Les plus courants capteurs de lumière solaire existants ne sont autres que… les fenêtres. Elles sont partout, dans les maisons et les immeubles, de la lucarne à la baie vitrée voire à la paroi extérieure elle-même de certaines tours. Leur fonction est de laisser entrer la lumière à l’intérieur des habitations et autres bureaux. Or, cette lumière pourrait fort bien être transformée en électricité grâce au fameux effet photoélectrique déjà exploité par les cellules solaires. Alors peut-on envisager de tirer partie de la gigantesque quantité de lumière qui traverse nos fenêtres pour… produire du courant ? Vous penserez immédiatement que si cela revient à obstruer nos fenêtres avec une sorte de volet photovoltaïque. Une solution guère lumineuse. Mais si les capteurs étaient transparents ? Cela changerait tout. Encore faut-il que cela soit possible, ce que les cellules solaires en silicium laissent mal entrevoir.
Depuis quelques années, se développe une technologie susceptible s’apporter une solution au dilemme lumière ou électricité. Il s’agit des capteurs photovoltaïques en polymères. Il suffirait que ces derniers soient transparents pour qu’ils s’ouvrent le fabuleux marché de la fenêtre. Pour les seules poses de nouvelles fenêtres et le remplacement d’anciennes, il se fabrique entre 10 et 12 millions de fenêtres par an en France. Une équipe de chercheurs de plusieurs universités américaines dont celle de Californie Los Angeles (UCLA) ont publié en juillet 2012 un article dans la revue ACS Nano sur, justement, des cellules solaires polymères “visiblement transparentes”, selon leur expression.
L’idée des chercheurs est de capter le rayonnement infrarouge de la lumière incidente et de laisser passer le plus possible le reste des longueurs d’onde. A priori, aucune perte importante dans le spectre visible traversant puisque le verre ne laisse, de toutes façons, pas passer les infrarouges ce qui permet de l’utiliser dans les capteurs thermiques (effet de serre). Néanmoins, le film de polymère n’est pas, lui-même, absolument transparent à la lumière visible. Il laisse ainsi passer environ 66% du rayonnement solaire ce qui, comme le montre la photo ci-dessus n’obscurcit que faiblement la fenêtre. Et surtout, la fine cellule transforme 4% de l’énergie reçue en électricité. Un rendement bien inférieur à celui des cellules photovoltaïques en silicium qui atteignent aujourd’hui de 15 à 20%.
On pourrait donc penser que la faible efficacité des nouvelles cellules polymères transparentes constitue un handicap rédhibitoire. En réalité, le calcul de la rentabilité en matière d’énergie solaire est assez différent de celui que l’on peut faire pour un moteur de voiture (20 à 30% de rendement). En effet, dans le cas du solaire, l’énergie primaire est gratuite, ce qui fait une grande différence avec la prise en compte du prix de l’essence, ou, même, de l’électricité. La rentabilité d’une cellule solaire est donc essentiellement liée à son prix d’acquisition. Or, les cellules photovoltaïques en silicium sont issues de l’industrie microélectronique et font appel à des technologies coûteuses. En revanche, les cellules polymères viennent de l’industrie pétrochimique. D’où l’espoir de coûts de production très inférieurs.
Les chercheurs ont mis au point leur film photovoltaïque en utilisant un polymère sensible aux infrarouges proches et une électrode en composite de nanofils d’argent (pas vraiment économiques…) et de dioxyde de titane qui apporte la transparence. On note, au passage, que le dioxyde de titane est déjà utilisé par l’industrie pour fabriquer du verre autonettoyant qui, grâce à ses caractéristiques de photocatalyse et d’hydrophilie, est insensible aux salissures organiques.
On peut donc imaginer des vitres autonettoyantes produisant de l’électricité. Pas que quoi éclairer une pièce, certes. Mais peut-être assez pour recharger les batteries d’appareils électroniques. On peut aussi noter que le bâtiment fait l’objet de multiples études puisque nous avons récemment parlé des LEDs intégrables dans du papier peint. Qui sait ? Peut-être que le courant généré par les vitres pourra-t-il servir à rendre les murs lumineux…
Michel Alberganti
Un des aspects essentiels de ces recherches en domotique, c’est qu’elles convergent vers la conception de logements ou de bureaux quasiment “autonome” en énergie que ce soit par les techniques d’isolation, de diminution de la consommation, de recyclage etc.. fabriquant les “négawatts” qui sont la première source d’économie d’énergie ou des solutions ou la fabrication d’énergie est de plus en plus intégrée à la conception des bâtiments.
Sans rouvrir le débat sur les “dangers” du nucléaire, il est certain que l’utilisation du soleil mais aussi du vent et pourquoi pas du géothermique dans la conception de bâtiments aussi bien particuliers que collectifs nous rendrait à terme moins “dépendant” des énormes centrales énergétiques (nucléaires ou pas) dont il faut transporter l’énergie jusqu’au point de consommation avec de plus un certain coût pour l’environnement (dans le cas de transport aérien) et une exposition à des attaques terroristes, aux intempéries et aux pannes.
Le problème reste tout de même celui du stockage (comme pour l’automobile) compte tenu du caractère “alternatif” de ces productions (aussi bien le vent que le soleil) puisque l’essentiel des besoins en éclairage se manifestent justement lorsque les cellules ne produisent pas et où en général le vent tombe (du moins dans ma belle région provençale où le mistral continue de s’épuiser sans que nous récoltions la moindre miette de sa puissance).
Mais dans le cas des habitations on n’a pas l’énorme inconvénient du poids qui est l’ennemi de tout véhicule.
Peut-être que nos arrières arrières petits enfants ouvriront des yeux ébahis en apprenant que nous dépendions d’EDF (c’est quoi EDF ?) pour nous chauffer et nous éclairer.
Un retour à l’autonomie énergétique au niveau de chaque foyer serait en tout cas un sacré changement pour nous et au passage se serait bon pour la planète.
Mes excuses pour les fautes d’orthographe! (oups! “des solutions ou” ou encore “se serait bon” et j’en ai sûrement oublié au passage;
Je n’ai pas tenu ma promesse de me relire attentivement mais c’est un peu de votre faute Michel Alberganti. 🙂
Les sujets que vous abordez (notamment dans vos deux derniers articles) sont tellement porteurs d’espoirs, parce qu’ils prouvent combien la recherche “s’active” autour de thèmes essentiels pour l’avenir de nos bambins, que je me laisse aller à trop d’enthousiasme.
Toutes les technologies qui repose sur des matériaux épuisables sont vouées à l’echec. J’imagine que les scientifiques sont au courants et qu’ils passent du temps sur ces solutions temporaire pour faire avancer le grand schmilblick de l’impact 0 sur l’écosysteme.
Bonjour,
Il n’y a que moi qui ai remarqué le “En revanche, les cellules polymères viennent de l’industrie pétrochimique”.
Euh, on ne cherchait pas à trouver des solutions alternatives au pétrole ? Et que fera-t-on quand il n’y en aura plus ? Encore une solution à court terme, pas de vrai débat sur nos réels besoins et solutions à trouver en conséquence…
[…] importante dans le spectre visible traversant puisque le verre ne laisse, de toutes (…) Lire la suite sur Slate.fr Partager […]
@ Olivier : Les besoins en pétrole pour fabriquer des films photoélectriques n’ont aucune commune mesure avec les quantités de pétrole utilisés comme carburants. Il est important de se préoccuper du tarissement des ressources fossiles. Il ne faut, néanmoins, jamais perdre de vue les ordres de grandeurs. Sinon, on risque de verser dans l’idéologie pure, avec les risques d’absurdité que cela implique.
D’accord, la réduction de l’intensité du spectre visible n’est que de 33% et cela n’obscurcit que “faiblement” la fenêtre. Mais qu’en est-il en fin de journée… devrons-nous allumer les lumières inférieures 1 heure ou deux heures plus tôt que d’habitude en raison de cette opacification de la fenêtre ? Dans ce cas, est-ce toujours rentable en termes d’économie d’énergie ?
L’idée est lumineuse en théorie (facile), mais en pratique ?
@setum Bonne remarque en effet ! Il est probable qu’il vaut mieux être bien orienté et dans une région pas trop nuageuse. Néanmoins, si vous devez allumer une heure ou deux plus tôt, vous aurez profité de la conversion de la lumière en électricité pendant 8 ou 10 heures. Cela devrait donc pouvoir être rentable, il me semble. Et puis pensez à ces baies vitrée, dans les appartements ou les immeubles de bureau qui sont tellement lumineuse qu’il faut les obscurcir dans la journée avec des rideaux ou des traitements qui assombrissent le verre… Cela concerne des millions de m2… Non?
On pourrait aussi faire remarquer que l’obscurcissement et surtout la captation des infrarouges devrait avoir un effet positif sur les besoins en climatisation donc générer des négawatts.
Bonne idée à la base mais comme les panneaux solaires, Il faut utiliser des métaux rares (ressources limitées et maintenant de plus en plus bloquées par les chinois qui sont presque les seuls producteurs) et surtout cela posera un gros problème de recyclage…
Et puis dans 30 ans, on verra plein de cas de cancers, on nous expliquera qu’on a respiré des nanofils d’argent et hop une nouvelle “amiante” a été créée.