Putain, Kenny, t’en va pas !

KennyP

On a tant parlé de la fin de Breaking Bad, tant raillé celle de Dexter, tant redouté celle de Treme, qu’on en viendrait presque à oublier celle d’une des meilleures comédies de ces dernières saisons, et celle d’un des antihéros comiques les plus forts des années 2010 : le héros de Eastbound & Down, Kenny Powers, ou Kenny Fucking Powers pour les intimes. Mort et ressuscité, cette figure christique (c’est lui qui le dit) aura porté la comédie à des sommets de beaufitude, de vulgarité, de machisme, de bêtise, de stylisme capillaire… et de subtilité, durant quatre saisons inoubliables de connerie et bouleversantes d’humanité. Parce qu’il est le plus grand, le plus fort, le plus beau, le plus sexy, parce que le monde entier devrait lui ressembler, parce qu’après Kenny Fucking Powers, ça ne servira plus à rien de regarder la télé (c’est lui qui le dit), mon putain d’hommage, en version non censurée.

Kenny Powers, avant d’être un personnage d’un rare complexité (si, si) était surtout une icône, une création instantanément culte, un truc « jubilatoire », comme on dit quand on ne sait plus quel mot employer pour dire son plaisir. Un putain de gros panard, comme il dirait certainement. Un défouloir comique, un antihéros, incarnation du plus gras de l’Amérique qui fait un doigt bien haut levé au plus gras de l’Amérique. Un beauf bedonnant à mulet et bouc, raciste (un peu), homophobe (un peu) et machiste (pas mal), qui emmerde ceux qui ne sont pas d’accord, et qui se fout d’à peu près toutes les bienséances. Un mari absent, un ami méprisant, un collègue égoïste, un père indigne, bref, un sale con. Mais quel sale con !

Kenny Powers, à l’inverse de beaucoup d’antihéros timides ou maladroits, assumait crânement sa position : il était grand, il était fort, il était fait pour être un champion, et même quand il était ridicule (c’est à dire bien souvent), il visait toujours le sublime. Il était immense, mais il était minable. Et sous son masque de winner, dans son regard bovin, passait en éclairs la lucidité de l’homme qui souffre. Car Kenny Powers n’était pas le Dieu qu’il voulait que l’on célèbre. Kenny Powers était un pauvre mec, paumé, seul, abandonné par un père encore pire que lui, incapable d’aimer, à l’égo dévorant. Un clown triste redoublant de gesticulations à chaque assaut du réel, à chaque obstacle, à chaque peur. Un bouffon arrogant dont chaque maladresse, chaque écart, chaque stupidité laissait sourdre une blessure, une faille, une incapacité à grandir.

Kenny Powers m’a fait rire. Kenny Powers m’a fait taper des mains. Kenny Powers m’a fait sourire. Kenny Powers m’a ému. Ses auteurs m’ont offert quatre saisons de plaisir jamais coupable, quatre saisons où les pires vulgarités étaient écrites à l’encre des émotions — ou avec de la bière, selon. Danny McBride, son génial interprète, a su rendre attachant cette sublime enflure, relevant sans cesse le niveau de ses sorties, inscrivant ses dialogues au panthéon des répliques sérielles. Eastbound & Down aura offert des moments comiques cultes, cultissimes, cultissimesques : sa déclaration d’amour à April et à ses gros nichons, les caméos monstrueux de Will Ferrell (aussi producteur), ses discours ampoulés (voir la vidéo ci-dessus).

Dimanche soir, Kenny Powers s’en va. He’s Fucking out, et nous aussi.

Dimanche soir sur HBO, et lundi soir sur OCS City chez nous.

4 commentaires pour “Putain, Kenny, t’en va pas !”

  1. J’espere qu’on reverra Will Ferrell dans le series finale !

  2. La série capable de fournir une fournée de citations cultes par épisode, de nous faire rire à grands éclats, de nous amener dans une douce euphorie sur le destin du personnage via sa réussite personnelle et professionnelle pour nous faire descendre plus bas que terre en même temps que lui.
    La bonne nouvelle c’est que Danny McBride risque de revenir très vite à la télé via une série animée sur FX (Chosen).

    “Who am I? I’m your handsome white Jesus, motherfucker!”

  3. *Chozen en fait pour sa future série.

  4. totalement d’accord !!!

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