On apprenait le 22 mars que le « prequel » de Battlestar Galactica, Blood & Chrome, qui devait raconter la jeunesse de William Adama, ne verrait jamais le jour, trappé par SyFy après la production d’un téléfilm pilote de 90 minutes, qui lui sera diffusé – comme cela avait été le cas pour BSG et Caprica. Triste nouvelle, mais nouvelle prévisible. On n’avait plus d’infos sur B&C depuis un bail, depuis qu’on s’était amusé à se dire que c’est le Freddie de Skins, Luke Pasqualino, qui jouerai Bill Adama jeune. Voir ce projet devenir une série aurait été un contre-pied absolu à une tendance lourde : la disparition (temporaire ?) du space opera, un genre qui aura marqué l’histoire des séries, de Star Trek à Stargate en passant par, justement, Battlestar Galactica. Pourquoi cette mort annoncée ?
Parce que l’espace, ça coûte cher.
C’est visiblement un des gros soucis de Blood & Chrome. Au bout de 90 minutes, on se rend compte de ce que va coûter une série. Retard sur la production, effets spéciaux et consorts peuvent vous plomber un projet. Il n’y a que quand on s’appelle Spielberg qu’on s’en sort – un temps (cf Terra Nova). Surtout, si on pouvait arrondir les angles et faire un peu cheap il y a encore dix ans, il faut aujourd’hui en mettre plein les mirettes d’un public habitué aux blockbusters hollywoodiens – en 3D ou pas. Du coup, les batailles intergalactiques entièrement tournées sur fonds verts n’ont de la gueule que si vous avez la crème des crèmes des effets spéciaux. Le projet de série Star Wars en chair et en os (on ne parle pas de l’animation ici), qui compte là-dessus, est en gestation. Dans tous les cas, il faut du temps. Or, en télé, le temps est un luxe, qu’une chaîne modeste comme SyFy ne peut pas se payer.
Parce que l’espace, c’est un truc de geek.
J’exagère, mais il me fallait une porte d’entrée pour mon second argument : les chaînes américaines, passées HBO, AMC, Showtime et FX, n’ont qu’un mot à la bouche : fédérer (aparté : un space opera d’HBO, ce serait extra…). Il faut que les séries plaisent à tout le monde, ou tout du moins n’excluent personne. Or, l’espace n’est pas franchement un univers fédérateur. Scientifique, cryptique, souvent métaphorique, voire métaphysique, il sous-entend surtout une certaine esthétique fatalement légèrement rétro. Le téléspectateur qui passe devant une scène de Battlestar Galactica sans prendre le temps d’en comprendre les enjeux ne voit qu’une bande de types en combinaisons un poil grotesques. Et rate l’immense richesse du sous-texte, la force des émotions, la complexité narrative, etc. Mais, à l’heure où il faut plaire vite, difficile de convaincre sur une base esthétique comme celle du Space Opera.
Parce que l’espace, c’est anxiogène.
Vous vous souvenez, c’est là qu’on ne vous entend pas crier. En temps de crise, d’angoisse globale, de stress international, il faut décontracter la zapette du téléspectateur consommateur. Pas l’enfermer dans un vaisseau perdu aux confins de la galaxie. Dans l’espace, il fait forcément nuit. Aujourd’hui, les chaînes veulent du soleil. Et pas le genre de soleil où le vaisseau risque d’aller se faire rôtir…
Parce que SyFy tente de changer sa définition de la SF.
Et que ça ressemble plus à « genre ludique où l’on s’amuse à se faire peur avec les possibilités de la science et de l’histoire. » Ce n’est pas désagréable, Eureka, Warehouse 13 ou Haven se laissent regarder, mais on est loin d’œuvres métaphysiques ou même visionnaires. Un excellent équilibre entre la SF pure et dure et le drame humain (la tragédie aussi) avait été trouvé avec Caprica, mais ça n’a pas tenu… Difficile de marquer une limite claire entre SF, Fantastique, Fantaisie…
Parce que la roue tourne.
En séries, comme en tout, il y a des cycles. Sans doute le Space Opera reviendra quand l’Homme s’envolera pour Mars. L’heure n’est plus à l’espace. L’espace est mort, vive l’espace !
Image de Une : BSG, Blood & Chrome (SyFy)
Un space opera HBO ca finira par arriver. Ils ont fait les vampires et autres loups garous avec True Blood. Ils font de la high fantasy, le genre le plus geek imaginable, avec GoT. Ils viendront a la SF, doucement, quand ca reviendra a la mode – on verra l’effet que fera Prometheus dans 1 mois et demi.
En effet je suis sûr que ça arrivera sur les chaines câblées. D’ailleurs il y a plus de 10 ans c’était Showtime qui avait diffusé “Total Recall 2070” je crois.
Et puis je trouve que ces chaines du câble sont les plus aptes à cibler un public SF que des chaines généralistes, le problème de Syfy c’est que c’est devenu une de ces chaines qui veut avoir tout le monde comme public, il n’y a qu’à voir qu’il diffusent du catch maintenant pour comprendre ça ^^
Le bon temps de Battlestar Gallactica et Farscape est définitivement révolu ; un space opéra sur HBO, effectivement serait de bonne augure, imaginez par contre la même série sur AMC : plans séquences sur l’espace digne d’un film biélorusse et dialogue kantiens sur l’origine d’une espace extra-terrestre, ça pourrait distraire, voire fasciner. Quoiqu’il en soit il est temps que la SF retrouve ses lettres de noblesse.
On notera un retour en force de la sf au cinema, par contre. Ca va peut etre relancer la vague d ici deux trois ans. En attendant, j vais m replonger dans babylon 5.