Très belle collection Jean Paul Gaultier pour la couture, à la fois chic et élégante et surtout d’une perfection dans les coupes. S’ajoute une petite touche de fantaisie parfaitement maîtrisée et accentuée par le choix de crêtes punks en guise de coiffures.
Citadine, la collection parcourt les rues de Paris et de Londres, alternant les références populaires d’une capitale canaille et la fantaisie rebelle du swinging London. Trench cancan lance le bal musette avec le grand classique Gaultier revisité en soie laquée. Le fantôme de Toulouse Lautrec et de ses modèles s’affiche : Valentin le désossé, Le Chat noir, la Goulue… De l’autre côté de la Manche Londres est moins Pop que Punk ; plus Sex Pistols que Carnaby Street. Punk canaille, Punk is not dead, et même un peu Vicious sont les modèles de noir corbeau vêtus. Le masculin épouse le féminin dans des silhouettes où l’un est l’autre. Vestes parfaites aux allures de dandy, queues de pie, robes près du corps, sans oublier un clin d’oeil à l’emblématique rayure marine dans un élégant fourreau.
Nini patte en l’air lève la jambe et se dévoile une doublure constellation d’un amusant kaléidoscope de jambes.
Membre correspondant de la haute couture, Elie Saab a aussi sa maison installée à Paris. Cette saison (printemps été) sa collection est dédiée à une femme entre force de caractère et fragilité. Le travail sur la dentelle est précieux, minutieux dans une palette de tons raffinée et sobre avec un goût prononcé pour le rose thé, le beige rosé, des teintes chair, proches d’une peau aux couleurs de lingerie.
Organza, mousselines de soie, tulles, dentelles incarnent la tradition haute couture des belles matières. Les tailles, fines, se ceinturent de rubans qui s’attachent d’un noeud dans le dos. Jeux de transparences, découpes. Du court et du long, modèles privilégiés des red carpet.
Livia Stoianova et Yassen Samouilov, le pétillant duo d’On aura tout vu ajoute toujours une joyeuse note de fantaisie aux présentations de la haute couture où ils occupent une place à part. Chaque saison, ils élisent un thème qui les emportent vers des rivages de fantaisie, de délires improbables, d’humour surréaliste. Un oiseau imaginaire semble les avoir piqués d’une belle plume. En veux-tu en voila, chaque modèle a son truc en plumes digne d’une descente aux Folies-Bergère ou au Moulin Rouge (le duo signe des accessoires). Des coiffes délirantes, des capes en fourrures, des patchworks de matières, un éléphant ailé, de joyeux monstres, armure de plumes… Les inspirations aviaires se traduisent en dentelles, strass… et se portent avec des chaussures ailées pour Hermès chevauchant Pégase.
Le trompe-l’oeil imprime en paillettes un motif de plumes sur une veste.
En guest stars, quelques vrais oiseaux passent. Le plus spectaculaire ? Un rêve pour folle de mode : un majestueux nid d’oiseau habillé d’oeufs strassé so Fabergé. Lady en sera sûrement Gaga.
Chaque saison Frank Sorbier est au rendez-vous de la couture, chaque saison vagabonde son imagination tandis que les petites mains cousent avec adresse et précision. Ses nouvelles Short Stories pour l’été sont éclectiques. Broken couture ouvre le bal de la collection avec un bustier en papier mâché customisé d’écrits à l’encre noire, street style chic. Thème coloré, Manhattan enchante de modèles magnifiquement peints à la main (Isabelle Tartière). Revisité, le fantôme de l’esprit de Basquiat plane, porté sur des académiques noirs rehaussés de motifs quasi ethniques. Sur les rives de l’Hudson, les graffitis habillent la rue.
The French Touch porte la signature du couturier avec ses modèles en soie compressée. Shamanic Songs, en transe, emporte sur la route de nouvelles indiennes aux costumes de peaux frangés.
Avec Fayoum et le souvenir des étonnants portraits des Chrétiens d’Egypte, la mode se dessine dans des peintures délavées, soies surteintes et repeintes à la main.
Blanc, le final renoue avec la mariée avec cape et fourreau en guipure de Solstiss.
Inconditionnelle de Maurizio Galante suis et resterai (une note a été récemment consacrée à sa biographie dans ce blog) ; ses défilés toujours j’admire. Particulièrement réussie, la dernière présentation couture combinait un maquillage corporel haut en couleurs couvrant jambes et visages de façon quasi tribale tandis que les improbables coiffures se terminaient en imposants bijoux d’oreilles.
Minutieusement travaillées, ses vestes construisent des plis, des volutes dans des gammes de couleurs chatoyantes. Superpositions de carrés de tissus, pliages, plissages, assemblages, le travail est incroyable. Une vraie couture hors des codes traditionnels, hors normes, hors des sentiers battus de la paillette bon teint. Vestes enveloppes, cocons précieux, Papagena d’Amazonie, chaussures scoubidous, mille-feuilles d’organza, coquillages de soie, virtuosité baroque.
Pour se consoler de ne pas s‘envelopper dans ses sublimes modèles, Maurizio Galante vient d’imaginer pour la poste un timbre, petit coeur à customiser en couleurs.
lire le billetPoétesse du minimalisme de la sobriété élégante, Adeline André continue son histoire très personnelle où s’imposent notamment la robe jambe libre qui s’échappe du tissu avec audace. Emblématique, la veste 3E aux trois emmanchures se construit autour de trois espaces pour les bras et enveloppe ensuite le buste; elle se porte aussi bien au masculin qu’au féminin. Le dernier défilé mixe les genres. Un premier modèle au féminin (robes simples, souvent dans le biais, fluides, près du corps) est suivi d’un passage masculin avec une veste 3E ; la veste se retourne et se pose au féminin. Masculin–féminin, Adeline André revisite ses classiques.
lire le billetCréateur d’origine brésilienne, Gustavo Lins est depuis cette saison membre de la haute couture à Paris. Après des études d’architecture, il a choisi la mode. Construit, poétique, son travail est souvent inspiré du Japon et de la distance qui s’écrit entre le corps et son enveloppe. Une rigueur dans la construction, un minutieux travail de coupe, des effets d’asymétrie dessinent un style personnel. Cette saison une palette sobre de gris souris, taupe, ardoise, bleu sombre, noir … dessine les nuages d’orage qu’observe une Indienne nue (l’inspiration fil rouge du défilé !). Une collection écho à sa très belle présentation pour hommes (pour beaucoup de journalistes une des meilleures) avec ses grands manteaux amples et réversibles dans lesquels on (je) rêve de s(m)’envelopper l’hiver prochain. Une couture où pinces et coutures s’estompent au profit d’un travail sur le plan (2D) et la masse de tissu. Carré et rectangle sont les maîtres du jeu de coupe. Basculés, les volumes donnent de l’ampleur et une impression de confort, doux cocon ouaté aux cols en écharpes et manches démesurément longues. Une très belle collection.
Après quelques années chez Jean-Louis Scherrer Stéphane Rolland ouvre sa maison de couture en 2007. Depuis ses débuts il a opté pour une couture avec des accents de modernité qui se traduisent par un travail sur la construction et la géométrie plus que dans la surcharge d’éléments. Des formes amples, des découpes géométriques construites et du flou drapé, enroulé. Des couleurs franches : blanc, orange, beige… Autour des tenues, quelques détails travaillés : cuir, paillettes (modérément) et bijoux volumineux. Effets de géométrie variable, tourbillon de plissés, encolures bénitier, effets de cape et parfois une pointe d’asymétrie. Le blanc immaculé est juste souligné d’or tandis que le noir s’exprime en découpes géométriques.
Membre invité, Alexandre Vauthier (formé chez Mugler et Gaultier) demeure fidèle aux années 80 et aux silhouettes construites et épaulées. Des tailleurs, mais surtout des robes où le flou s’organise en drapés. Jeux de décolletés, blouses vaporeuses, effets de transparence en découpes géométriques. Un bel imprimé avec jeu de carreaux et de perspective se dessine un peu dans l’esprit d’Esscher.
Pour le soir brillent lamé et paillettes (petite cape dorée).
Des coupes parfois asymétriques osent des ouvertures sur le corps, la jambe.
Au quotidien Alexandre Vauthier est l’invité des Trois Suisses avec notamment une veste de smoking, une ceinture or et une robe rouge structurée.
lire le billetMagnifique ! La dernière collection haute couture de John Galliano pour Christian Dior opère une synthèse réussie entre nostalgie et créativité. Des souvenirs de la silhouette historique de la maison Dior (la jupe démesurée du tailleur bar) s’intègrent au superbe travail sur les volumes savamment modulés par le créateur. La taille de guêpe est soulignée d’une ceinture en croco, presque brute. Une subtile palette de couleurs orchestre dégradés et camaïeux de tons dans de savants bains de couleurs voilés de tulles. Du rouge au noir, le manteau de soie enveloppe avec grâce la silhouette.
La collection rend hommage à René Gruau par l’écho au dessin, aux dégradés de couleurs, effets de gouaches, lavis, jeu de clair-obscur. La mine de plomb, avec les traits acérés du dessinateur, se traduit dans des coupes parfaites, géométriques, en volumes. Impressions fauves ; riche palette : sienne, gris, rouge, mauve…, dégradé de plumes blanches et beiges.
Cerise sur les coiffures rétro : de petits bibis de Stephen Jones en tissus ou plumes. Maquillage et coiffures ajoutent à l’unité : bouche rouge vinyle très sexy et ondulations (capillaires) de stars hollywoodiennes. Un exquis travail de couture et une création en majesté.