Ce week-end se déroulait pour la première fois Deauville, saison 1, branche sérielle du Festival du Cinéma Américain. Une première qui promet, pour les années à venir, quelques débats intéressants autour des productions françaises et américaines. Parmi les plumes invitées (David Chase, le créateur des Soprano, était là, on en reparle dans l’Hebdo Séries de jeudi, sur ce blog), Ian Edelman, créateur méconnu de l’excellente How to Make it in America, qui commence demain soir à 20h40 sur Orange Cinémax. L’occasion idéale de revenir sur les ambitions de cette comédie, qui suit deux potes new-yorkais dans leur tentative de lancer une nouvelle marque de jeans…
“Comment réussir aux Etats-Unis”, c’est un titre en forme de blague ou vous êtes sérieux ?
Non, ce n’est pas une blague, mais il faut le prendre au sens légèrement ironique. Je ne veux pas faire l’apologie des traders et des costards de Wall Street, mais parler du chemin qui mène du rien à la réussite professionnelle. En revanche, je ne comprends toujours pas comment HBO (la chaîne qui diffuse la série, ndlr) a pu laisser passer un titre pareil. Il est clairement trop long. D’ailleurs, les gens ont fini par dire How to make it, tout court, mais le “in America” est évidemment essentiel.
Le contexte de crise que le monde traverse est-il important ?
J’aurais pu faire cette série il y a 20 ans, car les thèmes abordés sont intemporels. Pour autant, le fait qu’on soit aujourd’hui en situation de crise rajoute du sel au scénario. Je dois préciser que nous étions déjà en train de filmer le pilote quand la crise est arrivée. Un peu comme un signe cosmique. Le truc, c’est que Ben et Cam n’ont pas d’argent. Ils sont fauchés quoi qu’il en soit, la crise n’aura d’impact sur eux que dans un second temps, en rendant leurs rêves plus difficiles à atteindre. L’histoire de How to Make it in America reste malgré ça celle de deux gars qui ont un rêve, qui savent qu’ils vont galérer pour l’atteindre, mais qui vont se battre jusqu’au bout.
On est donc dans un retour en force du rêve américain, non ?
Disons que je veux rester positif sans être idéaliste. Je veux être léger mais réaliste. C’est une comédie, pas la plus drôle du monde, mais qui veut au moins apporter un message optimiste. Le générique illustre bien ça : tout est possible en Amérique. Ses images et sa musique disent la même chose : un dollar, c’est le début de quelque chose, c’est la base de toute réussite.
Justement, à propos de ce générique, comment est-il né ?
Ce sont des amis à moi qui l’ont réalisé. Ils ont fait un instantané de la rue new-yorkaise. Rien n’est travaillé, rien n’est triché. Ce sont des images brutes, des jeunes, des vieux, des skateurs, des gars de la rue… c’est New York quoi. Je suis né et j’ai grandi à New York. How to make it est une déclaration d’amour à ma ville. Il y a forcément quelque chose d’autobiographique dans cette série.
… Elle a l’air chouette votre vie. Ben et Cam sont fauchés, mais ils vont dans les soirées les plus fashion de New York !
Ces soirées existent, je vous le promet, notamment dans China Town. Quand j’ai fini mes études, je n’avais plus un cent en poche, et j’allais dans ces soirées super branchées ! C’est justement ça l’esprit de la série : tout peut arriver. Par exemple, Ben et Cam sont dans un restaurant et paf, d’un coup, ils tombent sur un grand couturier, qui va peut-être les aider à lancer leur carrière. Ça arrive tout le temps à New York, et les new-yorkais n’ont pas peur de foncer, de prendre leur chance…
Vous avez vous-même lancé la carrière d’Aloe Blacc avec I Need a Dollar, qui accompagne le générique de la série…
Exactement ! C’est pas un bon karma ça ? Encore une fois, c’est l’esprit de la série : supporter les jeunes talents. J’ai découvert Aloe Blacc trois jours avant le bouclage du générique. Au départ, j’avais peur que “j’ai besoin d’un dollar” et “comment réussir en Amérique”, ça fasse un peu beaucoup, mais on s’y est tenu, et on ne regrette pas !
Ian Edelman (à gauche) avec Victor Rasuk, alias Cam.
How to make it in America est produite par Mark Wahlberg. Certains l’ont comparée à Entourage, une autre protégée de Wahlberg. Ça vous énerve ?
Pas vraiment, parce que c’est vrai qu’on partage la même équipe de production. Je suis un grand fan d’Entourage, et c’est tant mieux si les gens qui aiment cette série viennent jeter un coup d’œil à la mienne. Après, j’espère que les téléspectateurs iront au-delà de cette comparaison. Le message de How to make it est différent, son esprit aussi, son atmosphère…
Oui, mais après tout, Vince Chase (le héros d’Entourage) et ses potes sont de New York. Ils auraient peut-être cette vie-là s’ils y étaient resté…
C’est pas faux ! On m’a déjà dit ça deux ou trois fois. Bon, les personnages sont différents, mais pourquoi pas…
Pourquoi avoir lancé vos héros dans le monde de la mode ?
C’est un univers qui porte une réflexion sur la façon dont on s’expose au monde, sur notre apparence, sur ce qu’on tente de dire avec nos vêtements. Pour des jeunes comme Ben et Cam, qui n’ont pas de voitures ou d’appartements dont ils sont proprios, un t-shirt, c’est une marque identitaire. A New York, il y a une forte tradition du DIY, “Do It Yourself”, fais ton propre t-shirt.
C’est pas un peu superficiel ce “dis moi ce que tu porte, je te dirais qui tu es” ?
Ça pourrait l’être, mais c’est un peu plus que ça. Les t-shirts que Ben fabrique sont certes super cool, mais ils véhiculent aussi une idéologie. Ben les a designé à la fin des années 90, quand il était au lycée, en protestation contre la politique de Rudolph Guliani, alors maire de New York, et qui était accusé par beaucoup de tuer l’âme de la ville à force de politique sécuritaire. Donc, ça n’est pas si superficiel. Un peu comme la série elle-même d’ailleurs…
Image de Une : How to Make it in America, HBO
Merci pour l’interview ! Je ne me l’explique pas très bien mais je me suis beaucoup attaché à cette série en 8 petits épisodes. Elle a vraiment un petit truc qui fait qu’on s’y sent bien. Le générique aide bien à se mettre dans l’ambiance aussi.
Cette série est tout bonnement magnifique, que ce soit sur l’histoire,les personnages, les images, la bande son etc etc
La seule chose que je lui reprocherai c’est le format: une saison de 8 épisodes d’environ 20 minutes, on en voudrait tellement plus.