Non, vous ne rêvez pas. Je m’apprête à dire du bien d’une série française. Relativisons, je ne vais pas que dire du bien, je vais tenter de comprendre le succès d’une série française, dont je ne suis pas un fan, mais que je regarde à l’occasion sans déplaisir, voire en rigolant franchement. Je veux parler de Joséphine ange gardien. Nan, je déconne, je veux parler de Scènes de ménages. La shortcom d’M6 explose tous les compteurs d’audience ces jours-ci, et questionne forcément. Alors, pourquoi un tel succès ?
1. Parce que c’est une shortcom, justement.
A tout rabat-joie de mon genre râlant face au niveau médiocre de notre belle fiction nationale, il faut répondre : « Eh, y’a les shortcoms, quand même. » Chez nous, plus c’est court, plus c’est bon. Caméra Café, Kaamelott, maintenant Scènes de Ménages, M6 s’y connaît, et n’a presque jamais raté son coup – seule Soda (qui ne m’a pas fait rire, mais je dois être trop vieux) et la suite de Caméra Café (annulée rapido faute d’audiences) font exception. Si on veut être plus cynique, on notera que le téléspectateur moderne, accro au zapping, aime les formats courts, qui permettent à son cerveau de rester disponible, et de faire autre chose en même temps. Quoi qu’il en soit, le succès de Scènes de ménages confirmerait l’adage : ce n’est pas la taille de la série qui compte, c’est ce qu’on en fait…
2. Parce qu’on l’a piqué à l’étranger.
Je vous avais dit que j’allais aussi être méchant. Un gars / Une fille, c’était les québécois. Ici, ce sont les Espagnols qui sont pompés. Y’a pas de honte à copier sur le voisin, surtout, jurent les producteurs de Scènes de ménages – et on est assez sympa pour les croire, vu qu’on ne parle pas espagnol – qu’ils s’éloignent franchement de leur modèle. Les Philippins ont bien leur version de Caméra Café, après tout…
3. Parce que plus fédérateur, tu meurs.
Le concept même de Scènes de ménages est à faire baver d’envie un programmateur de grande chaîne : il y en a pour tous les âges, des trentenaires aux sexagénaires. Quatre couples, trois générations, et des milieux sociaux différents. Les trentenaires sont des citadins un peu fauchés et des néo-ruraux un peu fauchés aussi, les quarantenaires sont des “beaufs” de banlieue ou de province et les sexagénaires des retraités – difficile de dire d’où. Femmes, hommes, jeunes (avec et sans enfants), vieux, ville, banlieue, province, le compte est bon. Ne manquent que les 15-25, que plus personne ne courtise, puisqu’ils ont lâché la télé pour internet…
4. Parce qu’on a trop la haine !
La gentillesse ne paye plus. Aujourd’hui, il faut gazer, casser, mettre sa rage à l’autre, bref, se payer la tête de son prochain. Scènes de ménages est une véritable compet’ de cassage, pire que Brice que Nice – en même temps, c’est pas dur – puissamment cathartique. Si on en croit ses couples, s’engueuler, c’est pas grave. Pire, c’est la plus belle preuve d’amour. Alors, après une bonne volée d’épisodes, vous pourrez dire à votre conjoint(e) : va, je t’aime, pov’ conne/connard — ou, pour les littéraires : va, je ne te hais point.
5. Parce que ça amuse même les célibataires.
Ce qui voudrait dire que l’identification n’est pas nécessaire. Je dis ça, je dis rien…
6. Parce que les vieux.
Huguette et Raymond, les sexagénaires (Marion Game et Gérard Hernandez), méritent à eux seuls un coup d’œil. Systématique, leur manège est pourtant presque toujours réjouissant, parfois hilarant. C’est évidemment plus facile d’écrire des sketches pour deux personnages aussi aigris et méchants dans la tendresse mais, de l’écriture à l’interprétation, rien à dire, c’est une réussite.
7. Parce que c’est plutôt bien senti.
Ne soyons pas trop sévère. A l’heure du repas, pour changer de l’assommant exercice des infos, Scènes de ménages ne fait pas de mal. Ses comédiens sont bons, ses textes généralement justes. Étant donnée la masse de blagues qu’il leur faut sortir chaque semaine, les scénaristes ont du mérite. On ne s’étouffera pas de rire, mais la tentation de ne pas zapper est suffisamment grande pour qu’on le reconnaisse.
8. Parce que y’a pas mieux.
Finissons tout de même sur une méchanceté. S’il y avait des inédits de Un gars / Une fille, de Kaamelott ou de Caméra Café à la même heure, sur une chaîne concurrente, on zapperait.
Image de Une : Scènes de ménages, M6.
C’est etonnant que vous ne citiez pas “Bref” – un autre format court qui connait un enorme succes, notamment grace a Internet.
@ben Si, si, Bref est très bien, très réussie, mais c’est un programme court, pas vraiment une shortcom, en fait. C’est quelque part entre la pastille à la “Service après vente des émissions” et la shortcom. Du coup, je la laisse un peu à l’écart de tout ça…
– “qui permettent à son cerveau de rester disponible…” ah ba ça alors… M6 qui permet ça ? ^^ hihi
-” 6. Parce que les vieux.” d’avis général autour de moi les vieux lassent (en référence des amis célibataires quasi trentenaires, des couples de la trentaine et couples de la cinquantaine)
le jeu d’acteur oui peut être mais l’écriture doit manquer alors car les vieux se font toujours les même crasses et elles en deviennent donc souvent télephonées ou capilotractées.
Les vieux qui avaient les faveurs de mes connaissances “accroc” à la série passent désormais en second plan et les nouvelles “vedettes” sont le couple de la quarantaine José et Liliane (Frédéric Bouraly et Valérie Karsenti)
Dans les shortcoms, n’oubliez surtout pas Very Bad Blagues qui passent sur Direct 8 à 20h30 !!!
Je les ai découvert sur internet, n’étant pas un afficionado de cette chaîne :
http://www.youtube.com/show/verybadblagues?s=1
Les comédiens du Palmashow revisitent certains instants de la vie quotidienne ou parodient la télévision, comme celui-ci : “Quand on rencontre son ex”
http://www.youtube.com/watch?v=P0ej3WNlOzk&feature=sh_e_se&list=SL
A voir et revoir
@Bob : Comme pour “Bref”, ceci n’est pas une shortcom, mais une pastille, selon moi. Je n’ai d’ailleurs pas beaucoup ri en la regardant. Mais ça n’engage que moi…
Admettons… cela dit vous placez Kaamelott dans les shortcoms alors qu’initialement c’est une pastille qui est devenue feuilletonante (néologisme ?) par la suite.
Dans tous les cas, c’est dommage que leur humour n’ait pas réussi à vous atteindre. C’est vrai que sur une centaine de vidéos la qualité est inégale, mais je vous défie de ne pas au moins sourire à la “pastille” : “Quand on est parent d’élève” ou “Quand on est super héros”.
Bonjour,
Je suis étudiant en info comm’ et doit réaliser un reportage sur les shortcoms d’hier à aujourd’hui. Seulement j’ai du mal à trouver les infos. Du moins elles se ressemblent toutes plus ou moins. Etant à bordeaux je vais tenter de voir si quelqu’un ne peut pas me recevoir aux locaux de m6 mais j’ai peu d’espoir.
Je cherche quelque chose qui puisse sublimer mon reportage, auriez vous une idée?
Et au passage, pour moi very bad blagues ainsi que bref sont bel et bien des shortcoms et non pas des pastilles. C’est seulement une évolution des shortcoms, il est normal qu’elles ne soient pas à l’identique d’un gars, une fille qui est sortie en 1999 pour la 1ère fois.
” Je n’ai d’ailleurs pas beaucoup ri en la regardant. Mais ça n’engage que moi…” : il ne faut se contenter d’un seul épisode. Ce n’est qu’au bout du deuxième ou troisième épisode que l’on commence à réellement comprendre le concept de cette shortcom. Elle nous fait vivre ce qui est resté bloqué à notre imaginaire sans oser franchir la porte des cordes vocales.
@Clément Ça n’engage que moi, mais la différence entre une shortcom et pastille tiens pour moi dans l’envie des scénaristes de faire évoluer les personnages au fur et à mesure des épisodes. Pour Bref, il est trop tôt pour le dire, et je ne connais pas assez Very Bad Blagues. Pour ce qui est de votre reportage, je crains de ne pouvoir vous aider. Bonne chance.
Pour le point 5, célibataire est un statut qui peux ne pas rester figé (même si je suis peut être assez mal placé pour dire ça :D), donc l’identification peux aussi marcher pour des gens qui ont été en couple, ou qui auraient envie de l’être.
Et quant au débat sur Bref, j’ai cru comprendre au travers des propos d’une des comédiennes qui m’a gentillement spoilé la fin de la première fournée de 40 épisodes qu’il y aura une évolution chez le personnage, même si l’histoire est loin d’être raconté de manière linéaire. Après en effet, il faut voir ce que ça va donner sur la durée, sachant qu’elle est déjà reconduite.
En tout cas, je serai bien curieux de lire quelques lignes dans le coin à propos de ce qui, il faut bien l’avouer, est une des rares bonnes surprises de la rentrée.