On célèbre volontiers l’homme le plus riche de France, Bernard Arnault. On évoque moins sa situation financière personnelle quelque peu difficile. Il est vrai que l’homme d’affaires fait tout pour la dissimuler aux regards. A la tête d’une fortune évaluée à 23 milliards d’euros par Challenges, il ne se tournera pas demain vers la Commission de surendettement de la Banque de France, mais il a toute les peines du monde à se dépêtrer d’une dette contractée il y a deux ans pour financer l’assaut contre Carrefour. C’est l’histoire d’une dette à 1 milliard qu’il faut renégocier, renégocier… Cela fait maintenant deux ans que cela dur.
L’info tient en deux opérations décrites en quelques lignes, totalement incompréhensibles, et un chiffre : 390 millions d’euros. C’est le cash récupéré cet été par Groupe Arnault SAS, la holding personnelle du patron de LVMH, auprès de ses banquiers, en échange de quelque chose qui ressemble à des actions LVMH, mais qui n’en sont plus tout à fait. La transparence des marchés à des limites. En l’occurrence, l’information est aussi translucide qu’un parpaing. Le 31 août LVMH publie sur le site de l’Autorité des marchés financiers (AMF) deux déclarations qui doivent, en principe éclairer les marchés.
La première déclaration rend compte d’une opération vieille d’un mois déjà. Le 30 juillet, a été mis en place le « Renouvellement d’un financement par monétisation utilisant des instruments financiers à terme indexés sur le cours de l’action LVMH ». Respirez. Pour un montant de 315 millions d’euros. La seconde déclaration, réalisée le 30 août et publiée le lendemain, est plus simple puisqu’il s’agit de la « Mise en place par monétisation…”. Elle se monte à 75 millions d’euros. Cela fleure le dérivé d’actions, voir le produit de dérivés à terme… Allez savoir.
Avant d’aller plus loin, il faut un peu repérer le territoire sur lequel nous nous aventurons. Groupe Arnault SAS, est donc la société financière de la famille Arnault située tout en haut de la pyramide du groupe de luxe comme le montre un organigramme officiel publié récemment. En dessous se trouvent des holdings financières qui permettent à Bernard Arnault de contrôler 48 % du capital de LVMH et 63 % des droits de vote. Les sociétés industrielles étant tout en bas. On trouve donc une maison à trois étages : la famille (Groupe Arnault SAS), la finance (Financière Agache, Semyrhamis, Fiancière Jean Goujon) et l’industrie (Louis Vuitton, Moët Hennessy, Le Bon Marché, Guerlain, Christian Dior, Kenzo, Hublot, TAG Heuer…). C’est tout en haut que le problème se pose, dans les affaires de famille.
Penchons-nous donc sur Groupe Arnault SAS. C’est à partir de cette société par actions simplifiées, d’où le SAS qui n’a rien à voir avec Son Altesse Sérénissime, que Bernard Arnault réalise des coups personnels. Quand, en février 2007, il décide, avec Sébastien Bazin, le patron pour l’Europe de Colony Capital, de devenir le premier actionnaire de Carrefour, il passe par Groupe Arnault SAS qui met une place une filiale en Belgique, baptisée Cervinia et il s’endette. L’idée que nous avons déjà détaillée (lire notre post du 29 octobre 2009) consiste à devenir un actionnaire prépondérant du groupe de distribution pour réaliser ensuite un découplage entre l’immobilier et l’activité commerciale. La plus value est garantie avec la hausse de l’immobilier commercial et l’augmentation de l’action Carrefour qui ne manquera pas de survenir.
Voilà, le schéma. La réalité, elle, va se révéler un peu différente. En février 2007, les premiers signes avant-coureurs de la crise de l’immobilier américain apparaissent au printemps 2007 et loin d’assister à une hausse de l’action, Bernard Arnault et Sébastien Bazin vont constater une lente dégringolade de l’action Carrefour. Les compères achètent l’action (Carrefour FR0000120172- CA) autour de 45 € et la retrouve tout près de 20 € en mars 2009. Depuis, ça va mieux, puisque l’action est repassée autour de 35 €. Pas de quoi faire une plus value et pas de quoi non plus faire face au remboursement d’un emprunt évalué à 1 milliard d’euros. Rien que le service de la dette coûte entre 110 et 130 millions par an ! Bref, il faut 10 millions de cash par mois.
Depuis deux ans Groupe Arnault a bien cédé des actifs pour faire remonter de l’argent frais tout en haut de la pyramide. Bernard Arnault a ainsi revendu pour 238 millions d’euros sa participation dans Cheval Blanc (lire notre post du 26 mars 2010) à LVMH. Financière Agache la principale holding financière a multiplié par trois les dividendes versés à son actionnaire unique Groupe Arnault. De 20 millions par an, la contribution est passée à 63 millions en 2009. Mais, à l’évidence cela ne suffit pas. Il a donc fallu restructurer une dette qui pèse sur les comptes de Groupe Arnault SAS. Pendant un temps la moins-value enregistrée dans l’opération Carrefour a même dépassé les fonds propres de la holding familiale : 800 millions d’un côté, 700 millions de l’autre. Nous parlons d’un temps où les comptes de Groupe Arnault SAS étaient publics, car aujourd’hui personne ne peut dire à quoi ressemble l’équilibre financier de la holding familiale. Elle ne publie plus rien. C’est plus simple. Seule indication, Cervinia, la société belge qui porte les actions Carrefour détenues par le patron de LVMH, a affiché une perte de 635 millions en 2008. Depuis, elle aussi ne publie plus ses comptes.
Les deux opérations dévoilées dans les derniers jours d’août et mise en place au cours de l’été doivent précisément permettre à Bernard Arnault de desserrer un peu la contrainte financière qui pèse sur ces comptes personnels. De quoi s’agit-il ? Cela ressemble, au nantissement d’actions LVMH, mais ça n’en est pas. La première opération parle d’un « Renouvellement », cela suppose que Groupe Arnault a déjà réalisé une opération du même type pour 315 M€ au cours des mois écoulés. Or, le Document de référence 2010 (PDF), déposé auprès de l’AMF en mars dernier, précise bien que « la Société [lire LVMH] n’a connaissance d’aucun nantissement portant sur des actions détenues au nominatif pur par les principaux actionnaires ». Il s’agit donc d’autre chose. La mécanique est assez simple. Bernard Arnault a besoin d’argent frais. Il se tourne vers les banquiers qui demandent des garanties. Exactement comme pour un vulgaire prêt immobilier. Groupe Arnault SAS peut alors mettre dans la balance des actions de LVMH dont il détient directement 3,4 % du capital. Mais cela ferait désordre. Il a donc fallu plancher pour trouver quelque chose de plus élégant et de plus discret.
Quels est donc ce : « financement par monétisation utilisant des instruments financiers à terme indexés sur le cours de l’action LVMH » ? Mystère. Nous avons essayé de joindre la direction de la communication de LVMH. Pas de réponse. Nous avons posé une série de questions au cabinet DGM Conseil qui communique pour Bernard Arnault. Pas un mot en retour, pas un signe, rien. Pas même un accusé de réception. C’est dire si l’on ne souhaite pas évoquer de fâcheuses questions. (À suivre).
PhDx
Bonjour,
Merci pour votre article et votre blog en général. 😉
Que pensez-vous de cet article ?
“(…) la seconde fortune de France, celle du groupe Arnault, est tout aussi fantaisiste dans l’estimation “Challenges”.”
http://richessem.eklablog.com/le-magazine-challenges-n-est-pas-serieux-la-vraie-valeur-du-groupe-mu-a751929
Cordialement
Bonsoir,
“Bernard Arnault, le PDG de LVMH, aurait été épargné parce qu’il est un très gros annonceur -un des principaux de la presse française, d’ailleurs”
Ceci explique probablement pourquoi Challenges ne remets pas en question son évaluation !
http://www.rue89.com/confidentiels/2010/09/08/liberation-joffrin-trappe-quatre-portraits-de-derniere-page-165764
Cordialement
[…] PhDx » Le casse tête financier de Bernard Arnault à 1 milliard d’euros […]
Bonjour,
Extraits du portrait non publié dans libération
http://www.acrimed.org/article3437.html
Cordialement
haha
Selon Capital,
-Blue Capital aurait empruntée 2.3 Milliards
-Europatweb,filliale de Bernard Arnault à contractée un emprunt équivalent à 500 Millions
-Blue Partners,filiale commune entre Arnault et Colony à avancée 500 Millions probablement…un emprunt…
Bref,un véritable Leveraged Buy Out ^^ et il s’agit de plus d’un Milliard si ces infos sont bonnes
Carrefour à trés récemment annoncée la rénovation de centaines d’hypermarché,je ne pense pas qu’Arnault veuille faire de la plus value sur les murs de Carrefour pour l’instant
“Did you see a man in the pit?” I said; but he made no answer to that. We became silent, and stood watching for a time side by side, deriving, I fancy, a certain comfort in one another’s company. Then I shifted my position to a little knoll that gave me the advantage of a yard or more of elevation and when I looked for him presently he was walking towards Woking.
“Did you see a man in the pit?” I said; but he made no answer to that. We became silent, and stood watching for a time side by side, deriving, I fancy, a certain comfort in one another’s company. Then I shifted my position to a little knoll that gave me the advantage of a yard or more of elevation and when I looked for him presently he was walking towards Woking.