Éditeur de tissus à l‘origine en 1935, la maison Pierre Frey a acquis sa renommée avec des tissus d’ameublement très prisés dans les années 50. À partir de 1970, s’est ajoutée une diversification dans les papiers peints avec de très belles créations. Les textiles côtoient les papiers peints, le tout en relation avec des oeuvres du Musée des Arts décoratifs pour dessiner des « intérieurs ». Des motifs orientalistes, ethniques, floraux… Kenya, Bolchoï, Taïwan, Mauritius, montagnes japonaises… emportent vers d’imaginaires contrées. Voyages.
S’ajoutent quatre collections capsules imaginées pour l’exposition. Pour décorer l’espace 1935-59 Julien Colombier a créé un imprimé se jouant de la lumière. Pour les années 60-79 Benjamin Graindorge s’est amusé avec la notion de pixel, écho à l’Op art. Pour les années 80-99 Marcel Wanders a opté pour des fleurs. Et enfin pour 200O-2015, Nao Tamura a conçu un jacquard sur un thème de nature. Point d’orgue de l’exposition, un travail d’artistes contemporains dont Julien Salaud, Kumi Yamashita sur des thèmes maison : la couleur, l’encre, l’histoire, la matière, le motif et le bruissement de l’étoffe. Une promenade dans le temps via les murs.
Au Musée des Arts décoratifs Jusqu’au 12 juin.
Soleils à moustache Irène Rohr 1944 DR
Taiwan. 1974 DR
Montagnes japonaises 1981 DR
Mauritius 2014
Kenya 1972 DR
La chasse aux papillons 1988 DR
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Quatre siècles de papier aux Arts décoratifs au travers d’une sélection de 300 motifs (choisis parmi une collection de 400 000 modèles !). Motifs géométriques, trompe-l’oeil, paysages, scènes bucoliques, fleurs, arabesques, inspirations orientalistes, mythologiques… les papiers peints reflètent le goût des époques dans lesquelles ils s’inscrivent. Des motifs « imprimés » et non peints comme pourrait le laisser supposer le nom. Rêveries poétiques pour créer des petites bulles de décoration façon boudoir ou envolées de prestige pour pièces d’apparat. Art nouveau et arabesques, arts déco et géométrie pour le début du XXe siècle.
À découvrir tout le travail en trompe-l’oeil de la manufacture Jacquemart & Bénard reproduisant des éléments architecturaux de l’antiquité, colonnes, frises, murs… L’idée de trompe-l’oeil se redécouvre aussi plus contemporaine chez Maison Martin Margiela avec un motif de fausse porte.
Parmi les artistes qui ont « signé » des motifs : Emile-Jacques Ruhlmann, Jean Lurçat (plus connu pour ses tapisseries), Léonor Fini.
Mais aussi Jean- Charles de Castelbajac avec un motif de zèbres enchevêtrés dans un esprit un peu fou des dessins imbroglios d’Escher ou encore Niki de Saint Phalle et ses nanas.
Des motifs minéraux, animaliers et se dessine l’univers original de Piero Fornasetti, toujours poétique et délicat (dédicace à Andromaque).
Et reprendre E. A. Poe : « Le papier peint au motif répétitif est l’instrument du rêve, de l’évasion, parfois de l’hallucination ».
Au Musée des Arts décoratifs jusqu’au 12 juin.
Niki de Saint Phalle C Arts Décos.
Eventails Manufacture Sanderson 1930 Photo Jean Tholance.
Porte Trompe l’oeil Maison Martin Margiela C Arts décos Photo jean Tholance.
Papier peint Jean Lurçat 1925/30 Photo Jean Tholance.
Lendemain de fête. Léonor Fini et Jacques Hincelin C Arts déco Photo Jean Tholance.
Zèbres J.-C. Castelbajac Photo Jean Tholance 2009.
Manufacture Paul Gruin 1930 Photo Jean Tholance.
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Dans la forêt à une vingtaine de kilomètres de Stockholm s’est installé un Musée, Artipelag* dont la dernière exposition met en scène la couleur sous forme de monochrome.
Dans l’histoire du monochrome, déjà à la fin du XIXe siècle, a surgi une tentative amusante avec le mouvement des Incohérents. Alphone Allais rêvait de « monochroïdes » : Procession de jeunes filles chlorotiques par temps de neige, Récolte de la tomate sur le bord de la mer rouge par des cardinaux apoplectiques...
Et Courbet ne parlait-il pas de la difficulté à peindre une serviette blanche sur une nappe blanche ? Malevitch mit le noir et le blanc au carré avec le suprématisme. Mais c’est peut-être Yves Klein qui utilisa le premier la dénomination de monochrome avec ses oeuvres bleues en IKB, ou en doré. Aux États-Unis, en Italie, en France des artistes complètent une riche histoire : Barnett Newman, Robert Ryman, Pierre Soulages, Piero Manzoni, Lucio Fontana… Surface pleine ou camaïeux (en allant jusqu’à Rothko), la variation monochromique est passionnante.
L’exposition à Artipelag met en scène des salles occupées par une seule couleur. La plus grande est dévolue au noir avec une oeuvre de Yannis Kounellis, vêtements suspendus avec un écho mode puissant avec une série de robes de Yohji Yamamoto.
Des choix d’oeuvres contemporaines et d’artistes scandinaves. Humour des 50 nuances de noir qui aligne des carrés noir nommés : Africa, Little Black Dress, Black Market, Crude Oil, Black Widow… Une oeuvre de Riikko Sakkinen.
Des figures en ombres de David Svensson jouent sur la profondeur de la couleur.
Quelques silhouettes blanches fantomatiques de robes de Yohji Yamamoto passent en reflet dans la forêt.
Le bleu baigne dans l’IKB d’Yves Klein servi aussi par une vidéo des anthropométries. Jason Martin avec un bleu très Klein l’utilise avec coulées en vagues, peinture en mouvement.
Le rouge est mis avec Donald Judd et Lucio Fontana et son rouge lacéré.
Autour du vert, les objets s’imprègnent de chlorophylle et un petit manteau vert pomme devient l’esprit du Petit chaperon vert, une oeuvre de Pia Wallen & Felix Roll avec une version aussi jaune ou or.
Une intéressante thématique à laquelle manque juste peut-être quelques grandes oeuvres (Malevitch, Soulages, Ryman…).
* Fondé par Björn Jakobson le fondateur de Babybjörn. Bâtiment conçu par Johan Nyren.
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Mythique, Guy Bourdin a marqué la photographie dite de mode par une signature originale, humoristique et décapante. Le musée Fotografiska de Stockholm donne à voir une magnifique rétrospective de son travail sous l’intitulé Avant-Garde. Face à l’inventivité de Guy Bourdin, les séries de mode d’aujourd’hui semblent bien fades…
Une grande histoire de communication jalonne aussi le parcours de Guy Bourdin qui a mis en scène pendant des années (1967-1981) les chaussures de Charles Jourdan. Jambes en plastique, cadrages audacieux, scènes macabres, décors léchés, effets surréalistes, corps morcelés,… Jamais chaussures ne furent plus désirables.
D’une vie compliquée émaillée de quelques drames, Guy Bourdin s’imprégna pour mettre en scène moult fantasmes. Il débute avec Vogue en 1955 avec des choix un brin provocateurs, dans les décors (p.e. boucherie). Mystère, violence théâtralisée, couleurs vives dont la présence quasi obsessionnelle du rouge signent les oeuvres étonnantes de Guy Bourdin.
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Quelques modèles de caban à l’allure militaire et boutons dorés marquent le pas de la collection d’Alexandre Vauthier.
Sous-jacente, la féminité reprend vite le dessus avec mini-jupes ou micro robes accessoirisées de cuissardes lacées.
Pour de nouvelles amazones conquérantes, la collection joue les décolletés, les transparences.
Une touche de dentelle, la puissance du cuir.
Des couleurs sobres comme un vert délicat, mais aussi un rouge triomphant.
Effets plissés, jeux d’architecture. Des motifs aux accents quasi fauves, un zeste d’imprimé à fleurs.
Bustiers conquérants et danse des sept voiles. Épaules tombantes, asymétrie subtile. Audacieuse, la femme Alexandre Vauthier.
40 ans de création pour Jean Paul Gaultier et un défilé de couture qui plonge au coeur des années Palace. Une entrée de boîte de nuit, des néons, un physionomiste à l’entrée et les allées et venues des mannequins. Des titres évocateurs (une belle tradition couture conservée chez Gaultier) avec des chansons « tubes » de l’époque : London Calling, Manureva, Cherchez le garçon…
Un hommage à Edwige Belmore, le souvenir de Loulou, mais aussi Eva, Farida,… Les icônes et leur style traversent et allument la nuit.
Des tenues masculin-féminin, redingotes, blousons canaille, pyjamas du soir (so Loulou), blousons de cuir (très Farida)…
Une collection empreinte de décontraction, de nonchalance. Des couleurs vives, bleu, violet, rouge, fuchsia,…
Des dentelles pour dévoiler la peau.
Quelques imprimés fauves rugissent tandis que les paillettes donnent un air de fête sans fin.
Un petit chapeau de entre groom et « pillow box » met un accent sur la silhouette. Nostalgique d’une époque, une collection pour nouvelles reines de la nuit imaginées en haute couture.
Photos P. Stable
lire le billetMonolithique et monochrome, la collection des Viktor & Rolf se découvre entre cubisme et surréalisme. Dans la transposition des volumes est donnée à voir, de façon cubiste, une réalité que l’oeil ne peut percevoir. Les demoiselles ont quitté la vitrine d’Avignon pour se transformer en 3D.
En demoiselles d’Amsterdam ?
Sculptures en mouvement, enveloppes architecturées, le corps est mis à distance. Avec pour point de départ la simplicité d’un polo qui se déploie, le vêtement prend du volume, compose des angles tandis que s’ajoutent en relief des motifs de bouches, d’yeux (un corps morcelé et surréaliste).
La collection va crescendo, débute légère et finit par oblitérer le corps, le masquant, l’engloutissant sous une forme immaculée.
Ne reste que deux jambes sur Dr Martens pour mouvoir le vêtement.
Sculptures hybrides et burlesques, costumes de scène théâtralisés pour un nouveau Bauhaus.
Entre art et mode, une couture cubiste, poétique oeuvre au blanc.
PHOTO S © TEAM PETER STIGTER
SPRING/SUMMER 2016
Décor zen, gradins aux allures de théâtre Noh et parterre verdoyant semé de planches de bois plantent le décor sobre et majestueux de la haute couture du défilé Chanel. Petites étendues d’eau où poussent nénuphars et roseaux en guise de végétation. Place aux femmes fleurs de la collection.
Travail précieux de broderies où s’invitent des copeaux de bois. Les tailleurs sont légion avec des vestes qui jouent de petits effets de capes, boléros ; manches ballons. La jupe allonge la silhouette, d’un coup de crayon tandis que la fente ose le côté ou alors se dessine discrète dans le dos avec l’ajout d’une pièce de mousseline.
Dans une gamme claire autour de tons beige (fétiche chez Chanel) et ivoire se distingue le bleu marine.
Jeux bicolores sur les escarpins et tailleurs.
Un imprimé floral ajoute la couleur à une collection dévolue à la « nature ».
Pour clore le défilé, une mariée en dentelle, mousseline, cuir, copeaux de bois, perles et strass…
La haute couture dans son savoir faire de perfection. Au final, la maison s’ouvre, se dépouille de ses cloisons, se dévoile, comme dans une peinture japonaise, et donne à voir les modèles du défilé. Un jardin zen s’est invité dans le Grand Palais.
Photo Final Olivier Saillant
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