Comme le disait un personnage de Reiser trônant sur la cuvette des toilettes : “Y a que là qu’on est bien !” Il faudrait sûrement que je farfouille dans la littérature scientifique pour voir si quelques équipes ne se sont pas penchées sur la relaxation inhérente aux lieux d’aisances, sur l’apaisante atmosphère du petit coin. Certains en font l’annexe de leur bibliothèque, d’autres profitent de ce bienfaisant moment de solitude pour résoudre qui des mots croisés, qui des grilles de sudoku. En réalité, on n’est jamais seul aux wawas. Dans votre production, bon nombre de bactéries intestinales prennent l’air (ou plutôt prennent l’eau, amis de la poésie bonsoir…). Et c’est justement la plus connue d’entre elles qu’une équipe de jeunes chercheurs japonais a choisie pour… résoudre mieux que vous vos sudokus !
Escherichia coli, de son petit nom latin, est sans doute l’un des organismes vivants les plus étudiés dans le monde et sert de “boîte à outils” génétique à de nombreux chercheurs. Dans cet esprit, notre équipe nippone de l’université de Tokyo, qui participait il y a quelques jours au concours de l’IGEM (International Genetically Engineered Machine), s’est demandé si elle pouvait transformer le colibacille en unité de communication et de décision biologique. L’idée sous-jacente est d'”appareiller” les futurs médicaments dits intelligents, qui devront mesurer l’état de santé du patient et délivrer ou non leur principe actif en fonction des informations recueillies. En ce sens, le casse-tête logique du sudoku constitue un excellent terrain d’exercice, qui convient parfaitement à l’objectif recherché puisqu’il s’agit, à partir des chiffres déjà disposés dans la grille (l’information), de décider la valeur des chiffres manquants selon des règles aussi simples que strictes.
Pour se simplifier la tâche, les biologistes japonais ont choisi une grille pour enfants avec seulement 16 cases (4×4) au lieu des 81 (9×9) traditionnelles. Les bactéries ne pouvant pas encore écrire de chiffres (ça viendra sûrement un jour…), on les a programmées pour exprimer quatre “couleurs” différentes en activant des protéines fluorescentes. Il fallait donc compléter ce genre de grille :
Si vous avez déjà joué un peu au sudoku, vous vous apercevez vite que la valeur que doit prendre la case grisée est un 4 (ou la couleur verte dans le cas de notre expérience). En effet, il y a déjà un 3 (ou un jaune) dans la rangée, un 1 (ou un rouge) dans la colonne et un 2 (ou un bleu) dans le bloc supérieur gauche. Mais, pour en arriver là, vous disposez d’un cerveau assez conséquent. Comment Escherichia coli, qui n’a pas autant de chance, se débrouille-t-elle pour obtenir le même résultat ?
Voici comment fonctionne l’expérience. La bactérie présente dans chaque case a été trafiquée génétiquement de manière à n’intégrer que les informations des bactéries présentes dans les mêmes rangée, colonne et bloc qu’elle (informations transportées par un virus ne s’attaquant qu’aux bactéries). Ainsi, dans notre exemple, l’occupante de la case grisée ne prendra pas en compte le fait que la locataire de la case inférieure droite est verte. Une fois que la bactérie a reçu trois messages, trois couleurs différentes, elle exprime la quatrième couleur. Maintenant qu’elle a “fait son choix”, elle peut en informer ses copines de rangée, colonne et bloc encore indécises, qui à leur tour se différencient et transmettent leur décision aux autres. De proche en proche, la grille sera complétée, le sudoku sera résolu. La vidéo ci-dessous (en anglais) donne plus de détails sur la procédure suivie :
Il faut préciser que plusieurs opérations peuvent être effectuées en même temps et que ce système pourrait sans problème être étendu à des grilles classiques de sudoku. Il suffirait pour cela de programmer 81 bactéries au lieu de 16. Si les microorganismes sont capables de faire des “calculs” en parallèle, on peut parier qu’ils résoudront bientôt les grilles plus rapidement que nous.
Reste donc à leur apprendre les règles du jeu d’échecs, auquel j’ai consacré beaucoup de temps et un blog dans une autre vie. Le jour où des microbes qui, d’ordinaire, finissent leur carrière dans la cuvette des toilettes, se mettront à battre des champions, je jure que je cesserai de jouer.
Pierre Barthélémy
– Les journaux ont beaucoup titré ces derniers jours sur cette nouvelle bactérie très résistante aux antibiotiques, présente dans le sous-continent indien, qui commence à se promener partout dans le monde. Faut-il pour autant s’affoler et renoncer à son voyage de noces en Inde ? Le blog 80beats de Discover Magazine fait un point rapide et complet.
– Les chiens sont probablement l’espèce de mammifères au sein de laquelle on trouve les plus grandes variations de taille (regardez cette rencontre entre un chihuahua et un grand danois pour vous en persuader…). Ceci est dû aux croisements et élevages sélectifs que l’homme a effectués avec son meilleur ami pendant des siècles et des siècles. Comme le rapporte le Scientific American, une étude australienne vient de s’intéresser aux modifications du cerveau que ces bouleversements morphologiques ont pu entraîner. Elle s’est notamment aperçue que chez les races à nez écrasé, le cerveau avait pivoté, ce qui avait déplacé le bulbe olfactif. Quelles conséquences cela a-t-il sur l’odorat mais aussi sur le comportement et l’agressivité des chiens ? Il faudra mener d’autres études pour le savoir.
– La plus grosse planète de notre système solaire, Jupiter, est une géante gazeuse. Ce qui ne l’empêche pas de posséder un noyau rocheux. Il est cependant surprenant de constater que le noyau de Jupiter est plus léger que celui de sa cousine Saturne, pourtant plus petite. Après avoir effectué une série de simulations, une équipe internationale d’astronomes estime que le noyau de Jupiter a pu être en grande partie vaporisé par une collision avec une grosse planète rocheuse, lors de la jeunesse du système solaire. Pour rappel, l’existence de la Lune est sans doute le fruit d’un carambolage entre la Terre et une planète analogue à Mars.
La Grande Tache rouge de Jupiter
– Restons dans l’astronomie, avec les priorités de recherche pour les dix ans à venir que vient de définir, dans ce domaine, le National Research Council américain. Au menu : découvrir ce qui se cache derrière la mystérieuse énergie noire, remonter à l’origine des galaxies et des trous noirs géants, et chercher, pas trop loin de nous, des planètes extra-solaires dites “habitables”, c’est-à-dire des planètes où les conditions propices à l’apparition de la vie sont réunies.
– La nocivité pour la santé des nanoparticules, dont la taille avoisine le milliardième de mètre, est au centre des débats sur les nanotechnologies. Comme il est difficile de prévoir si ces poussières de poussières seront dangereuses ou pas, les opposants aux “nanos” brandissent le principe de précaution. Cela changera peut-être avec une méthode que viennent de développer des chercheurs américains, qui permet, selon eux, de prédire comment interagira telle ou telle nanoparticule avec un système biologique donné (être humain y compris…).
– Ces mêmes chercheurs pourraient commencer leurs travaux appliqués avec les chaussettes anti-odeurs, qui sont recouvertes de nanoparticules d’argent, lesquelles ont des vertus bactéricides. L’ennui c’est que les chaussettes, cela se lave. Et que se passe-t-il quand les nanoparticules d’argent se décrochent et se retrouvent dans la nature ? C’est à cette question qu’ont voulu répondre d’autres scientifiques américains avec une expérience décrite par le New Scientist. D’où il ressort que les nanoparticules d’argent en liberté peuvent augmenter… l’effet de serre !
Pierre Barthélémy
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