12 conseils pour les futurs journalistes

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Comment devenir journaliste en 2015? Et faut-il le devenir? A ces questions, Félix Salmon, l’éditeur de Fusion, passé par Reuters, répond que “la vie n’est pas belle pour les journalistes”. Il déconseille même aux jeunes de s’orienter vers ce métier.

“Si vous aimez faire autre chose (que le journalisme, ndlr), si vous êtes bons dans un autre domaine, vous devriez sans doute songer à changer d’orientation.”

Pas d’accord, et même pas d’accord du tout – mais comme on aime les débats à l’Ecole de journalisme de Sciences Po, on a invité Félix Salmon à donner la leçon inaugurale le 28 août prochain, et il a gentiment accepté. En attendant, voici 12 conseils destinés aux étudiants qui rêvent d’en faire leur profession. Et ils ont bien raison car c’est l’un des plus beaux métiers du monde.

1. Préparez-vous à ne jamais vivre la même journée

C’est le principal avantage de cette profession. Aucune journée ne ressemble à une autre quand on est journaliste puisque c’est l’actualité qui dicte l’emploi du temps et le volume des contenus produits. Le matin, on part sur un sujet dont on ignore souvent tout et, à la fin de la journée, on a publié un (ou plusieurs) contenu(s) qui en explique les enjeux. Au passage, on a appris plein de choses. Magique!

En outre, le journalisme constitue un poste d’observation formidable des mutations sociétales. Un paradoxe, estime un chercheur américain dont je tairai le nom, qui balance.

“Ce qui est incroyable avec les journalistes, c’est qu’ils sont censés raconter les évolutions de la société dans leurs articles, mais qu’ils sont incapables de voir sous leur nez le changement de leur propre métier.

>> Les questions que se posent les jeunes journalistes >>

2. Ne vous auto-censurez pas

Ne se sentant pas légitimes, beaucoup d’étudiants s’interdisent malheureusement de postuler à un stage en rédaction, voire à une école de journalisme. Or il ne faut rien s’empêcher, tout simplement pour ne rien avoir à regretter. Et si les aspirants journalistes n’ont pas obtenu de stage dans un média, même après les avoir demandés, ce n’est pas grave. L’expérience ne se résume pas au logo d’une organisation rédactionnelle posé sur un CV.

Ce qui compte, c’est d’expérimenter à sa mesure, de tester des petites choses en ligne, comme faire une photo par jour sur son compte Instagram avec une légende pertinente, monter un blog et apprendre à dialoguer avec les internautes, produire des vidéos sur Dailymotion ou YouTube en forme de zapping, apprendre le code, lancer un journal étudiant, une newsletter, monter une application, etc.

Tout cela a une valeur aux yeux des professionnels et prouve que vous avez déjà les mains dans le cambouis, et des idées en tête.

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3. Ne pensez pas que “c’est bouché, comme métier”

Non, ce n’est pas “bouché”. En 2014, il y a, sur 36.317 cartes de presse octroyées en France, 1.748 “premières demandes”. Dix ans plus tôt, en 2004, les “premières demandes” s’élèvent à 2.090, sur 36.520 carte de presse octroyées. Ces chiffres – qui ne prennent pas en compte les journalistes qui exercent leur métier sans carte de presse – montrent qu’il n’y a pas eu de réelle dégringolade. Le marché est donc toujours capable absorber des nouveaux entrants.

Les statistiques de l’insertion professionnelle des diplômés de l’Ecole de journalisme de Sciences Po, l’une des quatorze écoles de journalisme reconnues par la profession, sont encourageantes: toutes promotions confondues, 95% des diplômés travaillent, soit en CDI (46%) soit en CDD (23%) soit en piges régulières (26%).

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4. N’ayez pas (trop) peur pour votre futur salaire

Félix Salmon évoque “un très grand nombre de journalistes au talent incroyable qui ont du mal à joindre les deux bouts” aux Etats-Unis. En France, le salaire moyen d’un journaliste en CDI est de 3.790 euros bruts par mois, d’un journaliste en CDD de 2.506 euros bruts par mois, d’un pigiste de 2.257 euros bruts par mois.

A noter, “un journaliste diplômé d’un cursus reconnu en CDI ou CDD gagne en moyenne 12% de plus qu’un journaliste diplômé d’un cursus non reconnu” selon le rapport de l’Observatoire des métiers de la presse.

5. Ne croyez pas que vous allez faire du journalisme assis

Il est vrai qu’il y a quelques années, les journalistes travaillant sur des sites de presse n’ont, au départ, pas été encouragés à sortir de leur rédaction, englués dans du bâtonnage de dépêche inutile. C’est heureusement de l’histoire ancienne. Car ces sites ont maintenant compris que leur plus-value tient à leur capacité à sortir des contenus inédits, que leurs concurrents n’auront pas, publiés dans des formats adaptés à la consommation d’informations en ligne.

Après, cela tient aussi à la force de proposition des journalistes. La règle est simple pour sortir, soufflent les rédacteurs en chef: il suffit de ne pas rester pas bras croisés lors des conférences de rédaction, à attendre que le “flux” tombe, et de proposer des sujets percutants. Si la proposition est bonne, c’est sûr, le journaliste peut sortir faire le sujet.

Crédit: Sciences Po

6. Acceptez d’évoluer en cours de carrière

Quel point commun entre un présentateur de JT, un journaliste de PQR et un journaliste travaillant pour un pure player? Le journalisme est une “profession très éclatée”, analyse Cyril Lemieux, sociologue à l’EHESS (Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales), lors d’un séminaire à l’Ecole de journalisme de Sciences Po le 17 février. Une heureuse spécificité qui permet de connaître plusieurs vies professionnelles, au gré des employeurs, des réorganisations internes et, surtout, des changements de pratiques à l’ère numérique.

Guy Birenbaum, aujourd’hui à France Info, est un bon exemple: d’abord maître de conférences, il est devenu éditeur puis journaliste – sans carte de presse – et écrit toujours des livres. “Je ne suis jamais exactement ce que je suis censé être”, confie-t-il lors d’une master class. Avant d’envoyer une pique à ses confrères…

“Quand j’étais éditeur, je trouvais qu’il valait mieux déjeuner avec des journalistes que de lire leurs papiers.”

“Après 40 ans, il faut arrêter d’être journaliste”, m’avait prévenue un rédacteur en chef à mes débuts à Télérama. A l’époque, lui avait déjà la cinquantaine et, aujourd’hui, il travaille toujours.

Journaliste un jour, journaliste toujours? “Les journalistes ont le sentiment d’être liés par une culture commune et restent attachés à ce métier jusqu’à leur retraite, même s’il y a des sorties de la profession, vers la communication ou vers la politique”, observe encore Cyril Lemieux.

Et pour cause, il y a une interrogation légitime sur le rythme de vie imposé par ce métier, qui peut donner parfois le sentiment d’être comme un hamster dans une roue lancée à toute berzingue et qui peut lasser à force.

7. Sachez escalader les montagnes russes, entre adrénaline et grosse fatigue

Le vrai indice du bonheur chez journalistes? Selon Cyril Lemieux, c’est lorsqu’ils sont fiers de ce qu’ils produisent collectivement. Et c’est souvent le cas dans les périodes de breaking news intenses.

Mais cela provoque en contrecoup, comme après les attentats de janvier à Paris, un épuisement général qui “laisse des traces physiquement et moralement”, reconnaît Hervé Béroud, directeur de la rédaction de BFM TV, lors d’une conférence à Sciences Po le 12 février.

Et Céline Pigalle, la directrice de l’information de Canal+, surenchérit…

“L’extrême fatigue de ce métier est liée à l’impossible réplication de ce que l’on a appris dans une situation antérieure. On doit remettre en jeu nos choix et nos pratiques à chaque nouvelle situation.”

8. Comprenez qu’aimer voyager ne conduit pas forcément au journalisme

“Je veux être journaliste parce que j’aime voyager”, entend-t-on parfois de la bouche des étudiants. Or aimer les voyages n’est pas un argument suffisant pour faire ce métier. Contrairement à ce que vit Tintin dans ses “aventures”, le journaliste ne fait pas de tourisme. Il peut – et doit – aller sur un terrain parce qu’il y a un enjeu et une “histoire” à raconter, non pour se faire plaisir.

9. Aimer écrire non plus….

“Pratiquement tout le monde peut écrire. Le fait que vous puissiez écrire ne vous aidera sans doute pas à faire la différence”, note Ezra Klein, le co-fondateur de Vox Media.

En revanche, ce qui peut faire la différence, c’est la capacité à trouver des nouveaux codes narratifs, en faisant des reportages avec son smartphone, en plongeant dans des tableurs remplis de données pour réaliser des enquêtes, en jonglant entre temps réel et long format, en créant des graphiques interactifs, en sachant dialoguer avec l’audience, en collaborant avec des robots de l’information. Voire en créant sa propre start-up d’informations.

10. Prenez l’habitude d’avaler des informations

Quelle est l’actualité du jour? Quel angle proposeriez-vous sur cette actualité? Quel sujet aimeriez-vous couvrir? Ces questions sont celles que les professionnels posent souvent aux étudiants. Une façon de vérifier, notamment lors des entretiens, leur appétence pour les informations.

Pour devenir journaliste, il faut être incollable sur l’actualité et montrer que vous la butinez sous toutes ses formes et provenant d’une multitude de sources (médias traditionnels, pure-players, réseaux sociaux, etc.)  – ne vous contentez pas du traditionnel triptyque trop souvent cité par les étudiants, à savoir France Inter/Rue89/France 2.

11. Acceptez de ne pas être très populaire

“Un journaliste est un homme qui vit d’injures, de caricatures et de calomnies”, a prévenu Delphine de Girardin, citée par Serge July dans son Dictionnaire amoureux du journalisme.

C’est en grande partie vrai, et notamment en ligne, où les journalistes font l’objet d’invectives de toute sorte, qu’ils encouragent parfois d’ailleurs, et du harcèlement des trolls.

Corollaire ou non, les journalistes ne sont pas très aimés, déplore Eric Mettout, le directeur de la rédaction adjoint de L’Express, citant un sondage “assassin” d’Ipsos pour Le Monde et France Inter selon lequel “23% des personnes interrogées font confiance (aux journalistes), 77% se méfient, dont 27% absolument”.

12. Quittez votre déprime

Certes, “le journalisme est une profession inquiète”, comme le constate le sociologue Gérald Bronner lors d’un séminaire à l’Ecole de journalisme de Sciences Po.

Et pour cause, la responsabilité des producteurs de contenus face à des dilemmes complexes est grande: faut-il par exemple parler des rumeurs, pour les démentir, au risque de leur donner de l’écho?

“Il faut vérifier les faits mais aussi se demander en toute honnêteté: quels sont ses a priori narratifs sur l’histoire que l’on s’apprête à couvrir?”, conseille Gérald Bronner.

Pas de raison de déprimer pour autant, puisque l’ère numérique permet d’explorer des voies journalistiques inédites et accélère les carrières.

“Il n’y a jamais eu autant de possibilités de grandir rapidement”, encourage Will Oremus, de Slate.com, citant les exemples de Ben Smith, le rédacteur en chef de Buzzfeed, qui, à 38 ans, vient d’interviewer Barack Obama, ou d’Ezra Klein, de Vox Media, âgé de 30 ans. “Ceux qui sont prêts, ou juste désireux de créer, doivent être jugés sur la valeur qu’ils produisent aujourd’hui plutôt que par les noms listés sur leur CV ou le nombre d’années d’expérience”.

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Alice Antheaume

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«Plus tard, je veux être correspondant international»

  • «Je lis Le Monde, j’écoute France Inter et regarde Le Grand Journal»
  • «Je veux devenir journaliste parce que j’aime écrire»
  • «Je veux être correspondant international»
  • «Je ne sais pas comment s’appelle ce journaliste»
  • «Je me méfie de ce que racontent les médias»

Telles sont les cinq occurrences les plus entendues lors des oraux d’admission à l’Ecole de journalisme de Sciences Po pour le recrutement de la nouvelle promotion.

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Consommation

A la question «quels sont les médias que vous lisez/écoutez/regardez/consultez?», la plupart des candidats répondent, dans l’ordre, l’édito politique de Thomas Legrand sur France Inter, puis C’est dans l’air sur France 5, puis Le Grand Journal sur Canal+, puis «Le Monde en ligne».

Parmi les quelque 110 étudiants admissibles vus lors de ces jurys, une poignée seulement dit consulter lequipe.fr70.586.309 visites en avril 2011 selon l’OJD, un seul déclare lire La Voix du Nord, et trois personnes citent Closer – c’était le jour où le magazine assurait que Carla Bruni-Sarkozy était enceinte. A part ces quelques «extravagances», les candidats, sans doute soucieux de se conformer à l’idéal d’aspirant journaliste qu’ils se sont façonnés, témoignent de consommations de médias qui se ressemblent comme des gouttes d’eau.

Côté lecture, alors que, l’année dernière, Le Quai de Ouistreham (éd. L’Olivier), de Florence Aubenas, était sur toutes les lèvres des candidats, le livre le plus cité cette année est M. le président (éd. Flammarion), de Franz Olivier Giesbert. «Parce que la connivence entre journalistes et politiques me fascine», avancent les étudiants.

Motivation

Il y a un an, déjà, je m’étais étonnée de voir autant de candidats donner les mêmes références et utiliser les mêmes arguments. La phrase que j’ai le plus souvent entendue de la part des étudiants – et c’était déjà le cas l’année dernière – est «je veux être journaliste parce que j’aime écrire» ou bien sa variante «je veux être journaliste parce que je suis curieux». Pas très original dans le cadre d’un oral dont la dynamique est celle d’un concours, pas celle d’un examen.

Car ce que cherche un jury d’une école de journalisme comme celle de Sciences Po, ce sont des candidats ayant des profils variés, des goûts et des usages qui ne soient pas tous les mêmes ET qui soient capables de les justifier – dire «j’aime/je n’aime pas» ne suffit évidemment pas à ce niveau-là. Le but est de composer une promotion avec des étudiants ou scientifiques ou littéraires ou économistes ou ingénieurs, une promotion qui va vivre comme une rédaction pendant deux ans, et dont aucun élément ne doit ressembler à un autre.

Sortez du conformisme, s’il vous plaît, tonne le rapport de jury de l’ENA (Ecole Nationale d’Administration), remarqué par le blog «Il y a une vie après le bac». «Beaucoup de candidats ne semblent pas avoir compris que dans un concours il faut “faire la différence” et non essayer d’avoir la moyenne». Idem aux oraux d’admission de journalisme de Sciences Po, pour lesquels il y a beaucoup d’appelés, peu d’élus.

Certes, il y a des critères de sélection, écrits noir sur blanc sur le site de l’Ecole de journalisme. Pourtant, non, il n’y a pas de profil idéal. Etre un bon candidat pour une école de journalisme n’est pas une question de filière, sinon une question de conciliation de compétences: excellence académique quel que soit le parcours d’origine, très bonnes connaissances de l’actualité, candidats capables de se démarquer par leur personnalité et – ce n’est pas le moindre – démontrant une compréhension du métier de journaliste et de ses évolutions. Fondamental pour être en mesure de S’ADAPTER. A toutes les situations, toutes les urgences, tous les changements économiques.

Projet professionnel

«Plus tard, je veux être correspondant international», constitue un autre des leitmotivs de ces oraux. «Où cela?», interroge le jury. «Je ne sais pas encore où, mais à l’étranger». Une réponse qui manque de précision et qui peut faire douter de la réelle appétence du candidat pour ce métier, tel qu’il se vit au 21e siècle, à l’ère des audiences de l’affaire DSK racontées en temps réel, du fact checking et des live-tweets. Faut-il le rappeler? Contrairement à ce que vit Tintin et ses «aventures», le journaliste ne fait pas de tourisme. L’important, c’est davantage l’événement et ses enjeux que le lieu.

Lorsque le jury demande, pour juger de ce goût pour la marche du monde et dépasser le lieu commun énoncé, «quel journaliste ou reportage vous a marqué ces derniers jours?», rares sont ceux qui esquissent une réponse. Le candidat ne lit-il pas assez la presse? Est-il blasé? Ou bien est-ce ringard de la part d’un jury de demander aux élèves de connaître les noms de «plumes» et autres acteurs du métier auxquels ils se destinent?

Défiance

En fait, poser la question inverse, «quel média vous énerve?», s’avère beaucoup plus productif. C’est dire si la défiance à l’égard des journalistes est toujours vivace. Selon le dernier baromètre de confiance dans les médias, les Français sont 63% à estimer que les journalistes ne sont pas indépendants des pressions des partis politiques et du pouvoir, et 58% d’un même avis en ce qui concerne les pressions financières.

Ce septicisme ne concerne pas que les titres français, mais aussi les médias internationaux, comme en témoigne, toujours lors des oraux d’admission, la réaction d’une poignée d’étudiants, en échange universitaire en Egypte au moment des révolutions arabes.

>> Le dialogue qui va suivre est une retranscription raccourcie mais réelle >>

«Vous vous trouviez au Caire en février 2011? Vous y étiez à un moment historique. Qu’avez-vous vu?
– Les médias ont été nuls. CNN n’arrêtait pas de dire que les manifestations étaient violentes, c’était n’importe quoi.
Vous êtes sûr? Il y a pourtant eu des morts. Avez-vous été dans les manifestations?
– Non.
Alors comment dire qu’il n’y a eu aucune violence? Cela n’a quand même pas été une révolution pacifique, si?
– Certes, mais pas violente à ce point…
Si vous n’avez pas apprécié la couverture par les médias, avez-vous écrit quelques lignes sur ces événements? Sur un blog? Sur Facebook peut-être?
– Non. Je ne me sens pas légitime pour ouvrir un blog.
Avez-vous pris une photo des événements?
– Non. Aucune.»

Est-ce une façon, pour ces étudiants, de marquer leur désapprobation face à la couverture médiatique d’un événément qui a fait le tour du monde? Ou bien cela marque-t-il un désintérêt plus profond pour ce métier? Une chose est sûre: vouloir devenir journaliste sans ressentir le besoin de témoigner de ce qui se déroule sous ses yeux, cela présage a priori d’une erreur d’aiguillage.

Expérimentation

Oui, c’est extrêmement difficile de faire face, seul, du haut de ses parfois 20 ou 21 ans, aux questions incessantes d’un jury composé de trois personnes, rompues à l’exercice, qui ont entre 10 et 40 ans d’expérience. C’est dur de surmonter son trac pour parler de son projet professionnel avec détermination. Dur de répondre en donnant des faits précis sans pouvoir les chercher sur Google et en en tirant une analyse personnelle de surcroît. Bref, dur d’aligner en 45 minutes les critères requis et de témoigner d’une touche d’originalité qui finit de convaincre.

Alors quand le jury voit la passion s’allumer dans les yeux d’un candidat quand celui-ci a ouvert un «blog pour s’entraîner», se présente comme «télévore», sait ce qu’est un «live» ou un «flash», tweete pour «voir ce que cela donne», cite un reportage récent qui l’a bouleversé, prend les «gratuits dans le métro parce que cela (lui) donne un aperçu de l’actualité pour pas cher», connaît le chemin du fer du Point ou du Nouvel Observateur comme sa poche, ainsi que l’écosystème médiatique, des pure-players aux chaînes d’information en continu en passant par les matinales des radios, oui, le jury a envie d’y croire. De croire au potentiel de ce candidat et à sa capacité à – au moins – survivre dans le monde, à la fois en crise et en pleine refonte, du journalisme.

Un conseil, enfin, pour les étudiants qui rêvent d’entrer à l’Ecole de journalisme de Sciences Po: ce qui est écrit ci-dessus n’est pas un manuel. En rencontrant votre jury, n’oubliez pas d’être, avant tout, vous-même.

Alice Antheaume

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