Trublion de la mode, longtemps qualifié d’enfant terrible tant ses collections originales marquèrent la création, Jean Paul Gaultier est aujourd’hui à l’affiche d’une exposition au Barbican de Londres. La planète mode de Jean Paul Gaultier conduit « De la rue aux étoiles » et sillonne un parcours de plus de trente ans de carrière (débuts en 1976) allant de la débrouillardise tout terrain à la haute couture. Spectaculaire, l’exposition met en scène toute l’originalité, l’inventivité, mais aussi la perfection avec laquelle les modèles les plus élaborés sont réalisés (plumes, broderies…).

Un magnifique catalogue accompagne l’exposition et décrypte les temps forts d’une carrière.

L’odyssée du début se dessine avec l’ours Nana sur lequel Jean Paul Gaultier fit ses premiers essais.

Les Paris de Jean Paul Gaultier résonnent comme une déclaration à la ville lumière et ses habitantes : « ce sont elles mes Parisiennes, qui ont influencé ma mode ». Se découvrent des références au cabaret, au music-hall, french cancan… et toute une gouaille populaire dans la veine d’une collection comme « La concierge est dans l’escalier ».

Le boudoir se dévoile. Les dessous sont dessus, dehors, apparents (le souvenir des combinaisons de la grand-mère avant d’habiller Madonna). Les seins obus, coniques, proéminents, se dressent. Les robes corsets se lacent et se délacent jusqu’à l’effeuillage par Dita von Teese et le fétichisme revisité.

À fleur de peau, des références en trompe-l’oeil, des effets visuels, une allure de tatouage pour nouvelles tribus.

Omniprésent avec humour, le détournement donne une nouvelle vie aux objets. Iconique du début, la boîte de conserve (petit pois) était revisitée en bracelet, l’urinoir de Marcel Duchamp version mode. Aujourd’hui écrin à conserver du premier parfum, Classique.

Masculin féminin, le souvenir d’une garde-robe pour deux, un imperméable pour deux, singing in the rain.

Vers un ailleurs, s’affirme un métissage multi-culturel. L’art avec les constructivistes et la Russie (1986), Frida Kahlo et le Mexique, Vasarely et les effets optiques,…. Au loin les Esquimaux, l’Inde, mais aussi les Indiennes à plumes du Far West, Pocahontas, les Rabbins chics (1993),…

So french, cocorico avec la marinière (immortalisée dans le portrait de Pierre et Gilles). « J’aime depuis toujours l’aspect graphique, architectural de la rayure, ma mère m’habillait déjà avec des pulls marins… Ils ne se démodent pas et ne se démoderont probablement jamais. »

La marinière est une signature, une part de l’uniforme JPG, aussi assortie d’un kilt, période Eurotrash (l‘un est l’autre en Albion). Dans l’exposition, l’effigie du créateur porte la marinière et son visage s’anime (projection vidéo en 3D), il parle, raconte (un travail mis au point par UBU, compagnie théâtrale montréalaise avec un système de « Spitting Image Puppet »).

Du kilt au tartan, aux motifs de drapeau anglais, à un monde punk, noir, vers le noir du fétichisme… la ronde des influences. Les passerelles sont multiples pour un imaginaire débridé.

Parmi les 165 modèles, des vêtements historiques comme ceux de Madonna pour le Blond Ambition Tour ou des costumes pour les films d’Almodovar…

Des photos de Miles Aldridge, David Lachapelle, Pierre et Gilles, Cindy Sherman ajoutent une autre lecture, celle des photos et de leur mise en scène.

Une exposition magnifique qui rend nostalgique d’un temps où la mode faisait de la mode et pas seulement des produits formatés pour un quotidien ennuyeux.

Après Montréal, New York, Rotterdam et en attendant Paris.

The fashion World of Jean Paul Gaultier. From Sidewalk to the Catwalk. Barbican Art gallery. Jusqu’au 25 août

Photos Matthew Lloyd–Getty, Mark Alan, Herb Ritts (JPG de dos), Pierre et Gilles.

C’est le printemps, Issey Miyake le célèbre en fleurs avec ses plissés. Point d’ikebana, mais une simple fleur ou une branche dans une série de visuels (re)composés de vêtements Pleats Please. Taku Satoh, qui joue souvent avec les plissés (inoubliables formes de sushis et de crèmes glacées), a choisi une nature en fleurs qui se découvre, au final, très figurative. S’anime une « chenille » verte, ondulent des formes de noeuds, s‘épousent des duos de tops,… boutons en train d’éclore, pétales…  Tic tac, explosion de fleurs colorées, festival de mode. La magie du plissé permanent prend forme en fleurs : coquelicot, pois de senteur, rose, fleur de prunier, tulipe et camélia. Sans oublier que Pleats Please s’incarne aussi en un délicieux parfum au bouchon fleur.

Direction artistique  Taku Satoh

Design Shingo Noma

Photo Koji Udo

L’animation :

https://www.youtube.com/watch?v=G9q0O5P9MPY

Chaque année depuis 21 ans Dinard vit au rythme de la mode avec un Festival international de jeunes créateurs. Les dix candidats (cette année des Français, des Coréens et des Japonais), sélectionnés après examen de leurs dossiers, ont l’opportunité de présenter et d’expliquer leur travail dans un espace d’exposition. S’ajoute un défilé pour le grand public sur la plage de la ville. Né à l’initiative de Dominique-Damien Réhel, ce festival sert de tremplin à de futurs acteurs de la scène mode (pas simple aujourd’hui !). Le jury 2014 était sous la présidence de Ece Ege, créatrice avec sa soeur de la marque franco-turque Dice Kayek. Parmi les jurés : des journalistes, mais aussi des acteurs de la partie commerciale : acheteurs, représentants de salons.

Le prix de la mode féminine est allé cette année à un binôme de créateurs qui a réalisé un remarquable travail sur les perles, Laetitia Baqué et Victor Molinié, élèves de l’école Duperré.

Le prix de la mode masculine a couronné Mael Larcher (Esmod) et son astucieux travail de modèles transformables (le sac à dos qui devient gilet ou veste) et son jeu de différentes longueurs dans de belles matières et coupes soignées.

Un prix additionnel a été remis à Marie-Morgane Dumont dont le travail très abouti a été remarqué par Messe Frankfurt France. Ses juxtapositions de mille-feuille de soie et de laine brute étaient particulièrement réussies. Elle reçoit un prix en numéraire et un espace au salon Texworld.

Cette année Armor Lux et l’école de broderie Pascal Jaouen (à Quimper) parrainaient un concours de la marinière auquel ont participé les candidats. C’est Sung Eun Jang qui a gagné le prix avec son intéressant travail d’impression sur néoprène. Les marinières ont ensuite été vendues au profit d’Orpheopolis (oeuvre pour les orphelins de la police).

Le défilé des créateurs en lice était accompagné de présentations de collections des partenaires du festival ainsi Cache Cache et Bonobo. Un défilé Francesco Smalto a animé la remise des prix ainsi que la projection d’un film réalisé par Marie Schuller de Show Studio autour du travail de Dice Kayek.

Les créateurs reçoivent une aide logistique pour la production des défilés (maquillage et coiffure Jean-Claude Biguine). Les lauréats reçoivent une aide financière (les sponsors et Ville de Dinard, Ville de Paris…) ou alors concrète (stage de broderie école Pascal Jaouen, salon Who’s next)… Sans oublier un zeste de détente avec des séjours Accor Thalassa et Hôtel Barrière !

Un joli tremplin pour, peut-être, des créateurs de demain.

Photos Jean Louis Coulombel.

Nés aux Etats-Unis, les Fifi Awards existent en France depuis 22 ans à l’instigation de la French Fragrance Foundation. Ces récompenses viennent couronner les parfums de l’année écoulée.

Le jury des professionnels a primé Invictus de Paco Rabanne, vainqueur tout terrain dans les trois catégories : la fragrance (signée IFF par Véronique Nyberg, Anne Flipo, Olivier Polge et Dominique Ropion), le flacon (Cédric Ragot) et la campagne publicitaire à l’humour bien marqué passant du stade au vestiaire (agence Mazarine, Mademoiselle Noï). Du côté des féminins, Jour d’Hermès a remporté le prix de la meilleure fragrance, composée par Jean-Claude Ellena et le prix du flacon (Pierre Hardy). Pour la campagne de pub a été récompensé le film d’Anne Fontaine avec Cate Blanchett pour Si d’Armani.

Dans la catégorie mythes de plus de 20 ans et toujours présents dans le top 30 ont été primés Opium d’Yves Saint Laurent et Habit rouge de Guerlain, deux très grands parfums, intemporels.

En grande distribution ont été récompensés Urban Homme de David Beckhan créé par Maurice Roucel qui a déclaré en recevant le prix : « Pour composer, j’ai beaucoup pensé à madame Beckham… ». Pour les féminins, Super Playboy de Playboy composé par Lucas Sieuzac.

Sous enseigne propre, Yves Rocher, habitué du podium des Fifi a gagné les deux prix : Secret d’essence Néroli (Véronique Nyberg) au féminin et Ambre noir (Christophe Reynaud) au masculin.

Le grand public a plébiscité cette année des parfums leaders du marché français dans leurs nouvelles variations : One million Intense de Paco Rabanne et J’adore Voile de parfum de Dior.

Consacré aux marques de niche, le prix des experts a couronné le magnifique Black de Comme des garçons, composé par Guillaume Flavigny qui a imaginé le noir avec des notes poivre noir, encens, réglisse, cuir, goudron de bouleau…, oeuvre au noir, un bijou olfactif. Pour les collections de grandes marques a été primé Tobacco Oud de Tom Ford, composé par Olivier Gillotin autour de notes boisées et de tabac.

Importants au sein de la profession, ces prix concernent aussi de plus en plus le grand public qui a la possibilité de voter sur internet.

Pour se donner un petit air de Paris, une « french touch », Uniqlo* a choisi une collaboration avec Inès de la Fressange. Ancienne mannequin, conseillère chez Roger Vivier et muse parisienne par excellence (son guide a été vendu dans le monde à plus d’un million d’exemplaires), Inès de la Fressange est partie de l’idée de choses universelles et simples, de basiques faciles à porter. Elle explique : « Je trouve le beau même dans les objets usuels, le quotidien. J’adhère moins à la mode inabordable, trop snob ou en dehors de la réalité ».

Pour le printemps été, quatre chapitres ont été écrits.

-Petite Parisienne s’inspire de tenues de travail traditionnelles et se distingue dans le raffinement de détails comme les motifs floraux à l’intérieur des manches.

-Bleu, blanc, Parisienne, des classiques un peu sportswear, polos, chemises en oxford et pantalons de toile.

-Note parisienne. Un peu plus habillé et chic. Une incontournable petite robe noire et des blouses en chiffon.

-Souffle de Parisienne. Des modèles pour la détente, la relaxation (yoga) dans des matières techniques et confortables (une des signatures d’Uniqlo).

Le retour d’Inès de la Fressange du côté de la création se profile ainsi chez Uniqlo (collaboration d’un an), en attendant le relancement de sa marque autour de IDLF dont le PDG est Fabrice Boé. La marque Inès de la Fressange qui a retrouvé son nom se développera autour de l’idée de lifestyle avec une collection mode et accessoires et sans doute une boutique très parisienne et concept store en 2015.

*Marque japonaise désormais incontournable d’une mode simple et accessible, Uniqlo a ouvert sa première boutique en France en  2007 à la Défense avant les ouvertures parisiennes du 9^ème arrondissement et récemment  du 15^ème, en attendant d’autres adresses. À côté des basiques, la marque collabore régulièrement avec des créateurs ainsi Jil Sander qui a signé des collections plusieurs saisons.

Anagramme de maestro, de Stromae, Mosaert, en se prononçant, à des allures de Mozart. Le jeune prodige de la chanson belge, aux allures de néo-dandy, participe à un collectif à l’origine d’une collection capsule de vêtements proche de son univers très personnel. Pour lui, pour elle, à voir en double, façon racine carrée et se retrouver « Tous les mêmes » en polos et chaussettes.

Ayant participé aux clips du chanteur, le collectif s’est lancé dans la production d’une première collection autour du style très travaillé de Stromae. Coralie Barbier pour le stylisme et le groupe Boldatwork pour le graphisme… signent cette Capsule N°1 baptisée Racine carrée pour le lien avec l’univers de Stromae et Cheese pour la bonne humeur ! Dans « Papaouatai » se découvraient déjà les motifs : jeux de perspective, isométrie, géométrie dans l’espace. La collection de polos et chaussettes a été produite en Europe. Design et imprimés made in Belgium et fabrication au Portugal pour les polos et France pour les chaussettes. Le style enfant sage emprunte ses codes aux collèges anglais. Les imprimés, joyeusement colorés, puisent aux sources des wax africains. Dans le dossier de presse figure un intrigant blouson avec des photos de Cesaria Évora (autre chanson de Stromae) sur un fond imprimé de tapisserie à fleurs, mais il ne figure pas encore dans la boutique virtuelle.

A partir du 2 avril. www.mosaert.com

Photos Frieke Janssens et Benjamin Brolet.