Je ne suis pas un grand fan de House. Juste un admirateur distant, qui a vu un paquet d’épisodes, mais pas toujours dans l’ordre, qui s’informe de temps en temps sur l’évolution de l’histoire, qui reconnaît la puissance de la performance de Hugh Laurie. Mais pas plus. En préparant un Hebdo Séries, il y a deux semaines, je suis tombé sur une scène magistrale. Un chef d’œuvre de conclusion d’épisode, de tension, de poésie, de subtilité, parfait de bout en bout, de sa narration à sa mise en scène, en passant par sa musique. Au cas où vous n’auriez pas vu cette scène, je voulais vous la montrer, et vous en parler. La vidéo est ci-dessous, et la séquence débute vraiment à 1’20”.
Cette scène, c’est l’ultime séquence de l’épisode 16 de la saison 7 – en cours de diffusion aux Etats-Unis. Si vous êtes allergiques aux petits spoilers, évitez donc de la regarder – quoi qu’elle ne dise pas grand-chose. Et pour cause, c’est une scène essentiellement muette. House, réfugié dans un hôtel, passe ses journées à boire, à coucher avec des prostituées et à jouer des tours à ceux qui l’entourent. Après un ultime verre au bar de l’hôtel, il remonte dans sa chambre. Démarre alors une reprise symphonique de My Body is a Cage de Arcade Fire par Peter Gabriel. Je vous laisse savourer la suite…
Tous les producteurs, réalisateurs ou scénaristes qui veulent conclure leurs épisodes sur un « clip » musical devraient voir et revoir cette scène. Sa montée en puissance, orchestrée par la musique, est parfaite. D’abord, sur fond de piano sombre, on assiste à la déchéance de House. Alcool, canne au sol, médicament, obscurité dans la chambre, tout y est. Parallèlement, Wilson déboule dans le bar de l’hôtel, à la recherche de son ami. Cette entrée déclenche la tension. Pourquoi le verrait-on chercher House s’il s’agissait juste de voir le héros se coucher ? Quelque chose de grave s’est passé, ou va se passer. La scène est entièrement filmée au ralenti – jusqu’au dénouement de la tension. Un ralenti esthétiquement remarquable, mais surtout utile.
Tout flotte. Le temps est suspendu à la complainte de Peter Gabriel, à ce « mon corps est une cage, qui m’empêche de danser avec celle que j’aime… mon esprit est la clef. » Détruit, malheureux, seul, boiteux, House veut se libérer de son corps. Il boit, il se drogue. C’est insuffisant. Lentement, il s’approche du balcon. On pense immédiatement qu’il va se suicider, mais on refuse d’admettre cette solution impensable à l’épisode 16 d’une saison — et sur la Fox, en plus. Pourtant, il s’approche, il monte sur la rambarde. La musique s’emballe. Wilson n’a pas encore vu son ami, mais toutes les têtes se tournent vers le ciel. Silence. Et saut – sur un plan magnifique depuis l’intérieur de la chambre. Le temps se ralenti encore, étirant le « non ! » lâché par Wilson. Impossible. House se suicide. La tension est immense, on pense à un rêve, un fantasme, ça ne peut pas être la réalité.
La chute est interminable. On attend l’impact, ou le réveil. Mais non. House se met en boule et hurle « cannonball ! » Il fait une bombe. Dans la piscine. Il fait du balconing. La tension disparaît immédiatement, remplacée par le rire. Mais la scène n’a pas fini de nous étonner. Le silence se fait, sous l’eau, et la caméra s’applique à nous montrer les traits de House, souriant. A sa remontée, et face aux reproches de Wilson, il se lâche. Entouré d’étudiants ivres, il hurle : « Qu’est-ce que tu fais quand tu gagne ? Tu fais la fête ! Qu’est-ce que tu fais quand tu perds ? Tu fais la fête ! » La poésie est partie, le temps reprend son cours normal, la musique se tait, abandonne House à son malheur. La caméra se concentre sur Wilson, qui quitte la scène, tête basse.
Drame, suspens, émotion, rire, tristesse, peur, perfection de l’image et du son, performance évidemment remarquable de Laurie (et de Leonard), tout est ici parfait. Une telle scène pousse à regarder plus attentivement House. Malheureusement, elle fait aussi réaliser que si la série abandonnait plus souvent sa routine procédurale, elle pourrait être plus forte encore, tant son héros est un personnage fascinant, bouleversant, d’une rare complexité.
Alors je ne sais pas si c’est la coupe de la vidéo, si c’est fait exprès ou pas, mais quand même… quand Wilson s’en va, il est un peu embêté par la foule qu’il doit éviter et ce que ça donne a l’écran… c’est qu’il boite (et pas House, qui est dans l’eau, sans sa canne) en plus d’avoir la tête basse.
ca pourrait être une idée d’articles: les plus belles scènes de séries télé..
House est vraiment devenu incroyable depuis 2 / 3 saisons. Avant je regardais parce que j’aimais le personnage, l’humour noir, le sarcasme et la perf de Laurie. Mais depuis la saison ayant fini dans la déchéance puis l’hosto, la série est feuilletonante juste comme il faut et les scénaristes se font des délires qui maintiennent bien l’intérêt pour la série et surtout l’épaisseur de House. L’épisode d’avant était un must aussi, avec les zombies (http://youtu.be/ChnDRPpvMQg) et du musical bien barge ( http://youtu.be/h2xoO_tU7HI )