I Love David Simon

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Non, il n’y a pas que Lost dans ma vie de spécialiste des séries. Il y a mieux : David Simon. The Wire, la plus grande série de tous les temps, de mon humble avis et de celui de la majorité des critiques, est l’œuvre de cet homme. L’intelligence de ce polar (le mot est affreusement réducteur tant Sur Écoute, en VF, est bien plus qu’une histoire de flics) est telle qu’on l’enseigne partout à travers les États-Unis, et même un peu chez nous. Demain débute sur HBO Treme, la nouvelle série de Simon. Une raison supplémentaire de vénérer cet auteur à part, étonnement prolixe ces dernières années, mais qui parvient à enchainer les projets sans jamais se prendre les pieds dans le tapis.

Simon, 50 ans, est un ancien journaliste. Il a notamment travaillé pour le Baltimore Sun, une expérience qu’il a très largement utilisée pour bâtir ses premières séries, Homicide, The Corner et The Wire. Trois œuvres d’un réalisme impeccable et d’une exigence telle… qu’elles sont quasi inconnues du grand public. Série policière “classique”, la première (dont il n’est pas le créateur, mais qui est inspirée d’une de ses enquêtes avec la police criminelle de Baltimore) a tenu 7 saisons sur NBC (1993-1999) sans jamais casser les records d’audience. La seconde (en 2000 sur HBO), une mini-série sur la vie de quelques dealers et camés, a littéralement servie de base à la troisième (décrochant tout de même 3 Emmys). The Wire, enfin, diffusée sur HBO de 2002 à 2008, ignorée du public, doit sa survie à une critique unanime. Il faudrait un post entier… pardon, un livre entier pour analyser ses qualités, ce qu’elle dit de la société américaine, de la vie urbaine, des politiques sociales, de la justice, de l’éducation, de la politique politicienne, et de milles autres sujets. Après la parenthèse Generation Kill, un coup de maître supplémentaire sur la guerre en Irak diffusé il y a deux ans, Simon revient donc aux États-Unis avec Treme, série se déroulant dans La Nouvelle-Orléans post-Katrina.

J’ai pu voir le pilote de Treme, à La Nouvelle-Orléans, sur le tournage de la série, il y a un mois. Une merveille, évidemment. Une œuvre d’auteur, sensible, entrainante, bourrée de dialogues poignants, de scènes fortes, et bien entendu de musique jazz. Je ne pourrais vous en dire beaucoup plus ici, exclusivité signée avec un autre magazine oblige, mais nous en reparlerons. Tout ce qu’on peut dire, c’est que Simon y parle encore des États-Unis, du peuple américain et surtout de sa culture avec une justesse rare à la télévision. “Nous ne sommes pas en train de refaire The Wire” jurent à qui veut les entendre (et ça fait pas mal de monde) les producteurs de la série, pour beaucoup des anciens de Sur Écoute (tout comme les acteurs d’ailleurs), mais la politique n’est jamais vraiment loin chez Simon. Treme est une histoire de renaissance, mais aussi de colère. Car La Nouvelle-Orléans se relève doucement, mais est encore écorchée vive, consciente d’avoir été abandonnée trop longtemps par le reste du pays, à commencer par le gouvernement Bush — pour Simon, Katrina a été l’ouragan qui a fait déborder le vase républicain.

A l’époque de The Wire, Chris Albrecht, alors responsable des programmes d’HBO, c’était amusé avec le slogan de la chaîne, “It’s not TV, it’s HBO” (Ce n’est pas de la télé, c’est HBO), en lâchant à Simon, “de temps en temps, ça serait pas mal si tu faisais de la télé…” Treme est justement ce que devrait être la télévision, et les séries en particulier : une œuvre originale, forte humainement, visuellement ambitieuse et politiquement (au sens large du mot et non pas seulement dans son sens militant) engagée. Une raison d’aimer le travail de David Simon parmi tant d’autres, raison qui, on l’espère, aura l’attention des téléspectateurs américains demain soir…

Image de Une : David Simon, HBO.

4 commentaires pour “I Love David Simon”

  1. Je suis entièrement d’accord avec l’auteur de ces lignes quant au génie indéniable de David Simon.
    ‘The Wire’ reste également, à mes yeux, l’un des plus beau ‘roman télévisuel’ qu’il m’ait été donné de découvrir et que je conseille à tout fan de série qui sait prendre le temps pour des oeuvres plus exigeantes.
    En ce qui me concerne, il m’a fallu 6 à 7 épisodes (pas moins !) pour accrocher à ‘The Wire’.
    Je ne le regrette pas.
    Depuis ‘Murder One’, je n’avais jamais autant “scotché” devant l’écran.

    J’ai hâte de découvrir ‘Treme’ !

    “Way down to the hole …”

  2. The Wire, la plus grande série de tous les temps
    de mon humble avis aussi …
    Un problème de taille : je crois que Treme risque d’être diffusé sur Orange Séries, je vais donc devoir attendre (difficilement) la sortie DVD …

  3. Orange Tv a aussi signé a Game of Thrones. Décidément, HBO doit leur faire des prix de gros mais celà se fait à notre détriment. Heureusement que j’ai un copain qui vit en Amérique.

    Je rebondis sur Murder One, excellente série et dure à trouver. Pierre, pourquoi en pas faire un article sur ces séries des années 90 qui ont été les précurseurs de la grande qualité? Murder One, Wiseguy (les 3 premiers archs)…

  4. Même avis que les précédent, The Wire, c’est une claque, même si j’ai un préférence pour The Sopranos (mais pas de beaucoup).

    Comme d’autres, il m’a fallu une petite saison pour rentrer dans la série, mais après cet effort, c’est grandiose.

    J’attends donc Treme avec impatience, même si l’univers musical me fait un peu peur.

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