Heroes, c’est fini. Ou presque. La série, qui a bouclé sa quatrième saison le 8 février dernier aux Etats-Unis, ne connaîtra pas de cinquième volet. Rencontré à Paris mercredi dernier, James Kyson Lee, alias Ando (en promo pour la sortie du DVD de la saison 4, en septembre prochain*), confirmait l’information selon laquelle un téléfilm permettrait à NBC de boucler l’histoire imaginée par Tim Kring — “J’aurais autant préféré une minisérie, ça laisse plus de place pour bien conclure, régler chaque ligne narrative, mais le téléfilm est l’option la plus crédible“, regrettait-il. Quoi qu’il en soit, personne ne s’étonnera de l’annulation de Heroes. D’ailleurs, plus grand monde ne regardait la série à la télévision (chez nous, TF1 a repassé le bébé à SyFy, sur le câble). Et pourtant, à bien y réfléchir, on aurait tort de ne pas pleurer — un peu — la disparition de Heroes.
“Dans dix ans, tout le monde regardera en arrière et se dira que Heroes était en avance sur son temps“, expliquait, dans le cossu salon d’un hôtel des Champs-Élysée l’interprète du “sidekick” de Hiro Nakamura. Prétentieux ? Nostalgique ? Pas tant que ça. En de nombreux points, Heroes était effectivement une série en avance sur son temps. Ce sont ses lacunes scénaristiques et son casting bancal qui lui ont coûté sa crédibilité critique. Triste ironie, internet, qui lui avait donné la vie — Heroes a déclenché à son lancement un phénomène de buzz jamais vu auparavant — a sans doute causé sa mort. Boudé par les téléspectateurs, la série n’a en revanche jamais quitté la première place des séries les plus téléchargées (illégalement). D’où le constat, fataliste mais infaillible, de James Kyson Lee : “Si nous calculions les audiences non plus en fonction des gens devant leur poste — ce qui est dépassé, à l’heure du multimédia — mais en fonction de l’ensemble des visionnages, Heroes serait toujours en vie…” Une triste gloire, mais une gloire quand même : l’exemple de Heroes en dit long sur l’impact de la toile, ici négatif mais qui, avec un peu de temps, pourrait devenir positif…
Autre raison de ne pas oublier les heroes, leur internationalisme. A l’heure où les séries américaines voyagent de plus en plus loin, tournent à l’étranger, et où l’option des coproductions entre chaînes de différents pays est de plus en plus souvent choisie, Heroes a osé deux personnages japonais (Hiro et Hando), parlant leur langue natale, mis en scène à Tokyo (en fait, à Los Angeles dans des studios, mais c’est l’intention qui compte). Mieux, son scénario sous-entendait une mondialisation des enjeux, des déplacements réguliers en Inde, en Europe, etc. Le sort de l’humanité ne dépendait plus uniquement de l’Amérique, mais aussi du reste de la planète (bon, surtout de l’Amérique, mais c’est tout de même un Japonais qui avait pour mission ultime d’éviter l’apocalypse). La petite auberge espagnole de Kring, là encore, aura payé cher ses ambitions. Les coups de production d’Heroes, exorbitants (“Je me rappelle qu’une fois, en une nuit, ils ont transformé un décor de rue de Tokyo en restaurant gigantesque. J’ai à peine eu le temps de dormir, des tonnes de décors avaient bougés“, se souvenait, amusé, James Kyson Lee mercredi), auront fait sa gloire et provoqué sa chute.
Esthétiquement remarquable, capable de soigner certains personnages (notamment Noah Bennet), prenante sous la plume de Tim Kring (saison 1, fin de saison 3), Heroes s’en va donc par la petite porte, incapable d’avoir su exploiter sa bonne idée de départ. “Ce n’est pas une mauvaise nouvelle, positivait James Kyson Lee, les téléspectateurs n’ont pas eu le temps de vraiment se lasser de la série“. Malgré tous les défauts d’Heroes, il serait donc injuste de se réjouir de cette annulation. Si Tim Kring avait gardé la main sur la bride, sa série aurait pu devenir une grande. Elle aura connu un succès foudroyant et une trop rapide descente aux enfers. Tous les téléchargeurs de la planète pleurent sa mort et, s’ils l’ont peut-être un peu aidé à partir, leur hommage illégal en dit long sur leur amour…
*Heroes saison 4 en coffret DVD le 28 septembre (date à confirmer) chez Universal Pictures Vidéo.
Image de Une : Heroes, s4, NBC.
Bien dit Monsieur Langlais.
On nous a tellement rabaché les oreilles avec des critiques plus ou moins justifiées, qu’il est bon de voir que certains osent pleurer sur son sort publiquement.
Justement à mon sens ce qui fait en partie le charme de Heroes ce sont tous ces errements qui peuvent troubler à première vue, mais qui dans le même temps ouvrent de nombreuses portes qui réjouissent l’amateur.
Je vais pas mentir sur la légalité de mon visionnage (intégral !) de la série, mais quand j’aurai des sous j’achèterai les DVD, promis.
Ahah ! Mais j’y crois pas. Apres une saison parfaite Heroes a fini sur un FINAL bien pourris et m’a tellement décu en saison 2 que j’ai eu envie de crier au scandale. Ce site me donne également envie de crier au scandale.
OUF Heroes, it’s over !