Cherif est frais, mais encore timide

Je regarde aussi les polars des grandes chaînes françaises. Bon, ok, en général je craque après trois épisodes, mais je les regarde, au début. Je dis ça parce qu’on me demande rarement mon avis sur autre chose que sur les séries d’Arte et de Canal+, à l’occasion sur un polar de TF1, que j’éclate bien trop souvent (c’est pas de ma faute) – quoi que j’ai vu bien pire que Falco. Alors ce soir, avant qu’il ne soit trop tard, et parce qu’on me demandait ce que j’en pense, je voudrais écrire une bafouille sur Cherif, qui débute ce soir à 20h45 sur France 2.

J’ai pris Cherif par le mauvais bout. Par l’épisode 6, diffusé au dernier Festival de la Fiction de la Rochelle, dans un de ces choix de programmation ubuesque où l’on fait découvrir une série au public – et accessoirement aux journalistes – par un de ses derniers épisodes (la saison 1 a 8 épisodes). Étrange choix, et mauvais choix. L’épisode 6 de Cherif ressemble à un polar des familles, sonne souvent faux, est longuet, manque de rythme, cache de bien mauvaises répliques, bref, ne m’a pas donné envie de voir la suite – ou le début, en fait.

Parce que, sur le papier, Cherif avait l’air sympa, je suis pourtant retourné au début. Le Cherif du titre, c’est Kader, un flic lyonnais, quarantenaire, un peu bordélique et gentiment incontrôlable, le genre qui fait comme bon lui semble, mais pas en mode Vic Mackey. Avec le sourire, toujours charmant, donc agaçant pour ceux qu’il coince – et pour son ex femme. Cherif est un bon flic, mais on lui colle dans les pattes une partenaire coincée au possible, Adeline Briard (Carole Bianic), procédurière, stricte, pète-sec, bref, tout l’inverse de lui. Ils se chamaillent, ils se détestent, mais on sent qu’un jour ils pourraient finir par s’aimer. Bref, rien de bien neuf.

L’originalité de Cherif est dans son héros : ses origines – la série s’appelait au départ Kader Cherif, ça évitait de croire qu’on va voir Shérif tout court – et son petit côté geek – il s’inspire des séries et des films de sa jeunesse et lâche des « Kojak, saison 1, épisode 1 », quand on lui demande où il a dégoté ses méthodes. Deux idées sympas, que les scénaristes ont la sagesse de laisser au second plan, notamment dans la vie privée du héros. En gros, Cherif n’est pas « un polar avec un arabe », mais un « un polar dont le héros se trouve être d’origine arabe », et ne revendique rien du tout. C’est moderne, c’est cool, et c’est tant mieux.

Donc, sur le papier, Cherif n’a pas trop mauvaise allure. Le champ de la série grand public intelligente, avec un héros original, est encore à améliorer en France. Donc, Cherif était le bienvenu. Bon, maintenant, qu’est-ce que j’en pense concrètement ?

Le petit côté geek de Cherif passe bien. Son ton doux, son charme, son sourire, aussi. Ça nous change des flics constipés qui font la gueule en permanence – ben ouais quoi, c’est marrant de ramasser des cadavres et de coincer des assassins. Abdelhafid Metalsi, qu’on avait découvert dans Les Hommes de l’ombre, a du charisme. Mieux vaut Cherif que la plupart des polars grand public prétentieux, resucées de séries américaines. Au-delà de ça, ça coince. L’opposition Cherif / Briard est trop convenue, comme les enquêtes. On a encore droit à ces scènes de crime où les flics commentent tout ce qu’ils font, comme si la caméra ne pouvait pas nous le dire. Les relations intimes de Cherif, surtout avec sa fille ado, sont sympas un instant, puis lassantes. Plus globalement, Cherif sonne un peu faux, ou artificiel, un peu trop mécanique, pas assez souple, pas assez décontractée pour coller à l’image de son héros. Metalsi, d’ailleurs, malgré son charisme, joue un peu à côté. Ça peut avoir son charme, mais ça peut aussi sonner faux. Donc, au final, sans être désagréable, Cherif reste très inégale. Malgré son héros attachant, ce ne sera pas le polar qui nous fera nous brancher sur France 2 tous les vendredis soirs.

Regardez le pilote ce soir à 20h45 sur France 2, et dites-moi ce que vous en pensez…

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