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«C’est en écoutant les idées dans d’autres domaines que le sien qu’on a de nouvelles idées dans sa spécialité, puisque le monde est connecté». Tel est le principe des conférences TED, un rendez-vous annuel aux Etats-Unis depuis 20 ans, et dont une déclinaison vient d’être organisée à Paris le 30 janvier 2010.
Parmi les intervenants, citons un docteur en physique théorique, capable d’expliquer la théorie de relativité et de… se faire comprendre (brillant Christophe Galfard), un philosophe qui pense que toute vérité n’est pas bonne à dire, surtout si cette vérité aide un assassin à tuer (époustouflant Miguel Benasayag), un stand-up vraiment drôle (Vinvin), d’autres interventions moins réussies et… quelques invités venus parler – de près ou de loin – du Web. Compte-rendu à lire ci-dessous…
L’autorité vacillante du journaliste
A commencer par Christine Ockrent, que l’on ne présente plus, et qui a été la première à officier sur la scène de TEDx. «A chaque sursaut technologique, il y a une utopie, commence-t-elle. Lorsque les pigeons voyageurs sont apparus, on a pensé qu’ils empêcheraient les guerres». Et de poursuivre qu’aujourd’hui, avec l’arrivée de Facebook, c’est l’utopie du tout-info, «l’utopie selon laquelle tout le monde partage tout.» La directrice générale de l’audiovisuel extérieur de la France, qui regroupe les chaînes de télé France 24 et TV5 Monde, et la station de radio RFI, sait que le métier des journalistes d’aujourd’hui n’a plus rien à voir avec celui qu’elle exerçait à ses débuts. «Sur la toile, la fonction d’autorité du journaliste s’est diluée», reconnaît-elle. Or selon elle – et c’est ici que cela devient intéressant, «la toile va reconstituer cette fonction d’une façon ou d’une autre».
Christine Ockrent argumente: «la communauté immense de Facebook (400 millions d’inscrits, ndlr) veut s’organiser. Regrouper ses communautés par zone d’intérêts. Et élire des leaders.» Leaders qui seraient, si l’on pousse un peu, des déclinaisons du métier de journaliste? Ceux qui seraient (toujours) capables de choisir, de trier, de sélectionner l’information? Aucun doute, estime Christine Ockrent, pour qui «il n’y a rien de plus compliqué que le choix».
Dans le Net, pas sur le Net
«Comment allons-nous communiquer avec Internet dans 20 ou 30 ans?», a enchaîné Joël de Rosnay, le fondateur d’Agoravox. A cette question de prospective, il répond par deux mots. Deux mots qui incarnent, selon lui, les deux tendances du futur. La «biothique» (contraction d’informatique et de biologie) et les «environnements intelligents». «La puissance d’un ordinateur va s’étendre à notre environnement», explique-t-il, donnant l’exemple d’un hall d’hôtel et d’un aéroport. «Comment va-t-on cliquer dans ce hall? Comment va-t-on créer un environnement cliquable?», reprend-t-il. Ce sera le boulot des «puces RFID, des systèmes de reconnaissance faciale, des détecteurs de mouvement, comme cela existe déjà sur la console de jeux Wii.» En clair, pour Joël de Rosnay, le smartphone ne sera bientôt plus un écran sur lequel on navigue, mais un outil pour vivre dans cet écran. «Le téléphone sera un scanner, une télécommande, une souris…»
Méfiance
En regardant le flux vidéo de cette édition parisienne – parfois inégale, les membres de Twitter ont souligné à juste titre que revenait un leitmotiv dans les interventions: celui de la défiance. Et pas qu’envers les journalistes. «Où est passée l’expertise des communicants?, demande Gildas Bonnel, ancien publicitaire. Même avec alerte niveau 6 de l’OMS, qui s’est fait vacciner contre la grippe A / H1N1?». Une tension palpable aussi dans les relations internationales, estime Guy-Philippe Goldstein, consultant, faisant allusion au conflit qui oppose Google et la Chine. «On est dans une course au cyber-armement, où règne la peur réciproque de l’attaque surprise». Ambiance.
Alice Antheaume
Merci à Olivier Maurel de m’avoir invitée.