Adeline André

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Photo Makiko Kishi

Quand ? Le 25 janvier 18h

Où ? JTM Gallery, rue de Richelieu

Collection ? Printemps-été

Titre ? Biais

Statut ? Membre

Sièges ? Tabourets tam tam en plastique blanc

Si Adeline André a débuté dans le prêt-à-porter et a réellement inventé des modèles qui n’existaient pas (veste à trois emmanchures notamment ou exquise robe « unijambe »), elle apporte toujours un soin méticuleux à une coupe exemplaire et à des teintures raffinées. Sa présentation pour l’été 2010 était un « work in progress » où la couturière (vêtue de son emblématique tablier blanc) était en scène, s’affairant autour de son mannequin vedette. La belle Charlotte Flossaud était vêtue d’une superposition de robes de couleurs différentes (serait-ce un hommage à la coutume japonaise du Xème siècle du « junihitoe », tenue à 16 superpositions ?). Tandis que la belle s’effeuillait sagement, d’autres mannequins se revêtaient les modèles enlevés jusqu’à, en point d’orgue, une avant-dernière robe qui se déplie en trois longueurs dans un effet chenille très poétique. En georgette de soie ou en organza, les neuf modèles ont été travaillés dans le biais et créés dans des coloris délicats : coquelicot, framboise, soufre, oxyde, orpiment, capucine, germe, bougainvillée, chair.

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Georges Chakra

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Quand ? Le 25 janvier 16h

Où ? Ecole des Beaux-Arts

Statut ? Off

Collection ? Eté

Nombre de modèles ? 43

Sièges ? Bancs blancs

D’origine libanaise, Georges Chakra a une véritable réalité économique dans son pays et a aussi parfois les honneurs des « red carpet » (Tyra Banks, Misha Barton, Queen Latifah…)

Il défile à Paris au moment de la haute couture avec des modèles sobres et élégants, mais aussi des silhouettes plus chargées dans la démonstration d’un savoir-faire définissant une classique couture (broderies, dentelles, paillettes, strass…). A noter l’utilisation de cellophanes rebrodés.

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Christian Dior

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par John Galliano

Quand ? Le 25 janvier 14h30

Où ? Les salons de l’avenue Montaigne

Statut ? Membre

Collection ? Printemps-été

Nombre de modèles ? 34

Sièges ? Chaises en bois peint gris métal.

John Galliano peut être sage ou délicieusement et magnifiquement extravagant. Sa collection printemps été 2010 est un juste équilibre entre les deux, pas de fantaisie débridée, mais comme toujours un travail d’exception.

La collection rend hommage à Charles James qui inspira Christian Dior pour la création du tailleur Bar et ainsi du New Look dont l’origine a un lien avec la posture asymétrique des cavalières.

Le jour le plus long emporte les silhouettes cavalières, amazones d’un monde conquérant badinant avec les cravaches. Très près du corps, les vestes se posent sur de longues jupes drapées que l’on imagine soulevées prêtes au galop.

Les visages affichent une carnation blanche (mon voisin suggère que les maquillages sont un hommage au teint de porcelaine de Dita von Teese qui n’a pas vu le soleil depuis 1992), des yeux très maquillés, des lèvres vives. Enserrés dans des résilles, les imposants chignons amplifient l’allure altière des modèles.

Après le jour le plus long, le soir n’hésite pas à oser le court et à imposer des oppositions de couleurs extrêmement tranchées (bleu ciel et pistache, sauge et bleu pétrole, saphir et chocolat…). Les robes habillées amplifient le travail des détails : broderies, tulles,… et signent une vraie collection couture qu’il ne faudrait pas bouder sous prétexte d’inspiration nostalgique.

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Anne Valérie Hash

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Quand ? Le 25 janvier à 12h

Où ? Chez la créatrice, Bd Bonne Nouvelle

Statut ? Membre invité

Titre ? Confidences

Nombre de modèles ? 14

Les sièges ? Je ne sais pas

Si je n’ai pas vu le défilé, j’ouïs que les échos saluent le retour de la créatrice à ses premières amours d’un vestiaire échangiste où le féminin se conjugue au masculin. S’ajoute une touche de fantaisie dans la démarche qui a présidé à la collection. Des personnalités ont donné à Anne Valérie Hash des pièces de garde-robe qu’elle a librement réinterprétées, leur donnant une nouvelle vie. Le pyjama d’Alber Elbaz, le tee-shirt de Tilda Twinton, le spencer de Charlotte Rampling,  la robe de Bettina Rheims, la marinière de Jean Paul Gaultier…

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Christophe Josse

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Quand ? le 25 avril 11h

Où ? Ecole des beaux arts

Statut ? Membre invité

Saison ? Printemps-été

Nombre de modèles ? 19

Sièges ? Bancs blancs

Inspiré par un nouveau romantisme, Christophe Josse dédie sa collection aux héroïnes de Jane Austen avec des jeunes filles en fleurs pas toujours sages. Si les premiers passages raffinés signent un travail tout en délicatesse : manches en chips d’organza, fleurs peintes, insectes brodés… le noir lui va un peu moins bien.

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Alexis Mabille

En rouge et noir

Quand : le 25 janvier à 10H

Où ? Un garage, rue de Turenne

Statut : Membre invité

Saison : Automne-hiver

Titre : Radicale géométrie

Nombre de modèles : 40

Sièges : Chaises dorées.

Dans le garage Turenne, très brut de décoffrage, les chaises dorées créent l’ambiance couture tandis que les mobiles en suspension rendent hommage à l’esprit de Calder. Alexis Mabille a choisi de réinterpréter le suprématisme mais il s’éloigne du carré noir pour géométriser et découper les silhouettes en bicolores, moitié rouge, moitié noir ; moitié rose, moitié noir. Les cheveux et leurs extensions colorées (Odile Gilbert) joue le même bicolore (un style qu’approuverait Orlan). Quelques passages renouent avec l’esprit fête à noeud noeud (oui, ainsi écrit), clin d’œil à un style qu’il a aimé et aux noeuds papillons de ses premiers succès. Mais le géométrisme classique lui va bien avec des coupes impeccables et un choix de matières pour unir rigueur du style et courbes des corps : franc drap, crêpe marocain, satin duchesse… Joli travail.

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Josephus Thimister

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Quand ? Le 24janvier à 19h

Où ? Au Palais de Tokyo

Statut ? Membre invité

Saison ? Automne-hiver

Titre ? 1915 : Bloodshed and opulence

Nombre de modèles ? 45

Les sièges ? Bancs de bois

Avec son nom de village belge, ses racines multiples qu’il qualifie avec humour de « garbage », Josephus Thimister est un discret de la mode. Il a créé quelques saisons chez Balenciaga, a œuvré chez Genny puis Charles Jourdan. Il a en parallèle aussi signé sous son nom (à partir de 1998) montrant la maîtrise d’une coupe simple, rigoureuse, voire minimaliste. Il revient aujourd’hui dans le calendrier avec une très belle collection ; Bloodshed and opulence ». Si climat économique, catastrophes et guerres inutiles lui inspirent une humeur belliqueuse, il le traduit  avec des silhouettes quasi guerrières amplifiées par le choix d’un militaire kaki et de coulées rouge sang qui abreuvent le sillon de sa mode. Homme et femme se répondent, frères et sœurs non ennemis d’une même histoire. Des coupes structurées, géométriques, des dos magnifiques où se découpent des bénitiers à se damner ; le rouge est mis, impérial, magistral dans un total look carmin ruisselant aux effets de capes pour guerrières d’un nouveau monde.

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Pour que la haute couture en France ne devienne pas le dodo de l’île Maurice

Dépassée, archaïque, moribonde ? La haute Couture vit depuis quelques saisons la chronique d’une mort annoncée. Il y a quelques années Pierre Bergé jouait les Cassandre, n’imaginant pas qu’elle puisse continuer après Yves Saint Laurent dont le défilé adieu eut lieu en 2002. Alors oui elle est malmenée aujourd’hui. De nombreuses maisons (Ungaro, Carven, Torrente, Balmain, Scherrer, Ferraud …) ont arrêté cette activité très coûteuse et sans retombées financières directes importantes. Les vraies clientes ne sont plus très nombreuses, le style « robe de soirée » n’est peut-être pas le plus accessible même si les « red carpet » font toujours rêver. Mais malgré tout la haute couture a encore un rôle à jouer dans sa spécificité très française de conservation de métiers d’art, d’artisanat dont les activités sont directement reliées à ce secteur.

Chanel a à cet égard joué un grand rôle en permettant à certaines maisons de continuer contre vents et marées. Si la maison Lemarié, fleuron de la plumasserie, est née en 1880, il y avait 300 autres maisons en 1900. Dans les années 60 n’en subsistaient que cinquante et aujourd’hui elle est peut-être le dernier des Mohicans. Chanel a ainsi regroupé « Paraffection » différentes maisons comme les chapeaux Michel, les chaussures Massaro ou les broderies Lesage, pour que leur savoir-faire perdure.

Si le calendrier actuel des défilés haute couture conserve quelques maisons qui remplissent parfaitement les critères de sélection requis, il s’est aussi ouvert à des maisons plus jeunes dont les créateurs ont une façon de travailler qui s’approche de la couture.

Que reste-t-il de la haute couture aujourd’hui en France ?

Si le nom a conservé toute sa magie de la fine fleur de la création en termes de mode, il s’associe aussi à une perception parfois un peu archaïque de la dénomination. Née à la fin du siècle et créée par un anglais qui réussit à imposer son nom, à griffer ses modèles et à faire des collections ; C.-F. Worth fut aussi le couturier de l’impératrice Eugénie. La fin du siècle vit la création d’une chambre syndicale de la confection et de la couture et en 1910 de la chambre syndicale de la couture. Après Worth, de nombreux couturiers créèrent leurs maisons : Lanvin, Poiret, Chanel, Patou, Vionnet, Grès, Carven, Dior, Balenciaga, Yves Saint Laurent,… avec des fortunes diverses. D’après les statuts revus en 1945, une des conditions est de présenter à Paris au moins deux fois par an. La haute couture est une belle exception française dont les membres figurent sur une liste soumise chaque année à l’agrément du ministère de l’industrie. Mais l’après-guerre amorce une diminution du nombre des maisons qui passeront de 106 à 19 entre 1946 à 1967.  Pendant des décennies, ces maisons ont été LA source d’inspiration des tendances, elles ont réellement  « fait » la mode jusque dans les années 60 où la rue et puis l’arrivée des créateurs du prêt-à-porter ont changé la donne et ont sonné le glas en termes de tendances.

Malgré cette perte d’hégémonie, la haute couture a continué à faire rêver. Les robes les plus belles viennent de ses ateliers et les magazines avec leurs éditions spéciales haute couture suscitent encore admiration et respect pour la qualité du travail. Les créations de Christian Lacroix en étaient un des plus beaux exemples (une pensée émue pour ses défilés de couture magnifiques, extraordinaires et un pincement en songeant à son absence pour la première fois depuis vingt ans).

Progressivement le nombre (21 maisons en 1994) de maisons présentant en haute couture a diminué. Seules subsistent parmi les anciennes et très vaillamment Chanel et Dior ; une nouvelle aussi a réussi à exister dans ce secteur : Jean Paul Gaultier depuis 1997. Givenchy est en train d’y revenir avec Ricardo Tisci. Aux côtés de ces noms historiques, quelques jeunes maisons ont une démarche qui s’y apparente (même si pour certains l’opportunité du choix d’un calendrier moins encombré a pu jouer un rôle) ont rejoint les rangs et ont été adoubés par leurs pairs. Ainsi le calendrier a–t-il réussi à s’étoffer, se remplumer un peu avec l’intégration de « jeunes »  comme Dominique Sirop en 2002, Franck Sorbier, Anne-Valérie Hash, Maurizio Galante en 2005…

Les règles sont à certains égards les mêmes, mais il y a plus de souplesse pour des critères comme le nombre de salariés permanents.

Mais si la haute couture n’est plus ce qu’elle a été, elle a su conserver une forme de magie dans la qualité du travail qui est présenté et dans le maintien, vaille que vaille, de certains des artisanats les plus précieux. Si les clientes sont de moins en moins nombreuses (quelques centaines dans le monde, épouses d’hommes d’affaires américains, princesses du Moyen Orient …), elles achètent au final des centaines de modèles chaque saison.

Mais la haute couture, c’est de l’image, de l’éclat ; c’est la perfection d’un savoir-faire qui va défiler pendant trois jours (du 25 au 27 janvier) avec un invité la veille, avec le retour de Josephus Thimister et une journée supplémentaire avec l’introduction (une belle idée) de présentations de joaillerie intégrées à ce calendrier qui tente de maintenir une spécificité du luxe à la française.

Alors même si l’évolution est inéluctable, si l’artisanat cède le pas à l’industrie, si les plumes ne sont plus au vent, si les centaines d’heures de travail pour une broderie semblent anachroniques, je souhaite que la Haute couture puisse encore jouer les prolongations pendant de nombreuses saisons.

A la veille des défilés de la Haute couture du Printemps Eté 2010.

Les membres sont : Adeline André, Anne Valérie Hash, Chanel, Christian Dior, Christian Lacroix, Dominique Sirop, Franck Sorbier, Givenchy, Jean Paul Gaultier, Maurizio Galante, Stéphane Rolland.

Membres correspondants : Elie Saab, Giorgio Armani, Maison Martin Margiela, Valentino.

Membres invités (section par nature transitoire) : Adam Jones, Alexandre Matthieu, Alexis Mabille, Atelier Gustavolins, Christophe Josse, Felipe Oliveira Baptista, Jean Paul Knott, Joseph Font, Josephus Thimister, Lefranc Ferrant, Maison Tabih Kayrouz, Marc Le Bihan.

Mode-accessoires : Loulou de la Falaise, Maison Michel, Massaro, On aura tout vu.

Haute joaillerie : Boucheron, Cartier, Chanel Joaillerie, Chaumet, Dior Joaillerie, Mellerio dits Meller, Van Cleef & Arpels.

Sans oublier les créateurs qui défilent ou présentent en « off » du calendrier.

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Personnalités versus Personnes

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L’exposition Dysfashional et plus récemment les vitrines de Colette ont montré le Mount Blushmore. Petite visite guidée d’un haut lieu de mode parodique où les effigies de Washington, Jefferson, Roosevelt et Lincoln sculptées dans la pierre ont été remplacées par quatre icônes fashion. Le tourisme façon carte postale rend un hommage kitsch (écriture de LED sur verre par Cyril Duval, Item Idem) à quatre incontournables de la mode que nul ne peut aujourd’hui ignorer : Karl Lagerfeld, Anna Wintour, John Galliano et Donatella Versace (il y a encore six ans Tom Ford aurait sans doute figuré dans le quatuor). Si ce choix mélange curieusement sur un même plan création, stylisme et presse, il privilégie des personnages médiatiques, (re)connus par la culture pop(ulaire) plus pour leur image personnelle que par leurs créations. Les arbres ont caché la forêt.

A l’opposé se découvre aujourd’hui au Grand Palais une forêt d’anonymes, héros de l’installation Monumenta 2010, Personnes de Christian Boltanski. Mot d’étymologie étrusque, victime puis masque en passant par le subterfuge d’Ulysse, Personne en anglais souligne la négation du corps (no body). Omniprésents, les vêtements chez Boltanski figurent les humains en trace fantôme tandis que son exposition souligne absence et mort. Dans la grande nef, un amoncellement pyramidal est mis en action avec une grue qui prend et rejette au hasard les pièces d’une gigantesque garde-robe façon déchetterie. Epars, rangés dans un désordre ordonné, des centaines de vêtements colorés, chiffonnés, fripés, négligés trament le parcours. L’obsessionnelle de mode que je suis n’a pu s’empêcher de traquer la pièce signée, griffée et est tombée sur un gilet Dolce & Gabbana égaré dans la foule des anonymes.

Des paillettes de la mode aux fripes usagées, les vêtements trament la vie humaine, finissent en bûcher des vanités (même si ceux de Personnes seront recyclés).

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(untitled)

(untitled)2-Il se devait d’être sans nom (no logo était déjà le territoire de Naomi Klein), il s’appelle (untitled). « Un nom déshabillé de toute référence ».
-Il se devait d’avoir une dimension numérique entre 0 et 23. Le chiffre 3 qualifiera les parfums de la maison.
-Il se devait d’évoquer le blanc. Son flacon a été partiellement immergé dans de la peinture blanche avec un bel effet d’asymétrie.
-Il se devait d’être original et atypique. Il n’est pas déroutant, mais a une belle personnalité (il n’a pas été testé !). Il a des airs de paradoxe à la fois très vert (galbanum) et capiteux (des accents sensuels de « résines » : lentisque, encens).
-Il a été composé par Daniela Andrier (auteur d’Infusion d‘iris de Prada notamment).
-Le premier parfum de la Maison Martin Margiela (encore développé par l’Oréal avec le créateur) évoque avec justesse l’esprit, l’univers MMM.

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