Techniquement, c’est la semaine 10, mais il ne s’est rien passé la semaine dernière, alors appelons ça la semaine 9. Le câble se remue, et ça fait plaisir. Deux nouveautés étaient au programme, lundi et mardi soir, qui étaient toutes les deux très attendues, la première avec des craintes, la seconde avec des espoirs. Bates Motel déboulait sur A&E lundi, Top of the Lake sur Sundance Channel mardi. Alors, heureux ?
BATES MOTEL (A&E)
De quoi ça cause. De Norma et Norman Bates. Si vous ne savez pas qui sont ces gens, sortez. Et allez dans un vidéoclub louer Psychose d’Alfred Hitchcock, ce petit film méconnu où une jeune femme se fait trucider sous la douche. A peine une des scènes les plus célèbres de l’histoire du cinéma. Bref. Bate Motel raconte la jeunesse de Norman, 17 ans, qui emménage avec sa très chère et très possessive maman Norma dans un petit motel au bord de l’océan. C’est beau comme tout, sauf qu’on connait la suite, et qu’on se doute que chez les Bates, on est psychopathe de mère en fils…
Comment je la sentais. Ça sentait le blasphème à plein pif. Les prequels me tapent sur le système. Va pour Carrie Bradshaw, même si le résultat m’indiffère totalement. Mais essayer de faire des ronds sur le dos d’un classique du cinéma, c’est un peu fort. Ceci étant dit, la présence de Carlton Cuse (Lost) aux manettes me laissait espérer quelque chose d’osé, d’original, et peut-être même de pas si mal.
Ce que je pense du pilote. Ok, le prequel est un exercice de style intéressant. Mais pourquoi aller chercher ailleurs, dans une œuvre connue, ce qu’on peut imaginer ? L’atout numéro 1 de Bates Motel, c’est la relation flipante, violemment œdipienne, qui unie Norman et Norma. Pas besoin d’Hitchcock pour en faire une série. Ce premier épisode en tire de bonnes choses, même si il appuie un peu trop lourdement, se sentant obligé de multiplier les “je t’aime maman” et d’insister sur le côté castrateur de la mère. Grâce à Freddie Highmore, très bien, et Vera Farmiga, encore mieux, ça fonctionne plutôt bien. Cuse, pour ne pas simplement raconter une histoire de “couple”, en fait un thriller, avec petite ville à la Twin Peaks et, forcément, meurtres. C’est à la fois ce qui amènera le divertissement nécessaire — on est sur A&E, par sur AMC — et ce qui, peut-être, est la grande faiblesse de la série. Si “les” Bates, dans Psychose, étaient si flippants, c’est en bonne partie “grâce” à leur vie totalement isolée du reste du monde… Quoi qu’il en soit, ce pilote se laisse regarder sans déplaisir, Nestor “Ricardo” Carbonell pointe le bout de son nez, ce qui est chouette, et on en sort avec l’impression de finalement, non, notre mère à nous n’est pas si castratrice que ça.
Ma note : 6,5/10, avec un beau 8/10 à Farmiga et Highmore, parfaits.
TOP OF THE LAKE
De quoi ça cause. Robin Griffin, une jeune flique, revient dans sa Nouvelle-Zélande natale pour passer un peu de temps avec sa mère malade. Elle est appelée en renforts quand une jeune fille de 12 ans est retrouvée en train de faire trempette dans le lac du coin… vraisemblablement pour tuer le bébé qu’elle porte. Qui est les père ? Y a-t-il eu viol ? Sachant que la fillette vient d’une famille de “redneck” locaux, chasseurs violents et trafiquants de toutes sortes, Robin s’inquiète. Elle s’inquiètera plus encore quand la demoiselle disparaitra…
Comment je la sentais. Bien. Jane Campion (La Leçon de Piano) est aux manettes, et le casting est prometteur, avec Elisabeth “Peggy de Mad Men” Moss, Peter Mullan et Holly Hunter, entre autres. A en croire les premières images, on pouvait attendre de cette minisérie (7 épisodes) un polar atmosphérique, sombre, captivant. Et, comme j’avais vu le très bon pilote de Rectify, la première série inédite de Sundance Channel, avant de voir cette coprod avec la BBC, j’avais un bon feeling.
Ce que je pense du pilote. Filmé sur un faux rythme, il sert surtout à présenter les personnages, et à poser une intrigue qui, on le comprend vite, ne fera pas toute l’histoire — d’ailleurs, la fillette ne disparait pas dans le pilote. Les décors sont somptueux, mais froids, hostiles. Le monde que filme Campion est lui aussi violent, méchant, globalement con, et ne donne clairement pas envie d’aller s’installer en Nouvelle-Zélande (sauf pour y vivre en hermite dans la montagne). Ce qui importe la réalisatrice, c’est une atmosphère, une impression d’étrangeté, de quelque chose de cassé dans la narration, dans les images comme dans les personnages. On peut lui reprocher de faire des personnages malheureusement caricaturaux, surtout le chef de famille alcolo incarné par Peter Mullan (le père de la fillette) et le gourou féministe joué par Holly Hunter (double de Campion jusque dans sa longue chevelure grise et sa voix quasi inaudible sous un sourire mystérieux). On peut aussi lui reprocher, comme le fait très justement le critique du New York Times Mike Hale, de nous servir une vision d’un monde où tous les hommes sont des brutes ou des faibles, et toutes les femmes des victimes en lutte. Ce pilote n’en reste pas moins intriguant, et on attend de voir la suite — même si les critiques américains, pas très sympas, ont déjà écrit que la chute finale de la minisérie était gratuite et décevante.
Ma note : 7/10, pour la mise en scène, le casting 3 étoiles et le rythme atypique de l’intrigue. Avec une crainte pour l’avenir et un bémol sur la vision du monde de Campion. Pour info, Top of the Lake passera sur Arte à l’avenir.
Images : Top of the Lake (Sundance/BBC), Bates Motel (A&E).
Les “rednecks” locaux comme tu dis, on appelle ca des bogans la-bas. Voila, comme ca tu sais 😉