Je ne sais pas chez vous, mais à Paris, depuis quelques jours, les stations de métro sont couvertes de la même pub, celle que vous pouvez voir ci-dessus : une photo de groupe, avec six personnages, façon affiche pour comédie de boulevard, et ce message : « Voyages d’Affaires, la série pour convaincre votre patron de vous faire voyager en TGV Pro 1ere. » Au cas où ça vous aurait échappé, l’essentiel, c’est le « TGV Pro 1ere. » Déformation professionnelle oblige, ce qui m’a sauté à la rétine, à moi, c’est « la série. » Parce que, évidemment, Voyages d’Affaires n’est pas une série, c’est une pub pour la SNCF…
En 2008, la marque coréenne LG avait eu une idée nettement plus diabolique. Elle avait annoncé, à grands renforts de panneaux publicitaires et de spots télé une « nouvelle série par le réalisateur de Smallville et Supernatural », Scarlet. Une série censée « révolutionner la télévision »… en fait une pub déguisée en fausse bande-annonce pour une fausse série. Les fans de séries sentaient l’arnaque à plein pif, parce que dans le monde des séries américaines, on met rarement en avant le réalisateur – sauf s’il s’agit de Scorsese. Mais le coup était bien joué. Ici, rien de tout ça.
Voyages d’Affaire (sous-titrée « à grande vitesse », une référence à Steven Seagal ?) veut tout simplement profiter de la notoriété grandissante du format série pour vendre sa pub. Une série, c’est jeune, c’est dynamique, ça ressemble aux héros de cette websérie (nuance), employés d’une boîte de création de jeux vidéo qui, visiblement, aiment voyager en groupe (même le stagiaire se fait promener à travers la France). Malgré un affichage particulièrement laid, la SNCF a soigné le boulot. Elle a recruté Gerladine Nakache et Hervé Mimran, les auteurs et réalisateurs de Tout ce qui brille.
Le résultat, malheureusement, ne brille pas par sa subtilité. Voyages d’Affaires est une suite de cinq pubs d’environ 1,30 mn, dans une veine comique pas désagréable, mais quoi qu’il en soit commerciale. Pour vendre un parfum, on peut faire abstrait et subtil. Ici, il faut promouvoir le service petit déj’ ou réservation de taxi, et être didactique. Moins sexy. Peut-être que les vieux patrons d’entreprises en quête de djeunisme en sortiront inspirés, mais pour celui qui cherchait une bonne websérie, même en forme de pub, c’est raté. Ce n’est pas la faute des acteurs, tout à fait corrects, mais du message. En voulant faire tendance, cool, série télé, jeux vidéo, boîte jeune et dynamique, la SNCF nous pond une jolie caricature. Personnellement, je préférais l’époque des pubs pour la carte Kiwi…
Et puis je m’interroge sur une chose très simple : ils sont sûrs, à la SNCF, que les jeunes qui regardent les webséries sont des clients potentiels de leurs “TGV Pro 1ere” ? Ca sent surtout l’erreur marketing dès le départ là.
Franchement, j ai connu 10 fois mieux en matière de broadcontent. Prendre Nacash et Mimran pour ce résultat, c’est affreusement décevant, on ris pas, on sourit pas non plus.
Ca prouve peut-etre que le regard sur les séries change. Bientôt, on ne dira plus “comme un mauvais film de télé” mais “comme une bonne série”.