L’état d’esprit du papier

W.I.P. demande à des invités de donner leur point de vue. Ici, Jean-François Fogel, consultant et Professeur associé à Sciences Po, en charge de l’enseignement du numérique à l’école de journalisme.

Sept questions, posées au terme d’une présentation d’Eric Scherer, en disent plus long qu’un discours sur les attentes des journalistes dans les groupes de presse produisant pour l’essentiel sur papier.

On connaît Eric Scherer, chargé de la stratégie à l’Agence France-Presse. Son blog, Mediawatch, scande les tourments de la presse au tournant du numérique. Son ton, lucide et donc préoccupé, est le même quand il parle, comme c’était le cas mercredi 3 février 2010, dans la réunion interne d’une trentaine de collaborateurs d’un groupe de journaux du sud de la France. “Context is king” explique Scherer et son auditoire lui répond avec sept questions, pas une de plus, qui résument les attentes actuelles des troupes de l’imprimé.

1. Résignation: “D’où est-ce qu’on saute?” (La réunion se déroule au troisième étage d’un bâtiment) – on est au creux de la vague et c’est forcément le moment le plus dur, répond l’orateur.

2. Résistance: “Pouvez-vous imaginer qu’il existe un socle dur où le journalisme imprimé pourra résister sans que le numérique emporte tout?” – réponse positive sous condition que le papier offre de la rareté.

3. Défense du statut: “Qu’est-ce qui définit l’identité du journaliste à l’ère de la participation de l’audience: son titre, son comportement, son activité, sa position professionnelle?” – on peut défendre le statut du journaliste, dit Scherer, si on combine l’humilité et la transparence dans la façon de se présenter à l’audience.

4. Quête du modèle économique: “Avez-vous des modèles de sites payants qui ont réussi?” – les niches, notamment économiques (Financial Times, Wall Street Journal), nourrissent une réponse où revient le mot “rareté”.

5. Messianisme technologique: “Dans combien de temps arriveront les tablettes couleur d’encre électronique, à la fois bon marché et peu coûteuses en énergie?” – deux ans, peut-être moins.

6. Foi dans le métier: “Pourra-t-on continuer à financer des enquêtes d’investigation qui sont le savoir-faire de notre métier?” – aux Etats-Unis, ce sont les ONG et les fondations qui fournissent de plus en plus les ressources de ce travail, même le New York Times est devenu leur client.

7. Doute: “Ce que l’on produit est-il toujours nécessaire, pour l’audience jeune notamment?” – oui, à condition de répondre à sa demande et non de lui imposer une offre dont, peut-être, elle ne veut pas.

J.-F.F.

Docent School voor de Journalistiek
Faculteit Communicatie en Journalistiek
Hogeschool Utrecht
gsm 06 21 833 785

Un commentaire pour “L’état d’esprit du papier”

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