La sélection du Globule #36

Dinosaures

On compte au moins cinq épisodes d’extinctions massives d’espèces dans l’histoire de la Terre, la dernière étant celle qui a conduit à la disparition des dinosaures il y a 65 millions d’années. Depuis plusieurs années, certains chercheurs avancent l’idée que nous sommes en train de provoquer la sixième grande extinction du vivant.

– Le gouvernement indien a annoncé un vaste plan de reforestation et d’amélioration de la qualité de ses forêts. Il y consacrera plus de 10 milliards de dollars sur dix ans.

La NASA a échoué à lancer le satellite Glory qui devait étudier les particules en suspension dans l’atmosphère. Nature fait remarquer qu’après le satellite OCO (censé mesurer les concentrations de dioxyde de carbone), c’est la deuxième fois en deux ans que la NASA perd au décollage, et avec la même fusée, un instrument d’étude du climat.

Dans la même thématique, le CNRS a mis en ligne un dossier interactif sur le climat de la Terre.

La Commission européenne souhaite interdire aux pêcheurs de rejeter à la mer les prises indésirables, une pratique qui leur permet de n’intégrer à leurs quotas que les poissons rentables. On estime que chaque année, pour la seule mer du Nord, un million de tonnes de poissons (en général morts) retournent d’où ils viennent.

– C’est une équipe de chirurgiens français qui a pour la première fois greffé une bronche artificielle. Une opération qui a permis d’éviter l’ablation totale d’un poumon chez un patient atteint d’un cancer.

– Un nouvel article sur un champignon qui prend le contrôle du cerveau de certaines fourmis et les transforme en zombies.

– Pour terminer : les pleurs du soir (ou de la nuit), les couches à changer, les régurgitations, les maladies infantiles, le baby blues, l’ado qui traîne des pieds pour tout, le couple qui bat de l’aile… Oui, vous avez reconnu les joies d’être parent (j’ai quatre enfants, je sais de quoi je parle). Pourtant, pourtant… nous continuons à nous reproduire et, quand nous le faisons, nous exagérons la joie de la paternité et de la maternité. En fait, nous nous leurrons nous-mêmes en nous donnant l’illusion d’un bonheur plus grand qu’il n’est. A lire dans Time avant d’aller chanter une énième berceuse au gnafron qui hurle dans son berceau.

Pierre Barthélémy

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La sélection du Globule #10

Uner-Tan-SyndromeL’histoire de ces Turcs ne pouvant marcher qu’à quatre pattes a, paraît-il, fait couler beaucoup d’encre il y a quelques années. Si, comme moi, vous l’avez ratée, l’heure est venue pour une session de rattrapage. Cela s’appelle le syndrome Uner Tan, du nom du biologiste turc qui l’a décrit, et c’est dû à une malformation du cervelet qui, entre autres, joue un grand rôle dans la coordination des mouvements. Ceux qui en souffrent présentent aussi de graves difficultés à s’exprimer et un retard intellectuel notable.

Le chercheur danois Bjørn Lomborg, devenu mondialement célèbre pour avoir accusé les climatologues et les médias d’exagérer les conséquences pour l’humanité du réchauffement de la planète, vient de changer d’avis. Il réclame désormais 100 milliards de dollars par an pour lutter contre le réchauffement climatique. Un virage à 180° qui mérite d’être noté. Dans le même temps, un rapport indépendant s’est montré assez critique sur le fonctionnement (mais pas sur les résultats scientifiques) du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC).

On aime toujours les histoires de David contre Goliath (enfin, moi, j’aimerais bien juste une fois voir le géant éclater la tête du petit d’un bon coup de gourdin…). Et voici comment des fourmis tiennent en respect des éléphants.

Savez-vous fabriquer de l’eau ? Même si nous avons tous fait l’expérience en cours de chimie (de l’hydrogène, de l’oxygène, une allumette… et un grand bang), ce n’est pas si évident que cela. Une étoile mourante a réussi à le faire.

La metformine, un médicament couramment pris contre le diabète de type 2, pourrait réduire les risques de développer un cancer du poumon. En tout cas, cela marche sur la souris…

Je suis assez âgé pour avoir été vacciné contre la variole mais mes enfants ne le sont pas, la maladie ayant été considérée comme éradiquée en 1977. Une petite cousine, la variole du singe, est en train de gagner du terrain chez l’homme en République démocratique du Congo, suffisamment pour que des chercheurs commencent à s’en inquiéter.

Deinococcus radiodurans est une bactérie fascinante qui résiste à d’effrayantes doses de radioactivité. On sait désormais comment elle s’y prend.

Pierre Barthélémy

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Des fourmis et des hommes

big-brother-12Fourmis

Une équipe internationale de chercheurs a annoncé une première, vendredi 27 août, dans la revue Science : le décryptage du génome de deux espèces de fourmis. Cette étude est captivante car ses auteurs ont montré la puissance des modifications épigénétiques sur la morphologie et la physiologie des fourmis, en fonction de la caste à laquelle elles appartiennent. L’épigénétique s’attache à repérer non pas ce que codent les gènes mais la manière dont, sous l’influence de facteurs environnementaux et de l’histoire personnelle, ces gènes s’expriment… ou sont rendus silencieux. Chez les fourmis, chaque individu naît avec un patrimoine génétique ressemblant mais, suivant la caste dans laquelle il atterrit, celui-ci ne s’exprime pas du tout de la même façon. Ainsi, dans l’espèce Camponotus floridanus, les fourmis qui protègent la colonie sont plus grandes que les travailleuses qui cherchent à manger. Et seule la reine est féconde. Lorsqu’elle meurt, la colonie trépasse avec elle. C’est une autre histoire chez Harpegnathos saltator, l’autre espèce, décrite comme plus primitive, dont le génome a aussi été décrypté : quand la reine meurt, une ouvrière peut prendre sa place. Avec tous les attributs y afférents y compris ses caractéristiques épigénétiques : non seulement la “promue” peut pondre, mais elle va aussi se mettre… à vivre plus longtemps car deux de ses gènes vont s’exprimer beaucoup plus fort. Le premier produit une protéine associée à la longévité chez l’homme tandis que le second code pour la télomérase, une enzyme qui, grosso modo, protège les chromosomes contre le vieillissement. On comprend mieux, à la lumière que nous apportent ces fourmis, l’importance potentielle de l’épigénétique, qui fait de nous plus que la somme de nos gènes.

Une étude passionnante donc. Sauf qu’à part une pauvrichonne dépêche AFP reprise plus ou moins proprement par quelques médias, personne en France ne s’est trop intéressé au sujet. Un peu par fainéantise, je le concède, j’ai tapé “ants” (fourmis en anglais) sur le Google News américain, histoire de voir si mes petits camarades d’outre-Atlantique avaient fait mieux. Ce fut la consternation. Non pas que mes confrères américains n’aient pas perçu l’importance de la nouvelle : ils étaient 43, dont le Scientific American par exemple, à l’avoir traitée. Non. Le choc a été de constater que, pour l’immense majorité des médias américains, les seules fourmis palpitantes du moment étaient celles qui “envahissaient” la maison dans laquelle se tourne la douzième saison de “Big Brother”, émission de télé-réalité à 8 millions de téléspectateurs, dont “Loft Story” et “Secret Story” sont les avatars français. Ces fourmis-là, qui dérangent les braves candidats dont la photo de groupe figure en tête de ce billet (ou du moins ceux qui restent après plus de 50 jours d’émissions et d’éliminations), ces fourmis-là ont été “couvertes”, comme l’on dit dans le jargon journalistique, dans 449 articles ! Plus de dix fois plus.

Après quelques pensées amères sur le fait que je me suis trompé de métier (j’aurais dû faire du “people”, c’est payant et moins fatigant pour les neurones), que l’espèce humaine préfère se délasser devant des “clones” bodybuildés et/ou siliconés plutôt que d’enrichir sa culture – scientifique ou pas –, que l’information traditionnelle n’a aucun avenir étant donné que les médias de masse s’ingénient vraiment à vider les cerveaux plutôt qu’à les remplir, je me suis demandé ce que des chercheurs découvriraient s’ils étudiaient la colonie “Big Brother”. Devant sa photo de groupe, j’ai d’abord constaté que ces étranges animaux avaient tous la peau claire, sans doute l’effet d’une mutation génétique qui les a privés de mélanine, et qu’hormis un dimorphisme sexuel assez évident, une certaine uniformité morphologique régnait : pas de gros, pas de vieux, pas de handicapés. L’environnement doit être tellement hostile qu’ils ne peuvent pas survivre… Je me suis ensuite aperçu que, comme chez les fourmis, certains rôles, comme celui du Saboteur, étaient prédéterminés (sans que cela entraîne pour autant des modifications physiques). En revanche, le Chef de maisonnée, contrairement à ce qui se passe chez Camponotus floridanus, change sans arrêt. Il a le pouvoir et la mission de nommer deux membres de la colonie, dont l’un sera chassé par les autres. Curieuse manière de vivre en société que de chercher à tout prix à éliminer les membres de son clan. C’est une colonie bizarre enfermée dans son territoire, qui ne passe son temps qu’à produire des déchets, vit dans l’égoïsme et la perpétuelle idée de la récompense ultérieure qui leur tombera toute cuite, lorsque la colonie sera détruite.

Si des chercheurs étudiaient “Big Brother” et ses dizaines de succédanés qui encombrent les télévisions du monde entier, ils préfèreraient retourner à leurs fourmis.

Pierre Barthélémy


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