Journalisme numérique: les marronniers de l’automne

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Le payant paie-t-il? Jusqu’où aller dans la couverture des “breaking news”? Comment combiner instantanéité et temporalité plus longue? Faut-il permettre les publicités déguisées en contenus journalistiques? Ces questions, pas vraiment nouvelles, animent toujours les rédactions en cette deuxième moitié de l’année 2013, en France et à l’étranger.

Le payant paie-t-il?

C’est l’obsession d’un nombre grandissant de rédactions françaises. Influencées par l’expérience du New York Times (dont le paywall génère certes des revenus, mais qui ne compensent pas encore la perte des revenus publicitaires), elles veulent “faire payer les lecteurs” en ligne.

“Comment faire en sorte que ce qui est payant sur le papier soit aussi payant sur le Web?”, demande à plusieurs reprises Jean-Michel Salvator, le directeur délégué des rédactions du Figaro, lors d’une master class donnée à l’Ecole de journalisme de Sciences Po jeudi 19 septembre. Face à à un étudiant en journalisme aguant que, même s’il gagnait un salaire, il ne lui viendrait pas à l’esprit de payer pour de l’information généraliste en ligne, Jean-Michel Salvator concède que “l’idée de la gratuité de l’information est tellement ancrée dans les usages des internautes que cela va être compliqué”. Le Figaro espère atteindre d’ici la fin de 2013 15.000 abonnés payants – sur 4 millions de membres – en misant sur son “produit d’appel”, la mise en ligne dès 22h du journal du lendemain.

Lemonde.fr, lui, possède 110.000 abonnés dont 50.000 sont des “purs Web” (qui n’ont pas souscrit à l’offre imprimée, donc). Objectif visé: 200.000 abonnés à l’offre purement numérique d’ici dans deux ans.

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Même idée fixe du côté du Point.fr qui compte passer à un modèle mixant gratuit et payant début 2014. Sous la pression conjointe des actionnaires et de la direction de la rédaction, Lexpress.fr va aussi installer, à partir du printemps 2014, un “metered paywall” (mur payant dosé). En quoi cela consiste-t-il? Le lecteur a accès à un certain nombre de contenus gratuits. Un clic de plus et il doit payer pour poursuivre ses lectures. “Le principe est acté, mais nous n’avons pas encore décidé des modalités”, m’informe Eric Mettout, le directeur adjoint de la rédaction. A partir de combien d’articles consultés devra-t-on payer? La partie “Styles” fera-t-elle partie du dispositif ou restera-t-elle en accès gratuit? “On affinera au fur et à mesure”, reprend Eric Mettout, qui veut voir là un test sans résultat garanti. Au moins, cela “va nous aider à obtenir une base qualifiée d’internautes enregistrés sur lexpress.fr et nous obliger à monter en qualité sur le site”.

Pour l’instant, la stratégie du paywall n’a pas vraiment fait ses preuves. Pour l’expérimenter, deux conditions sont nécessaires, selon Frédéric Filloux, auteur de la Monday Note: 1. avoir des contenus à haute valeur ajoutée qui justifient qu’ils soient payants (voilà pourquoi l’information économique et financière a plus de chance d’être monnayée que de l’information généraliste) et 2. disposer d’un spécialiste des données et statistiques qui traque les itinéraires des utilisateurs, pour comprendre pourquoi, quand ils se heurtent au paywall, ils font machine arrière ou, à l’inverse, décident de s’abonner.

Jusqu’où aller dans la couverture des “breaking news”?

Aux Etats-Unis, après la fusillade survenue à Washington DC lundi 16 septembre, les rédactions s’émeuvent des erreurs commises. “Les premières informations faisaient état de trois tireurs. Puis deux. Puis un. Puis, à nouveau, trois. Que quatre personnes avaient été tuées. Mais qu’il y en avait peut-être six en fait”, décrit le Washington Post, pour qui cette cacophonie (il y a eu en fait treize morts, dont le tireur, seul, un dénommé Aaron Alexis) est devenue “presque systématique à l’âge des réseaux sociaux”.

Sur Gawker, le diagnostic est encore plus sévère: “les gens à la TV, tout particulièrement, n’ont aucune idée, vraiment aucune, de ce qu’il se passe. Les blogueurs non plus, mais au moins ils ne sont pas coincés sur un plateau à devoir remplir le vide à l’antenne, face à une audience qui veut connaître les faits que l’on n’a pas, là tout de suite”. Et de conclure que l’information en temps réel est une vaste blague: “personne ne sait rien, ignorez-nous!”.

Pourtant, les journalistes n’ont pas attendu les réseaux sociaux pour commettre des erreurs au moment des breaking news. Le 22 novembre 1963, jour de l’assassinat du président J.F. Kennedy à Dallas, alors que n’existaient ni Internet ni les réseaux sociaux, il est annoncé à la radio américaine que le vice-président Lyndon Jonhson a lui aussi été tué, et que plusieurs tireurs sont à l’origine de la tuerie. Rien de nouveau, donc, dans le chaos qui accompagne la couverture d’un événement inopiné, si ce n’est que ce chaos est désormais visible par tous, exposé via de multiples témoignages, vrais et faux, en ligne. Les discerner fait partie des compétences requises pour les journalistes d’aujourd’hui, lesquels doivent savoir à la fois joindre des sources officielles (policières, gouvernementales, etc.) le plus vite possible – ce pour quoi les médias traditionnels sont les mieux armés – et vérifier les témoignages glanés en ligne en pratiquant le crowdsourcing – une pratique que maîtrisent les utilisateurs de Reddit.

Comment faire du long format en ligne?

Si les rédactions en ligne se sont beaucoup concentrées sur les breaking news, les “lives” et les billets de blogs très anglés, elles cherchent désormais à juxtaposer au temps réel une autre temporalité, celle des longs formats. “Comment j’ai fini Grand Theft Auto en 38h”, sur Buzzfeed, Snowfall, le reportage interactif du New York Times, ou l’enquête en cinq volets de Reuters sur le “child exchange”, ces contenus nécessitent parfois jusqu’à 15 minutes de lecture. Une tendance encouragée par l’essor du mobile. Depuis un canapé, le lit, le métro – où le réseau défaillant ne permet pas toujours de changer de page -, la salle d’attente du médecin, on consomme de plus en plus de longs formats sur smartphones ou tablettes.

Fini le temps où l’on pensait le Web dédié au picorage d’informations vite préparées et vite avalées. Fini aussi de croire que la lecture sur écran empêcherait la consommation de longs formats. Slate.com a redessiné son interface pour les mettre en majesté. Buzzfeed a une section intitulée “Buzzreads” qui comporte des longs formats, faits maison ou agrégés, distribués chaque dimanche, jour où la frénésie est moindre. C’est un “Buzzfeed pour ceux qui ont peur de Buzzfeed”, a souri Steve Kandell, qui coordonne cette partie.

Le pure-player Politico, qui publie des infos plus vite que son ombre et commence aux aurores, a embauché des journalistes provenant de la presse magazine, capables d’utiliser des ressorts narratifs et des figures de style dans l’écriture, pour “embrasser un nouveau défi, faire renaître les longs formats journalistiques, alors que les lecteurs cherchent des contenus originaux qui ne peuvent être ni cannibalisés” ni copiés facilement.

En France, Lemonde.fr a doté son application d’une section “morceaux choisis” et permet en outre à ses abonnés d’opter pour le “mode zen”, une fonctionnalité qui fait le vide autour de l’article choisi pour faciliter le confort de lecture. Et bénéficier d’une durée de consultation allongée. La même “lecture zen” est disponible sur liberation.fr.

Attention néanmoins, rappelle le journaliste Rem Rieder sur USA Today, à ne pas confondre long format et mise en ligne de papiers de 30.000 signes édités pour l’imprimé. “L’erreur serait de simplement balancer ces articles en ligne sans prendre en compte la nature du réseau”, écrit-il. “Une narration palpitante doit aller de pair avec une construction qui mélange vidéos, sons, graphiques interactifs pour une expérience à couper le souffle en ligne”.

Faut-il laisser la publicité s’incruster davantage?

Avant, c’était simple, il y avait, sur les applications et les sites d’informations, bannières et pavés publicitaires aux couleurs criardes d’un côté et contenus journalistiques édités sur fond blanc de l’autre. Désormais, on voit fleurir ce que les Anglo-saxons appellent l’advertorial (advertising + editorial), ou “native advertising”, c’est-à-dire des publicités qui singent le journalisme. Leur ton, leur format et même leur angle ressemblent à s’y méprendre à ceux utilisés par des journalistes. Et pour cause, les annonceurs ont parfois accès au système de publication pour insérer, dans les gabarits éditoriaux utilisés par les journalistes, leurs publicités. Il n’y a pas pour autant tromperie sur la marchandise pour qui sait lire: sur les sites qui s’y adonnent, du New Yorker à The Atlantic en passant par Quartz.com, le nom de la marque est indiqué dans la signature et l’intitulé “contenu sponsorisé” écrit en toutes lettres.

Choquant? A ce stade, on ignore quelle en est la réception des lecteurs. Nombre de journalistes ont, eux, du mal à avaler la pilule. Pourtant, ils savent la tentation grande alors que le marché publicitaire est moribond pour les médias? Quant aux marques, elles n’attendent que ça: explorer des nouveaux formats pour communiquer. Dans un message adressé aux plus de 300 employés de Buzzfeed, Jonah Peretti, le fondateur, dévoile les grandes directions stratégiques à venir, publicité comprise. “Nous devons être un “must buy” pour les annonceurs. Nous devons leur donner l’accès total à notre système, à nos données, notre équipe de créatifs, et notre technologie.” Mieux, une Université Buzzfeed va être lancée “pour former marques et agences à la façon de faire de Buzzfeed”. La rançon du succès, continue Jonah Peretti: “nous avons commencé il y a quatre ans avec zéro revenu et nous sommes désormais une entreprise profitable”.

Il n’y a qu’une façon de répondre à ces questions: tester des réponses, voir comment l’audience réagit et en tirer des enseignements. A contrario, rappelle le journaliste Mathew Ingram, la posture qui consiste à ruminer que Google “nous vole des contenus” et à ressasser en boucle le bon vieux passé est stérile.

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Alice Antheaume

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A la conférence du Guardian, le mur payant est (encore) là

Crédit: AA

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Peut-on faire payer les contenus des sites d’informations? Vrai serpent de mer, cette question a été posée des milliards des fois. Et pour cause: elle n’a pas reçu de réponse claire. Ou alors une réponse – oui, tout doit être gratuit en ligne, sauf les informations très spécialisées à destination de professionnels – qui ne satisfait pas les éditeurs. Résultat, aucune conférence sur les médias ne se tient sans échapper à cette discussion. Et le Changing Media Summit, le colloque organisé par le Guardian, les 23 et 24 mars à Londres, ne déroge pas à la règle. Plusieurs interventions et tables rondes y étaient consacrées.

>> Lire aussi: Pourquoi le journalisme continue à muter en 2011? >>

Alors que le New York Times vient de lancer un mur payant «incroyablement complexe», selon les mots d’un journaliste de la BBC, que le rapport annuel du Pew Research annonce qu’aux Etats Unis, seul 1% des utilisateurs paient pour accéder des informations en ligne, et qu’Associated Press serait en train de regarder de près le système de paiement «One Pass» de Google, qu’en pensent les intervenants de la conférence londonienne? Eléments de réflexion.

Rob Grimshaw, Financial Times

«Avoir un mur payant ou pas, ce n’est plus un débat pour le Financial Times. Car la discussion a été tranchée: notre paywall marche. Il marche même très bien. Nous avons 210.000 inscrits payants en ligne, ce qui représente la moitié de notre circulation payante. De plus, près de 15% de nos utilisateurs souscrivent leur abonnement au FT.com via leur mobile. Alors pourquoi aurions-nous encore un débat sur les paywalls? Non, en revanche, ce qui nous occupe au Financial Times, c’est le mobile. Comment faire grandir notre audience sur ce support? D’après les chiffres dont nous disposons, 90% des internautes britanniques accèdent déjà au Web par le mobile et 45% de nos lecteurs accèdent à des contenus du FT via leur téléphone.»

Alan Rusbridger, The Guardian

«Le modèle du Financial Times ne peut pas marcher pour le Telegraph ou le Guardian. Quel type de journalisme peut susciter l’achat? Je ne sais pas. Pour l’instant, je ne suis pas sûr d’avoir vu des preuves que l’on peut faire payer pour des informations généralistes. Si le New York Times réussit son expérience de mur payant, je regarderais de plus près. Mais encore faudrait-il que les médias soient transparents sur leurs chiffres, afin que l’on puisse tirer les leçons de leurs expériences. Actuellement, sur le site du Guardian, 4 millions de personnes viennent chaque jour cliquer sur des contenus… gratuits.»

Arianna Huffington, Huffington Post

«Y aura-t-il un jour un mur payant sur le Huffington Post? A priori non, même si nous sommes tous dans une phase d’expérimentation. Je vois que le New York Times a finalement lancé son mur payant avec une très grande hésitation, en le testant d’abord au… Canada, c’est dire. Au fond, ils ne misent pas vraiment sur ce mur payant, ce que je comprends, car il paraît très difficile de le faire sur les informations générales et les opinions.»

Christian Hernandez, Facebook

«Pour les contenus, il faut distinguer les denrées de base, les informations généralistes, et celles qui ont de la valeur, le journalisme. Les murs payants n’ont de sens que pour les contenus qui ont du sens. De la valeur, si vous préférez.»

Paul Bascobert, Bloomberg Business Week

«Il n’y a pas de modèle valable à part celui qui permet de découvrir ce qui a de la valeur pour l’éditeur et le client. Oui, nous ferons un jour payer nos contenus en ligne. Quand? Dans le futur…»

Stevie Spring, Future

«Je déplore la naïveté des éditeurs qui assènent que ce contenu coûte tant, donc maintenant, chers lecteurs, il faut payer. Entre la “capacité” à payer, et l’acte de payer, il y a une grosse différence. La plupart du temps, les gens estiment qu’une fois qu’ils ont payé leur fournisseur d’accès à Internet, c’est bon, ils peuvent naviguer tranquillement sur leur navigateur et sur leur mobile, et consommer ce qui leur plaît.»

Paul Hayes, News International

«Le plus intéressant, en ce moment, c’est de voir comment les éditeurs évaluent la valeur de leur contenu. Par exemple, sur l’application iPhone du Guardian, on peut estimer qu’un contenu vaut un penny (10 centimes d’euros, ndlr). En réalité, cela coûte beaucoup plus cher que cela à produire. Les éditeurs ont passé trop de temps à se plaindre. Ils ont d’abord dit que Google leur volait leurs contenus, et maintenant, ils regrettent qu’Apple leur pique leurs revenus. Pendant ce temps, Facebook, Google, et Apple construisent la suite.»

Au final, lors de ces deux jours au Changing Media Summit, le mot «valeur» était sur toutes les lèvres. Mais de quelle valeur parle-t-on? La prix que coûte la production d’un article? Sa valeur journalistique aux yeux d’un directeur de la rédaction? La valeur que lui donne les internautes? Nul ne le sait tout à fait. Une chose est sûre, et c’est ce qu’annonçait l’état des lieux annuel sur les médias américains, Apple, Google et Facebook se sont assis autour de la table, et ont d’ores et déjà installé leurs péages. En un clic.

Alice Antheaume

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Spiil: Esprit du Web, es-tu là?

«Comment voyez-vous le futur du journalisme?» C’est par cette question, posée par Jessica Chekroun, journaliste pour l’Atelier des médias, qu’a commencé ma journée au Spiil (Syndicat de la presse indépendante d’information en ligne), vendredi 22 octobre. Journée de débats, ateliers (1), et de «réseautage» organisée à la Maison des métallos, à Paris, par le syndicat professionnel des pure players, la première du genre depuis leur naissance, il y a un an, en octobre 2009. Ambiance sur place résumée en trois questions.

Crédit: Satellifax

Crédit: Satellifax

1. Y a-t-il un esprit Web?

Contents, les organisateurs du Spiil, de voir les «450 inscrits» discuter comme s’ils étaient les membres d’une même famille. Ici, la majorité des présents sont des producteurs de contenus en ligne. Point de contingence du papier donc – les pure players étant des sites Web d’infos sans déclinaison imprimée, comme Slate.fr, Bakchich, Arrêts sur images, Médiapart, le Bondy Blog, etc.

«Je suis journaliste Web», apostrophe un participant dans la salle, n’oubliant pas d’accoler le mot Web à sa fonction. «L’esprit Web n’est pas si éloigné de l’esprit rock, pense Antonio Casilli, auteur de «Les Liaisons numériques» (éd. du Seuil) (MISE A JOUR LUNDI 14h30). Il a aussi ses valeurs et ses codes esthétiques». Des valeurs «libertaires et solidaires», détaille à ce sujet Owni, qui ont permis de se mettre d’accord sur des normes universelles, pour fonder par exemple les licences Creative Commons.

Des valeurs qui – pour les avoir évoquées dans un W.I.P. sur la «rédaction secrète du Web français» et un autre sur les usages des «forçats du Web» – se concrétisent, dans le monde des producteurs d’infos en ligne, par le partage de centaines de liens quotidiens, par l’entraide, l’intérêt pour l’expérimentation, et cette vie faite de chats, de réseaux sociaux, de photos taguées à tous les étages. Et d’interaction avec l’audience. «Puisque l’audience apporte de la valeur ajoutée aux sites d’informations, il faut réfléchir à des moyens de partager nos revenus avec elle, s’enthousiasme Benoît Raphaël, ancien rédacteur en chef du Post.fr, avant de se raviser: «le problème, c’est que l’on n’a pas beaucoup de revenus à partager.»

Quant aux codes esthétiques, s’ils existent, ils concernent moins la mise vestimentaire du producteur de contenu en ligne que ses outils de travail. Iphone, iPad, Android, ordinateurs portables, mais aussi plug in, navigateurs et applications mobiles.

2. Comment couvrir les retraites autrement qu’en faisant du «live»?

Dans les coulisses du Spiil, c’était, actualité oblige, l’une des préoccupations les plus pressantes des journalistes harassés par des semaines de couverture en temps réel des mouvements contre la réforme des retraites. Comment trouver, chaque jour, un angle différent sur ce sujet qui dure? Et mieux, un format différent?

Outre les «lives», très pratiqués par lemonde.fr et 20minutes.fr, rejoints par leparisien.fr et Rue89, il y a eu aussi des cartes interactives, pas toujours très complètes d’ailleurs, mais problème: comment faire pour ne pas lasser les internautes quand ce format revient chaque jour et comment «faire des retours sur ce qu’il s’est passé il y a 24h, voire 48h, qui n’est déjà plus dans l’actu», s’interroge Yann Guégan, gestionnaire de communautés sur Rue89, interviewé à ce sujet dans l’émission d’Arrêts sur images. D’autant que, ajoute-t-il, «c’est fatiguant, de tenir un “live” du matin au soir, lorsqu’on est une petite équipe». Pour le site Regards sur le numérique, tout se résume en une question: l’article est-il mort?

3. Quelle campagne en ligne en 2012?

Outre la question des modèles gratuit/payant, des aides à la presse en ligne – celles de l’Etat comme celles que pourront peut-être apporter un site comme jaimelinfo.com, qui proposera aux internautes de faire des dons pour subventionner le reportage de leur choix -, le sujet débattu au cours de la dernière séance plénière de la journée du Spiil a concerné la future campagne de 2012. A quoi celle-ci va-t-elle ressembler? Plus exactement, la prochaine élection présidentielle va-t-elle encore reposer sur l’image (télévisuelle, ndlr) et la personnalité des candidats, demande Dominique Cardon, sociologue et auteur de «La Démocratie Internet» (éd. du Seuil), ou mettre – enfin – le programme des candidats en débat via le Web?

La réponse du panel invité , vendredi, a été réservée: «Il y a trois ans, je travaillais dans un grand ministère du côté de Bercy», raconte Xavier Moisant, qui s’est occupé de la campagne en ligne de Jacques Chirac, en 2002. «Je me demandais pourquoi personne ne répondait à mes emails. J’ai posé la question, on m’a répondu: “pour avoir une réponse, faxe nous tes emails!”»

«C’est vrai que les hommes politiques français n’ont pas souvent un ordinateur sur leur bureau, confirme Benoît Thieulin, co-fondateur de La Netscouade, qui s’est occupé de la campagne de Ségolène Royal en 2007. Or c’est dur de faire une stratégie Web si l’on n’est pas praticien du Web». Xavier Moisant s’en souvient: la seule relation que Jacques Chirac entretenait, à l’époque, avec Internet consistait en des signets qui le menaient vers les résultats des compétitions de sumo. D’après Benoît Thieulin, «notre classe politique, dans sa formation intellectuelle et dans sa carrière, qui passe souvent par de grandes administrations centrales, n’est pas formée au Web. Développer une stratégie complexe ne peut venir que de la pratique même, sinon on se limite à calquer sur le Web des stratégies préexistantes» sans vraiment les penser pour le Net.

L’avantage est, qui que soient ses futurs compétiteurs, à Nicolas Sarkozy, estime Xavier Moisant. En dépit des 7 Français sur 10 qui s’estiment mécontents de l’action du chef de l’Etat, selon un sondage Ifop/JDD publié le 24 cotobre, il a une arme que les autres n’ont pas, à savoir une page Facebook qui compte plus de 334.000 personnes. Un vivier sur lequel s’appuyer pour 2012.

(1) J’intervenais pour ma part lors d’un atelier intitulé «tout ce que les journalistes Web doivent apprendre et que leurs collègues ignorent», animé par Philippe Couve, en compagnie de Soizic Bouju, Marc Mentré et Eric Mettout.

Alice Antheaume

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Liens du jour #31

Le site du Times passe au payant et… se passe de Google (Etreintes digitales, blog du Figaro.fr)

L’Associated Press du XXIe siècle s’appelle Publish2 News Exchange, une plate-forme d’échange de contenus journalistiques (Publish2blog)

Nos vies gérées par les données (Internet Actu)

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Liens du jour #30

Comment Bill Keller, le rédacteur en chef du New York Times, compte faire payer des contenus en ligne dès janvier (Venture Beat)

Les 200 moments qui ont transformé le journalisme? A voir sur ce graphique (Poynter)

Coup de colère à Bloomberg: le rédacteur en chef juge les tweets de certains de ses journalistes trop “éditorialisants” et compromettants pour l’intégrité du titre (The Biz Blog, un blog de Forbes)

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Liens du jour #21

Le payant, le rêve éveillé des sites de presse et des pure-players (Médiapart)

Quatre leçons à tirer des erreurs de référencement de Google (Hubspot)

En Italie, on passe par Facebook pour défendre la “dignité des journalistes et le respect des citoyens” (editor’s weblog)

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Liens du jour #16

Le New York Times réfléchit à rendre ses blogs payants (blog Reuters)

Le plagiat, le mal journalistique du 21e siècle? (blog Babel @ Bedlam)

Google met à disposition “Living Stories”, un rival de l’outil “Covert it live” pour la couverture en direct d’événements (Guardian)

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