Plus que l’inquiétude d’une guerre, ce sont ces deux sentiments qui prédominent chez les Sud-Coréens aujourd’hui. Il y a à peine deux semaines s’achevait le sommet du G20 de Séoul, dont l’organisation réussie devait montrer au monde entier une nation prospère, sûre de ses forces et de son destin. Mais se sont les images de l’île de Yeonpyeong bombardée par le Nord puis celles de manoeuvres militaires à grand renfort de porte-avions américain qui tournent en boucle dans le monde entier.
Au delà du danger réel que représente le Nord, et dont beaucoup de gens sont blasés ici, toute la frustration des Sud-Coréens est résumée là: parvenue au cercle très prisé des nations riches, elle est maintenant en quête de reconnaissance internationale, mais les rares moments de célébrité dont elle jouit viennent de ses déboires avec son frère ennemis, et au cours desquels le Sud apparaît chaque fois comme victime impuissante.
Le mécontentement des Coréens du Sud ne concerne pas seulement le Nord mais aussi leur propre gouvernement. En 2007, le Président Lee Myung-bak (centre-droit) est élu sur une ligne de fermeté vis-à-vis de la Corée du Nord. Arrivé au pouvoir, il met fin à la politique d’ouverture et au programme d’aide inconditionnelle mis en place par son prédécesseur, arguant que cette stratégie n’a donné aucun résultat.
Mais un navire de guerre coulé et une île bombardée plus tard, l’opinion s’aperçoit que le langage de fermeté n’a non seulement pas porté ses fruits, mais n’est qu’une façade cachant un manque de préparation inquiétant de l’armée sud-coréenne aux attaques du Nord. Il aura ainsi fallu 13 minutes pour que 3 des 6 canons d’artilleries en poste sur l’île (les 3 autres restants étant en panne pour 2 d’entre eux, et endommagé pour le dernier) répliquent par des tirs… à l’aveugle dans le vide, et 38 minutes à l’artillerie sud-coréenne pour finalement repérer l’origine des tirs et répliquer correctement.
Impuissance militaire donc, mais impuissance diplomatique également vu que les clés du problème coréen sont plus dans les mains des Etats-Unis, dont la Nord cherche la reconnaissance et la garantie de non agression, et de la Chine qui seule, possède un moyen de pression sur le régime nord-coréen.
Colère et surtout impuissance donc.