Mardi dernier, Glee faisait son retour sur la Fox, aux États-Unis. La série de Ryan Murphy, le créateur de Nip/Tuck, a emballé les compteurs, frôlant la barre des 15 millions de téléspectateurs. Une manifestation supplémentaire du succès inattendu de cette série, qui est en train de devenir un phénomène médiatique outre-Atlantique avant, peut-être, de casser la baraque chez nous (d’abord, pour les abonnés d’Orange Cinéma Séries, puis sur M6 dans un futur indéterminé). Glee est une bonne série, pas un chef d’œuvre, mais un programme “feel good”, comme on dit, capable de vous remonter les moral en quelques scènes bien senties. Surtout, c’est une série musicale (pas une comédie musicale, car les parties chantées ne sont que des numéros isolés). Or, le genre, à la télé comme au cinéma, n’est pas au mieux de sa forme.
Glee raconte la naissance et l’ascension d’une chorale de lycée composée de bras cassés (une diva imbue de sa personne, une black rondouillarde qui se prend pour Beyonce, un type en chaise roulante, un quarterback complexé, etc.). Sur le papier, la série ressemble à n’importe quel produit pour ados type Sauvés par le gong de la grande époque, quelque part entre le soap, la comédie et le drame léger. Seulement voila, Ryan Murphy est un malin, et il connait les ados. Popular, sa première tentative sur ce terrain, bancale, valait le détour pour ses dérapages burlesques et l’anticonformisme de ses personnages. Glee reprend les mêmes ingrédients, les épice encore un peu plus (notamment avec un savoureux penchant “gay friendly”), et leur adjoint une suite de performances musicales. Le contraste entre la comédie, souvent acide, se jouant de l’image classique des gentils lycées américains (tout en utilisant son esthétique et ses codes) et les tours de chant type Nouvelle Star, est une vraie réussite.
Il ne faut pas bouder son plaisir. Si Glee a autant de succès, c’est en grande partie grâce à ces parties chantées. Une surprise quand on sait que plus aucune “série musicale” ne fonctionne en ce moment. La meilleure d’entre toutes, la désopilante Flight of the Conchords, a raccroché l’an passé après seulement deux saisons sur HBO (TPS Star et Orange Cinéma Séries chez nous). Même la folie High School Musical a fini (Dieu merci !) par se calmer. Autrefois tendance, les épisodes chantés sont de plus en plus rares, et il y a un moment qu’une comédie musicale n’a pas rencontré le succès des Moulin Rouge ! et autres Chicago au cinéma. Le succès de Glee est-il alors plutôt à lier à celui d’American Idol et de ses cousines internationales, où de jeunes inconnus s’époumonent, souvent brillamment, sur des classiques pop-rock ? Sans doute un peu. On parierait gros sur le fait qu’M6 s’arrangera pour lier la diffusion de Glee à la prochaine saison de sa Nouvelle Star (on lui conseillerait de le faire). D’ailleurs, les jurés de l’émission, réjouissant de méchanceté (surtout la première génération), ne dépareilleraient pas dans Glee.
En attendant, la série est en train de donner vie à un phénomène marketing sans précédent. Les jeunes comédiens/chanteurs s’apprêtent à faire une tournée et à se produire pour de bon sur scène (la série, elle, opte pour un lipdub pas toujours très réussi, mais du coup soigne la qualité de ses enregistrements). Plus de 25 morceaux interprétés par la troupe ont figuré au Top 100 des ventes (2 millions de singles ont été téléchargés via ITunes), un record depuis les 31 morceaux des Beattles en 1964 ! Les invités de marque se succèdent (Madonna en personne passera pour un épisode entièrement consacré à son répertoire). Preuve ultime que Glee est en train de casser la baraque, l’équipe a été invitée, en mars dernier, à chanter à la Maison Blanche…