Roches Liancourt

Les roches Liancourt, ces quelques îlots qui émergent à mi-chemin entre les côtes coréennes et japonaises symbolisent toute la complexité des relations entre les deux pays, et parfois tout le ridicule dans lequel peuvent se draper Coréens et Japonais pour se disputer un petit bout de territoire. L’enjeu de cette bataille diplomatique se résume à deux gros cailloux aujourd’hui occupés par quelques policiers sud-coréens et un couple de pêcheurs amené sur l’île à grands coups de subventions en 2006. Dans les faits, ces roches Liancourt, qu’il est ici déconseillé d’appeler autrement que par son nom coréen “Dokdo”, sont donc un territoire sud-coréen.

Mais vous l’aurez deviné, les Japonais ne sont pas du tout d’accord. D’ailleurs, n’allez pas parler de Dokdo aux Japonais, qui ne connaissent ces îlots que par leur dénomination japonaise “Takeshima”. Injustement occupées par les Coréens, ces îles seraient partie intégrante de la préfecture de Shimane, qui depuis 2005 célèbre un “Takeshima day” afin de mobiliser l’opinion nationale  contre cette injustice.

L’appartenance des roches Liancourt est un sujet aussi controversé que l’origine de la rivalité entre Corée et Japon et quiconque tenterait une explication serait aussitôt accusé par l’un des deux camps de favoriser le camp adverse. Pour les Coréens, Dokdo, dont l’appartenance à la Corée serait prouvée par des archives historiques coréennes et japonaises, n’est rien d’autre que le premier bout de territoire national annexé par les Japonais en 1905, avant d’annexer le reste quelques années plus tard. Que le Japon conteste ce bout de terre est donc une provocation grave car en plus de mettre en cause l’intégrité territoriale du pays, il tend à légitimer le passé impérialiste de l’Empire Nippon.

Pour les Japonais, l’histoire est différente: ils auraient certes annexé l’île au début du 20ème siècle, mais alors qu’elle n’appartenait à personne. Tandis que dans le traité de San Fransisco de 1951 ces fameuses roches Liancourt ne figureraient pas nommément dans la liste des territoires Coréens pour lesquels le Japon déclare renoncer toute ambition.

Aujourd’hui cette querelle est donc forte de symboles: pour les Coréens c’est une preuve supplémentaire que le Japon n’a pas complètement renoncé à son ambition impérialiste, tandis que pour les Japonais, il s’agit de dépasser le complexe de sa défaite de 1945 et de pouvoir faire valoir ces droits comme n’importe quelle autre nation souveraine.

C’est ainsi que chaque petit fait et geste de l’un est scruté et interprété par l’autre et vice-versa. Chaque sortie de manuel scolaire Japonais est contrôlé par les Coréens afin d’y détecter toute mention de ces îles comme appartenant au Japon.  Chaque auteur de mappemonde où ces fameuses îles seraient décrites sous la mention Takeshima (ou Dokdo) ferait l’objet de protestation officielle de la Corée (ou du Japon). Dernier épisode en date: un vol de démonstration de son nouvel airbus A380 effectué par Korean Air au dessus de Dokdo. Forcément, ça n’a pas plu au gouvernement japonais qui a demandé à ses fonctionnaires de boycotter la compagnie aérienne pendant un mois.

– “Les Coréens auraient pu boycotter à leur tour les compagnies japonaises, mais ils ne les prennent jamais de toute façon parce qu’elles sont trop chères,” me dit une amie coréenne.

La cour de récré vous dis-je…

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