Mythe de la mode, la petite robe noire est devenue parfum Guerlain. Pour célébrer son succès, N°3 des ventes en France en 2014, Guerlain la met en scène dans sa boutique des Champs-Elysées. Quelques variations artistiques en complément aux campagnes rondement dessinées par le duo Kuntzel + Deygas.
Célèbre pour ses autoportraits où tel un caméléon il se fond dans le décor de ses oeuvres, Liu Bolin rend hommage à la petite robe noire dans une oeuvre au décor envahi de roses. Pour ce projet de plusieurs jours et au maquillage complexe, Liu Bolin a convaincu son épouse de participer à l’aventure où dans le mur de roses figure aussi, démultiplié, l’iconique flacon au bouchon coeur.
Rendant hommage au concept de robe noir, Jean-Luc Monterosso (directeur de la MEP) a choisi une sélection de photos dont des oeuvres de Diane Arbus, Henri Cartier Bresson, Helmut Newton, Irving Penn, David Seidner et Jeanloup Sieff. Les prêtres en soutane noire de Mario Giacomelli permettent de sortir du cliché mode et d’ajouter de l’humour à l’exposition.
Les deux oeuvres de William Klein accompagnent aussi avec fantaisie l’histoire de la petite robe noire, incontournable pièce glamour du vestiaire féminin.
Enfin un travail mené avec l’école des Gobelins donne à voir des projets d’élèves sur le thème.
C Liu Bolin Galerie Paris-Beijing
C Archivio Mario Giacomelli
C William Klein
Visionnaire d’une mode souvent résolument avant-gardiste, Iris van Herpen réussit également l’exercice simplifié du prêt-à-porter. Sa collection baigne dans une gamme de couleurs minérales et futuristes (vif argent).
L’inspiration vient de l’idée de « terraforming », modifiant la biosphère d’une autre planète pour la faire ressembler à la terre et la rendre viable. Légères, les matières se meuvent sur le corps, se posent en transparence à l’apparence parfois liquide ou métallique. Au centre de la géométrie figure le cercle, comme notre terre, ronde, sphérique. Cette forme se retrouve autant dans la silhouette que dans le travail de coupe ou de façon plus mystique avec une forme de mandala.
Fils métalliques, tissage en 3D, Iris van Herpen oeuvre en compagnie d’artistes, architectes (Aleksandra Gaca, Philip Beesley) ou encore, pour les chaussures de cuir découpé au laser et effet cristal, en collaboration avec Noritaka Tatehana.
Effets gaufrés, reflets irisés, plissés éventail, excroissances, protubérances, mouvances aquatiques, silicone, découpes au laser… Les fascinantes créations d’une exploratrice de mode.
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Volontaire, conquérante, la femme de Véronique Branquinho se dresse en noir majeur, drapée dans capes et longs manteaux d’hiver en laine, en cuir.
Sous une apparente austérité pointent des détails de lingerie, dentelle noire en bustier, simple bandeau. Chemisiers entre ombre et lumière, voile sur la peau.
Longues jupes plissées. Autour du cou, un noeud.
Le tweed du tailleur bourgeois est revisité, bousculé. Travaillé en patchwork, il est mixé à d’autres pièces du vestiaire, posé en bordures, jupes à godets.
La maille se tient à carreaux. Les pulls partent en vacances à la neige, rétro.
Et s’écrit un poème d’Emily Brontë : « That wind I used to hear it sweeling With joy divinely deep You might have seen my hot tears welling But rapture made me weep I used to love on winter nights. » Bientôt l’hiver… hurle le vent, poésie du froid.
Effet Midas, la feuille d’or se pose, craquelle, caresse et magnifie la collection de Lutz.
De vrais vêtements d’hiver aux silhouettes confortables avec de superbes manteaux. Jupe vif argent, métal hurlant.
Des capes,effet poncho, bomber…
Des peaux dans un bain d’or. De la laine. L’épingle de sûreté dorée se met en rang et donne ses galons au bleu marine un zeste militaire.
Du noir, de l’ivoire, un bleu vif et un joli coquelicot.
Le col se dézippe en rond, géométrie.
Duo de maille, gris ou noir et blanc cassé.
Sans manche, la robe joue les Gilda avec gants de peau. Sequins dorés.
Une belle collection, reflets dans une feuille d’or.
Photos Etienne Tordoir
lire le billetBeige de comptoir. La mode selon Chanel s’est installée dans la gigantesque « Brasserie Gabrielle » créée pour l’événement dans la nef du Grand Palais. Café Society cette saison pour jeunes femmes en fleurs, cheveux retenus et bandeaux parfois à la Beauvoir, « chanelisées » de la tête au pied.
Du tweed en veux-tu en voilà mais, pas toujours dans le droit-fil, avec bandes en obliques, ajouts d’éléments. En vedette est revisité l’escarpin beige à bout noir ; talon carré et bride (« slingback »).
Des couleurs classiques et chic : gris, noir, blanc, une pointe de rouge. Quelques matières plus contemporaines dont le vinyle à la noire brillance. Une envolée de “plumes”, Papagena.
Une collection foisonnante avec, en majeur, la signature maison par Karl Lagerfeld. Grands gilets, pièces confortables pour hiberner au chaud et poncho.
Différentes longueurs en option autour du genou. Robes manteaux, gilets sans manches pour citadine classique, so Chanel.
C Olivier Saillant
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La mode belge une fois, c’est aussi la fantaisie, l’humour, la belle humeur. Jean-Paul Lespagnard en est le digne étendard. Le créateur raconte des histoires sur lesquelles il brode ses collections. Pour l’hiver ? Il était une fois une mennonite (il fallait y penser !) qui va dans le Monterey pour vendre le fromage produit par sa famille. Là, elle rencontre un gang de Cholombianos avec lesquels elle crée une mafia de « cheese dealer » ! Au final, la campagne fusionne avec la ville dans des imprimés joyeux et colorés. La vivacité a pris le pas sur l’austérité (peut-être dans les chaussures un peu monacales). Les télescopages d’imprimés sont particulièrement réussis.
Des formes confortables, cocons, enveloppes, couvertures, parkas.
Sensation de drapés. Des filles en sandales et au look sourcils épais, très Frida Kahlo. Une présentation en plein air (Musée Nissim de Camondo) intelligemment orchestrée pour que chacun puisse bien voir et photographier dans un décor quasi champêtre, même si les photos officielles ont été prises dans un garage avec une Jaguar XE « Acid Green ». Rat des villes et rat des champs, une mode d’énergie et bonne humeur.
Feu vert.
Gonflée, la collection de Comme des garçons, qui toujours pousse le bouchon de la mode au loin, s’envole cette saison vers de nouvelles sphères stratosphériques. Le volume joue la démesure, l’emphase, l’exacerbation des formes.
Hors normes, les vêtements développent une accumulation d’enchevêtrements. Le corps disparaît, englouti, enseveli dans des couches d’étoffes. Protubérances, vêtement cage, fête à noeud-noeud (sic).
Un blanc immaculé nimbe de nouvelles mariées. Mais, pour la mise à nu par les célibataires, la tâche sera rude.
Un noir profond enveloppe le chagrin des veuves. Visage nappé de dentelle noire et corps effacé par le volume de la construction et l’accumulation des tissus.
Allure liturgique, procession, mais aussi paquet de linge en partance pour la buanderie!
Intrigante, baroque, hors du temps, hors mode, une extraordinaire collection.
P.S. Portable ? Quel horrible mot, la mode peut ne pas être un vêtement classique et constituer un exceptionnel art du rêve. C’est son rôle le plus beau. NON, la mode n’est pas morte.
lire le billetHis tailor is chic. Le défilé débute par une silhouette très british. Manteau brodé, pantalon court et bottines. Le vert sombre, bouteille, donne une allure un peu militaire amplifiée par les motifs camouflage (combinaison) et par l’intitulé même de la collection : Tactical Formation.
Manteau croisé, pans ouverts sur les côtés.
Avec le passage d’un bleu vif, le courant passe, vêtement électrique.
Les broderies se posent sinueuses en arabesques et entrelacs et semble s’esquisser un nouveau japonisme dans le droit fil des représentations de brouillard (kasumi) en peinture.
Un zeste de non fini, l’esthétique ombrageuse de l’« accident » plane sur la magnifique collection d’Haider Ackermann. Échappé d’un classicisme bourgeois qui pourrait lui coller à la fibre, le tweed tisse de nouvelles contrées.
S’invitent des éclats brillants tandis que le style essaye un nouveau twist. S’ajoutent des raccommodages, surpiqûres, réparations, sutures façon couture médicale ; broderies délicieusement destroy.
Le vêtement semble pouvoir enchaîner plusieurs vies. Sur un podium à décor géométrique noir blanc op, les modèles ne se tiennent pas à carreaux.
Un poil d’imprimé fauve, blanc tacheté de noir, zébrures marron.
Dans le couvent des Cordeliers, le temps s’est suspendu.
Musique classique en fugue pour une collection où la partition se joue en blanc et noir. Pliage savant, pop up de formes pour floraison de filles fleurs, écolières pas sages aux membres tatoués de graffitis.
Le bibi se pose, pour mieux fricoter. Losanges, géométrie complexe, lanterne magique,… Le tissu s’anime de reflets en équilibre savant.
Écharpes en accordéon pour serpenter autour du cou.
Coiffes hiératiques pour nouvelles princesses espagnoles, Ménines du temps présent. Chapeau abat-jour et femme lampion avec vêtements en volume, à la structure enveloppante. Esquisse d’origami.
La collection s’impose, variation sur deux couleurs martelées comme sur les touches d’un piano. Incongrue, une note rouge surgit ; ondulant en chenille, elle casse le rythme.
Et s’ajoute le gris, souris. Monolithique, hypnotique et absolument Junya.