Elle a fleuri au printemps et je la redécouvre épanouie et croquante. J’en reçus d’abord quelques gouttes. La rafraîchissante rosée me valut quelques compliments (ce n’est pas toujours le cas avec les parfums que j’aime). Je me penchais à nouveau sur ce roman de la rose qui n’est pas, dans l’ordre végétal, mais alors pas du tout ma tasse de thé. Je ne m’identifie pas à la reine d’Alice que la seule vue d’une rose blanche insupporte ; moi, c’est aux roses que je couperais bien la tête.
Une ou deux fois des parfums à la rose m’ont plu. Je pense à Une rose (Edouard Fléchier) chez Fréderic Malle dont la présence d’une note truffe me plaisait ou à celles cueillies par Lutens. Mais À la rose de Maison Francis Kurkdjian est moins dans l’opulence, elle est croquante. Mutine, gracieuse et fraîche, elle pétille. Un zeste de fraîcheur hespéridée d’orange et bergamote, d’autres fleurs pour embellir la reine : violette, magnolia et un fond cèdre et musc. Je me suis penchée sur ce parfum quand je m’obstinais à imaginer ou à rêver au retour des notes vertes pour tourner la page des gourmands. Las, la queue de comète des friandises semble avoir encore de beaux jours. Francis Kurkdjian parlait de « l’idée de créer une composition entre figuratif et abstraction ». Pouvant osciller entre Cranach et Malevich, le parallèle me parle. Le parfumeur ajoute : « Être dans la sensation d’une caresse de pétale de rose, dans du charnel et pulpeux, sans être lourd ni opaque ou gras. Les facettes vertes que j’ai ajoutées contribuent à cette impression de nature réinventée pour donner un élan de modernité aux extraits naturels de rose (essence et absolue). » C’est sans doute cette fraîcheur un peu verte qui me donne à voir cette rose avec bonheur.
À la rose me réconcilie définitivement avec la reine des fleurs, mais seulement en parfum.
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Envie de soleil, de plage, d‘estivants ? Matin Parr a parcouru le monde avec son oeil aiguisé qui transforme en clichés la plus banale des situations. Humour, dérision, cernent ce sujet de prédilection qu’est la plage. De 1982 à 1985, Martin Parr s’était déjà intéressé à cette forte thématique aux alentours de Brighton pour composer « The last resort » avec des scènes prises sur le vif qui ont contribué à sa renommée. Depuis, Martin Parr a pris le large, il a multiplié les locations, il est parti vers l’Amérique du Sud avec Argentine et Pérou et en pourtour de la Méditerranée, il a fait escale en Italie et en Espagne. La solitude des vacanciers noyés dans la foule, un festival de parasols, des corps en vacances, le bronzage outrancier, les maillots de bain colorés, les chapeaux ridicules… autant de sujets qui s’offrent sur une plage avec gourmandise.
Des gens modestes, la puissance du consumérisme, le farniente… La question du territoire aussi se pose, de la serviette de bain au parasol ou à la cabine de plage s’établit une hiérarchie de castes, manque la plage privée qui n’est pas la tasse de thé de Martin Parr ; il jubile dans la foule de vacanciers en goguette.
Des photos sans méchanceté, mais au travers du prisme d’un oeil redoutable, un état des lieux sans concessions. Une sélection de 37 photos est présentée au Bon Marché et dans les vitrines du grand magasin. Un délicieux Paris Plage photographique. Vamos a la playa.
Au Bon Marché jusqu’au 19 août.
À Nice, le photographe expose Life’s a Beach. Un Anglais à Nice. Au Théâtre de la photographie et de l’image jusqu’au 20 septembre.
Martin Parr Magnum Photos – Kamel Mennour.
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« Conversation » pour le créateur italien Maurizio Galante qui a choisi d’associer mode et design dans sa présentation de couture. Une galerie d’art (Bailly) et des vêtements posés sur des Stockman, en résonance avec des pièces de mobilier ainsi le lustre Plissé Cloud (Lasvit) et ses ondes de lumière.
Exquis plissés pour vêtements qui s’enroulent, drapent les corps ici immobiles. Formes cocons, vestes du soir. Couleurs raffinées. Détails incroyables de travail sur le tissu qui se plie et se découpe en motifs origamis. Vagues, avatars organiques, lamelles de champignons, fleurs,…
L’imagination est au pouvoir dans ce festival de formes en volutes.
En galanterie, le collier « Silver Swan » de plumes et d’argent.
Et si Maurizio Galante a une belle place dans le design contemporain avec son complice Tal Lancman, sa couture raconte avec poésie une exquise histoire de mode.
C J L Coulombel
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Toujours surprenant, le duo hollandais composé de Viktor et de Rolf travaille toujours ses collections de façon conceptuelle. Une idée, un thème, exploité avec culture et humour. Si, depuis leurs débuts, la question de frontière entre art et mode est souvent posée, leur dernière présentation apporte une fantasque réponse très réussie.
Leur collection se déroule en tableaux qui finissent accrochés aux cimaises tandis qu’eux, kuroko identifiables et occidentaux, ôtent les vêtements de leurs mannequins pour leur conférer un statut d’oeuvre.
Motifs de peintures parfois classiques, ainsi une main tendue qui pourrait faire songer à celle d’un Dieu créant Adam, mais non. L’inspiration est aussi résolument plus contemporaine et plonge dans des éclaboussures abstraites, tachisme coloriel, dripping anarchique.
Du passé, un vestige, celui du classique encadrement qui se casse, se fracture, s’articule, se plie à de nouvelles règles. Les mannequins s’en accommodent, part de leur tenue en mouvement.
Bord cadre, la mode sort de son modèle étriqué, mais paradoxalement demeure mode. Envie de cet art à porter jubilatoire. Non, la mode n’est pas morte.
C Peter Stigter
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Rythmée, énergique, la collection d’Alexandre Vauthier emporte vers des terres lointaines, vrombit à la conquête d’un far west urbain avec une inspiration de vêtements à franges des Indiens d’Amérique.
La coupe toujours impeccable, une allure de conquérante pour femme sexy. Un zeste d’animalité avec l‘utilisation de python. Jeux de transparences, pantalons étroits et droits, taille ceinturée d’éclats métalliques.
Une touche de rose shocking, une traînée de rouge laque.
Cuir vernis, vinyle brillant. Découpes, construction, décolletés vertigineux.
Alignement en métal façon cartouchière ou réminiscence de pectoral indien.
Les nouvelles squaws sont entrées dans Paris.
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Brise marine et embruns pour le défilé Jean Paul Gaultier dans une ode à la Bretagne. Coiffes architecturées en dentelles de cheveux, avatar bigouden ou casquette de marin en goguette.
Collants à rayures d’une Bécassine marine qui du bleu peuvent passer au rouge.
Aux pieds, une chaussure dérivée du sabot. Vivifiant, l’air marin oblitère de rayures la collection et donne des allures de vacances couture à l’emblématique signature Gaultier.
Manteaux superbes, caban d’hiver.
Broderies, jeux de transparence, guipure. Un motif fougère suggère la forêt de Brocéliande. Le doré se pose, effet feuille d’or, alchimie.
Les jupes tournent en rond, circulaires, géométriques, mènent la danse.
Après les références musicales portuaires et mélancoliques (Renaud, Brel…) un concert de musique bretonne avec les musiciens de Bagad Pariz sur podium pour inciter à la gavotte, au passepied ou culminer dans un réjouissant et drôle In the navy. Quant aux noms des modèles, ils sont travaillés en références locales et humoristiques : Becassine c’est sa cousine, Chou-chen-chic, Pardon, Armor Luxure, Biniouse, Le cas Bik, La Mousse tique, Kreiz Ker… Pas l’ombre de l’Ankou et une mariée vêtue de peaux de bêtes.
Au-delà du folklore breton, une très belle collection.
Photos Patrick Stable.
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Inspiration rétro-futuriste pour Julien Fournié qui s’est nourri de cinéma fantastique du début du XXe siècle. L’inquiétant Les mains d‘Orlac ou La nuit fantastique ont conduit le couturier à imaginer de mystérieuses femmes qui ont la nuit pour royaume.
Tenues de jour où le noir domine rehaussé de rouge et de bijoux, une touche de transparence dentelle dans les détails.
Robes du soir où les manches jouent les prolongations en quasi gants (les mains d’Orlac ?). Effets moirés, brillances, velours, éclat vinyle, capuches.
Un motif imprimé urbain, la ville est là sous-jacente. Un esprit art déco, boutonnage oblique. Une collection très couture, très soir, une « Première nuit » mise en scène dans l’oratoire du Louvre.
Photos Yannis Vlamos
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Mue, mutation, transformation, métamorphose, la collection de Yiqing Yin s’intitule « Shed my skin ». Vêtements seconde peau en transparence pour (re)commencement.
De l’inspiration de la mue d’un serpent à la construction d’une collection, Yiqing Yin a imaginé avec grâce les étapes. Motif peau de serpent réinterprété en dentelle.
Légèreté en transparence d’une mue délaissée. Soie dévorée, symbole de mutation. Éclats brillants.
(Re)naissance à une nouvelle vie, nouveaux atours. Construction en légèreté, jeux d’asymétrie, enroulements, drapés, effets carapace, marqueterie de tissus.
Puis s’impose l’éclat, lumière d’une nouvelle vie or, bronze pour parer les nouvelles déesses.
Sensualité du corps donné à voir, ondulant.
Voilé, dévoilé. Poétique toujours.
lire le billetCercle privé, une salle de casino plante le décor du défilé Chanel. La chaleur moite plonge les invités dans un Macao imaginaire sous la coupole du Grand Palais. Les croupiers s’installent, suivis par un parterre d‘actrices (Isabelle Huppert, Géraldine Chaplin, Vanessa Paradis, Kristen Stewart, Julianne Moore…) et personnalités venues « jouer ». Robes du soir et bijoux précieux, le casino est royal.
Le défilé commence. Avec leurs perruques au carré plongeant, (Sam Mc Knight) les mannequins arborent un look de garçonne sixties et oriental tandis que les ongles se maquillent en bicolore french version beige et noir. Des tailleurs Chanel avec le classique tweed, mais où la technologie s’est invitée avec un travail en 3D de « selective laser sintering ».
Effets matelassés, broderies, paillettes, boutons dorés… Esprit couture. Le cuir vernis prend des allures « jeu vinyle ».
Légèreté des mousselines, envolée de plumes, asymétrie.
Un zeste de masculinité dans les détails : pattes boutonnées, paletots d’hommes.
Le final (Kendall Jenner) en tailleur smoking pantalon à traîne questionne avec humour le genre.
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Le jeu des dames avance ses pions en blanc et noir sur l’échiquier de la couture de Serkan Cura. Le jeune plumassier travaille la plume dans tous ses états mêlant coq, autruche, aigrette… Veste à capuche à effet hérisson.
Grand manteau ample aux deux plumages. Rayures, zébrures, mais aussi mise à carreaux en damier.
L‘hiver emmitoufle ses silhouettes dans la fourrure (renard, finn raccoon, vison, opossum). Un zeste de couleurs et brille un rouge vif et quelques paillettes.
Une touche de cristal, le travail du corset, une robe cerceau, des broderies,… la mode est un jeu.
Aux pieds, un travail sur le cuir d’autruche, le python, le crocodile. Mannequins aux fiers toupets de plumes, une collection « animale ».
Photos Shoji Fujii
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