Et la lumière fut, la fée électricité s’est penchée sur la collection d’Iris van Herpen. Toujours étonnante, la créatrice mérite sans conteste une place de membre invité dans le calendrier de la couture. Son travail est techniquement remarquable et propulse la couture dans une sphère avant-gardiste (elle collabore pour la 3D avec des artistes, architectes : Julia Koerner, Neri Oxman…).
Dans la pénombre de la salle (lambris dorés de l’Hôtel Intercontinental), une silhouette est traversée de courants électriques, des stimuli lumineux animent le corps arborescent traversé d’éclairs. Le corps irradie et le son grésille. Une performance de Carlos van Camp. Voltage !
Si les premiers modèles donnent l’impression d’une silhouette un peu plus classique ; dans le travail minutieux se retrouve la patte d’Iris van Herpen, dans les découpes du cuir blanc.
Des formes en volumes, jeux d’origami dans des matériaux techniques, métal, plastique… Des silhouettes spectaculaires aux allures de hérisson, de coquillage, d’oursin… aux protubérances multiples, volutes, excroissances, formes organiques, pour alien d’un autre monde, mais créatures couture.
Un impressionnant travail pour des pièces spectaculaires, entre art et couture. Une vraie vision de la mode, une nouvelle voie, à suivre, absolument.
Magistral et poétique.
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Si Maurizio Galante est désormais très souvent associé au design avec son complice Tal Lancman, il présente aussi, chaque année, une délicieuse collection couture. Ses vêtements semblent parfois ne tenir qu’à un fil qui assemble les différents éléments de son puzzle. Des constructions étonnantes, un travail d’un raffinement incroyable, des gammes de couleurs délicates… La fusion entre précieuses étoffes et matériaux technologiques est parfaite (superbe étole en « plexiglas »). Superposition d’éléments géométriques, carrés de tissu mis en abyme, superposés en feuilleté, strates, volutes, tissus ajourés, plis (réinvention du Fortuny pour les manteaux sans col), tressage…
Infinie poésie des pièces les plus spectaculaires. Cette saison, quelques silhouettes accentuaient la féminité avec une séduction presque rock de pantalons très ajustés. Parmi les mannequins, sans nostalgie, trois « grandes » du passé : Simonetta Gianfelici, Violetta Sanchez et Amalia Verelli.
Un final autour de tissus japonais retravaillés, soie effilochée, tissus à l’envers, mais ajouts de strass, de brillants… bel hommage au soleil levant.
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Exception française, la haute couture accueille cette saison dans son cercle deux nouveaux membres : Alexis Mabille et Maison Martin Margiela (la liste est établie chaque année par le Ministre en charge de l’industrie sur suggestion d’une commission de « classement couture »). Parmi les quatorze noms qui peuvent se prévaloir de cette appellation (juridiquement protégée) figurent trois grands noms : Dior, Chanel et Gaultier, marquant les temps forts des trois jours de présentation de janvier.
Parmi les membres correspondants défilent cette saison Elie Saab, Giorgio Armani et Valentino.
Onze membres ont été invités cette saison dont les talentueuses Iris Van Herpen et Yiqing Yin et le très original duo On aura tout vu. Se remarque l’arrivée d’Hervé L. Leroux et le retour de Lefranc Ferrant.
En marge de la mode, les présentations se complètent judicieusement avec la joaillerie : Boucheron, Chanel, Chaumet, Dior, Mellerio dits Meller, Van Cleef & Arpels.
De nombreux événements off viennent aussi s’agréger de façon parfois pittoresque et se casent entre deux défilés. L’effeuillage de Zahia, le discours poétique d’Olivier Saillard, les trucs en plumes de Serkan Kura sont parmi les séductions de la saison.
Au final, un panorama de mode très éclectique où la création vogue entre tradition et avant-garde, mais aussi entre perfection et bricolage. Le travail parfois incroyable (broderies, assemblages, dentelles, plumes…) de toutes ces « petites mains » confirmées ou débutantes permet à la mode de s’exprimer avec plus de créativité que lors du prêt-à-porter, devenu très (trop !) « produit ».
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Créateur de mode au parcours on ne peut plus atypique, Naco Paris a pourtant passé le cap de dix ans d’existence. En septembre 2012, il a partagé son univers d’humour, de création avec de jeunes Mexicains d’une école de mode (Institut supérieur d’études de mode IES Moda Casa de Francia). En résulte aujourd’hui un livre, un catalogue (truffé de petits ajouts amusants, comme des tirages de photos, fac-similés de programme de lutte lucha libre (catch mexicain), tickets de musées…). Le tout finit dans un plastique noir (très « sac poubelle » en plus fin) et farci de confettis.
Ce Melting Pot Édition N°1 signe en photos la fashion fusion entre la créativité de Naco, le travail des étudiants et le patrimoine haut en couleurs du Mexique, de son folklore, son artisanat. Des silhouettes à la Frida Kahlo, une confusion des genres où l’on ne sait si elle est lui ou l’inverse. Travestissement, grimage sont de la partie. Le fantôme de Frida Kahlo rencontre une Hello Kitty très kawai. Des crêtes d’Indiens se dessinent en plumes de plastique twistées par des voilettes rétro. Des tissus de couvertures se jettent en ponchos qui ironisent gentiment sur les logos de la mode (Lacoste, Dolce & Gabbana…). Robes en sacs poubelle, animaux brodés, motifs au pochoir, masques de lutte, superposition de tongs ultracompensés…
Roi de la débrouille et de la récup, Naco a trouvé au Mexique son royaume en couleurs où l’esprit de la madone se mâtine de Barbie pink.
Une édition « expérimentale » de 150 exemplaires numérotés et signés, présentée au Who’s Next Paris (19-22 janvier).
Sinon liste des points de vente : www.nacoparis-shop.com
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Jour J des soldes, il faut communiquer ! La marque espagnole Desigual a choisi l’originalité en lançant la campagne « Entrez en sous-vêtements, sortez habillé ». Une opération destinée aux 100 premières personnes entrant dans la boutique en petite tenue pour en ressortir avec un haut et un bas offerts. Mais, pour éviter l’émeute et ses débordements, l’opération fut rondement menée. Inscription orchestrée via facebook et les 100 premiers ont retiré un bracelet pour leur participation officielle à la Seminaked party. Rendez-vous dans un bus place de la Concorde pour le déshabillage (disco bus avec DJ) et arrivée devant la boutique du Bd des Capucines pour l’heure d’ouverture…
Une façon astucieuse de communiquer pour une enseigne qui fêtera ses 30 ans en 2014.
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Jour des rois (mages), le 6 janvier apporte dans ses cadeaux parfumés l’encens et la myrrhe.
Si l’encens figure dans la Bible, il fut beaucoup associé à de nombreux cultes païens avant d’être adopté par la chrétienté. C’est à partir de ce souvenir d’église, en compagnie de sa grand-mère, que Giorgio Armani fit créer Bois d’encens (Armani privé). Composition de Michel Almairac, Bois d’encens s’entoure d’épices, de poivre et de vétiver. Chez Goutal, parmi la trilogie des orientalistes figure Encens flamboyant avec farandole d’épices, poivre, baie rose, cardamome, muscade sur encens, fir balsam, lentisque.
De l’église à la séduction selon Baudelaire :
« Sur ta chair, le parfum rôde
Comme autour d’un encensoir »
Deuxième cadeau des rois mages, la myrrhe, gomme résine odoriférante s’associe également à la séduction dans le Livre des Proverbes :
« J’ai parfumé ma couche
De myrrhe, d’aloès et de cinnamone
Viens, enivrons-nous d’amour jusqu’au matin, livrons-nous aux délices de la volupté ».
Chez Goutal, autre orientaliste (le troisième est l’Ambre fétiche), Myrrhe ardente est un boisé épicé, mais adouci, langoureux : fève tonka, vanille, benjoin. La Myrrhe de Lutens efface vite la note hespéridée de la mandarine avant de basculer dans l’opulence orientale autour de la myrhe, magnifique.
Un petit dernier chez Guerlain : Myrrhe et délires. Une composition de Thierry Wasser, des notes fraîches sur un coeur floral rose, iris et fond encens, patchouli et réglisse.
Parmi les cadeaux des rois mages, l’or serait-il symbole de royauté, la divinité pour l’encens et l’humanité pour la myrrhe ? Qu’importe, en parfumerie : deux joyaux : myrrhe et encens.
Dans mon calendrier, le choix fut réalisé en toute subjectivité. Il ne s’agit pas forcément de « grands » parfums, de succès incontournables, mais de fragrances qui ont marqué ma route.
Si j’avais continué, j‘aurais sans doute ajouté Encre noire (Lalique), L’ombre dans l’eau (Diptyque), Herba Fresca, Guet-apens (Guerlain), Cuir de Russie, Egoïste (Chanel) ; L’eau du fier (Goutal), King Kong, Kenzopower (Kenzo), l’Eau d’Ikar (Sisley), Untitled (Martin Margiela), Alien (Mugler), Helmut Lang, Iris (Prada), L’Eau d’Issey, Ombre rose (Brosseau), Le Male (Jean Paul Gaultier), Jean Charles de Castalbajac, Cuir (Lancôme), Bel ami, Eau de gentiane blanche (Hermès)… et sûrement d’autres Comme des garçons, d’autres Frédéric Malle, d’autres Lutens… Et puis des trésors, créations libres de parfumeurs (comme les compositions senties pendant les smell dating d’IFF)…
Si j’ajoute les différents commentaires et « like » entre slate et facebook. « Mes » parfums les plus plébiscités ont été Aromatics Elixir, Opium, Comme des garçons, Eau noire (Dior) et M/Mink (Byredo).
Merci également à dix rois mages qui, l‘année dernière, ont composé chacun un parfum pour une chanson de Lewis Furey avec diffusion au Théâtre du Rond Point (avec la complicité de Akram Aschi, Shams Conseil).
Dix nez :
Hutler’s tango /Dominique Ropion
Vole pigeon vole / Anne Flipo
Mirage Geisho / Francis Kurkdjian
He says love me / Isabelle Doyen
Fire / Olivier Polge
Is she as beautifu as me / Antoine Lie
She says move on / Guillaume Flavigny
Litte red dress / Antoine Maisondieu
Dans la nuit / Aurélien Guichard
Dust / Mathilde Laurent
Et un petit dernier pour la route, un nom charmant, un flacon de Patrick Veillet, un parfum de Dominique Ropion (fraîcheur mandarine, coeur fleur d’oranger, amande sur fond ambré boisé) et une charmante campagne de pub : Catch Me (Cacharel). Yes I can.
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Parmi mes trente-cinq parfums « préférés » ne figurait pas une rose.
J’avoue, j’assume; la rose, je ne l’aime pas. Je la trouve banale, cadeau passe-partout, fleur de supermarché… alors que la nature recèle des trésors que j’apprécie infiniment : iris, violette et évidemment la vénéneuse tubéreuse. La rose m’ennuie, elle s’offre par douzaines, sans imagination.
Mais, vue dans les champs à Grasse, la centifolia ou rose de mai a, un situ, je le reconnais, un charme particulier. Un « bain » dans les cuves de pétales, une fois les fleurs libérées de leur parfum demeure un inoubliable souvenir (Chez Mul pour Chanel).
En parfums, je ne suis pas amateur de floraux, j’aime les orientaux, les cuirs. En littérature, la pauvre mignonne de Ronsard a été usée jusqu’à la corde, celle du Petit prince est arrogante ; des autres il dit : « Vous êtes belles, mais vous êtes vides ». Je préfère Gertrude Stein avec Rose is a rose is a rose… sans oublier un détour par l’art et le grand Marcel (Duchamp) pour qui toujours Rrose Sélavy. Mais ce sont les roses d’Alice au pays des merveilles qui m’amusent le plus : « Ma foi, voyez-vous, mam’selle, pour dire la vérité vraie, ce rosier là, c’aurait dû être un rosier rouge, et nous en avons planté un blanc par erreur ; et si la reine venait à s’en apercevoir, on aurait tous la tête coupée, voyez-vous. »
Considérée en parfumerie comme une des deux reines avec le jasmin, la rose est surtout utilisée en deux variétés : damascena (bulgare) ou centifolia. Si de nombreux parfums à la rose ont été composés, un seul me plait vraiment : Une rose, une création d’Edouard Fléchier (Poison !!!!) éditée chez Frédéric Malle. Dans son histoire de composition est mentionné un accord de truffe, j’avoue que je ne sens pas réellement la truffe (pas née dans une famille dressée à débusquer l’or noir), mais c’est sans doute cet accord qui twiste la rose qui en perd toute mièvrerie tout en demeurant parfaitement identifiable. Pour Frédéric Malle : « l’idée était de profiter de l’aspect mi-terreux, mi-animal de la truffe pour renforcer le côté « jardin » de la fleur, créant par là même un lien entre cette odeur de pétale et celle de la peau. » Absolue de rose turque, géranium, miel et lie de vin ajoutent au côté très nature de la rose des senteurs de terre.
Une rose est « ma » rose.
Naissance : 2003
Papa : Edouard Fléchier
Famille : Soliflore
Genre : Féminin
Le parfum de Nolwenn D.L. et d’Irina V. (dans une interview, prête à séduire le cochon de George Clooney avec sa « rose truffe »)
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C’est par les parfums Annick Goutal que j’ai découvert Isabelle Doyen (à l’époque de la magnifique Eau du fier ?). Avec le temps, j’ai aussi découvert des facettes hautement fantaisistes de sa personnalité, alliées à une rigueur dans le travail qu’apprécient certainement ses élèves. Un jour, elle m’a fait rencontrer son ami Michael H. Shamberg qui développe son projet Turttle et pour qui elle a composé Turtle Vetiver. Un autre jour, elle m’envoyé des échantillons (LesNez édités en Suisse par René Schifferle) un peu bizarres qui avaient tout pour me plaire et surtout l’un d’eux supposé sentir « rien ». Intrigant, L’Antimatière a été imaginé en référence à l’Aleph de Borges, de la question de l’infini, elle a divagué vers le un pour le tout. Borges écrit : « « les mystiques, dans une situation analogue, prodiguent les emblèmes : pour exprimer la divinité, un Perse parle d’un oiseau qui en une certaine façon est tous les oiseaux. » De l’un au tout (ou l’inverse ?), la composition est simple, sans tête, sans coeur, mais avec des notes de fond que l’on sent ou pas (anosmie à certains muscs ?). Isabelle Doyen a privilégié des muscs (« des notes comme dans le vrai musc »), ambre gris, mousse de chêne (lichen). Au final, un parfum indéfinissable, un côté propre comme un nuage de rêve, mais avec de la persistance. Entre transparence et l’odeur du rien, une « trace », un parfum qui englobe « le tout ». Minimaliste en diable.
Bizarre, j’ai dit bizarre.
Naissance : 2006
Maman : Isabelle Doyen
Famille : ???
Genre : Anti
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Le nom m’enchante, le lieu fleure l’Italie, vogue en Méditerranée. Près de Capri, une petite île ; un imprimé Pucci ; un premier parfum chypré en 1966 et, en 2007, dans le ciel de la parfumerie, un magnifique OVNI avec un flacon galet quasi psychédélique. Dans l’esprit des mille fleurs italiens…, sulfure, champignon hallucinogène traversé de plages vives de couleurs (et cerne noir, so Pucci), le flacon est signé Helle Damkjaer.
Enchanteur également, le parfum dessine une promenade en Méditerranée où la tête se rafraîchit de bergamote de Calabre, une douceur amande amère, amaretto, sur coeur floral de jasmin sambac, narcisse, vert galbanum et fond iris de Florence, accord boisé vétiver, patchouli. Et un soupçon d’esprit marin avec une note iodée. Une composition de Nathalie Gracia-Cetto et Marie-Aude Bluche avec François Demachy.
Un parfum de farniente, vacances à la Riviera, habillée en Pucci….
Et un sacré flacon ! De quoi (re)donner ses lettres de noblesse au « plastique ».
Naissance : 2007
Mamans : Nathalie Gracia-Cetto et Marie-Aude Bluche
Famille : Floral chypré ?
Genre : Féminin
Le 3 janvier
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Si je découvris l’incroyable Poison de Dior au Japon, c’est la version Hypnotik qui me conquit. Création d’Annick Ménardo, le somptueux oriental tout en douceur, en rondeur se blottit dans le flacon pomme tentateur du Poison originel, mais dans un verre teinté de rouge sombre, vénéneux. La nouvelle Eve d’Hypnotik Poison à ses débuts était Milla Jovovich. Dans un ascenseur, la mannequin-actrice se révélait féline, diablesse et très sensuelle avec juste quelques gouttes de ce nouveau Poison que porte aujourd’hui Mélanie Laurent au Louvre.
J’avoue être sensible aux créations d’Annick Ménardo (dans la filiation de Michel Almairac !) : Bois d’argent (Dior), Lolita Lempicka, Kenzo Vintage… sans oublier pour Yves Rocher, Moment de bonheur…
Le Poison ? Hypnotik, envoûtant. Une saveur amande amère, mais douce, chaude sur un coeur floral de jasmin sambac et un fond vanillé doux et suave. Une gourmandise en douceur, en volupté (mais tellement loin des gourmands collants qu’inflige la parfumerie d’aujourd’hui). Autour de cette dominante vanille et amande, des notes coco, santal, bois de rose, jasmin, tubéreuse, carvi…
Un parfum magnifique.
Naissance : 1998
Maman : Annick Ménardo
Famille : Oriental
Genre : Féminin
Le parfum d’Elsa W
Le 2 janvier
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