W.I.P. demande à des invités de donner leur point de vue. Ici, Arièle Bonte, étudiante à l’Ecole de journalisme de Sciences Po, et lauréate de la bourse Amazon, partie en exploration au festival international de journalisme de Pérouse, en Italie.
“Nous devons considérer notre public comme une communauté et non pas comme une masse”, a martelé Jeff Jarvis, le professeur et journaliste américain, lors de sa keynote au coeur du Palazzo dei Priori. S’adressant aux journalistes et professionnels des médias présents en nombre dans la salle, il a insisté sur la nécessité d’une spécialisation des médias pour ne plus “parler de tout à tout le monde”.
“Les journalistes doivent repenser leur rôle. Ils doivent devenir des organisateurs de communautés. Aujourd’hui, le problème avec les médias c’est que nous définissions une communauté de l’extérieur. Nous devons demander aux communautés de se définir elles-mêmes et de développer des services autour d’elles.” Des propos qui ont suscité de nombreux applaudissements de la sala de Notari.
Le pure player hollandais “De Correspondent” est basé sur un modèle simple: zéro publicité et un contenu 100% payant (60 euros par an). “Ce nouveau média se focalise sur les besoins de nos membres”, raconte Ernst-Jan Pfauth, son jeune éditeur. Pour lui, les abonnés de De Correspondent ne sont pas de simples lecteurs. “Ils ont une expertise et peuvent donc contribuer à notre contenu”.
Alexander Klöpping, fondateur de Blendle, s’étonne quant à lui du succès de la VOD ou des abonnements de musique en streaming, alors que le journalisme payant en ligne peine à exister. Le contenu de Blendle est lui-aussi entièrement payant. Mais les articles viennent de différents médias, et sont tous recommandés par des amis inscrits sur le site. La lecture d’un article coût environ 60 centimes. Si celle-ci n’a pas satisfait le lecteur, il peut demander un remboursement. Un système inédit, et qui fonctionne. Seuls 2,25% des articles achetés sont remboursés.
Pour Mathew Ingram, de Fortune Magazine, l’équation peut être résumée de la façon suivante: un média offre un service payant à ses membres. En échange, la publicité est bannie du contenu. Cette relation privilégiée de “membership” est importante et en pleine expérimentation selon Raju Narisetti, vice-président de News Corp. Plus qu’un chèque ambulant, un membre est considéré comme un collaborateur, comme quelqu’un qui a une valeur à apporter au contenu du média.
Dans les médias français, ce modèle existe déjà. C’est ce que propose notamment La Revue Dessinée. David Servenay, son confondateur, insiste sur l’importance d’un contrat de lecture pour garantir une indépendance et un contenu de qualité: “On vend une revue à un prix coûteux – 15 euros – mais la contre-partie, c’est une revue sans publicité, et de longs reportages ou sujets d’enquête.” David Eloy, rédacteur en chef d’Altermondes, dénonce la course aux annonceurs de certains médias: “l’information perd en qualité et l’opinion publique n’est pas très confiante dans les médias. Choisir un contenu payant, c’est être très clair sur sa ligne éditoriale.”
Avoir du contenu exclusif et de qualité est un gros avantage pour un média. Mais une bonne histoire, une fois en ligne, peut être récupérée par tous, reprend Raju Narisetti dans la salle Rafaello de l’Hotel Brufani. Pour lui, les rédactions doivent se focaliser sur la création de nouveaux contenus, mais aussi sur l’expérience pour les utilisateurs. Bref, il faut combiner journalisme et technologie.
Au festival international du journalisme, les workshops et ateliers consacrés aux nouvelles technologies n’ont d’ailleurs pas manqué. Cours de data journalisme, présentations de centaines d’outils en ligne ou d’applications pour réaliser une carte, une iconographie, localiser des témoins et même générer des idées d’articles, impossible de quitter l’Italie sans sa liste de nouveaux outils de journaliste connecté. Mais pour le journaliste belge Tim Verheyden, “si les gens parlent, les chiffres non”. Saluant ces nouveaux outils qui sont “formidables”, il encourage à les utiliser “dans le but de se dépasser en tant que journaliste”.
Pour permettre aux journaliste d’embrasser les nouvelles technologies, le contact entre développeurs doit être permanent. Vivian Shiller (Vocativ) raconte que, lorsqu’elle était au New York Times, les développeurs n’étaient pas intégrés physiquement à la rédaction des journalistes – une remarque qui figure dans le mémo sur l’innovation du New York Times. Les contacts entre les deux parties s’en trouvent donc entravés: or, sans communication entre journalistes et développeurs, pas de cohésion, ni de création de projets innovants.
Facebook, Twitter, Instagram, Youtube, Snapchat… Les médias sont présents sur de plus en plus de réseaux sociaux. Et pour cause, c’est là que se trouve l’audience, laquelle ne prend plus forcément la peine de passer par les pages d’accueil des sites d’information.
“Nous avons dû mettre notre contenu vidéo sur Youtube, parce que c’est là qu’on peut toucher une audience plus jeune”, raconte Ben de Pear de Channel 4 News. “La stratégie, c’est de publier le contenu là où vont les gens. Mais c’est aussi pour pousser les plus jeunes à se rendre sur notre site Web.”
Les médias prennent de plus en plus en compte cette nouvelle génération qui a grandi avec un smartphone entre les doigts. Channel 4 News a par exemple lancé son Newswall, un site qui reprend les codes des jeunes sur Internet: beaucoup d’images, des gifs, du contenu interactif et une touche d’humour pour expliquer l’actualité et les enjeux de la société.
La partie Le Plus de L’Obs revendique le même public : avec son contenu participatif, et ses nouveaux formats vidéos. Quant à BBCNews, son compte Instagram est suivi par 177.000 utilisateurs. Des vidéos de 15 secondes qui expérimentent, parfois avec humour, de nouvelles manières de transmettre l’information. Le site anglais s’est même mis à l’interview emojis pour raconter des histoires adaptées aux nouveaux modes de communication.
Arièle Bonte
lire le billetSi vous n’étiez pas au Web Summit, la conférence sur les nouvelles technologies qui s’est tenue à Dublin, en Irlande, du 4 au 6 novembre 2014, voici un rattrapage en 7 points et autant de tendances en vigueur dans la sphère numérique.
Signe du dynamisme de la place irlandaise dans le monde numérique, le Web Summit, créé il y a quatre ans par Paddy Cosgrave, un trentenaire irlandais, a réuni 22.000 participants, 614 speakers et 1.324 journalistes à Dublin. Autant dire une foule impressionnante. Oubliez la Silicon Valley, regardez l’Irlande, clament les entrepreneurs présents au Web Summit.
“Il n’y a pas de pays plus favorable aux entreprises en Europe”, prétend le premier ministre irlandais Enda Kenny, en s’offrant le luxe de sonner la cloche à l’ouverture du Nasdaq à New York. C’est aussi en Irlande que se situent les plus importants bureaux en Europe de Google et Facebook, qui révèle vouloir passer de 500 à 1.000 employés à Dublin.
La politique du “double irish”, cette technique d’optimisation fiscale qui permet à des entreprises d’échapper au fisc europeén en profitant d’une dérogation, n’y est pas pour rien. Même si le gouvernement irlandais a présenté un projet de loi qui veut y mettre un terme, Twitter, qui emploie 200 personnes à Dublin, assure que cela ne remet pas en question ses projets d’expansion en Irlande. Les panélistes du Web Summit l’ont martelé: le dynamisme irlandais en matière de numérique n’est pas qu’affaire de fiscalité, c’est aussi une question de talents.
Quelle sera la prochaine grande révolution numérique? Bien malin qui peut le savoir. Brendan Iribe, le patron d’Oculus Rift, la société rachetée 2 milliards de dollars par Facebook en mars, parie sur la réalité virtuelle pour métamorphoser la façon dont on communique. “La plupart des gens voyagent, prennent l’avion ou la voiture, pour rencontrer leurs interlocuteurs. Imaginez que l’on puisse, dans le futur, mettre des lunettes de soleil pour rencontrer les gens en ayant l’impression d’être dans la même pièce, en pouvant regarder de près leurs yeux, voir bouger leur bouche, cela aurait un énorme impact” sur nos vies à long terme.
En attendant, le casque de réalité virtuelle d’Oculus, qui a fait l’événement à Austin, lors du festival South by South West, sera commercialisé dans quelques mois, sans que Brendan Iribe ne donne de date précise. “Nous sommes très impatients. Nous sommes très très près du but. C’est une histoire de mois, pas d’année. Mais de plusieurs mois quand même”.
Eva Longoria, Lily Cole, Bono… Ils ont tous défilé au Web Summit. A qui profite leur venue? A la conférence d’abord qui voit son influence et son rayonnement démultipliés lorsque ces célébrités promeuvent l’événement – l’intervention d’Eva Longoria est celle qui a recueilli le plus de tweets (plus de 3.000) à l’occasion du Web Summit, loin devant celle de Tony Fadell, le président de Nest, cette entreprise de thermostats intelligents rachetée par Google 3,2 milliards de dollars (2,5 milliards d’euros) en janvier. Pour ces stars, c’est une formidable opportunité aussi. Car elles investissent désormais dans des projets numériques et/ou des fondations. Or accéder au Web Summit à un public d’investisseurs de cette trempe peut leur permettre de lever des fonds.
Steve Jobs est mort il y a trois ans, et pourtant, son nom a été cité par pas moins de trois intervenants du Web Summit. D’abord par John Sculley, ex-patron d’Apple, responsable de l’éviction de Jobs en 1985 avant que ce dernier ne revienne en fanfare en 1997. Sculley est «célèbre par association», remarque Techcrunch, et «c’est une étrange dynamique».
«Tout le monde veut savoir comment était Steve Jobs, et dans quelle mesure Sculley l’a poussé au départ. 30 ans après, nous voulons toujours en parler, disséquer les tenants et les aboutissants de la situation d’alors, en demandant à Sculley ce qu’il s’est passé.» On ne saura rien ou si peu des activités de Sculley en dehors d’Apple, qu’il a quitté en 1993.
Le patron de Dropbox, Drew Houston, qui n’a rencontré Steve Jobs qu’une fois en 2009, a aussi été interrogé sur la personnalité du gourou d’Apple. Même chose lorsque le chanteur Bono est arrivé au Web Summit, lui qui s’est autrefois ému auprès de Steve Jobs du look immonde d’iTunes, indigne d’un esthète du design comme il l’a été. Autant d’occurrences qui prouvent que l’ex-patron d’Apple garde une influence remarquable sur le monde de la technologie, même en 2014, même si, parmi d’autres figures titulaires ont été mentionnées lors des interventions du Web Summit, notamment Larry Page, de Google, et Mark Zuckerberg, de Facebook.
A la conférence DLD 2014 à Munich, en Allemagne, était apparu, célébré comme un prodige, Nick d’Aloisio, 18 ans, venu présenter son bébé, l’application News Digest.
Au Web Summit, au rayon jeunes pousses prometteuses et déjà riches, figure John Collison, un Irlandais de 24 ans qui a co-fondé Stripe, une start-up de paiement en ligne basée à San Francisco et estimée à… 1,5 milliard d’euros. Sur la grande scène, le jeune homme aux visage encore joufflu, en chemise jean brut et chausses bateaux, rappelle qu’aujourd’hui “la plupart de nos achats s’effectuent hors ligne mais cela va s’inverser au profit des paiements en ligne, un marché immense”. Stripe teste un bouton “buy now” sur Twitter. Quant à l’Apple Pay, c’est aussi signé Stripe.
“Plus l’interface pour payer est simple, et intégrée, plus vous allez acheter des choses en ligne”, prévoit John Collison, plus à l’aise pour parler de sa société que de lui-même. “Quel genre de parents vous laissent lancer votre start-up alors que vous n’aviez pas fini vos études?”, interroge le journaliste David Rowan, de Wired, après avoir présenté Collison comme une “icône”. “C’est vrai que j’ai un parcours peu commun. Mes parents ont tous les deux lancé leur business, et comme on était à la campagne, l’Internet était très lent, ils ont donc pris une connexion par satellite”, répond John Collison qui, à l’époque, était en train d’apprendre la programmation informatique.
Autre star remarquée du Web Summit, Nao, un robot de 58 centimètre. Il a beau avoir été créé en 2006, il a fait une sortie remarquée à Dublin, à la fois sur la grande scène, et sur le stand, où se sont agglutinées les équipes de télévision, dont Médias Le Mag et CNN International.
“Il peut parler, danser – il fait partie d’une chorégraphie de Blanca Li, ndlr -, éviter les objets, sentir quand vous le touchez sur ses capteurs, et vous aider à apprendre”, m’explique Laura Bokobza, la directrice marketing d’Aldebaran, la société française qui a, cocorico, conçu cet humanoïde pour qu’il “accompagne des élèves dans leur apprentissage”, par exemple lors de cours dans des universités. Il peut même tweeter.
Nao, alias Jean-Mi, participe chaque semaine à l’émission Salut les Terriens avec Thierry Ardisson. Profitant du boom des robots de l’information, va-t-il remplacer les journalistes? Non, répond Laura Bokobza: “il n’est pas là pour remplacer les gens mais les assister”.
D’ailleurs, il a besoin de la programmation d’un technicien ad hoc avant de pouvoir réagir à ce qu’il se passe. Le temps réel de l’information est une donnée qui lui est difficile, pour ne pas dire impossible, à intégrer pour le moment.
A noter: il n’est pas encore à vendre pour les particuliers, même si Laura Bokobza pense qu’il pourrait être bientôt commercialisé au prix de 4.500 euros avec un an de maintenance garantie.
Le futur est au streaming, pas au téléchargement. La preuve, le succès de Spotify, une start-up suédoise créée en 2008, avec 12,5 millions d’abonnés payants, dont les revenus titillent ceux diTunes au dernier trimestre en Europe. Une étape importante pour l’avancée streaming, se félicite Willart Ahdritz, de la société Kobalt. Pas de surprise, puisqu’en 2012, Sean Parker le fondateur de Napster a prédit que les revenus de Spotify dépasseraient ceux d’iTunes d’ici deux ans, rappelle The Independent.
L’expansion de Netflix en Europe va dans le même sens même si aucun chiffre officiel n’a été communiqué depuis son arrivée en France.
Comment embarquer la technologie à bord des moyens de transport? C’est l’une des questions sur laquelle planchent de nombreuses marques, de Google avec ses voitures connectées à Audi qui prévoit un tableau de bord incluant Google Earth et Google Maps ainsi qu’une sorte de Siri permettant aux conducteurs de garder les mains sur le volant et les yeux sur la route tout en dictant leurs SMS à voix haute – un système qui ne serait pas sans danger, selon cette étude réalisée par l’Université d’Utah.
Aer Lingus, la compagnie aérienne irlandaise, a même installé sa nouvelle classe affaires avec écrans HD au milieu des stands dédiés aux start-up du Web Summit. C’est pourtant bien moins impressionnant que l’avion sans hublot que propose le Centre for Process Innovation (CPI), et dont la vidéo de démonstration a beaucoup circulé en ligne ces dernières semaines. Dans 10 ans, l’habitacle de la cabine serait alors recouvert intégralement d’écrans sur lesquels les voyageurs pourront voir des films, une vue panoramique du ciel, consulter leurs emails ou surfer sur Internet.
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Alice Antheaume
Grumpy Cat a été la star – à quatre pattes – du festival South by South West à Austin, aux Etats-Unis. Au Web Summit, organisé à Dublin, en Irlande, du 4 au 6 novembre 2014, la tête d’affiche s’appelle Eva Longoria. Invitée à converser avec une journaliste de Vanity Fair, l’actrice de la série Desperate Housewives s’est mis dans la poche les quelque 22.000 participants venus d’abord pour «réseauter», parler nouvelles technologies et trouver des investisseurs pour lancer leur start-up.
«Je n’étais jamais venue en Irlande»
A la question «qu’est-ce qui vous amène au Web Summit?», Eva Longoria a répondu par un éclat de rire décomplexé: «je n’étais jamais venue en Irlande». Avant de préciser: «on m’a invitée à parler de mes investissements qui, dans un monde global, nécessitent différents modèles selon le pays. Une bonne façon de partager ces modèles, c’est de recourir à la technologie».
L’actrice, présentée comme productrice/entrepreneuse/philanthrope, a préféré axer son intervention sur les femmes, une denrée plutôt rare dans les conférences sur les technologies. «J’aimerais encourager toutes les femmes présentes ici à aider leurs jeunes congénères, à devenir leur mentor, à leur montrer la voie. Parce que, sans mentor, le système ne fonctionne pas.» Un discours salué par une salve nourrie d’applaudissements et les flashs des photographes agglutinés près de la grande scène.
Le tollé Kardashian
Pourtant, les geeks ne sont pas public facile. Lors d’une autre conférence dédiée au mobile qui s’est tenue en Californie le 27 octobre, la venue de Kim Kardashian a provoqué une levée de boucliers sur Twitter, avant même qu’elle ne monte sur la scène, sur le thème «que peut-elle nous apprendre sur la technologie?». «C’est une star du mobile», a justifié la journaliste qui l’a invitée, Kara Swisher, arguant que son jeu sur Iphone, Kim Kardashian: Hollywood, génère 200 millions de dollars de revenus. Bien plus, donc, que ce qu’obtiennent la plupart des créateurs de start-up, continue Techcrunch. Interrogée sur les raisons pour lesquelles elle n’est pas prise au sérieux, Kim Kardashian a confié qu’elle ne le sait «pas très bien». «Peut-être parce que mon succès provient d’une télé-réalité, ce qui peut être négatif pour certains»…
Qui tire la couverture sur qui?
A qui profite la présence de telles célébrités à ces événements arpentés par des entrepreneurs du Web? A la renommée de la conférence? Ou à la star qui accède ainsi à un autre public que son terreau de fans habituels? Sans doute les deux.
Faire venir une star à une conférence numérique, c’est profiter de son influence. Une Kim Kardashian, avec plus de 25 millions d’abonnés sur Twitter, 20 millions sur Instagram, représente une chambre d’écho extraordinaire quand elle évoque un événement en ligne. Et, au delà, cela peut avoir des retombées pour l’économie locale, comme lorsqu’Eva Longoria visite les trésors du pays – le petit déjeuner irlandais, la cathédrale Saint Patrick, un bar de Dublin – dont elle parle sur les réseaux sociaux. A un jour d’intervalle, elle fait ainsi la couverture de deux journaux, le «Irish Independent» puis le «Irish Time».
Des stars qui rayonnent via le réseau
Pour les stars qui investissent dans le numérique, c’est aussi un coup de projecteur sur leurs activités. C’est le cas de Lily Cole, le mannequin au visage en forme de lune. Invitée au Web Summit, elle a présenté sa start-up, impossible.com, une plate-forme de trocs qui permet par exemple d’échanger des cours de tricot contre le design d’un site Web.
Reconversion en vue? «J’ai plus d’amis dans la technologie (dont Jimmy Walles, le co-fondateur de Wikipédia, qui a investi dans impossible.com et la conseille, ndlr) que dans la mode», a-t-elle expliqué. «Je passe un à deux mois par an à jouer des rôles et à faire du mannequinat, pour payer les factures et mettre de la lumière sur mes projets. Le reste du temps, je travaille à cette start-up avec ma petite équipe qui, comme dans toutes les start-up, analyse les data et pense à son développement».
Le partage comme compétence
Ces stars peuvent même avoir des compétences numériques inédites. Kim Kardashian est une championne du partage en ligne. «Toute ma carrière est basée sur les réseaux sociaux», et notamment «dans un environnement mobile», a-t-elle clamé. Flairant le filon, des entreprises de technologie ont même embauché des célébrités pour profiter de leur expérience. «La chanteuse Alicia Keys a travaillé pendant un an au sein du fabricant Blackberry en tant que directrice créative. Une position qu’a également occupé la chanteuse Lady Gaga chez Polaroid», répertorie Lefigaro.fr.
Enfin, la présence d’Eva Longoria et Lily Cole féminine quelque peu le casting. Au Web Summit, seuls 15% des orateurs sont des femmes, regrette l’équipe. Quant au public, il n’est pas non plus très féminin même si l’organisation a offert des billets gratuits à des femmes triées sur le volet – pour un montant total de 250.000 euros, ce qui, si l’on se réfère au prix d’un billet à 800 euros, fait 312 billets.
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Alice Antheaume
lire le billetComment diriger une rédaction en 2013? Qui peut être chef de service, rédacteur en chef, directeur de publication, directeur de rédaction à l’ère numérique? Jim Brady, le rédacteur en chef de Digital Media First, et Callie Schweitzer, directrice de l’innovation à Time Magazine depuis septembre, ont débattu des compétences requises pour savoir «manager» des médias en ligne, à la conférence organisée par l’ONA (Online News Association) le 19 octobre 2013 à Atlanta. Le premier a commencé à travailler en 1990 comme journaliste sportif, la seconde a terminé ses études en 2011. Les deux ont une approche des ressources humaines adaptée à la culture américaine, mais certaines de leurs recommandations peuvent aussi intéresser le marché français. Voici une retranscription, partielle, de leur discussion.
Jim Brady
Avant, dans les rédactions, tous les journalistes attendaient que le chef parle avant d’agir. Maintenant, le chef en sait cent fois moins que sa rédaction en tant que collectivité. L’étendue des compétences des journalistes n’a jamais été grande. Si vous avez besoin de rappeler que vous êtes le boss, vous avez perdu. Vos journalistes doivent savoir que vous l’êtes, point.
Callie Schweitzer
L’âge n’est pas un critère pour devenir chef. Ce qui compte, c’est la capacité d’adaptation. Pouvoir tester des nouvelles technologies et comprendre leur impact sur le métier que l’on exerce, à tout âge, est la compétence clé.
Jim Brady
Nous vivons dans un monde de «gamification», où nous sommes habitués à gagner des points, à obtenir des badges et à passer des niveaux, comme dans un jeu vidéo. Or il est dangereux de penser que ce système puisse correspondre à la hiérarchie rédactionnelle. Ne vous mettez pas d’objectif du style «à 30 ans, j’aurai tel poste et je gagnerai tel salaire», cela ne fonctionne pas ainsi.
Callie Schweitzer
La génération Y passe souvent pour une génération égocentrique et arriviste. Mais, dans les rédactions, il est rare d’avoir des gens qui proposent leurs services pour mettre en place des changements et prendre de nouvelles responsabilités. Pour ma part, j’ai toujours proposé mon aide, même si je n’étais pas toujours parfaitement qualifiée pour la tâche, car je savais que j’apprendrai en route.
Jim Brady
La meilleure décision à prendre est parfois de refuser un poste en expliquant à votre supérieur que vous n’êtes pas encore prêt. Contrairement à ce que vous croyez, vous gagnerez en crédibilité à ses yeux. C’est très précieux de connaître ses forces et ses faiblesses.
Callie Schweitzer
Certaines rédactions veillent à ne pas laisser leurs managers superviser plus de dix personnes. Car la difficulté, c’est de pouvoir suivre ce que fait chaque personne dans son équipe. Si vous ne le savez pas ce que fait un tel ou un tel, il y a un problème. Il faut prendre le temps de récupérer des remarques provenant de la base, pour comprendre ce qu’il se passe chaque jour, savoir ce qui marche ou non. Ne pas avoir de retour quotidien des membres de votre équipe, c’est l’échec assuré.
Jim Brady
Nous avons trop souvent tendance, dans les rédactions, à recruter des journalistes en fonction d’une fiche de poste à pourvoir. Si le poste concerne le pôle vidéo, nous regardons si le candidat est compétent pour réaliser des vidéos. Si le poste concerne le desk, nous veillons à ce qu’il soit capable de produire vite. Mais nous ne pensons pas assez à regarder s’il pourra, un jour, devenir chef. Or les bons journalistes ne sont pas forcément des bons managers. Un bon manager doit savoir parler plusieurs langages, le langage du développement, le langage éditorial, et le langage du marketing.
Callie Schweitzer
Il ne devrait y avoir aucun secret entre les équipes. La rédaction, la publicité, le marketing et le développement ont le même objectif – que tout marche au mieux -, donc il faut pratiquer la transparence absolue entre les services et tout partager.
Jim Brady
Si votre média se dit «digital first», cela sous-entend que vous avez pris trois décisions:
1. la direction de votre média est assurée uniquement par ceux qui croient au numérique, et sont eux-mêmes des profils très «numérisés»;
2. les commerciaux sont payés pour vendre du numérique (abonnements, publicités, etc.);
3. les revenus obtenus sont réinjectés dans la technologie.
Si l’un de ces trois points n’est pas respecté, votre média ne peut se prétendre «digital first».
Callie Schweitzer
Nous pouvons passer notre vie en réunion et, un an plus tard, rien n’aura avancé. J’aime beaucoup cette idée qu’en réunion, les minutes restent, les heures filent. Pourtant, nous savons tous ce que c’est que de produire des contenus sous la contrainte d’une heure de bouclage. Nous devrions appliquer les principes du bouclage aux réunions, et plus généralement, à ce que nous accomplissons dans une rédaction. Lorsque vous quittez un poste, vous devez être capable de résumer ce que vous y avez fait via un titre et deux lignes de chapeau.
Jim Brady
Il y a beaucoup de plus de «turn over» qu’avant dans les médias. Les journalistes ne restent plus au même poste pendant des années. Si l’un d’entre eux part, parce qu’il a été recruté par une autre rédaction, ne le prenez pas mal, maintenez le contact avec lui, vous le recruterez à nouveau plus tard. Il faut accepter qu’il y ait du passage.
Callie Schweitzer
Recruter des journalistes ne suffit pas, il faut aussi savoir les retenir. Pour cela, pas de secret, il faut les valoriser et leur faire sentir qu’ils ont le pouvoir de tout changer en faisant des suggestions. Il faut aussi les aider à grandir à l’intérieur de l’organisation.
Jim Brady
En tant que chef, vous devez apprendre à tourner votre langue sept fois dans votre bouche avant de parler. Ne soyez jamais négatif. Cela se répandrait à toute vitesse et empoisonnerait toute l’organisation.
Callie Schweitzer
Outre la «réunionite» aïgue, l’autre problème des chefs consiste à gérer leurs messageries surchargées. Qui arrive à lire et répondre à tous ses emails? Personne. L’idée d’avoir zéro email en attente dans sa boîte est un mensonge. C’est impossible. Vous mettez une étoile à un email pour y répondre plus tard? Sachez que vous ne reviendrez jamais sur cet email. J’aimerais beaucoup pouvoir ajouter à nos emails l’acronyme NRN (no response necessary – réponse non demandée) pour éviter cette succession de réponses inutiles disant «OK» ou «merci».
Quelles compétences vous semblent indispensables pour diriger une rédaction à l’ère numérique? Merci de vos suggestions sur Twitter, Facebook, et dans les commentaires.
Alice Antheaume
lire le billetLe futur du journalisme passera par les mastodontes de la technologie. C’est l’une des conclusions que tire le rapport annuel du Pew Project for Excellence in Journalism, The State of the News Media 2012.
Session de rattrapage pour ceux qui n’auraient pas encore eu le temps de parcourir cet état des lieux sur les médias aux Etats-Unis.
1. Relations unilatérales entre éditeurs et entreprises de nouvelles technologies
Ceux qui mènent la danse s’appellent Amazon, Apple, Facebook et Google. Les rédactions, elles, cavalent derrière pour suivre le rythme.
Pour attirer de l’audience et pour diffuser des contenus, les médias (se) sont soumis aux règles des géants de la technologie. Une dépendance déjà annoncée dans le rapport de l’année dernière.
En 2012, la tendance se confirme. Certes, le Financial Times et le Boston Globe ont créé des applications en HTML 5 pour pouvoir les changer à leur guise sans devoir soumettre les mises à jour à la validation d’Apple. Mais ce type d’émancipation reste limité, estiment les auteurs du rapport, Amy Mitchell et Tom Rosenstiel.
Alors que Apple, Google, Amazon et Facebook tentent d’accompagner chaque seconde de nos vies numériques (terminaux, moteurs de recherche, navigateurs, réseaux sociaux, messageries, plates-formes de jeu et de commerce en ligne), vont-ils finir par s’offrir des médias? Possible, mais à condition qu’ils y “trouvent un intérêt”, reprennent les auteurs. Et qu’ils considèrent que ces médias puissent constituer l’un des ingrédients du “tout numérique” qu’ils entendent proposer aux utilisateurs…
2. La montée du mobile et une lecture plus “immersive”
“Plus de 4 adultes américains sur 10 possèdent aujourd’hui un smartphone, et 1 sur 5 une tablette. Les nouvelles voitures que l’on fabrique intègrent de l’Internet à bord.” En tout, plus d’un quart de la population américaine, soit 27%, s’informe maintenant via mobile.
Et c’est une bonne nouvelle pour les médias. Car la consommation d’informations en mobilité s’ajoute à celle via des supports plus “traditionnels”. “8 Américains sur 10 consomment des informations depuis leur mobile et s’informent aussi sur leurs ordinateurs”, en se tournant davantage vers des marques de presse historiques et en témoignant d’une immersion plus intense, précise le rapport.
Conséquence: l’émergence de nouveaux usages avec une lecture de l’information qui permet de faire une pause, de lire en différé, de surligner des idées importantes sur l’actualité. D’où la demande pour de longs formats journalistiques, ce que les intervenants du festival South by South West, à Austin, avaient aussi martelé.
Enfin – et c’est un phénomène nouveau – la montée du mobile a fait venir au numérique – et au journalisme numérique – une catégorie de la population américaine, plutôt rurale, qui avait raté l’étape de l’ordinateur.
3. L’impact relatif des réseaux sociaux sur la consommation d’infos
La population américaine, de plus en plus présente sur les réseaux sociaux (133 millions d’Américains sont inscrits sur Facebook, 25 millions sur Twitter), y passe en moyenne 7 heures par mois. Pourtant, cela n’a pas (“encore”, tempère le rapport) l’effet escompté sur l’apport d’audience pour les médias.
En effet, moins de 10% de internautes lisent “très souvent” des informations repérées grâce à la recommandation sociale de leur communauté sur Facebook ou Twitter, quand 36% vont “très souvent” consulter les actualités directement sur une application ou un site Web, 32% passent par une recherche avant de tomber sur une information et 29% se tournent vers des agrégateurs de contenus.
Pour Amy Mitchell et Tom Rosenstiel, ce n’est qu’une question de temps, les réseaux sociaux étant appelés à générer de plus en plus de trafic sur les éditeurs de contenus.
4. Le “modèle” de l’abonnement en ligne
Et si, d’ici 5 ans, les journaux n’imprimaient plus qu’un ou deux exemplaires par semaine, l’un porté à domicile le dimanche, et le deuxième un autre jour de la semaine, plutôt propice aux revenus publicitaires sur l’imprimé? Ce scénario n’est pas si fictif, écrit ce rapport, au vu de la crise continuelle subie par les journaux imprimés.
Engluées dans la crise de la presse imprimée, un très grand nombre de publications pourraient ainsi se tourner vers le modèle par abonnement en ligne, sans doute influencées par le système payant du New York Times qui a récolté quelques 390.000 abonnés.
“Les journaux ont perdu tellement de leurs revenus publicitaires – plus de la moitié de leurs revenus depuis 2006, que, sans perfusion de revenus par abonnement en ligne, certains ne pourront pas survivre.”
5. Le retour de la télévision?
Même si la plus forte croissance se fait avant tout sur les sites d’informations, l’audience sur les chaînes de télévision qui font de l’information aurait augmenté de 4.5% en un an. Une “première depuis 10 ans” aux Etats-Unis, salue le rapport. Inattendue, cette percée profite à CNN, MSNBC, au détriment de Fox News, qui décline.
Difficile de savoir à quoi cette croissance est vraiment due. Est-ce la résultante de la Social TV, qui peut pousser à regarder des programmes télévisuels très commentés sur les réseaux sociaux? Ou le fait d’une riche actualité, faite des révolutions arabes notamment? Selon le rapport, “cette croissance peut être de courte durée et fonction d’actualités très visuelles plutôt qu’à un vrai changement d’habitudes”.
AA
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Crédit: Reuters/Jas Lehal
La 3D est-elle l’avenir du football à la télé? A en voir le programme de la Coupe du monde, qui vient de débuter, nombreux sont ceux qui veulent le croire: pas moins de 25 matchs seront tournés en 3D par des caméras de Sony, TF1 en diffusera 5, CanalSat, propriété de Canal+, 10, sans oublier les quelques cinémas qui, en France, vont organiser des projections ad hoc. Qui peut regarder des matchs en 3D? A quel prix? Qu’est-ce que cette technologie change à la façon de suivre un match de foot? Débuts de réponses.
Une image en 3D est une image en relief. Laquelle est constituée de deux images légèrement décalées l’une par rapport à l’autre. Lorsqu’un spectateur regarde une image 3D, son oeil droit perçoit l’une des deux images, son oeil gauche l’autre image, de façon simultanée et très rapide. Les lunettes permettent alors de «synchroniser» ces deux images pour que naisse l’image en relief sur la rétine.
Ils travaillent avec des caméras spéciales pour filmer les deux images détaillées plus haut, des caméras avec deux yeux, deux objectifs donc. Gilles Maugard, directeur général adjoint des technologies et systèmes d’information de TF1, m’explique le dispositif: «d’ordinaire, pour les matchs en HD (haute définition, ndlr), on tourne avec 15 caméras. Là, pour la 3D, on est encore en phase de test, on tourne avec 6 ou 7 caméras.» Quant aux spécificités de tournage, elles ne sont pas encore tout à fait définies. Si ce n’est qu’a priori, les plans sont pris de plus près et les zooms moins utilisés, pour éviter l’effet mal de mer. «Après l’expérience du Mondial, on aura beaucoup plus de retours de la part de ceux qui filment et qui réalisent», reprend Gilles Maugard.
Tous ceux qui ont acheté une télévision 3D, plus des lunettes pour chacun des spectateurs. Le prix de ce téléviseur? 1.300 euros pour le premier modèle, et une centaine d’euros pour chaque paire de lunettes. Tandis que Médiamétrie réfléchit à créer un panel spécial pour les spectateurs de télé 3D, il reste une option moins onéreuse: se rendre dans l’un des 39 cinémas qui projette les matchs de la Coupe du monde en 3D, à 15 euros le billet d’entrée, lunettes comprises.
Personne ne le sait. «On espère qu’au moins 10.000 téléspectateurs vont regarder les matchs en 3D pendant la Coupe du monde», précise Gilles Maugard. D’après le cabinet GfK, entre 150.000 et 200.000 téléviseurs 3D pourraient être vendus en France d’ici à la fin de l’année 2010. Est-ce que tout le monde aura vraiment besoin de regarder des matchs de foot en 3D? Pas sûr. Cependant, il faut noter la règle suivante: les innovations précédentes, à la télé, n’ont jamais éloigné les fans de leur sport. Ceux-ci montrent souvent une capacité d’absorption très rapide de nouvelles images, l’oeil étant capable de s’habituer.
«Regarder un match en noir et blanc, beaucoup de jeunes trouvent cela à la limite du supportable aujourd’hui», rappelle Pascal Griset, professeur d’Histoire contemporaine à l’Université Paris-Sorbonne. C’est dire si la couleur, arrivée sur les écrans en 1967, a été vite adoptée. Quant au ralenti, il est crucial à la télévision. Un match diffusé sans ralenti, ce n’est plus un vrai match. «Même lorsque les spectateurs sont sur place, dans les stades de foot, ils regardent l’action en direct sur le terrain, puis se tournent immédiatement vers les écrans disposés ici et là dans les tribunes pour revoir une action de plus près, un but ou une faute. Enfin, les journalistes qui commentent les matchs, également sur place, font toujours des commentaires sur les ralentis diffusés sur les écrans. C’est devenu structurel.»
Oui. Car la 3D sur le petit écran n’offre pas le même confort que la 3D au cinéma. «Il faut de très bons téléviseurs, et rester bien en face de l’écran, sinon, on ne profite pas de l’image. Cela nécessite donc de rester concentré devant sa télé, ce qui n’est plus vraiment l’usage des gens aujourd’hui.» C’est donc moins immersif que le cinéma et moins intuitif que la télévision que l’on connaît. Autre problème, qui pourrait déstabiliser les spectateurs: les chaînes n’ont pour l’instant pas pu fabriquer des publicités qui, à la mi-temps, seraient également en 3D. Ce qui va obliger le téléspectateur à retirer puis remettre ses lunettes, le temps de la pause pub. «On est un peu gênés par rapport à ça», concède Gilles Maugard. «Disons que pour le moment, la 3D est un bonus plutôt qu’autre chose. A terme, la pub sera aussi en 3D, comme celle du cinéma, avant Avatar ou Alice au pays des merveilles.»
Difficile à dire. Pour Gilles Maugard, la 3D pourrait être plutôt réservée à quelques événements d’exception, comme… le Mondial. Ou alors, la 3D pourrait n’être utilisée que pour certaines séquences des matchs de foot, par exemple pour voir ou revoir certaines actions en 3D, mais pas sur l’intégralité de la rencontre. L’avenir, estime ce dirigeant de la première chaîne, c’est plutôt la HD, diffusée pour la première fois via Ushuaïa, en février 2006. Puis utilisée pour la Coupe du monde de foot 2006 sur TPS, avant de servir la Coupe du monde de rugby de 2008, sur TF1.
L’avenir du foot télévisuel pourrait aussi résider dans l’utilisation de la «Newsight GmbH», une technologie en 3D relief créée les entreprises Grundig et 3D Image Processing (3D-IP) et visible… sans lunettes. Pour les footovores, c’est le comble de l’interactivité: voir entrer dans son salon le ballon que vient de shooter un joueur mondialement connu, et ce, en temps réel. En revanche, faire la passe, toujours depuis son salon, pour remettre ce même ballon sur le terrain officiel, n’est pas encore possible. En attendant, une innovation fait sensation sur le site du Guardian, l’option «replay» des matchs de la Coupe du monde à partir des messages postés sur Twitter.
Oui. Pour Pascal Griset, le sport a toujours été «un produit d’appel». «Si les nouvelles technologies télévisuelles ne sont pas toujours créées pour le sport, elles se développent souvent avec lui», dit-il, en citant l’exemple du Tour de France, qui a grandi en même temps que les moyens de diffusion de l’image se sont perfectionnés. «Au début du Tour de France, il n’y avait aucune transmission d’image, mise à part à l’arrivée. Puis, les images ont pu être diffusées en direct. Mais il y avait toujours des difficultés à filmer les cyclistes en plein effort, sauf sur quelques points de passage.» Quand la technique a permis aux spectateurs de suivre, depuis le petit écran, la course au moment-même où les cyclistes pédalaient, cela a été la révolution. Un exploit sportif, en quelque sorte.
«Il est plus facile d’innover avec le sport, car ce sont des émissions de flux, qui offrent une grande souplesse sur les moyens de production, alors qu’une fiction, tournée 18 mois avant sa diffusion, ne permet pas du tout la même réactivité», ajoute Gilles Maugard. Un bémol, cependant: les chaînes ont beau assurer qu’elles «créent l’événement» et que «c’est une première», en réalité, les premières images 3D, appelées à l’époque «stéréoscopiques», ont été projetées pour la première fois avant la seconde guerre mondiale, se souvient Pascal Griset. «Je ne veux pas jouer le rôle de l’historien qui dit toujours qu’il n’y a jamais rien de neuf, mais disons que cela ne sera une vraie révolution que si la technologie se répand vraiment.»
Et vous, de quelle façon aimeriez-vous regarder les matchs de foot à l’avenir?
Alice Antheaume
lire le billetA priori, entre un site d’infos et le nouveau site du président de la République, rien à voir. Mais à y regarder de plus près, les outils et les formats utilisés, spécifiques au Web, sont les mêmes – le traitement de l’information, c’est une autre histoire. Ainsi, sur la nouvelle «home page» d’Elysee.fr, que j’ai pu voir en avant-première et qui doit être lancée après les élections régionales (UPDATE: le nouveau site a été mis en ligne dans la nuit du 29 mars 2010), des photos grand format, en pleine colonne — mais sans pub — pointent sur les sujets du jour. Plus bas, une partie «dossiers» et une colonne d’«actualités». Certes, l’url ne trompe pas sur la marchandise: il s’agit bien du site d’information du chef de l’Etat. Certes, le code couleur graphique (bleu, blanc, rouge) rappelle où l’on est, ainsi que la devise «liberté, égalité, fraternité». Certes, Elysee.fr, piloté par le conseiller présidentiel Nicolas Princen au sein de la cellule de communication dirigée par Franck Louvrier, est un site institutionnel, qui porte la parole du président. Mais en coulisses, la production d’Elysee.fr s’organise parfois comme celle d’un site Web d’infos: l’un et l’autre numérisent des contenus, organisent leur diffusion et créent le débat, en ligne, dans une sphère publique donc. Sans compter que certaines innovations technologiques d’Elysee.fr vont faire des envieux dans les salles de rédaction. Pour vous le montrer, je me suis livrée au jeu des sept points de convergence / divergence.
1. La ligne éditoriale
Quand nombre de sites d’infos dégainent des articles au rythme de l’agenda de l’AFP, sur Elysee.fr, c’est l’agenda du «PR» (président de la République) qui détermine le menu du jour. En clair, si Nicolas Sarkozy fait un discours, ou un déplacement, comme mercredi 24 février au Gabon, cela détermine le contenu de la page d’accueil d’Elysee.fr du jour. En revanche, s’il ne fait pas d’allocution publique sur la grève dans les raffineries, alors niet, Elysee.fr n’en parle pas. Et ce, même si le sujet faisait par ailleurs la «une» de tous les sites d’infos au mois de février. La ligne éditoriale, c’est donc de coller à l’action du président.
2. L’iconographie
Quelle image mettre sur la page d’accueil? Quelle photo donne envie aux lecteurs de cliquer? Comment illustrer ce dossier? Ces questions, ce sont celles que se pose une rédaction des dizaines de fois par jour. Or ce n’est pas parce que l’on s’appelle Elysee.fr que l’on déroge à la règle. L’équipe du site présidentiel se triture aussi les méninges sur l’iconographie, avec les mêmes contraintes que les sites d’infos pour les photos de Nicolas Sarkozy: que celles-ci soient d’actu (c’est-à-dire du jour, pas du mois dernier) et qu’elles soient de très grande qualité pour convenir au format.
La grande majorité des photos proviennent des photographes de l’Elysée qui, depuis 1958, mitraillent les scènes diplomatiques pour la postérité, à des fins d’archives. Cette fois, leurs clichés sont mis en ligne, façon pour l’équipe d’Elysee.fr de valoriser des contenus qui existaient déjà mais n’étaient jusqu’alors pas montrés si vite. La difficulté du service photo? Saisir le président quand il n’est pas caché par la dizaine de personnes qui assure sa sécurité et l’entoure en permanence. Ce qui rend rares les photos où Nicolas Sarkozy est seul, comme ce cliché où on le voit visiter le carré musulman du cimetière militaire de Notre-Dame de Lorette, le 26 janvier 2010, à Ablain-Saint-Nazaire.
3. Le temps réel
Le rush des lefigaro.fr, 20minutes.fr, lemonde.fr, qui publient des «urgents» et des «dernières minutes» en espérant être les premiers à sortir l’info, Elysee.fr ne connaîtra pas. La présidence ne court pas après l’actu car c’est elle qui la créée. La preuve, il n’y a qu’à compter, sur les sites d’infos français, le nombre d’articles rebondissant sur les annonces de l’hyper-président.
Reste que pour mettre en ligne les vidéos des discours de Nicolas Sarkozy, cela va être la course. La séquence sera récupérée au pool TV, qui filme les interventions du président, sitôt l’allocution terminée pour que celle-ci soit disponible en ligne entre 15 et 30 minutes «après le prononcé». Bref, des quasi «directs». Et de la diffusion sans coupure ni montage, a contrario des sujets des télévisions – qui puisent aussi dans les images du pool TV.
4. Le circuit de la copie
Sur Elysee.fr, aucun contenu n’est publié sans validation. Idem pour les sites d’infos, où la plupart des articles des rédacteurs sont relus par des rédacteurs en chef et /ou des éditeurs. Dans ces conditions, le temps réel stricto sensu n’est pas possible, mais les «actualités» sur les déplacements du chef de l’Etat peuvent être préparées à J-48, avec la publication d’éléments de «contexte» des dits déplacements.
Or publier autre chose que des communiqués de presse, à propos du Président, c’est périlleux. Une simple faute d’orthographe peut faire l’objet de la risée des internautes. La polémique autour de la date exacte de la photo de Nicolas Sarkozy prise à Berlin en 1989 et publiée… sur sa page Facebook montre que le président est guetté en ligne.
5. L’audience
Sur Elysee.fr, les internautes s’appellent «les Français». Il n’est pas prévu qu’ils commentent directement sous les contenus publiés. Mais des boutons Facebook et Twitter sont visibles pour que «les Français» réagissent… sur les réseaux sociaux. Un choix qui coïncide avec les problématiques actuelles des sites d’infos, dont la communauté s’est exportée sur les réseaux. Pour l’équipe d’Elysee.fr, c’est aussi un souci: comment traiter / faire remonter les réactions des internautes? Alors que certains sites font des synthèses de réactions, ou des témoignages d’internautes, Nicolas Sarkozy consulte une sélection des commentaires laissés sur sa page Facebook. Façon baromètre de l’opinion publique numérique.
Sur Twitter, tout reste encore à faire et, comme dans les rédactions, l’équipe d’Elysee.fr s’interroge sur le potentiel de ce réseau encore réservé aux «happy few» (0,98% de la communauté de Twitter est française).
6. La technologie
C’est l’un des points de convergence le plus fort entre Elysee.fr et un site d’info: la nécessaire agrégation de nouvelles technologies. Mais sur Elysee.fr, il s’agit de mettre en valeur l’innovation technologique… française. Plutôt qu’une Google Maps sur les allers et retours de Nicolas Sarkozy, la carte des voyages présidentiels est donc signée IGN (Institut géographique national). Car IGN, c’est français! De même, point de YouTube (américain), place à l’INA (Institut National de l’Audiovisuel) et à Dailymotion, les plates-formes frenchy de vidéos.
Cependant, la vraie innovation du site réside dans la technologie de reconnaissance vocale des vidéos, conçue par deux sociétés – françaises! – Exalead et Vecsys. Un outil qui permet de chercher un mot dans les discours filmés de Nicolas Sarkozy, et rend traçable la parole politique dans le temps. De fait, le dispositif va sans doute plaire à Yann Barthès, dont Le Petit Journal de Canal+ excelle à traquer les répétitions et les bafouilles des hommes politiques. Et je prends le pari que les rédactions Web vont se bousculer pour l’acquérir.
7. La politique
J’entends par là la politique au sens figuré. Car le lancement du nouveau site de l’Elysée pourrait bien faire évoluer le fonctionnement du Palais. En effet, la mise en ligne de données sur l’action de Nicolas Sarkozy qui, jusqu’à présent, étaient réservées à un usage interne, poussent à plus de transparence, l’une des valeurs clés du Web. Avec le risque, quand les données se multiplient dans le temps, de voir pointer d’éventuelles contradictions.
C’est peu ou prou ce qu’ont vécu – et vivent encore – les sites Web des journaux imprimés. D’abord ils ont retraité et numérisé des contenus existants (ceux du papier) pour les rendre accessibles en ligne – ce que fait Elysee.fr, au service du palais présidentiel; ensuite ils se sont constitués en rédaction spécifique, distincte du journal, et ont créé des contenus propres au Web.
Qui sait? L’Elysée pourrait aussi vivre sa révolution numérique…
Alice Antheaume
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