Adultère et prostitution

Deux faits divers illustrent à quel point le rapport des Coréens aux affaires de moeurs est à l’inverse du nôtre.

Le premier relate l’histoire adultérine de deux policiers d’un même commissariat de la ville d’Incheon. Parti pour un 5 à 7 dans un motel des environs à bord d’un véhicule banalisé, ce couple eut la malchance d’être repéré par un fonctionnaire de la police des polices qui le suivit à la trace jusque leur motel. Lorsque le fonctionnaire appela nos deux amants depuis la réception pour leur demander des descendre, ceux-ci préférèrent tenter de prendre la fuite en sautant de la fenêtre de leur chambre qui se situait au 4ème étage. Leurs jours ne sont pas en danger mais les deux policiers sont aujourd’hui hospitalisés pour de graves blessures.

Si nos deux amants ont choisi une solution si extrême, c’est parce que l’adultère est toujours considéré en Corée comme un crime passible d’une peine pouvant aller jusqu’à 2 ans de prisons. Certes, cela fait belle lurette que dans les faits l’adultère n’est pratiquement plus réprimé, mais le fait même que ce texte existe toujours dans le code pénal coréen illustre à quel point l’adultère est mal vu par la société coréenne. Et dans le cas de nos deux malheureux policiers, malgré certaines critiques sur l’excès de zèle de la police des polices, celle-ci a défendu son fonctionnaire en argumentant que l’adultère portait atteinte à la dignité de la fonction publique et devait donc être réprimé.

Pourtant la Corée est l’un des pays où il n’a jamais été aussi facile pour un homme de tromper sa femme. Mais pour cela, il faut payer. Non pas les services d’une prostituée aux abords d’une route traversant un quartier déserté, mais une soirée dans l’un des établissements connus sous le nom de Room Salon. Un Room Salon c’est la version coréenne des maisons closes. On y va entre collègues de bureau ou en compagnie d’un client pour s’installer dans des salles privatisées où en guise de divertissements sont offerts karaoké, sélection de boissons fortement alcoolisées, et sélection de filles. Récemment des room salons pour femmes ont fait leur apparition, mais nous sommes en Corée, pays extrêmement machiste,  et la plupart de ces lieux de plaisirs pour adultes sont à l’attention des hommes.

En théorie, rien n’empêche les clients de passer une soirée à discuter, boire et chanter sagement en charmante compagnie pour ensuite rejoindre le lit conjugal. Mais le rôle des filles est évidemment de pousser à la consommation. D’alcool d’abord, puis forcément de sexe. Et si l’endroit n’est pas un baisodrome en soit, la prostituée et son client pourront se rendre dans l’un des nombreux “Love motel” avoisinants pour concrétiser la passe.

Le tout alors que la prostitution a été interdite par la loi en 2004 avec depuis, quelques efforts du gouvernement pour fermer certains Room Salons. Mais pour se rendre compte de l’ampleur de ce type de prostitution, il suffit de prendre un air innocent et demander à n’importe groupe d’hommes adultes en présence de femmes (ou mieux de leurs femmes) ce que c’est que ces Room Salons dont on parle souvent ici et là. Leurs regards et silence gênés trahiront sans ambiguïté leurs propres actes d’infidélités dans ces maisons closes à la coréenne.

Il suffit également de s’en référer à ce deuxième fait divers datant d’il y a quelques jours: la mise au grand jour de l’un des principaux Room Salon du quartier de Gangnam “Yesterday, Today, Tomorrow” qui occupait les trois étages en sous-sol d’un hotel: les clients commençaient leurs soirées dans la partie Room Salon, puis étaient guidés par le personnel de l’établissement aux étages supérieurs afin de terminer la soirée dans l’une des chambres de l’hotel dont les propriétaires étaient les mêmes que ceux du Room Salon. Ce dispositif “all in one” employait 500 prostituées et aurait permis la réalisation de 88,000 passes en deux ans. A cette échelle on doute fort que cette “découverte” soit le fruit d’intenses investigations de la part des autorités, mais plutôt celui de la détérioration des relations entre les propriétaires de ce lieu et quelques fonctionnaires qu’ils n’ont pas dû suffisamment arroser.

Vous imaginez donc la circonspection avec laquelle j’accueille les commentaires caustiques des Coréens sur le caractère volage des maris Français. On évoque les vies sentimentales tumultueuses des différents Présidents français d’un air amusé, mais implicitement on suggère qu’en Corée les leaders ont un sens moral plus affirmé. On me le fait savoir plus ouvertement parfois, en m’affirmant qu’il serait inconcevable qu’en Corée un leader politique ou un CEO de grand groupe coréen soit divorcé : “comment pourrait-il diriger un pays ou une entreprise, alors qu’il n’arrive même pas à gérer son ménage?”

Certes on surprendra moins de Coréens en flagrant délit d’adultère avec un amant consentant. Mais on se demandera si tromper sa femme en achetant le corps d’une autre n’est pas, à bien des égards, pire.

 

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Raid aérien imaginaire

Je suis à 500m de mon bureau lorsqu’au dernier carrefour, une dame en vague uniforme se tient au milieu de la chaussée et fait des gestes qui se veulent autoritaires mais qui respirent la panique, pour tenter d’arrêter la circulation chargée d’un jour de semaine à Séoul. Un accident? Une personne âgée en difficulté au milieu de la chaussée? Une classe de primaire de sortie? J’ignore donc le feu qui pourtant m’indique de passer, et m’arrête à quelques mètres de cette farouche ménagère pour constater que non, rien ne justifie un tel blocage de la circulation.

Le temps de baisser la radio et je constate que des sirènes hurlent au loin, un peu comme celles qui s’exercent à Paris tous les premiers mercredi du mois. Mais ici elles annoncent une menace bien plus tangible qu’en France: celle que constitue la 4ème armée au monde, dont les principales capacités sont amassées à quelques 70km d’ici et avec qui la Corée du Sud est toujours techniquement en guerre. Il faut bien ça pour que Séoul, la ville qui ne s’arrête jamais, s’arrête avec peine le temps de répéter les mesures à prendre en cas d’attaque aérienne.

Je dois dire que l’exercice n’est pas particulièrement rassurant: les dames en charge de faire respecter les consignes de l’exercice sont certes farouches (il faut un certain courage pour tenter d’arrêter la circulation de Séoul à la force de son petit fanion), mais on les imagine mal faire preuve d’autant de motivation en cas d’attaque réelle. Autour de moi, quelques conducteurs font vrombir leur moteur comme s’il s’agissait d’un départ de grand prix de formule 1, trahissant ainsi leur impatience ; certains livreurs passent outre les consignes de notre sympathique ménagère et continuent leur route; au bord de la chaussée, les piétons qui ne peuvent traverser montrent plus d’agacement pour ce temps perdu que de réel intérêt pour un exercice dont ils semblent avoir oublié la justification.

Paradoxalement cet exercice de préparation montre le degré d’impréparation de la population à l’éventualité d’une attaque. Pour les gens du Sud, la menace du Nord a toujours existé. Séoul est tellement proche de la frontière qu’une menace nucléaire en plus ne change pas grand chose à leur situation: en cas de guerre, la capitale subirait de toute façon des pertes énormes. C’est sous cette épée de Damoclès que le pays s’est reconstruit depuis un demi-siècle.

Si bien qu’aujourd’hui les gens ont développé une accoutumance à la menace du Nord: présente vaguement dans l’esprit des gens, un peu plus précisément peut-être lors d’accrochages militaires qui arrivent à fréquence régulière, mais ignorée par le plus grand nombre dans la vie de tous les jours.

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Les médias en Corée: recherche impertinence désespérément

 

En France, je n’aurais sûrement jeté qu’un oeil distrait à la polémique créée par le “Casse-toi riche con” de la une de Libération en référence à la demande par Bernard Arnault de la nationalité belge: coup marketing réussi d’un quotidien engagé qui s’attaque à la première fortune de France, tout en sachant qu’il ne risque pas grand chose vu qu’il joue le beau rôle aux yeux de l’opinion. La routine quoi.

Mais vue de Corée cette polémique prend une saveur particulière. Ici un tel scénario est tout simplement impensable. J’imagine un instant l’un des principaux quotidiens coréens moquer de la sorte la première fortune de Corée, Lee Kun-hee, Chairman du Groupe Samsung et fils du fondateur. Il faudrait alors tout de suite éliminer de ce scénario imaginaire le Joongang-Ilbo, l’un des trois premiers quotidiens nationaux vu qu’il est lié par alliance à la famille Samsung. Pour les deux autres quotidiens, il est d’abord impensable qu’un journaliste daigne proposer une telle une, et surtout pas le rédacteur en chef dont le rôle est de faire semblant de s’occuper de l’indépendance éditoriale du journal tout en s’occupant en réalité de ses intérêts économiques, notamment en tenant en respect les ardeurs d’éventuelles de journalistes un peu fougueux.

Mais imaginons que sur un énorme malentendu, avec en prime la défaillance incroyable de la direction commerciale du journal qui souvent fait autorité sur la rédaction pour bloquer les articles susceptibles de froisser leurs annonceurs, une telle une soit publiée. Heureusement les services de relations presse des Chaebols veilleraient et détecteraient aux aurores ce problème. Il suffirait ensuite d’un simple coup de fil pour que ce dérapage soit, d’une manière ou d’une autre, contrôlé.

J’essaie généralement d’être mesuré dans mes critiques de mon pays d’accueil, mais je dois admettre qu’en ce qui concerne les médias, je ne leur trouve aucune circonstance atténuante: ils sont tout simplement affligeants. Summum de cette médiocrité: la télé. Les Talk shows y sont creux et abrutissants (certes, mon jugement est peut-être injuste dans la mesure où je ne comprends pas la moitié des blagues qui y sont échangées), les feuilletons sont creux et abrutissants (j’aimerais varier les adjectifs mais ces deux-là sont vraiment les plus adaptés). Ils servent surtout de support de “product placement” pour marques de voitures et de faire valoir pour acteurs ou actrices dont je n’arrive pas à m’expliquer comment leur jeu peut s’avérer aussi médiocre à la télé mais sublime sur grand écran.

Enfin comment ne pas évoquer les JT, qui consacrent tous en moyenne un tiers de leur temps d’antenne à évoquer le temps qu’il fait: envoyé spécial dépêché dans un parc de Séoul pour confirmer en direct que oui, il fait soleil et que les enfants profitent du beau temps pour patauger dans les fontaines; hélicoptères réquisitionnés pour survoler les plages et constater que par beau temps, les gens vont effectivement en nombre à la plage. Puis vient la rubrique des faits divers: accidents de la circulation, crimes de droit commun qui sont peu nombreux dans les faits mais tellement couverts par les médias que le Coréen moyen est persuadé de vivre dans l’un des pays les plus dangereux au monde alors que la Corée est sûrement l’un des pays industrialisé les plus sûrs au monde.

Pour autant, balayer d’un revers de main l’intégralité des médias coréens serait injuste. Il faut d’abord réaliser les progrès effectués: les générations qui ont connu la dictature racontent que jusqu’au milieu des années 80, les rédactions des principaux quotidiens recevaient tous les jours par fax les directives pour leur une de la part du ministère de l’intérieur. Et si aujourd’hui encore on sent la collusion entre les principaux groupes de médias, les Chaebols, et les conservateurs, Internet a permis un souffle salutaire de liberté d’impertinence et d’innovation. Aujourd’hui si les médias “mainstream” restent conservateurs, les nouveaux médias constituent un contre-poids non négligeable: le concept de journalisme participatif est d’ailleurs né en Corée à la fin des années 90 avec Ohmynews. Depuis, les réseaux sociaux ont pris le relais et permettent aux Coréens de partager podcasts, vidéos, et autres contenus exprimant plus ou moins librement toute la variété des opinions représentées en Corée.

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Vivre l’enfer de Corée du Nord et s’enfuir

Parler de la Corée du Nord, pays le plus fermé au monde, c’est prendre le risque de se tromper. Mais ne pas en parler lorsqu’on en a l’occasion, c’est ajouter son indifférence aux souffrances sans fin qu’un régime totalitaire inflige à une vingtaine de millions d’hommes et de femmes. Comment donc ne pas en parler après une série de rencontres avec trois Coréens du Nord qui ont réussi à fuir l’enfer de leur pays pour s’installer au Sud? On les appelle talbukjas ici. Ils seraient 24 000 en Corée du Sud et j’ai pu en rencontrer dans le cadre d’un projet auquel j’ai pu contribuer et dont j’espère vous reparler très prochainement.

Ce qui frappe en premier lorsqu’on rencontre des talbukjas, les jeunes surtout, ce sont les séquelles que la malnutrition a laissées sur des corps qui ne demandaient qu’à grandir, mais qui pour les moins chanceux d’entre eux, n’avaient droit qu’à des bouillons de racine ou d’écorce d’arbre lors de la terrible famine que la Corée du Nord a connu dans les années 90. Parmi les trois avec lesquels j’ai pu faire connaissance, un étudiant de 29 ans paraissait en avoir 16, tandis qu’une étudiante de 21 ans paraissait en avoir 14.

Ce qui fait réfléchir ensuite, c’est que les trois talbukjas sont des exemples vivants que l’homme peut vivre longtemps et docilement privé de toute liberté élémentaire, mais pas avec la faim au ventre. C’est cette faim terrible, que peu de gens connaissent aujourd’hui en Europe ou en Corée du Sud qui pousse d’abord l’un des trois talbukjas, et avec lui certainement beaucoup d’autres gens normaux, à envisager de voler, “mais il n’y avait plus rien à voler”, puis finalement le cloue au lit, sans force, même pas celle de soulever sa tête devenue trop lourde pour un corps où il ne reste plus que les os. Mais de cette faim naît également l’énergie du désespoir qui permet à certains Coréens du Nord de traverser la frontière au mépris de la mort et du sentiment de trahison de leur patrie.

Car c’est paradoxal mais ce sentiment de trahison existe et montre l’étendue de l’emprise du régime de la dynastie Kim sur son peuple. A écouter ces témoignages on comprend qu’aucun autre régime au monde n’a poussé aussi loin le contrôle total du corps et de l’esprit de son peuple, si ce n’est celui imaginé par Orwell dans 1984. Car pour la grande majorité des Coréens du Nord, celle qui vit dans la relative indifférence du régime, ni particulierement persécutée, ni particulièrement choyée, celle donc, qui se contente de souffrir silencieusement de la faim et de l’absence totale de liberté, cette population là semble rester incroyablement fidèle au régime. Au point que parmi les trois talbukjas rencontrés, l’un raconte avoir traversé la frontière avec la Chine parce qu’il avait faim, mais en culpabilisant de trahir ainsi son pays, les siens, ses dirigeants, bref incapable de réaliser que c’est ce régime qui était à l’origine de toutes ses souffrances. A tel point qu’il pensait rester en Chine le temps de manger puis revenir au paradis socialiste une fois rassasié.

L’exemple de l’étudiante de 21 ans est encore plus révélateur de l’immense réussite du régime dans son entreprise d’endoctrinement absolu. Lorsqu’on rencontre cette charmante étudiante au sourire pétillant, on imagine une enfance sans histoire dans une chambre remplie de posters Hello Kitty. Point de Hello Kitty dans son village de Corée du Nord, mais l’étudiante raconte une enfance sans histoire dans un pays qu’elle aimait et pour la défense duquel elle mettait toute sa bonne volonté. Elle l’admettra elle-même sans sourciller: lorsqu’un voisin du village réapparait après une longue absence avec de nouveaux habits, elle le soupçonne d’avoir fait un tour en Chine et va aussitôt le dénoncer aux autorités locales. C’est en l’écoutant qu’on commence à comprendre l’extrême perversité du régime nord-coréen où même les individus les plus inoffensifs deviennent les rouages d’un système terrifiant où chacun est le délateur potentiel de l’autre.

Lorsqu’avec les difficultés économiques grandissantes, sa mère évoque vaguement l’idée de s’enfuir en Chine, elle s’y oppose avec vigueur et tente de “rééduquer sa mère”. Cette dernière aura le dernier mot en prétextant une visite chez une tante habitant au nord du pays, pour entraîner sa fille dans sa fuite du pays. Il aura fallu à cette étudiante deux ans pour prendre goût au monde libre et réaliser l’horreur de la Corée du Nord, où elle espère retourner un jour en tant qu’avocate des Droits de l’Homme.

Après ces témoignages, on ne peut être que pessimiste sur la capacité des Coréens du Nord à se soulever pour renverser le régime tyrannique dans lequel ils vivent depuis un demi-siècle. Le fondateur d’une ONG qui aide les réfugiés nord-coréens résume bien la stratégie du régime : choyer les militaires et les 3 millions d’élites privilégiées vivant à Pyongyang et seules susceptibles de soulèvement. “Seules ces deux catégories comptent pour le régime, la vingtaine de millions de Coréens du Nord restante, trop faible et docile pourrait être entièrement laissée à l’abandon qu’elle crèverait silencieusement sans mettre en danger le maintien du régime.”

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Le poids d’une image

Alors que la Corée du Sud fait le buzz sur la toile grâce au tube d’un chanteur excentrique, la Corée du Nord fait également le buzz sur la toile grâce à une photo mettant en scène son dictateur excentrique Kim Jong-un.

Cette photo donc, montre un Kim Jong-un ravi d’être photographié au milieu d’une famille qui elle, paraît beaucoup moins enthousiaste d’apparaître ainsi. Et les commentateurs du monde entier de s’exclamer: “Cette photo, quel epic FAIL !” Rendez vous compte: un Kim Jong-un tout souriant au milieu de mines terrorisées, n’est-ce pas en une image, le désaveu le plus criant d’un pays qui se prétend paradis socialiste, alors qu’il est en fait une prison à ciel ouvert? J’ai moi-même été abasourdi par cette photo, au point de me demander s’il ne s’agissait pas d’un fake.

Sauf que j’oubliais un détail: cette photo ne s’adresse ni à moi, ni aux commentateurs du monde entier mais avant tout au peuple de Corée du Nord. Et qu’aux yeux de celui-ci, ces mines qui pour nous semblent exprimer l’horreur absolue, pourraient apparaître simplement comme l’expression d’une émotion intense. Ces visages sont certes déformés par des sanglots, mais peut-être s’agit-il de sanglots de joie et d’émotion. Les regards trahissent certes la peur, mais peut-être celle que suscite l’intimidation et l’immense honneur d’être aux cotés d’un leader absolu élevé au rang de Dieu.

On peut faire dire n’importe quoi à une image. Celle qui suit par exemple: sans explication du contexte, on pourrait croire à une violente dispute entre deux hommes, l’un furieux, l’autre sanglotant, sous le regard inquiet et attristé d’un troisième. Sauf qu’il s’agit des retrouvailles entre un père et son fils après 50ans de séparation forcée due à la guerre de Corée.

Cette ambiguïté du message contenu dans une image figée est également valable pour la photo de la visite de Kim Jong-un à cette famille de Nord-Coréens: impossible de savoir quel sentiment habitait les figurants, et finalement peu importe car c’est l’interprétation qui en est faite par ceux à qui la photo est destinée qui compte. Mon avis personnel est qu’au yeux de beaucoup de Nord-Coréens cette photo montrera un leader magnanime et bienveillant tenant à descendre parfois de sa hauteur divine pour rester au plus près de son peuple reconnaissant jusqu’aux larmes. Je ne peux imaginer rien d’autre de la part d’un régime totalitaire, peut-être le terrible d’entre tous pour ce qu’il fait subir à son peuple, dont la survie jusqu’à ce jour montre qu’il sait mieux que quiconque exploiter les images et les mots pour contrôler et soumettre son peuple.

Et quelque chose me dit également que Kim Jong-un doit se réjouir de l’effet que produit cette photo sur la scène mondiale. Parce que si le reste du monde continue à penser que cette photo est un raté monumental qu’un régime nord-coréen incompétent et négligent aurait laissé s’échapper sur la toile, bref si le reste du monde continue à gentiment sous-estimer ainsi le régime de Corée du Nord, ça ne peut pas lui faire de mal.

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Un bronze qui vaut de l’or

C’est un ami de visite en Corée qui eut la description la plus juste des JO vus de Corée: “ça n’est pas les JO de Londres qu’on voit à la télé, mais la Corée aux JO de Londres!”

En France aussi les médias ont tendance à braquer les projecteurs sur les chances françaises de médaille. Mais il suffit de suivre les retransmissions coréennes pour se rendre compte à quel point même le plus chauvin des commentateurs de France télévision ne serait pas de taille face au militantisme patriotique de son confrère coréen. Ici l’esprit olympique de fraternité des peuples par le sport laisse beaucoup sa place à la volonté de la Corée de montrer aux yeux du monde à quel point elle est maintenant une puissance sportive.

Mais il ne serait pas très juste d’arrêter là cette observation et de conclure au nombrilisme de la Corée. Oui elle a tendance à contempler ses performances et à se délecter de ce qu’au classement des médailles d’or, elle a battu le voisin japonais. Mais, Japon excepté, ça n’est tant de battre les autres nations dont on se réjouit ici, mais de mesurer le chemin parcouru par la Corée. Et il est vrai que les JO sont un bon reflet des progrès immenses accomplis par ce petit pays depuis moins d’un siècle. Aux JO de Berlin en 1936, la seule médaille d’or de la Corée aurait pu être remportée par le marathonien Son Ki-chon. Celui-ci termina bien premier de la course, mais la Corée étant à cette époque simple colonie du Japon, c’est le drapeau de l’Empire du Soleil Levant qui fut hissé pour saluer la victoire de Son, qui se tint sur la plus haute marche du podium mais tête baissée lorsque retentit l’hymne japonais. 52 ans plus tard, c’est ce même Son qui fut choisi pour allumer la flamme olympique des JO de Seoul de 1988, consacrant la réussite d’un pays en plein essor économique et démocratique.

Rien d’étonnant donc que le summum de cet élan patriotique aux JO de Londres fut atteint lors du Corée – Japon match pour la medaille de bronze de la compétition de football des JO Londres. Pour ajouter un peu plus de piment à l’affaire, la prime prévue pour les footballeurs sud-coréens en cas de médaille olympique n’était pas sous la forme d’espèces sonnantes et trébuchantes, mais d’une exemption de service militaire qui dure deux ans et demi ici. Autant dire que la défaite n’était envisageable ni du point de vue de toute une Nation face à son puissant voisin et rival, ni du point de vue personnel de chacun des joueurs professionnels, dont les deux ans et demi à porter les armes constitue un handicap certain dans leurs carrières professionnelles. Et c’est donc la Corée qui emporta par 2 buts à rien ce match pour une médaille de bronze qui valait tout l’or du monde.

 

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L’Europe vue de Corée

Expérience riche d’enseignements pour le Français que je suis, d’assister aux perspectives économiques mondiales exposées par un gestionnaire de portefeuille coréen à ses clients particuliers. Son exposé doit rester simple, ne s’adressant pas à des investisseurs professionnels, mais pertinent dans la mesure où il entraîne in-fine des décisions d’investissement qui peuvent être lourdes de conséquence.

Ce qui étonne, c’est qu’on y parlera beaucoup, presque exclusivement d’Europe. Pourtant, la Chine, puissante voisine à deux pas d’ici ne présente-t-elle pas des enjeux qui pourraient influer sur l’économie mondiale et en particulier sur la balance commerciale de la Corée? Quant aux Etats-Unis, alliés historiques et partenaires commerciaux majeurs de la Corée, n’ont-ils pas leur propre lot de problèmes faisant peser leur part d’incertitude sur l’économie mondiale? Mais sur l’écran de projection, ça n’est ni la photo de Hu Jintao, ni celle d’Obama, mais bien celles de Mario Draghi, le Président de la Banque Centrale Européenne, et d’Angela Merkel qui apparaissent, illustrant l’influence majeure dont le Vieux Continent et ses quelques 500 millions de consommateurs jouissent (encore) sur la Planète.

Il faut dire que les problèmes de l’Europe sont sérieux, et rien de tel que le résumé simpliste de notre banquier pour s’en convaincre. Son diagnostic tient en une courte phrase: le sud de l’Europe est endetté. Notez au passage à quel point les différents Etats européens disparaissent au profit de “l’Europe”, cette entité économique avec ces régions riches au nord et pauvres au sud. Face à ce problème d’endettement, deux solutions de bon sens: soit dépenser moins, mais l’Europe du Sud en serait incapable car son système social coûte trop cher et que personne ne serait prêt à le remettre en cause parce que “ça n’est pas dans la culture des Européens du Sud d’être économes”.

Reste donc l’autre solution: gagner plus d’argent, mais l’Europe du sud en est également incapable car le peu d’industrie qu’il lui reste décline comme peau de chagrin. Et le gestionnaire de portefeuille de rajouter que certes les plus riches (l’Allemagne) pourraient prêter aux endettés pour retarder la catastrophe, mais “est-ce que vous mesdames, seriez prêtes à sacrifier votre épargne durement gagnée pour soulager les dettes d’un voisin dépensier et insouciant?”

-“Noooon!!” général de l’audience sur un ton à la fois amusé et inquiet.

Voilà donc réglé le compte de l’Europe lors d’une synthèse certes très vulgarisée, dont je vous épargne certaines tirades de café du commerce notamment sur la fraude fiscale, qui serait le dernier savoir-faire possédé par les Grecs… Discours vexant pour tout Européen, mais après tout est-ce sur la réalité de la crise économique en Europe qu’il faut se vexer ou sur la caricature qui en est faite?

Et la France dans tout ça? Suis-je forcé de me demander. Est-elle perçue comme faisant partie du Sud pauvre et insouciant ou du Nord riche et performant? Lorsque j’interroge le banquier, celui-ci est dithyrambique sur l’industrie française, sa technologie, son leadership dans certains secteurs de pointe. “Mais ce qui est bizarre, c’est que d’un côté vous avez Airbus ou Areva sur lesquels vous devriez vous concentrer, et que de l’autre vous avez PSA, une entreprise sans grand avenir que votre gouvernement s’acharne à défendre avec de mauvais arguments.”

 

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Vacances coréennes

C’est la saison des vacances en Corée aussi. Mais des vacances à la coréennes, c’est à dire sensiblement différentes de celles que passent la plupart des Français.

Certes des employés de bureau doivent poser quelques jours ici et là pour que Haeundae, la plus grande plage du pays, se remplisse de plus de 100 000 baigneurs chaque été. Mais dans les rues de Seoul,  la circulation de désemplit pas, comme ce soir vers 22h30 sur les quais du fleuve Han, où l’ambiance est moins festive qu’à Paris Plage.

Pour les lycéens, les cours sont terminés pour un mois environ, mais la plupart continuent à se rendre au lycée tous les jours en salle d’étude pour révisions quasi-obligatoires. Par ailleurs leurs cours privés eux, ne connaissent pas de vacances, surtout pour ceux qui préparent les concours d’entrée aux universités.

Quant aux commerces de proximité, je vous renvoie au message affiché sur la porte du restaurant en bas de chez moi qui sert un bon barbecue de porc 24h/24 et 7 jours/7, et qui explique qu’en raison de “congés nocturnes” l’établissement fermera à 22h pendant trois jours, entre les 27 et 29 juillet.

Bonnes vacances donc!

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Ahn Cheol-su for President ?

Ahn Cheol-su, c’est peut-être le prochain Président de la République de Corée et pourtant, à 5 mois des élections, il n’a ni expérience politique, ni équipe de campagne connue, ni programme politique bien défini. Il n’est d’ailleurs membre d’aucun parti politique et n’a pas clairement déclaré sa candidature à la fonction suprême.

Si en France un tel retard au démarrage serait un handicap insurmontable, tout va bien pour Ahn car nous sommes en Corée, pays où l’opinion publique possède une propension marquée à l’engouement collectif et une capacité incomparable à se mobiliser en un temps record pour une cause nationale. Il suffit parfois même d’une demi-journée pour qu’une mobilisation en masse change la tournure d’une élection présidentielle: lors des élections de 2002, tous les sondages donnaient le candidat du parti progressiste Roh Moo-hyun perdant. Le matin-même des élections celui-ci se trouvait sans surprise en mauvaise posture, notamment à cause d’un taux de participation trop faible des jeunes. Se mettait alors en place une campagne de bouche à oreille relayée par SMS sans précédent pour inciter les jeunes à aller voter. Une demi-journée plus tard, c’est Roh Moo-hyun qui remportait les élections au nez et à la barbe des conservateurs.

Tout est donc possible pour Ahn, d’autant que depuis cette semaine, la campagne de communication en vue de sa déclaration de candidature s’est accélérée. Samedi dernier paraissait l’ouvrage “Pensées d’Ahn Cheol-su” sous la forme d’un entretien permettant à ce dernier d’étayer son parcours et sa vision de la Corée. Signe de l’attente énorme de l’opinion publique, cet ouvrage a battu le record des ventes lors du premier jour de parution. On est encore loin d’un programme de campagne et le lecteur ne retiendra rien de très concret de cet ouvrage, si ce n’est que Ahn prône plus d’Etat providence, de justice sociale, de paix et la lutte contre les excès des Chaebols, ces conglomérats coréens qui dominent tous les aspects de la société coréenne. Mais ce recueil de généralités n’entame en rien l’espoir des soutiens, pour la plupart jeunes, de Ahn. Mardi soir, il était l’invité d’un talk show où il put se dévoiler davantage à l’opinion: son parcours, sa personnalité, et sa vision pour la Corée, sans toutefois confirmer sa candidature à l’élection présidentielle. Il se contenta d’affirmer qu’il prendrait sa décision bientôt en précisant qu’il convenait avant tout de dévoiler sa personnalité et expliquer ses convictions à ses supporters afin de connaître leur avis. Aucune information concrète n’est donc sorti de cette émission qui a néanmoins battu des records d’audience.

Si l’attente est aussi forte, c’est d’abord parce que le parcours d’Ahn Cheol-su est atypique. Né à Busan et 1962, Ahn décroche un doctorat en médecine à la prestigieuse Seoul National University, mais en parallèle, se passionne pour l’informatique et crée une start-up de logiciel antivirus Ahnlab. Très vite l’entreprise devient leader dans les logiciels de sécurité informatique, détenant 65% de part de marché en Corée, au détriment des leaders mondiaux du secteur.

Même si le fait d’avoir réussi dans les logiciels, domaine traditionnellement faible des Coréens comparé au hardware, lui confère une aura particulière, la popularité de Ahn ne s’explique pas par son parcours d’excellence et son succès en affaires. Certes ils sont retentissants, mais le développement économique fulgurant de la Corée a permis à beaucoup de s’enrichir. Par contre, rares sont ceux qui ont eu le comportement exemplaire de Ahn une fois leurs fortunes faites. En 2005, celui-ci quitte les commandes opérationnelles de Ahnlab et se consacre surtout à l’enseignement. Il est toujours aujourd’hui doyen de la faculté des sciences et technologies de la convergence de la Seoul National University.

Surtout, Ahn cède au début de cette année la moitié de sa participation de 37% dans Ahnlab à une fondation de bienfaisance dédiée à la lutte contre les inégalités sociales en Corée. Tel un Bill Gates coréen, Ahn fait ainsi don de la coquette somme de 155 millions d’euros, ce qui fait de lui l’un des plus généreux donateurs de la Corée, et ceci à partir d’un patrimoine qu’il s’est constitué à la sueur de son front et par son talent: un contraste flagrant face aux plus grosses fortunes de Corée, c’est à dire à peu d’exceptions près les familles propriétaires des Chaebols, qui elles sont assises sur un patrimoine obtenu par héritage souvent bien supérieur à celui de Ahn, et qui font parler d’elles plutôt pour leurs tentatives de fraudes fiscales ou d’abus de bien social que pour leurs actes de générosité.

Bien sûr tout ou presque reste à faire pour Ahn: se déclarer candidat, formuler un programme, former une équipe et surtout, ne pas décevoir les espoirs qu’il est arrivé à susciter. Mais voilà pourquoi parmi tous les candidats potentiels, Ahn est aujourd’hui le seul capable de barrer la route à la candidate conservatrice Park Geun-hye, qui elle est depuis longtemps en campagne. Parce que Ahn n’a pas besoin de promettre le changement pour susciter l’espoir, vu qu’il l’incarne. Même s’il n’a ni programme, ni équipe, ni expérience politique particulière, sa fraicheur, son talent passé à l’épreuve de son parcours académique et professionnel ainsi que son comportement d’une probité et d’un altruisme exemplaires parlent plus que n’importe quelle profession de foi enflammée de politicien aguerri.

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Amour parental

Il y aurait cinq types de preuves d’amour privilégiés tour à tour en fonction des cultures et des personnalités : les mots, les cadeaux, le temps consacré, les gestes d’affection et les services rendus. Lorsque j’observe les différences dans les relations parents-enfants entre la France et la Corée, je me dis que cette observation est pertinente. Car s’il est absurde de prétendre que les parents coréens aiment plus leurs enfants que les parents français ou vice-versa, il est flagrant de voir à quel point ces preuves d’amour diffèrent dans les deux cultures.

En France ce sont les mots d’affection et le temps consacré aux enfants qui priment pour témoigner son amour à ses enfants: quoi de plus banal pour une mère ou un père de dire à sa fille ou son fils “je t’aime”, ou de ponctuer ses phrases par un “mon coeur”. Quoi de plus naturel que de poser une demi-journée  ou de rentrer plus tôt du travail pour un dîner en compagnie des enfants. Autant d’efforts de la vie de tous les jours qui mis bout à bout, créent un environnement d’amour et d’affection au sein duquel l’enfant pourra s’épanouir.

Ce qui semble aussi naturel pour nous est souvent ignoré par les Coréens. Peut-être les parents les plus jeunes sont-ils plus expansifs dans leurs manifestations d’amour envers leurs enfants. On voit également de plus en plus de familles réunies pour profiter d’une promenade dominicale. Mais pour nombre de Coréens, là n’est pas l’essentiel du devoir des parents envers leurs enfants. Il faut d’abord leur assurer, voire leur imposer, le meilleur des avenirs possibles.

Pour cela, aucun sacrifice n’est trop grand, et au coeur de ces sacrifices se trouve l’argent. L’argent pour l’éducation d’abord: consacrer tout le revenu du foyer pour payer les frais de scolarité exorbitants de son enfant est assez courant, car entre les cours privés auxquels tous les enfants ont droit dès leur plus jeune âge et les frais d’université dont les montants n’ont rien à envier à ceux de leurs homologues américains, les foyers coréens sont ceux qui dépensent le plus parmi les pays de l’OCDE pour l’éducation de leurs enfants. Il suffit de lire les titres des journaux pour s’apercevoir à quel point l’éducation des enfants passe avant tout: on y décrit des femmes au foyer appartenant à la classe moyenne, contraintes à faire des ménages afin de compléter le financement des frais d’université de leurs enfants. Le tout sur le ton de la louange plus que de la critique de cette obsession des études supérieures.

La partie n’est pas pour autant gagnée une fois le rejeton diplômé. Arrive le temps du mariage où traditionnellement les parents se doivent d’accompagner financièrement les premiers pas de la vie du jeune couple. Pour ceux qui ont une conception la plus conservatrice du mariage, on s’attendra à ce que les parents du marié financent l’achat du premier logement tandis que ceux de la mariée prennent à leur charge l’achat des meubles et équipements indispensables à la confection d’un nid confortable. Aussi n’est-il pas rare que toutes les économies d’un couple s’envolent avec le mariage de leurs enfants. Ceci sans regret aucun car c’est la conception normale du rôle des parents selon la société coréenne.

Sacrifice financier mais sacrifice aussi de la vie de couple, toujours sur l’autel de l’éducation des enfants. Car pour nombre de parents coréens, même la meilleure université coréenne n’est qu’un second choix quand il suffirait d’aller aux Etats-Unis ou en Angleterre pour accéder aux meilleures universités au monde. Le phénomène est connu sous le nom de gireoggi appa (기러기 아빠), ou “papa oie” car celui-ci est resté en Corée pour travailler et gagner de quoi financer l’expatriation et la vie de sa femme et de ses enfants afin que ces derniers puissent étudier à Harvard ou Stanford. Telle l’oie migratrice, il doit traverser continents et océans pour voir sa famille une à deux fois par an pendant quelques jours. Ils seraient près de 200 000 papas oies en Corée, offrant un cadre familial qui serait considéré comme déséquilibré, voire malsain pour la plupart des Français, mais perçu comme l’acte de dévotion parental suprême pour nombre de Coréens.

On comprend mieux pourquoi les paroles prononcées en priorité par les parents coréens à leur enfant sont : “tu peux et tu dois mieux faire”, ou “ne nous déçois pas”, plutôt que des mots d’affection. On comprend également pourquoi les parents coréens sont plus autoritaires pour décider de l’avenir de leurs enfants. Il ne s’agirait pas de voir tous ces sacrifices consentis pour un plan de carrière, ruinés par une soudaine passion farfelue de l’enfant. Les conflits entre parents et enfants existent mais souvent les sacrifices parentaux permettent un pacte auquel les enfants adhèrent dans un sentiment où se mêlent profonde admiration et respect des parents et de tous les efforts qu’il ont consenti pour leur avenir, mais également culpabilité à l’idée de devoir trahir les idéaux qu’ils ont placés en eux. Formule idéale pour la réussite des enfants, mais pas forcément pour leur bonheur.

 

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