Deux lettres et un chiffre donnent le ton : H20. Le duo des On aura tout vu plonge dans un univers où l’eau passe du liquide au solide. Des créatures hybrides à fourreau en écailles de sirène sont là, naïades immobiles sur le podium, mystère. Des eaux sombres, noire surgissent robes, tailleurs, juste ponctués de cristaux. Des robes légères et vaporeuses, mousselines (e)au vent, imprimés de reflets aquatiques, jeux cristallins.
La fourrure douce et duveteuse se dessine en écume.
Le travail de broderies illumine la plupart des tenues. Silhouettes drapées. Jeux d’eaux et brillance Versailles. Éclaboussures légères. Détails de cristaux imposants, majestueux. Une ombrelle en cascade et des accessoires toujours humoristiques comme le sac masque et tuba.
Et comme le disait Donald Potard avec verve on peut les rebaptiser cette saison en « On aura tout bu ». Une collection fraîche et joyeuse, plongeon.
Photos J.-L. Coulombel
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Installé Place Vendôme dans un des lieux historiques de la maison, le nom de Schiaparelli revient sur le devant de la scène. L’Hôtel de Fontpertuis, au 21, abrite les nouveaux salons de couture et les bureaux. D’anciens objets de l’univers d’Elsa Schiaparelli et un éclectisme mâtiné de rencontres surréalistes recomposent un décor fantasque et original.
Après une première collection capsule de quelques modèles dessinée par Christian Lacroix en 2013, un directeur artistique a été choisi : Marco Zanini (précédemment chez Rochas). 60 ans se sont écoulés entre la fermeture de la maison par Elsa Schiaparelli et le renouveau avec la première collection couture présentée en janvier 2014 en tant que membre invité. Le challenge n’est pas simple, la haute couture n’est plus le secteur prédominant de la mode, mais demeure une vitrine magnifique tout en maintenant le flambeau d’un savoir faire d’exception. L’air du temps n’est pas non plus à la créativité débridée. Ce qu’a pu faire Elsa Schiaparelli en son temps n’est peut-être pas envisageable aujourd’hui. Il faut trouver le juste équilibre tout en gardant l’originalité indissociable de ce nom extraordinaire. Le travail des ateliers pour la première collection fut particulièrement remarquable et ce n’est sans doute que dans les salons de la maison que l’on peut en avoir pleine conscience. Travail d’exception, imprimés peints à la main, broderies raffinées, couleurs délicates…
Les noms choisis invitaient au voyage : Mes Garçons du jardin … (fleurs en tête de jeunes hommes), Pluie de Paris (motifs de pois), Ciel étoilé (étoiles à gogo). Les bijoux rendaient hommage à de magnifiques fleurs carnivores ou des enveloppements de feuilles de lierre.
7 juillet 2014, une deuxième collection est présentée. La première silhouette donne le ton, hausse la fantaisie, le souvenir d’Elsa est là, magique. Les matières se mélangent joyeusement. Une carrure démesurée se déploie pour les vestes tandis que des drapés ondoyants, près du corps, dessinent les fourreaux du soir.
La fantaisie règne sur la collection, les bibis (créations de Stephen Jones) participent à la joyeuse conversation. De l’alligator, de la panne de velours, des soies…
Un zeste de broderies, très Schiap et hommage aux initiales ES.
Des imprimés inventés : Dans les ombres du jardin (papillons sur feuilles de lierre), Les amis d’Elsa (ribambelle de chiens), Central Park (écureuils et rats), Les pigeons de Notre-Dame. Un festival de couleurs sans oublier un passage rose vif. Think pink comme le décor tendu de rose drapé dans un shocking maison.
Une collection pleine de fantaisie et avec des finitions dignes de la haute couture.
Et, en paraphrasant Aragon, on ne peut que souhaiter qu’à nouveau « Il ne soit Paris que d’Elsa ».
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Excentrique, extravagante, fantasque et talentueuse, Elsa Schiaparelli fut une des figures majeures de la couture du XXe siècle et sans aucun doute la plus originale. Amie de nombreux artistes dans la mouvance surréaliste, elle travailla avec Dali, Léonor Fini, Cocteau…
Épouse d’un théosophe, l’intrigante Italienne débute en 1927. Elle apporte immédiatement un vent de fantaisie avec une collection de maille en trompe-l’oeil.
Courtesy Museum of arts Philadelphia
Elle imagine ensuite des accessoires hautement farfelus. Un tissu imprimé de larmes dessiné par Dali devient vêtement de pleureuse. Le motif du homard (l’emblématique crustacé du Téléphone aphrodisiaque du peintre) se brode sur une robe portée par Wallis Simpson.
D’improbables chapeaux voient le jour. Elsa Schiaparelli met sur la tête des élégantes des formes de côtelette, de chaussure ou de cerveau. Le bibi vient ponctuer la silhouette comme un point sur le i.
En parfums, elle a imaginé les collections les plus originales du siècle. Débutant sous le signe de la lettre S, une première fragrance S, ensuite Soucis, Salut et Schiap… Avec Shocking, la femme bustier est surmontée d’une couronne de fleurs de Léonor Fini et la forme du corps rend hommage à l’opulence d’une de ses clientes célèbres, Mae West (surnom ensuite des gilets de sauvetage des soldats américains !).
Avec Zut, le jupon tombe sur des jambes inspirées de Mistinguett. Snuff en forme de pipe renvoyait peut-être au jeu de mot de Magritte. Sleeping tenait la chandelle… Un patrimoine extraordinaire.
Le surréalisme a souvent innervé ses inventions, un collier aspirine en porcelaine avec Elsa Triolet, un bracelet métal et fourrure avec Meret Oppenheim… Des gants sertis d’ongles maquillés, une robe à tiroirs, un collier insectes… Dans les années 30, Elsa Schiaparelli règne sur la mode et fait la couverture du Time en 1934.
La créatrice a aussi « inventé » une couleur et lui a donné un nom passé à la postérité, le rose shocking, un rose vif et joyeux.
Sa maison s’arrête en 1954 et s’endort. Seuls les parfums ont ensuite un peu continué et ont été relancés à petite échelle.
En 2007 un nouveau grand tournant est amorcé, la belle endormie voit son nom et ses archives rachetés par Diego Della Valle (qui avec le nom de Roger Vivier a réussi à créer une marque de chaussures importante dans le paysage de la mode).
Le souvenir du patrimoine de la maison est vivace dans un site internet façon scrapbook depuis mai 2014 unissant passé et présent.
Quant à l’humour de Schiap, il manie l‘ironie notamment dans ses 12 commandements adressés aux femmes.
4. Souvenez-vous – 20% des femmes ont un complexe d’infériorité. 70% ont des illusions.
10. Ne jamais adapter une robe à un corps mais entraîner le corps à s’adapter à la robe.
Robe broderies Lesage (dessin Cocteau) Courtesy Museum of arts Philadephia
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Très jolie surprise avec le défilé de Stéphanie Coudert. Une inspiration féminine et médiévale capture le souvenir d’Aliénor d’Aquitaine et chevauche vers l’Orient avec le mot Croisade, thème de la collection. Chapeautée, enturbannée, la silhouette pourrait osciller entre Moyen-Age et années 40, mais le vêtement est résolument actuel. Des volumes très construits, recomposés, basculés, bousculés dessinent un très beau travail de coupe. Une gamme de couleurs sobre et chic.
Parfois le vêtement s’enroule autour du corps, l’enveloppe en un joli cocon. La silhouette se ponctue de liens, de chaînes, mais avec légèreté. Une jolie carte du tendre pour un parcours contemporain. Invitée dans le calendrier, la créatrice a réussi l’exercice haut la main, adoubée couture. Le passage discret d’une boutique de Belleville au podium pour couturière en chambre (des dames).
Photos Etienne Tordoir
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Invitée dans le calendrier de la haute couture, Fred Sathal défile a nouveau après quelques années loin des podiums. Fidèle à ses leitmotivs, elle continue l’exploration du fil, cousu, recousu, innervant les tissus dans de nouveaux méandres. Les expériences de teintures dans un esprit tie and dye ajoutent une dimension artisanale. Beaucoup de broderies, de sequins, de paillettes jusqu’au total look brillant.
Mini robes ou longues tenues du soir, un poil de fourrure avec notamment un poncho en queues de renard.
Un zeste d’humour avec la robe gorille (gare au…).
Une haute couture réversible, travail au petit point, onirisme et bohême entre sombre et brillants.
Photos Olivier Claisse
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Si le souvenir de Christian Lacroix associé à la couture demeure vivace, le créateur continue de saupoudrer de son talent des costumes de pièces de théâtre, d’opéra, des expositions et des éditions d’objets.
À la Comédie française, le Lucrèce Borgia de Denis Podalydès où l’un est l’autre (Guillaume Gallienne en Lucrèce et Suliane Brahim en Gennaro) est porté par les costumes flamboyants et sombres de Christian Lacroix. Un zeste d‘influence japonaise et souffle l’esprit de l’onnagata où l’homme se travestit en femme. Pour Lucrèce, une robe bustier où scintillent quelques éclats de broderie. Pour Gennaro, un pantalon noir, une ample chemise blanche et un long gilet rouge bordeaux ou une veste à l’allure militaire ornée de boutons métalliques.
Et si Christian Lacroix a souvent manifesté un goût pour les riches étoffes, il a imaginé une collection orientaliste pour le Louvre. « Les quelques objets que j’ai pensés pour le musée s’inspirent à la fois fidèlement, respectueusement et très librement des trésors du pavillon des Arts de l’Islam, source inépuisable d’inspiration et d’influence pour l’art occidental depuis des générations éprises d’Orient ». Foulards, vases et objets aux allures de miniatures persanes et des gammes de couleurs qui font parfois songer à Matisse. Pour Christian Lacroix, qui s’imaginait conservateur de musée, le passage par la case mode le conduit aujourd’hui au Louvre.
À découvrir également l’Hôtel Jules César à Arles (ville natale du couturier) repensé en couleurs et avec un air de « Camargue ».
À l’automne, le créateur aura carte blanche pour la scénographie d’une exposition sur le costume au musée Cognacq-Jay.
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Plongée sur la couleur à la National Gallery de Londres au travers des collections du musée. Art et science sur le berceau des théories de Newton revisitées par Moses Harris et son Natural System of colours (1769-1776) expliquant le principe du mélange soustractif des couleurs. La fabrication des pigments et leur origine animale, minérale est expliquée et s’ouvre à l’utilisation des couleurs en peintures : Van Dyck, Degas, Botticelli…
De l’art au maquillage, Terry de Gunzburg a sauté le pas et apporte son soutien à l’exposition. Elle a aussi imaginé une palette dans le cadre de l’événement. Baptisée INGU (I Never Give Up), la gamme de fards est composée de sept couleurs. Dans une ambiance « pop » : violet foncé, vert profond (sapin ?), bleu mer, jaune scintillant, rose vif (think pink), corail et orange pétillant.
National Gallery de Londres jusqu’au 7 septembre.
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C’est l’été, Saint-Tropez est désormais moins ville de gendarmes que cité de vacances dédiée à la mode. Les boutiques éphémères jouent la carte estivale sur le principe de ce que l’on appelle aussi les pop up store (comme les fenêtres qui s’ouvrent dans un livre ou sur internet).
Depuis cinq ans Chanel établit ses quartiers d’été tropézien dans l’hôtel particulier de la Mistralée. L’ancienne propriété du coiffeur Alexandre est une bâtisse du XIXe siècle en plein coeur de Saint-Tropez. Des jardins, deux corps de bâtiments et une piscine servent de décor aux collections Chanel et à l’esprit de l’édition des Métiers d’art, Paris Dallas. Chaque année, le décor change. Cet été a été suspendu un millefeuille en papiers colorés survolant les podiums d’accessoires.
Une pièce aux allures de rodéo avec un tapis en poulain reprend le code couleur noir et blanc.
Dans la poolhouse figure la collection de plage dédiée au farniente.
Une astucieuse façon d’être là où cela se passe.
Jusqu’en octobre.
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Une rivière (lac) au coeur de Londres, un lieu voué à l’art contemporain et désormais un parfum au joli nom : Serpentine développé sous les auspices de Comme des garçons.
Art et parfum ? Le mariage existe, mais n’est pas le plus foisonnant de la parfumerie. Des créations sous le nom de Niki de Saint Phalle ; des parfums Dali (Cofinluxe), odes au surréalisme ; Warhol en fleurs ou en dollars ; Chapeau bleu inspiré de Picasso… Il y a quelques années Francis Kurkdjian interprétait l’odeur de l’argent pour Sophie Calle.
Comme des garçons avait déjà eu une approche avec le design en lançant Standard Artek (design finlandais créé au départ autour d’Alvar Aalto).
Aujourd’hui avec Serpentine est rendu hommage à un lieu qui porte le nom de la rivière qui traverse Hyde Park à Londres et où se situe la Serpentine Gallery, un des hauts lieux de l’art contemporain avec ses expositions souvent remarquables. L’espace s’est aussi étendu avec la Serpentine Sackler Gallery créée par Zaha Hadid dans Kensington Gardens.
Simple et carré, le flacon est habillé d’un dessin de Tracey Emin. Des traits, une écriture autour du thème « The Grass. The Trees. The Lake ». Une “écriture d’herbe” façon occidentale.
Le Parfumeur Emilie Coppermann, sous la direction artistique de Christian Astuguevieille pour Comme des garçons, traduit la présence de la galerie au coeur d’un parc. Une exquise fraîcheur de notes vertes évoque les jardins anglais de Londres. Pour la facette nature : herbes, feuilles, pollen (galbanum, feuille d’iris). Et pour le côté urbain : l’asphalte (musc noir, muscade), labdanum, cèdre fumé et un zeste de pollution (benjoin, genévrier, gaïac). San soublier une touche de respiration avec l’oxygène (aldéhyde, ozone).
Plus besoin de construire les villes à la campagne (boutade d’Alphonse Allais), tout est dans Serpentine.
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Lancôme ne fait pas de cinéma avec sa « nouvelle vague », mais met sous le feu des projecteurs trois talents émergents de la scène de mode parisienne. La marque à la rose a déjà, à plusieurs reprises, associé mode et cosmétiques en collaborant avec Olympia le Tan (une minaudière) ou Alber Elbaz (des dessins sur la gamme de maquillage).
Pour « nouvelle vague », les trois créateurs ont imaginé l’équivalent d’une trousse de maquillage, mais version mode, à porter comme un sac, une luxueuse minaudière (en édition limitée). Le seul signe de reconnaissance pour établir le lien avec la beauté se remarque à la présence de la rose Lancôme gravée sur le fermoir. Le contenu de la trousse est aussi prévu avec trois produits iconiques : un Absolu rouge, un Hypnôse star (les mascaras incarnent une importante signature Lancôme) et Hypnôse palette avec quatre couleurs de fards et eyeliner.
Dessinant pour une femme conquérante et sexy et jouant sur les carrures, Alexandre Vauthier a imaginé sa création autour des notions de « glamour chic et épuré ». Multi fonctions, le sac multiplie les pochettes, les zips pour inclure les objets. Le créateur définit son sac « entre la trousse et le clutch » et a choisi de le souligner de doré (une de ses couleurs fétiches).
Jeune roi de la mode pop aux accents frais et juniors Jacquemus a choisi le rose et la simplicité d’un rond (très présent dans sa dernière collection dédiée à la Grande Motte) à porter comme une ceinture ou autour du poignet (deux systèmes).
Pour Yiqing Yin qui aime les couleurs minérales et construit sa mode de plissés, de drapés minutieusement travaillés, son sac est la traduction de son goût pour les matières. « Je suis partie de l’idée que mon sac du soir devenait ma trousse de maquillage et non l’inverse » explique-t-elle parlant de son sac à matière très texturée.
Une jolie initiative pour associer mode et beauté.
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