comprendre. Le cerveau, la conscience, ne jouerait donc aucun rôle. Ce que l’on sait, dans ce cas que l’on absorbe une pilule de sucre ou de vitamine, n’agirait pas sur les réactions du corps… Ce dernier recevrait donc un autre message. Et il réagirait en fonction d’une information erronée pour déclencher des mécanismes contribuant à la guérison. Des mécanismes qui ne se seraient pas activés sans ce processus improbable. Le corps aurait besoin d’un subterfuge, même grossier et cousu de fils blanc, pour décider de se soigner. Dans la mesure de ses possibilités, certes. Mais reconnaissez que l’on nage en plein mystère. Et qu’il s’agit de l’une des histoires les plus extraordinaires que l’organisme humain nous ait donné à découvrir. D’autant qu’il fonctionne dans les deux sens. A l’effet placebo, positif, répond l’effet nocebo, négatif.

Sans être au courant…

Cette histoire ne s’arrête pas là. Des chercheurs viennent d’en écrire un nouveau chapitre en découvrant que les effets placebo et nocebo n’ont tout simplement pas besoin de passer par la conscience pour agir. Ils lèvent sans doute ainsi un coin essentiel du voile pour tenter de comprendre les précédentes étapes. “Une personne peut avoir une réponse placebo ou nocebo même si elle n’est pas au courant d’une quelconque suggestion d’amélioration ou anticipation de détérioration”, affirme Karin Jensen, de l’hôpital Massachusetts General et de la Harvard Medical School, auteur principal de l’article paru dans les Proceedings of the National Academy of Sciences (PNAS) du 10 septembre 2012.

Conscience court-circuitée

Pour parvenir à cette affirmation assez incroyable, les chercheurs n’ont pas hésité à mettre en doute l’un des fondements de l’explication de l’effet placebo. Malgré les précédentes découvertes, il restait établi que ce phénomène fonctionnait grâce à une sorte de projection mentale du patient liée à l’espérance d’une guérison ou à la crainte d’une aggravation de sa maladie. Les chercheurs sont néanmoins partis d’une autre découverte, récente, concernant les mécanismes de récompenses ou de punition chez l’être humain. Certains travaux montrent que ces réactions pouvaient se produire très rapidement, sans que les patients aient besoin de consciemment enregistrer leurs stimulations dans leur cerveau. La neuro-imagerie a montré que certaines structures du cerveau, comme le striatum et l’amygdale, peuvent traiter des stimuli avant même qu’ils parviennent à la conscience. Elles peuvent ainsi avoir des effets directs sur la cognition et le comportement de l’individu. Tout se passe alors comme si la conscience était court-circuitée… Un tel phénomène peut-il se produire avec l’effet placebo ?

Deux expériences

Pour répondre à cette question, Karin Jensen et son collègue Jian Kong ont réalisé deux expériences avec 40 volontaires en bonne santé (24 femmes, 16 hommes, âge moyen de 23 ans). Dans la première, les chercheurs ont appliqué une source de chaleur sur le bras des participants tout en leur montrant des images de visages humains masculins sur un écran d’ordinateur. La première image était associée à une faible douleur de brûlure et la seconde image à une forte douleur. Les participants devaient ensuite noter leurs sensations de douleur sur une échelle de 0 à 100, 0 correspondant à une absence totale de douleur et 100 à la douleur la plus forte imaginable. Les patients ne savaient pas que la chaleur qui leur était appliquée restait rigoureusement la même au cours de l’expérience. Comme on pouvait le prévoir, la douleur ressentie s’est trouvée liée à l’association avec les images. Les participants ont noté, en moyenne, leur niveau de douleur à 19 lorsque les images montraient des visages associés à de faibles douleurs (effet placebo) et à 53 lorsque les images étaient associées à de fortes douleurs (effet nocebo). Jusque-là, rien de bouleversant. Juste la confirmation de l’effet placebo classique.

Images invisibles

Dans une seconde expérience, les participants ont reçu la même stimulation sous forme de chaleur. Les images ont également été projetées sur l’écran d’ordinateur mais, cette fois, d’une façon si brève que le cerveau ne pouvait les reconnaître consciemment. Après cette succession de flashes, les participants ont noté leur niveau de douleur : 25 de moyenne en réponse aux visages associés à une faible douleur et 44 pour les visages associés à une forte douleur. Les effets placebo et nocebo se sont donc produits de façon similaire malgré l’absence de conscience de l’association visage-douleur.

Nouvelle voie

Ted Kaptchuk, directeur du Program in Placebo Studies (PiPS) au Beth Israel Deaconess Medical Center/Harvard Medical School, coauteur de l’article, déclare : “Ce n’est pas ce que les patients pensent qu’il va se produire, c’est ce que le cerveau non conscient anticipe, malgré l’absence de toute pensée consciente, qui influence le résultat. Ce mécanisme est automatique, rapide et puissant. Il ne dépend pas des délibérations mentales et du jugement. Ces découvertes ouvrent une voie entièrement nouvelle vers la compréhension de l’effet placebo et des rituels de la médecine”.

Michel Alberganti

 

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Parfois, une bonne colère vaut mieux que le pardon et l’oubli

L’expression de la colère peut s’avérer nécessaire pour résoudre certains problèmes relationnels. Dans ce cas, il s’agit de faire le sacrifice d’un moment désagréable au profit d’un bénéfice à long terme pour la santé de la relation. Ainsi, pardonner et oublier ne serait pas la panacée pour faire durer un mariage. Telle est la conclusion d’une partie des travaux menés récemment sur la compréhension des raisons pour lesquelles certaines relations durent alors que d’autres échouent. Ces études tentent également d’évaluer l’impact de la qualité des relations intimes sur la santé.

La psychologie positive contestée

Le travail réalisé par James McNulty, psychologue de l’université de Floride, a été présenté au dernier congrès annuel de l’association américaine de Psychologie (APA) à Orlando. Il prend à contre pied une tendance dans la recherche qui, au cours des dernières années, a favorisé une approche positive de la psychologie assurant que le pardon, l’optimisme et la gentillesse pouvaient améliorer les relations après une sérieuse transgression. En analysant cette tendance, James McNulty est parvenu à des observations contradictoires. “J’ai constaté que les pensées et les comportements censés être associés avec le bien-être produisaient chez certaines personnes un effet inverse, en particulier chez celles qui ont le plus besoin d’aide pour parvenir au bien-être”, témoigne-t-il. D’où sa tentative d’évaluation du coût potentiel de la psychologie positive.

L’efficacité du pardon

Dans plusieurs études récentes, James McNulty a découvert que le pardon dans le mariage pouvait avoir des effets négatifs imprévus. “Nous avons tous fait l’expérience d’un partenaire qui transgresse les règles d’une relation à notre désavantage. Cela peut arriver si ce partenaire dépense trop d’argent, est infidèle ou n’est pas assez présent. Dans de telles situations, nous devons décider si nous sommes en colère et ne pas céder sur cette colère ou bien s’il est préférable de pardonner”. L’étude de James McNulty montre qu’une série de facteurs influence l’efficacité du pardon, y compris le degré de correction du partenaire fautif ainsi que la gravité et la fréquence de la transgression.

“Penser qu’un partenaire pardonnera conduit les personnes correctes à avoir moins tendance à offenser ce partenaire et les personnes incorrectes à l’offenser plus”, estime-t-il. Par ailleurs, la colère peut jouer un rôle important pour faire comprendre au partenaire indélicat que son attitude n’est pas acceptable. “Si ce partenaire peut faire quelque chose pour résoudre le problème qui, sinon, va continuer à affecter négativement la relation, des bénéfices à long terme peuvent résulter d’une suspension temporaire du pardon et de l’expression de la colère”.

En fait, comme bien souvent dans les recherches en psychologie, la conclusion de l’étude de James McNulty est frappée au coin du bon sens. “Ce travail suggère que les gens doivent être plus souples dans leur façon de traiter les problèmes qu’ils rencontrent fatalement aux cours d’une relation. Il n’existe pas de solution miracle, pas d’attitude ou de comportement unique dans une relation. Les conséquences de chaque décision que nous prenons dans nos relations dépendent des circonstances de chaque décision”.

La frontière de la colère…

Le bon sens a souvent du bon, même lorsqu’il semble enfoncer des portes ouvertes. En contestant certains postulats de la psychologie positive, James McNulty fait sans doute oeuvre utile. La réhabilitation d’une bonne colère, lorsque les circonstances la justifient, est probablement une bonne nouvelle pour ceux qui pouvaient trop se l’interdire. Mais la prudence du chercheur nous renvoie à la source du problème. Quand décider que la frontière de la colère est dépassée ?…

Michel Alberganti

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Superbird: la pêche sous-marine du cormoran impérial en vidéo

Pendant que les sportifs s’affrontent aux JO de Londres, il peut être instructif de comparer les performances extrêmes de l’homme à celles d’autres animaux. Prenons le plongeon, par exemple.  Ce geste essentiellement esthétique pour les hommes, est vital pour certains oiseaux comme les cormorans. Le genre impérial qui vit surtout en Patagonie a été étudié par le National Research Council of Argentina (CONICET) associé à la Wildlife Conservation Society (WCS).

45 mètres de profondeur en 40 secondes

Les chercheurs ont eu la bonne idée de fixer une caméra sur le dos d’un cormoran afin de filmer en mode subjectif une partie de pêche de l’oiseau. C’est ainsi qu’ils ont découvert que le “superbird” pouvait plonger à une profondeur de 45 mètres en 40 secondes avant de chasser pendant 80 secondes au fond de l’eau. Après avoir capturé un poisson, le cormoran impérial remonte tranquillement à la surface. Pour voir l’intégralité de cette étonnante pour nous, mais semble-t-il très banale pour un cormoran, partie de pêche, rendez-vous sur le site de National Geographic sur lequel on trouve la vidéo complète.

Michel Alberganti

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Hommes et femmes ont des fantasmes sexuels très différents

Si l’on en croit l’étude réalisée par deux chercheurs espagnols de l’université de Grenade et qui doit être publiée dans la revue Anales de Psicología, l’égalité règne, presque, dans le domaine des fantasmes sexuels. Nieves Moyano Muñoz et Juan Carlos Sierra Freire ont recueilli les réponses de 2250 espagnols 18 à 73 ans (49,6% d’hommes et 50,4% de femmes) engagés dans une relation hétérosexuelle depuis plus de 6 mois, à un questionnaire de 98 questions sur les fantasmes sexuels qu’ils ont ressentis vis à vis de leur partenaire.

Près de 100% des hétérosexuels fantasment

Le résultat montre que des fantasmes sexuels agréables ont existé au cours de la vie de… près de 100% des hommes et femmes qui ont répondu. Ce taux “tombe” à 80% pour les fantasmes sexuels négatifs ou désagréables. Ce remarquable partage ne supprime toutefois pas des différences quantitatives et qualitatives entre les deux sexes. D’abord, ils ne fantasment pas avec la même fréquence. Ainsi, les femmes ont des fantasmes agréables et romantiques plus souvent que les hommes. Ces derniers, en revanche, ont des fantasmes plus fréquents concernant des activités sexuelles exploratoires comme les relations en groupe et la recherche de nouvelles sensations dans la multiplication des partenaires, l’échangisme, la participation à des orgies. La fréquence de tels fantasmes varie fortement suivant les hommes, d’une fois dans la vie à une fois par an.

Le plus désagréable: la soumission

Les fantasmes sexuels les plus désagréables apparaissent liés à la soumission. Les femmes se révèlent plus sujettes que les hommes à la pensée d’être forcées à une relation sexuelle, ce qui arrive au moins une fois dans leur vie. Pour les hommes, c’est l’homosexualité qui arrive en tête des fantasmes négatifs. Rappelons que les participants sont purement hétérosexuels.

A travers cette étude, les deux chercheurs tentent de déterminer si les fantasmes sexuels négatifs ou désagréables engendrent des dysfonctionnements et favorisent le développement de certains comportements sexuels. C’est pour cette raison qu’ils se sont adressés à des adultes de plus de 18 ans engagés dans une relation depuis au moins 6 mois. Les chercheurs notent que le fait d’avoir des fantasmes sexuels favorise certains aspects du désir sexuel et de l’excitation. Coté thérapie, ils estiment que ce n’est pas seulement la présence ou l’absence de fantasmes qui doit être pris en compte mais également l’attitude du patient vis à vis d’eux.

L’harmonie dans la différence ?

Peu de grandes révélations, en somme. Si ce n’est que le fantasme sexuel est bien partagé par les deux sexes. Mais les importantes différences d’objets de ces fantasmes que montre l’étude confirme que les hommes et les femmes ne fantasment pas vraiment des même situations. Pas de quoi faciliter l’harmonie. A moins que ces différences ne soient la garantie d’une plus grande richesse de la vie sexuelle des couples. Mais l’étude, semble-t-il, ne va pas jusque là… Elle n’explique pas, non plus, pourquoi nous avons des fantasmes négatifs ou désagréables. S’agit-il d’une jouissance masochiste ? Dans ce domaine, les sujets d’études futures ne manquent pas.

Michel Alberganti

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Traque des pédophiles sur Facebook

Que les pédophiles soient tentés d’exploiter Facebook pour entrer en relation avec des enfants n’est guère surprenant. On sait que, depuis qu’Internet est utilisé par les plus jeunes, cette pratique existe sur le réseau mondial et que les forces de police spécialisées traquent les suspects en permanence. Mais qu’un site privé comme Facebook, connu pour analyser avec minutie le comportement de ses membres à des fins commerciales, soit également un repère de pédophiles semblait moins probable. D’où la surprise d’une journaliste de la publication en ligne World Net Daily (WND) lorsqu’elle s’est lancée dans une enquête sur le sujet en créant un faux profil sur Facebook. Très vite des pédophiles la contactent, comme elle le raconte dans l’interview vidéo ci-dessus (en anglais) réalisée à la suite de son article publié en mai 2012 sur WND et qui comptabilise plus de 10 000 “likes” des utilisateurs de… Facebook. Echanges de photos explicites, création de groupes d’amis au label sans ambiguïté, propositions de rencontres… Tout y est.

Deux mois plus tard, le 13 juillet 2012, le directeur de la sécurité de Facebook, Joe Sullivan, dans un entretien à Reuteurs repris par ZDNet, explique que “le réseau social a mis en place une méthode de détection automatique des comportements suspects, notamment pédophiles”.  Il s’agit d’un robot qui analyse l’ensemble des conversations sur Facebook et qui signale celles qui sont suspectes. Sur quels critères ? Les relations “lointaines’, indique Joe Sullivan, entre des utilisateurs situés à loin les uns des autres et affichant une grande différence d’âge, mais également le contenu des conversations entre les 900 millions d’utilisateurs de Facebook dans le monde… La tâche est considérable et les garanties quant à l’utilisation de cet espionnage des conversations privées ne sont pas précisées par Joe Sullivan. En effet, si l’on peut se réjouir de la prise de conscience par Facebook, même tardive, du problème de la pédophilie sur son réseau, on peut noter que la solution, comme souvent en matière de surveillance, conduit à espionner tout le monde pour détecter les suspects.

Une autre solution est proposée par l’université Ben Gourion du Negev (BGU) en Israël. Il s’agit d’une approche similaire en matière de détection mais proposée sous la forme d’une application utilisable par les parents d’enfants inscrits sur Facebook. Le Social Privacy Protector, c’est le nom de l’application, promet, en un clic, de prévenir la collecte d’informations personnelles et de protéger les enfants contre les pédophiles. L’application gratuite téléchargeable est décrite dans un article de Phys.org du 6 juillet 2012. Michael Fire, doctorant du département d’ingénierie des systèmes d’information de la BGU, explique que l’algorithme de l’application “détermine scientifiquement qui doit être retiré de la liste des amis”. Sans plus de précisions, là encore, sur les critères utilisés. Il faut dire que la divulgation de ces informations seraient probablement très utile aux pédophiles pour tenter de les contourner.

Ainsi, l’espionnage centralisé ou le filtrage personnel semblent être les deux seuls moyens permettant d’espérer assurer une protection des enfants sur Facebook. Cette réponse technologique à un problème essentiellement humain fait l’impasse, semble-t-il, sur une autre voie. Est-il véritablement impensable d’éduquer les enfants pour qu’ils puissent, d’eux mêmes, détecter les “prédateurs” pédophiles ? Si c’est impossible, est-il raisonnable de laisser ces mêmes enfants voyager librement sur un réseau de 900 millions de personnes, dont 26 millions en France ? Laisserions-nous ces enfants voyager seuls ou se promener au milieu d’une foule d’inconnus sans accompagnement ? La question posée par Facebook rappelle celle des enlèvements d’enfants. Un instant d’inattention peut être fatal. La même prudence et l’exigence d’éducation ne sont-elles pas de mise sur Facebook ?

Michel Alberganti

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Un vaccin pour maigrir en mangeant gras… Paradis des futurs ex-obèses

La vogue du vaccin ne se dément pas. Après la nicotine, voici l’obésité. Les vendeurs de régimes diététiques n’ont qu’à bien se tenir. Ils vivent peut-être leurs dernières années d’opulence. Et ce sont les firmes pharmaceutiques qui pourraient prendre le relais pour tirer profit d’un mal qui sévit dans le monde entier, Etats-Unis en tête. Les perspectives sont si considérables qu’une entreprise de biotechnologies américaine, Braasch Biotech LLC, a décidé de concentrer sa stratégie sur ce type de vaccin, dont la cible principale est l’obésité humaine et animale. Pour ce qui est des animaux, la société est parfaitement bien localisée. Elle est en effet implantée à Garretson, dans le Dakota du Sud, une “ville” de 1166 âmes… Son président et directeur scientifique est Keith Haffer, spécialiste du développement de vaccins depuis 30 ans.

Anticorps contre la somatostatine

Braasch travaille sur une deuxième génération des vaccins fondés sur l’action sur une hormone, la somatostatine dont l’une des actions est d’inhiber le largage de l’hormone de croissance (GH) et d’une hormone secrétée par le foie (IGF-1). Ces deux hormones sont impliquées dans le métabolisme. Le vaccin utilise une somatostatine modifiée qui provoque la production par le système immunitaire d’anticorps contre la somatostatine naturelle. Il induit ainsi une suppression de l’inhibition de l’hormone de croissance sans interférer directement avec elle. Au final, l’organisme consomme plus d’énergie et il perd du poids.

Keith Haffer a testé le vaccin avec deux groupes de souris comprenant chacun 10 animaux obèses mâles. Le premier groupe a reçu le vaccin et l’autre des injections d’une solution saline. Toutes les souris avait été, auparavant, nourries avec un régime très gras pendant 8 semaines et elles ont continué à manger le même type de nourriture pendant les 6 semaines de l’expérience. Les vaccinations ont été administrées deux fois, la première injection ayant lieu au début de l’étude et la seconde 22 jours après.

10% de perte de poids

Quatre jours après la première injection, les souris vaccinées ont affiché une perte de poids de 10% qui n’a pas été observée sur les souris non vaccinées.  A la fin de l’expérience, les résultats ont montré que les deux injections ont provoqué la production d’anticorps à la somatostatine sans affecter les niveaux normaux d’hormone de croissance IGF-1 et d’insuline. Les souris traitées ont conservé leur perte de poids de 10% jusqu’à la fin du traitement.

“Cette étude démontre la possibilité de traitement de l’obésité par vaccination”, affirme Keith Haffer. “Bien que de nouvelles études soient nécessaires pour découvrir les effets à long terme de ce vaccin, la traitement de l’obésité humaine par vaccination devrait apporter aux médecins une alternative aux médicaments et à la chirurgie pour lutter contre l’épidémie de surcharge pondérale”. Les résultats de l’étude doivent être publiés dans la revue Journal of Animal Science and Biotechnology du 8 juillet 2012.

On se prend alors à rêver un peu. Il suffirait d’un double vaccin, nicotine et somatostatine, pour arrêter de fumer sans prendre de poids ! De quoi supprimer l’un des freins à l’arrêt du tabac. Et pour ceux qui ne fument pas, on imagine leur joie de pouvoir enfin dévorer sans grossir, et même maigrir en mangeant bien gras… Le paradis, non ?

Michel Alberganti

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Gagner plus ne fait pas toujours plaisir… aux névrosés

Voilà qui devrait ravir certains employeurs ! En effet, certains employés vivraient mal une augmentation de salaire… Telle est la conclusion d’un docteur en économie de l’université de  Warwick, Eugenio Proto, dans un article de travail publié en mai. Avec Aldo Rustichini, de l’université du Minnesota, il s’est penché sur la façon dont certains traits de personnalité peuvent affecter notre évaluation de l’impact de notre niveau de revenu sur notre degré de satisfaction dans la vie. Autrement dit, l’argent fait-il le bonheur ? Les deux chercheurs ont revisité cette antique question pour aboutir à une réponse nuancée. En fait, l’argent peut apporter des satisfactions… si l’on n’est pas névrosés. Dans le cas contraire, cela se complique. En effet, les névrosés peuvent considérer une augmentation de salaire ou de revenus comme un échec. Le phénomène se produit si l’augmentation est inférieure à ce qu’ils attendaient.

Mesure de la réussite

De fait, la névrose peut conduire à ressentir des états émotionnels négatifs. Les personnes très névrosées sont ainsi plus sensibles à la colère, l’hostilité ou la dépression. Ainsi, ce sont celles qui ont de hauts salaires et un haut niveau de névrose qui peuvent ressentir une augmentation comme un échec. “Ces personnes interprètent l’augmentation comme une mesure du succès. Si leur salaire est bas, une augmentation les satisfait parce qu’elle la considère comme une récompense. En revanche, si leur salaire est déjà élevé, ils peuvent considérer que l’augmentation n’est pas suffisante. Ils la ressentent alors comme un échec partiel et cela réduit leur degré de satisfaction”, explique Eugenio Proto. Pour lui, ce résultat démontre que nous considérons plus l’argent comme une façon de mesurer notre réussite que comme un moyen de vivre avec plus de confort.

Seuil d’insatisfaction

On peut toutefois noter la différence de réaction entre ceux qui gagnent peu et ceux qui gagnent beaucoup. Il semble que l’insatisfaction n’apparaissent qu’à partir d’un certain niveau, non précisé, de revenus. Il se produirait ainsi un basculement de la signification de l’augmentation de salaire: récompense lorsque le salaire est bas, mesure du succès lorsque le salaire est élevé. On peut imaginer que ce seuil est franchi lorsque le niveau de salaire est déjà suffisant pour assurer le degré de confort souhaité par la personne. Au delà, la satisfaction due à l’augmentation n’est plus assurée par le gain de confort puisque ce dernier n’est plus ressenti comme nécessaire. C’est alors la mesure du succès qui prend le relai. Et, bien entendu, cette évaluation est forcément très subjective. Mais il ne faut pas oublier qu’Eugenio Proto établit d’emblée une relation entre de telles réactions et la névrose…

Moralité

Les employeurs ont tout intérêt à plutôt augmenter les bas salaires. Et à éviter les petites augmentations des hauts salaires. Mais il leur faut, avant tout, identifier les salariés névrosés afin de pouvoir appliquer au mieux ces règles. Sauf à penser qu’ils le sont tous. Ce qui, dans certaines entreprises, a des chances d’être vrai…

Michel Alberganti

 

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Réapprendre à marcher après une paralysie des jambes

Cette vidéo montre comment les chercheurs de l’École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) ont réussi à restaurer la marche chez des rats dont la moelle épinière avait subi une lésion provoquant la paralysie des membres inférieurs (paraplégie). Publiée dans la revue Science du 1er juin, l’étude menée par le Français Grégoire Courtine montre les résultats spectaculaires obtenus grâce à une injection d’un cocktail de produits chimiques et à la stimulation électrique de la moelle épinière lésée. Cinq années de travail ont été nécessaires pour aboutir à cette restauration des facultés motrices des membres inférieurs. Il s’agit d’une démonstration spectaculaire de la plasticité du système nerveux. «Grâce aux effets combinés des stimulations et d’un entraînement avec un dispositif de soutien vertical, nos rats retrouvent la marche volontaire en quelques semaines. Ils peuvent rapidement se mettre à courir, à monter des marches ou à éviter des obstacles», explique Grégoire Courtine dans un article publié sur le site de l’EPFL.

Stimulation électrochimique

Le traitement commence par l’injection dans la partie de la moelle épinière située en dessous de la lésion d’un cocktail chimique qui stimule les neurones coordonnant les mouvements de la marche. Dix minutes plus tard, les scientifiques appliquent une stimulation électrique de la même région de la moelle épinière. En 2009, des travaux précédents de Gérard Courtine, mais également de Reggie Edgerton, professeur à l’université de Californie Los Angeles (UCLA), avaient montré qu’il est possible de restaurer les mouvements des membres paralysés par des stimulations électrochimiques. Mais cette marche n’était alors pas commandée par le cerveau. Le plus important restait donc à faire: reconnecter les neurones situés sous la lésion avec ceux du cerveau. C’est l’exploit réalisé par l’équipe de Gérard Courtine.

Marche volontaire rétablie

Les scientifiques sont partis du constat que la moelle épinière semblait capable de commander les mouvements des pattes inférieures de façon autonome. C’est à dire sans ordres provenant du cerveau. Cela laissait poindre l’espoir que de très faibles signaux pourraient être suffisants pour rétablir un contrôle volontaire de la marche. Pour tester cette hypothèse, les chercheurs ont remplacé le tapis roulant sous les pattes du rats par un robot qui n’apporte plus qu’un simple maintien de l’équilibre. Un carré de chocolat est alors suffisant pour motiver l’animal. Au bout de quelques temps, avec le maintien de la stimulation électrochimique, la marche volontaire s’est rétablie.

Les fibres nerveuses contournent la lésion

C’est alors que le plus extraordinaire phénomène se produit: des fibres nerveuses ne mettent à repousser pour contourner la lésion ! “Nos rats sont devenus des athlètes, alors même qu’ils étaient complètement paralysés quelques semaines auparavant. Je parle d’une récupération à 100% des capacités de mouvements volontaires», déclare Gérard Courtine. On imagine facilement les espoirs qu’une telle expérience peut susciter pour l’homme. Les essais de phase 2 sur l”être humain devraient commencer d’ici deux ans. Entre temps, les chercheurs de l’EPFL vont coordonner le projet NeuWalk, doté de 9 millions d’euros.

Un espoir immense

Ces travaux apparaissent très prometteurs. Ils confirment les découvertes multiples des scientifiques sur les extraordinaires capacités plastiques du cerveau et du système nerveux. Il n’est donc plus impossible d’imaginer que des personnes paralysées puissent retrouver le contrôle de la motricité de leurs membres. Nul doute que les chercheurs vont susciter de très nombreuses attentes. Il leur reste à confirmer leurs promesses chez l’homme.

Michel Alberganti

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