Schiaparelli

 

LOT 26 - Horst P. Horst - Elsa Schiaparelli Paris 1936 - ?10.000 - 12.000

Étonnante créatrice de mode depuis la fin des années vingt, Elsa Schiaparelli a laissé l’empreinte de son imagination à un monde fantasque, original et souvent proche de la mouvance surréaliste. L’actualité est particulièrement riche autour de son nom en ce mois de janvier. Chez Christie’s, l’exposition de sa collection personnelle (propriété de Marisa Berenson, sa petite fille) sera suivie d’une vente le 23 janvier.

Au programme de la vente : 180 lots avec des oeuvres d’art, des robes, créations d’Elsa ou sa collection de vêtements ethniques qui lui servirent d’inspiration. Des modèles de robes Hammamet où elle se fit construire une maison, des caftans, mais aussi des robes orientales, chinoises et kimonos.

Un lot est particulièrement remarquable, il s’agit de patrons de robes (la créatrice  ne dessinait pas, travaillait directement les matériaux qui étaient ensuite modélisés), 40 toiles de calicot roulées précieusement. Ce témoignage devrait fasciner les spécialistes. Vivant dans un entourage d’artistes, Schiaparelli collectionnait objets, peintures… ainsi un lampadaire de Giacometti, à motif de tête de jeune fille, un paravent de Marcel Vertès, du mobilier, des pièces d’argenterie originales,…

LOT 9 - Méridienne en confident de style Napoléon III - ?600-800LOT 23 - Alberto Giacometti - Lampadaire 'Figure Version Etroite' - ?60.000 - 80.000

 

Parmi les modèles signés Schiaparelli : un chemisier de soie de la collection astrologie (1939), estimé 25.000€, un gilet brodé de la collection Cirque (1938), un petit boléro en paille tressée et son chapeau avec des motifs d’abeille. Se redécouvre la fantaisie de Schiaparelli dans les détails ainsi un modèle de robe à l’allure orientale, fermée d’un zip tout le long et agrémenté d’une doublure en zibeline.

LOT 132 - Veste style matador en laine rose - Schiaparelli printemps-été 1940 - ?12.000 - 15.000LOT 135 détail - Boléro en crêpe de soie bleu 'sleeping' -  Schiaparelli 1940 - ?15.000-20.000

Lors de la conférence de presse, Marisa Berenson raconta sa grand-mère, égrèna les souvenirs qui ont tissé la légende d’Elsa ainsi celle de la petite fille qui, ne se trouvant pas belle, avait mis des graines dans ses narines et oreilles pour qu’y poussent des fleurs ! La fantasque Elsa choisit l’excentricité et fut, à de nombreuses reprises, sublimement photographiée par Horst P. Horst et Man Ray. Une dizaine de ces portraits de Man Ray figurent dans la vente ainsi l’étude solarisée d’Elsa qui servit de couverture à ses mémoires : A Shocking Life. Pour Marisa Berenson, cette collection a fait partie de son existence, mais :  « La vie évolue et il y a des moments où il faut accepter la séparation. Je suis convaincue que les objets personnels de ma grand-mère vont inspirer les générations futures, c’est un héritage extraordinaire et fascinant ».

Grande dame de la mode, Elsa Schiaparelli a joué la carte de la fantaisie, mettant sur la tête des élégantes des côtelettes, des chaussures, ou encore des cerveaux (velours innervé de circonvolutions et semé de perles). Les colliers osèrent des insectes en décolleté. Le sportswear fut aussi un fer de lance des débuts avec notamment des pulls en trompe-l’oeil à l’image de celui porté par Marisa Berenson, marinière blanche à rayures bleues et noeud rouge. De l’humour, de la fantaisie, mais aussi des innovations comme l’utilisation de grands zips posés de façon visible.

Les parfums furent particulièrement originaux et audacieux, Shocking (comme le nom donné au rose) dans un flacon bustier de femme inspiré des courbes voluptueuses de Mae West dont une sculpture en plâtre figure dans la vente. Entouré d’un minuscule mètre ruban, le flacon était couronné de fleurs signées Leonor Fini. Zut (deux versions dans la vente) mettait en scène une paire de jambes sur lesquelles un jupon était tombé (à l’image des jambes de Mistinguett). Pour Snuff, une forme de pipe, pour Sleeping, un bougeoir… Parfums incroyables, noms provocateurs, la créativité de Schiaparelli a marqué la parfumerie.

Si Schiaparelli a cessé ses activités de mode en 1954, son nom a été racheté par Diego Della Valle en 2006. Après une collection capsule signée Christian Lacroix, l’été dernier, la maison fait son retour pendant la haute couture en tant que membre invité. Marco Zanini, qui signait la mode de Rochas et est passé par Versace, va présenter son travail sous le nom de Schiaparelli le 20 janvier. Si la belle endormie se réveille, sera-ce avec la fantaisie et l’originalité de la créatrice qui lui a donné son nom ?

 

Exposition du 18 au 22 janvier chez Christie’s et vente le 23.

 

Portrait de Horst P. Horst

 

 

 

lire le billet

Chalayan / Vionnet

 

Hussein Chalayan

Créateur majeur de la scène anglaise mais défilant à Paris, Hussein Chalayan est un des rares à imaginer un vêtement aux accents futuristes multipliant les expériences avec la technologie. Maîtrise de la coupe et rigueur signent aussi ses modèles. Le créateur va désormais aussi dessiner les collections de la maison Vionnet (créée en 1912).

À son époque, Madeleine Vionnet fut une extraordinaire visionnaire et acquit sa célébrité et le respect de ses pairs (jusqu’à aujourd’hui) avec sa maîtrise de la coupe en biais et sa vision d’une déesse femme aux allures de sculpture antique. La maison de couture cessa ses activités pendant la seconde guerre mondiale et devint belle endormie.

A la fin des années 80, la maison est rachetée par la famille Lummen et est relancée en 1996 Place Vendôme. Au début des années 2000 un Italien, Maurizio Pecoraro dessine les créations. La mode revient véritablement sur le devant de la scène avec deux collections de Sofia Kokosalaki, adepte du travail des drapés. En 2007, c’est Marc Audibet (un grand des années 80, mais méconnu du grand public) qui oeuvre pour une seule saison, mais quitte le groupe n’ayant pas eu les moyens de créer. En 2009 la marque est rachetée en 2009 par des Italiens : Matteo Marzotto (groupe du même nom) et Gianni Castiglioni (président de Marni). Rodolfo Paglialunga est d’abord choisi pour la création puis est remplacé par Barbara et Lucia Croce. En 2012, nouveau changement, la maison est rachetée par Goga Ashkenazi femme d’affaire du Kazakhstan. Dans un premier temps, elle assure la direction artistique de la semi couture qu’elle imagine pour Vionnet pour qui elle nourrit une grande admiration et dont elle collectionne les vêtements. Mais pour relancer véritablement la maison, elle vient de choisir un des grands de la mode : Hussein Chalayan. De quoi réveiller définitivement la maison ?

 

lire le billet

Yiqing Yin chez Léonard

yiqing-yin_james-bort - copie

Dans un mercato de la mode en plein bouillonnement, la nomination de Yiqing Yin chez Léonard en tant que directrice de la création est une excellente nouvelle. Depuis plusieurs saisons, la jeune créatrice poursuit un travail remarquable autour des plissés et de savants drapés. Si elle est membre invité de la couture, elle a aussi débuté son prêt-à-porter. Lauréate de plusieurs prix en France dont le grand prix de la création Mode de la mairie de Paris et le prix des premières collections décerné par l’Andam, Yiqing Yin a réussi, en quelques saisons, à s’imposer comme un des jeunes talents les plus prometteurs de la mode aujourd’hui. Son arrivée chez Léonard devrait faire souffler un vent de renouveau dans la vénérable maison aux imprimés signature.

 

 

C James Bort

lire le billet

Mugler Follies

 

MUGLER-FOLLIES-Fourmi

D’improbables créatures, des costumes extraordinaires, des numéros de cabaret, de l’humour, c’est le Mugler Follies que propose Manfred T. Mugler (nom de scène du couturier) au théâtre Comedia.

MUGLER-FOLLIES-Final-Lucy-Eve

Créateur mythique des années 80, Thierry Mugler avait imaginé et imposé un style de femme conquérante à la silhouette impeccable et à la carrure majestueuse. Des défilés spectacles ont jalonné l’histoire de sa maison ainsi une extraordinaire couture hommage aux insectes en 1997 (très Microcosmos). Lors du 20ème anniversaire grandiose au cirque d’hiver, Cyd Charisse s’avançait, dégainant ses mythiques jambes, Tippi Hedren ondulait en fourreau de satin et plumes (d’oiseaux !),… et James Brown chantait Sex Machine. Le spectaculaire a toujours fait partie du travail  de Thierry Mugler. Venu de la danse, le créateur a ensuite poursuivi cette voie après l’arrêt de sa mode au début des années 2000. Il a participé à la création de Zumanity (spectacle pour adultes au Théâtre du soleil) et aussi les tenues d’une tournée de Beyoncé.

MUGLER-FOLLIES-Plastic-Girls

Aujourd’hui, Manfred T. Mugler propose à Paris dans le théâtre rénové de Comedia un spectacle de type revue. Le parcours d’une jeune héroïne qui se veut funambule est émaillé de rencontres étonnantes sur le chemin de sa gloire. Un poil d’érotisme, des performances, acrobaties, danses et chansons. Le plus réussi : les costumes d’un des grands de la mode où se retrouve son style inimitable dans les tenues en vinyle, les ballets des insectes… Une parodie de défilé est particulièrement séduisante. Parmi les attractions : Marie France dans un fourreau hommage à Marilyn (la robe qu’elle portait pour chanter Happy Birthday Mister President). Au programme également Lola (Laurent Mercier) et La chose, créature étonnante, hybride entre un Wesselmann et Leigh Bowery.

MUGLER-FOLLIES-La-Chose

 

Des lumières, de la musique et une mode spectaculaire ; du Mugler flamboyant, mais façon nostalgie plus que projection vers le futur.

MUGLER-FOLLIES-fr-affiche-HD

Jusqu’au 28 février à Paris.

 

 

C MTML Manfred T. Mugler

 

 

 

 

 

lire le billet

Alaïa à Galliera

ALAIA_GALLIERA_5373

 

 

Pour sa réouverture, le Palais Galliera* rend hommage au talent d’Azzedine Alaïa avec la première rétrospective en France consacrée au couturier. Orchestrée par Olivier Saillard, directeur du musée, l’exposition des 70 modèles se découvre dans une scénographie signée Martin Szekely.

ALAIA_GALLIERA_5518

Créateur majeur depuis les années 80, Azzedine Alaïa a choisi un parcours atypique, oubliant notamment les contraintes d’un calendrier de la mode imposé. Architecte du vêtement, il possède une maîtrise de la coupe hors normes. S’il a modestement débuté, il a su vite trouver une clientèle de fidèles séduites par ses robes parfaites. Louise de Vilmorin ou Greta Garbo furent parmi les premières personnalités à porter ses modèles. Muse, Arletty servit d’inspiration, ainsi l’iconique robe zippée est influencée par une tenue portée par l’actrice dans Hôtel du nord. Le style troubadour de la collection 88-89 s’inspire lui du style des tenues médiévales des Visiteurs du soir.

ALAIA_GALLIERA_5465

Couturier majeur des années 80, Alaïa a su imposer un style personnel qui a défié le temps. Perfectionniste, il a développé une maîtrise de la coupe parfaitement construite. Ses matières de prédilection furent le stretch, mais aussi le cuir, particulièrement souple. Le jean, il l’a « moulé comme un bas-relief ». La technologie est aussi un centre d’intérêt pour le couturier avec les découpes au laser, les perforations… « Quand je travaille le vêtement, il faut que ça tourne sur le corps, de profil et de dos » explique-t-il. Ces dernières années, ce sont ses robes de patineuses qui sont devenues une signature sur lesquelles les nouvelles élégantes ont jeté leur dévolu.

Dans l’exposition, 70 modèles remettent en mémoire la force des années 80, l’audace des modèles que portaient les conquérantes de l’époque. Se redécouvre aussi avec bonheur la fantaisie avec l’utilisation de matières comme le raphia ou les imprimés fauve. Se dresse, longiligne la robe à cagoule et laçage sublimement portée par Grace Jones. Une magnifique succession de silhouettes empreintes de majesté hante le décor des salles du Palais Galliera restaurées. L’exposition traverse aussi l’avenue du Président Wilson. Hors les murs, elle ose une incursion au musée d’art moderne de la ville de Paris, juste en face. C’est dans la salle des grands Matisse qu’a lieu une réjouissante confrontation entre art et mode. Le sujet tient à coeur au créateur qui a souvent tissé des liens entre art et mode au fil de rencontres : au CAPC de Bordeaux avec des sculptures de Dan Flavin, avec Julian Schnabel à la Biennale de la mode à Florence… Pour la grande rétrospective au musée Groninger des passerelles étaient proposées avec des oeuvres de Picasso, Basquiat et Kiefer.

ALAIA_MAM_6542ALAIA_MAM_6513

Reconnu par ses pairs comme un des « grands » de la mode, Azzedine Alaïa reçut deux oscars de la mode en 1985 lors d’une manifestation organisée à l’instigation du ministre de la culture de l’époque, Jack Lang.

Le très beau catalogue remet en lumière des séries de mode mythiques avec les mannequins des années 80 signées Horst P. Horst, Peter Lindbergh, Arthur Elgort… Croquées par William Klein, les coulisses des défilés découvrent l’envers du décor. Parmi les souvenirs qui s’égrènent au fil des pages : un essayage de la robe bleu blanc rouge portée par Jessye Norman pour chanter la Marseillaise lors du bicentenaire de la révolution française. Des dessins d’Aurore de la Morinerie ajoute une touche de poésie. De nouvelles photos figurent également dans l’ouvrage ainsi une série délicate et magnifique signée Sarah Moon.

Jusqu’au 26 janvier.

 

C   Pierre Antoine

 

lire le billet