Ça va devenir une habitude. Après le succès mondial du post « On a revu le pilote de Beverly Hills », ma camarade Charlotte Blum (qui dit des trucs fantastiques sur OCS Max chaque vendredi soir) et moi-même avons décidé, parce qu’on aime les séries et les pizzas (ou l’inverse), de revoir au moins une fois par mois le pilote d’une série « culte », d’un « classique », bref d’une série dont on parle tout le temps mais dont on n’a pas forcément souvenir des premières images – ou alors, justement, seulement souvenir. Après Brandon dans le jacuzzi, on attaque 2013 avec Jacko dans le frigo. Un pilote de 24h Chrono qui, ô soulagement, ne dure pas 90mn comme celui de Beverly Hills (ça aurait été con). Hop, direction le 6 novembre 2001.
On aime tellement Jack Bauer (on l’appellera d’ailleurs ici Jacko, affectueusement) qu’on croyait que ce pilote s’ouvrait sur une scène de torture. Un truc sympa avec électrocution des parties intimes où initiation à l’apnée dans une cuvette de chiottes. Même pas. On est à Kuala Lumpur, en Malaisie, et l’horloge (qui fait alors un bruit différent, un tic-tac un peu plus sourd, ou alors la télé de Charlotte déconne ce qui est un peu le cas mais bon c’est pas le sujet je m’égare…) et l’horloge, donc, marque 4h de l’aprèm. Pour le brèles en math et en fuseaux horaires, ça fait minuit à Los Angeles. Parce qu’on a lu dans le programme télé que 24 parle de terroristes, et parce que Kuala Lumpur, ça sonne pas fiable comme bled – ben ouais, c’est ni en Amérique, ni aux États-Unis, ni en Californie – le type qui apparaît à l’écran ne nous inspire rien de bon. Il est pas rasé, il sue, et il se retourne tout le temps. C’est donc forcément un méchant – en fait, c’est un gentil déguisé en méchant, chargé d’alerter la CTU que le bon gars Palmer, candidat aux primaires, a une cible entre les deux yeux.
Bref. Comme il fait trop chaud à Kuala Lumpur (les producteurs de 24 savaient-ils que ça veut dire « confluent vaseux » en malais ? Si oui, je tiens à leur dire que leur série, au bout de quelques saisons, est un peu devenu un kuala lumpur), on déménage à Los Angeles, et on fait connaissance avec la famille Bauer. Charlotte, qui est aussi chroniqueuse mode chez Bons Goûts Magazine, note d’entrée de jeu que « 24 doit être la série dans laquelle les personnages sont les plus mal habillés. » Elle a visiblement pris un coup sur la tête depuis le pilote Beverly Hills. Je suis personnellement sous le charme de Kim, superbe dans un peignoir rose pâle (« volé dans un hôtel Formule 1 en bordure du périph », précise-t-on à ma droite), et je trouve que le fait que Jack ne porte pas de chaussettes (« c’est con quand tu sais que le mec va passer 24 heures à courir », ajoute-t-on) profondément émouvant. Papa et sa (désactivez votre contrôle parental pour voir ce mot) de fille jouent aux échecs (si les scénaristes voulaient se la jouer métaphoriques, une partie de pétanque eut été plus appropriées) pendant que maman Teri bosse dans la cuisine – douce ironie, c’est Jacko qui n’en colle pas une. Tout de suite, on sent le mec autoritaire. Son premier ordre : « il est l’heure d’aller se coucher. » 1. On se dit qu’il doit y avoir un truc avec l’heure dans cette série et 2. Kim a genre 16 ou 17 ans et son papa lui dit encore à quelle heure elle doit se coucher, trop la hooooonte sur elle. Charlotte, qui a aussi bossé pour OK Podium, tient à ajouter que Kiefer Sutherland est « beau et jeune comme dans Génération Perdue », et, perfide, conclut « à croire que 8 années passées dans la peau de Bauer a fait vieillir Sutherland à vitesse grand V. »
A ce rythme là ce post va sortir en deux tomes, alors j’accélère. Ça n’a sans doute eu l’air de rien quand on l’a vu en 2001, mais cette scène d’ouverture familiale est un truc de dingue : Jack passe tout près de la porte des toilettes et, surtout, il ouvre le frigo pour manger un truc – un yaourt selon Charlotte – ce qui tendrait à prouver qu’il est doté d’un système digestif humain, et que la théorie qui voudrait qu’il a fait greffer un chargeur de téléphone à la place de son intestin grêle est une sottise. Pendant qu’on parlait produits laitiers, cette (pffff, je me retiens) de Kim s’est fait la malle. Elle a bien raison, Jacko avait qu’à être plus souple avec les horaires. En plus, on a bien compris que le couple parental Bauer traverse une période difficile parce que… Oh mais attendez, c’est un drame familial ou un thriller antiterroriste ce truc ? On passe des plombes sur Kim et sur sa fugue, deux fois plus que sur un truc dont on ne se contrefoutrait pas…
Pendant que Jacko reçoit un coup de fil de Nina (ce front, mais ce front, quel front !) et qu’il répond en nous aidant encore avec l’heure – « j’arrive dans l’heure », tu m’étonnes coco, sinon ce sera l’épisode 2 – on découvre un peu plus avant les joies du split-screen, en fait une déclinaison du visiophone en plus cool. Kim, elle, débarque avec une copine chaude comme la braise et deux mecs lubriques à souhait dans un magasin de meubles – y’a surtout des lits, grrrrr – et, note Charlotte, « la fête va être dingue, ils ont un pack de six bières pour quatre. » On rouvre la chronique mode de Têtes de Séries, avec Charlotte Saint-Laurent : « Kim est habillée en pute, avec un top à la Pocahontas au-dessus du nombril, qu’elle va devoir porter pendant un nombre infini d’épisodes, et elle a la coupe de cheveux la plus 90’s du monde : la minivague. Ça nous rappelle un peu Beverly Hills, finalement. » Kim, en fait, est aussi coincée que Dana, sa cousine de Homeland, et on se dit qu’en les enfermant dans une cave 1. ça ferait un concours de memes (les grimaces, pas les retraitées) d’anthologie et 2. les deux séries seraient vachement mieux.
Pour ceux qui n’ont toujours pas pigé le concept de 24h Chrono, on explique à Jacko, arrivé à la CTU, que la menace sur Palmer va se concrétiser dans les 24 heures. Sinon, ça sera en saison 2. Vu que la CTU, ça n’existe pas en vrai, on est tenté de confondre avec la SPA : George Mason, un peu cocker, nous apprend qu’il y a une taupe dans le coin – c’est pas aveugle une taupe ? Une fouine ça conviendrait pas mieux pour un espion ennemi ? – et la fille qui remplace Chloé – qui ne déboule qu’en saison 3 – « ressemble à Barf, le chien de La Folle Histoire de l’Espace », note Charlotte, cinéphile (pour comparer, voyez la fille (qui s’appelle Jamey, dans la série), voyez le chien, et notez que cette comparaison n’engage que Charlotte).
Parce que Jack ne sait pas encore que David Palmer jouera un rôle dans l’élection de Barack Obama (rôle symbolique, ok, mais toutes les scènes où il apparaît dans ce pilote, c’est plus fort que moi, j’y pense), il préfère s’occuper de sa fille, et utilise la technologie de la CTU pour hacker son compte mail – « mot de passe, Lifesucks… ça c’est une vraie ado », note Charlotte, qui poursuit, « pendant ce temps, Kim raconte à un mec que son père est mort, méthode ultra subtile des scénaristes pour nous indiquer que VRAIMENT, chez les Bauer, c’est tendu du slip. Et dix minutes plus tard, elle monte à l’arrière d’une camionnette avec deux mecs qu’elle ne connait pas, et qui, bien sûr, vont l’enlever / lui faire du mal / faire chier le monde de Jack Bauer. » Jack, lui, suspecte George d’être suspect. Du coup… a) il lui pète le bras b) il lui met une bastos dans le genoux c) il accroche sa femme par les cheveux à l’arrière d’un pick-up et la traine jusqu’au Mexique ou d) il lui injecte un somnifère qu’on se demande bien ce qu’il foutait dans un placard de l’open space de la CTU. La bonne réponse est d), et on est déçu, parce qu’on attendait plus de violence venant de Jacko – qui nous donne encore l’heure quand il nous précise que George va se réveiller dans 30 minutes (ouah, juste avant le générique de fin, il est bien fait ce somnifère).
Puisque Jacko est un peu mou et que Kim nous donne déjà des envies de tartines à la mort-aux-rats, on se console avec Mandy (jouée par Mia Kirshner). Elle est dans un avion (bon pour la libido, pas bon pour la CTU) et elle drague un type suspect – la preuve, il a un accent allemand. « Elle porte LA tenue idéale pour les longs voyages et les endroits surclimatisés : une mini-jupe et des talons » note finement Charlotte. Elle finit dans les toilettes avec le gars, et on se doute que pour la peine il va mourir, mais bon, au moins il ne sera pas mort pour rien. Et là, paf, gros truc débile bien bourrin – soulagement dans l’audience : elle fait péter tout l’avion juste pour supprimer un gars (l’Allemand, c’était le photographe de Palmer, et elle va prendre sa place).
Bilan : la copine de Kim et son pote se sont envoyés en l’air (ça fait deux coïts en 42 minutes, soit à mon avis autant que par saison de 24) et ils sont raides bourrés après 2 canettes de bières, Jacko a mis chaos son supérieur mais il n’a pas dégainé une fois son flingue, on se demande bien pourquoi il a trompé sa femme avec Nina, sauf si depuis sa maquilleuse et son coiffeur sont morts, et s’il n’y avait pas eu Mandy on se serait limite emmerdés. Charlotte est déçue, elle aussi : « A la fin de ce pilote, je me pose une seule question, et ce n’est ni “que va t-il arriver à Kim?”, ni “Jack trouvera t-il la taupe?” mais bien : “putain, comment j’ai fait pour avoir envie de mater le suivant, vu le peu d’intérêt que m’a procuré le pilote?” Ah well, 1/ j’avais du avoir un crush sur Jack, 2/ j’avais moins le choix, à l’époque. »
Disons que les scénaristes ont eu la bonne idée de laisser le temps aux personnages de s’installer. Et que depuis, on s’est habitué à des thrillers avec un rythme plus soutenu, à cause de… 24h Chrono. En éteignant la télé, j’ai une pensée pour le mec de Kuala Lumpur, parce qu’on ne sait toujours pas ce qu’il fout à Kuala Lumpur, damn it ! (Tiens, pas un “damn it” ni un “freeze” de tout le pilote…)
Image de Une : 24, FOX.
“Ah well, 1/ j’avais du avoir un crush sur Jack” Insupportable franglais….
Bon article sinon mais le franglais comme ça faut arrêter damn it !
C’est censé être drôle ? Je pense que ça se veut intelligent, mais vos remarques (ou vos “notes”, pardon) sont surtout assez ri– pffff, je me retiens. Je ne vois pas trop l’intérêt de ce genre de chronique, en fait.
Je vais pas revenir sur tout, ça n’a pas lieu d’être une vraie critique, mais Jack n’a jamais (ou très très rarement) dit “freeze” — ça me semble pas être une blague ou de la répartie ironique, donc je suppose que vous pensez vraiment qu’il dit ça (souvent) dans la série. Soit vous êtes grand amateur de VF (je ne pense pas ;)), soit vous n’avez pas vraiment regardé 24… avec attention (il aurait mieux fallu mentionner “drop the gun” / “put the gun down”).
Il me semblerait plus judicieux de faire des critiques sérieuses (approfondies, utiles, etc.) de pilotes n’ayant pas pu être reviewés indépendamment en leur temps, et un angle intéressant serait de les mettre en perspective avec le reste de la série.
Histoire de ne pas avoir juste l’air d’un grand méchant, je vais dire mon avis sur ce pilote de 24, qui ne ressent pas comme un pilote justement, mais comme la première étape d’un tout (point très positif), et m’a laissé intrigué avec des histoires qui commencent à se complexifier sur la fin (les amis de Janet qui semblent assez louches, notamment).
Enfin bon, ça ne vient pas du Câble (HBO/Showtime/AMC/FX) et Kiefer Sutherland ne réalise/écrit pas tous les épisodes, donc forcément on veut frimer en étant ironique/sarcastique sur des trucs qui n’en demandent pas tant. En l’occurrence, moi j’ai bien vu 24, et je la place haut dans mon estime, et je suis très heureux qu’une série comme ça ait pu exister pendant 8 saisons sur un grand network.
@ Léonard : c’est en effet une chronique légère, pour s’amuser un peu. J’ai vu tout 24h, j’ai interviewé sérieusement ses scénaristes, producteurs et acteurs pendant des années, j’ai fait des papiers d’analyse, alors le but c’est de s’amuser ! Ceci étant dit, l’humour n’est pas une chose facile 🙂
On peut avoir les liens vers les papiers d’analyse, Pierre?
@Jérome : malheureusement, elles remontent à l’époque de Générique(s) pour la plupart, donc sans trace sur le net 🙁 Les premiers temps de 24 commencent à dater…
Oui, effectivement, c’est très très léger on va dire :D. Désolé si j’ai pu paraitre un peu brusque, j’apprécie souvent vos opinions, or là je trouvais ça assez dommage de parler de 24 comme ça, la série n’est pas parfaite mais je suis assez fan.
Vous étiez à Générique(s) c’est vrai, j’avais presque oublié ce très bon magazine qui aurait mérité de continuer – pour une fois qu’il y en avait un bon avec un vrai fond. J’ai les 27 numéros à la maison et le n°7, avec Jack Bauer en couv’, est justement celui qui m’a fait connaitre le mag (et le Kief’ était aussi en couv’ du n°1). Générique(s) n’a pas eu de successeur digne amha, mais je ne désespère pas.
Je rejoins un peu Leonard sur le coup : malgré le but humoristique et leger on pense tout de même en lisant la chronique que le pilote de 24 est un peu kitsch, voire niais (surtout en choisissant 24 après Beverly Hills)
Pourtant ce pilote présente (presque) toutes les ficelles de ce qui a fait de 24 une grande série. Si on juge l’episode en tant que pilote, il est furieusement efficace, affirme dès son premier coup son identité, puis la première rencontre avec Bauer et Palmer, deux personnages trop classes et cultes toutes séries confondues… (oui bon j’aime beaucoup aussi 24)
Bref, un pilote trop reussi à mon goût pour en parler avec legèreté à mon humble avis, à moins que tu t’apprêtes aussi à parler de la même façon des pilotes de Lost ou Friends ?
Quitt à parler d’un pilote avec tant de légèreté, un Smallville ou un Dawson feraient pas mieux l’affaire ?
Oh, si c’est dans Génériques, je dois l’avoir quelque part à la maison…
Dommage qu’il n’y ait pas de saison 9 ou 10 et plein d’autres encore :(. C’était une des seules séries ou a la fin d’un épisode on repousser des limites pour voir le suivant 😀