Chaussures ailées, le souvenir du dieu Hermès plane sur les baskets de Jeremy Scott pour Adidas.
Ses « Wings » qui s’envolent aux pieds sont désormais mises en bouteille. Chaussure de verre (et pas de vair) devenue basket (pas seulement après minuit), elle abrite une fragrance unisexe s’adressant à la belle (floralité de la rose) et à la bête (bois) qui en chacun(e) sommeille tandis que la bergamote pétille et que le fond enveloppe : encens, poivre blanc, bois de cashmere. Adidas Originals est une fragrance composée par Maurice Roucel et Philippe Roques.
Un des rares tenants d’une mode humoristique, Jeremy Scott, en plus d’une marque à son nom, signe la direction artistique de Moschino et des chaussures pour Adidas. De l’humour, un esprit pop avec des modèles à capuche animale, survêtements gorille, imprimés tigres… Chaussures mutantes et montantes.
En parfum, une édition limitée de 10 000 exemplaires. (Colette et Flagship store Adidas des Champs-Elysées).
Couleurs vives, art moderne, abstraction géométrique, l’oeuvre de Sonia Delaunay foisonne de formes (cercles souvent concentriques) dans des contrastes dits simultanés. Si remarquable est sa peinture, son travail autour du vêtement est passionnant, réalisant une fusion parfaite entre art et mode.
Née à Odessa en 1885, Sonia est adoptée par son oncle et prend le nom de Terk. Elle part étudier les arts en Allemagne puis à Paris où, après un premier mariage « amical », elle épousera Robert Delaunay. Pour leur bébé, elle compose une couverture en patchwork de tissus qui est remarqué par son entourage.
Apollinaire « invente » le cubisme orphique et le mot orphisme est associé au style pictural des Delaunay.
En 1914 le couple part en Espagne pour plusieurs années. Pour Diaghilev à Madrid les Delaunay créent les costumes et les décors du spectacle consacré à Cléopâtre pour les ballets russes. Dans la fantaisie d’une Égypte revisitée, la reine, solaire, est magnifiée de disques concentriques. En Espagne Sonia Delaunay ouvre une boutique, Casa Sonia, où sont déjà en germe ses idées où tous les secteurs se fondent : arts de vivre, vêtement, décoration…
Dans les années vingt, c’est en France que l’artiste ouvre son atelier et sa boutique de tissus. Pour l’exposition de 1925, elle crée des tissus pour un soyeux lyonnais et crée un extraordinaire manteau brodé pour Gloria Swanson.
Sonia Delaunay explore l’idée de robes poèmes (Tzara, Aragon, Soupault…), une belle idée revisitée quelques décennies plus tard par Jean-Charles de Castelbajac. Proche de dada, elle travaille avec Tzara pour le spectacle Coeur à gaz dessinant les costumes bouche et oeil. Elle joue sur les formes et les volumes, dessine une incroyable robe toupie, expose des mannequins en bois peints de couleurs. Elle crée des écharpes, des costumes de bain, des carrés pour Hermès, travaille pour la maison Redfern… L’artiste donne aux objets de la vie quotidienne une dimension artistique. Ses vêtements jouent sur l’enveloppement, le graphisme et les couleurs. En 1927, elle donne une conférence sur l’influence de la peinture sur l’art vestimentaire.
Si les décennies qui suivront se tournent vers la peinture, le passage par la case tissu, vêtement, s’inscrit à jamais, remarquable, dans l’histoire qui lie art et mode. Fusion parfaite entre les deux, le travail de Sonia Delaunay est superbement exposé au Musée d’art moderne de la ville de Paris où « Les couleurs de l’abstraction » donnent vie à la mode.
À voir absolument jusqu’au 22 février.
-Rythme Couleur, 1964
C Pracusa 2013507 Musée d’art moderne de la ville de Paris . Roger-Viollet
-Couverture de berceau 1911, MNAM
C Pracusa 2013057
-Manteau pour Gloria Swanson c 1924
Broderie de laine Collection particulière
C Pracusa 2013057
-Studio REP
Modèles devant voiture simultanée, 1925
C Pracusa 2013057 C BNF Robert Mallet-Stevens @ ADAGP, Paris 2014 Jacques Heim C DR
Vers un Orient poétique et inspiré Stéphanie Coudert guide sa collection. Du mot farsi qui signifie perle, essence, Qohr se dessine avec le souvenir d’une créatrice qui a vécu en partie en Iran.
Dans un texte, elle raconte :
« À Téhéran, Farah Diba Pahlavi portait un tailleur Chanel sous son foulard fleuri.
Ma mère une robe plissée Rodier orange au genou, parmi les bédouins et voyageurs d’un road-movie, lorsqu’on traversait le désert de Jordanie pour rejoindre Bagdad. Cet orange corail est devenu mon lien à l’Orient. »
Ce rouge orange, voire coquelicot innerve délicatement la collection. Volumes monochromes, géométrie souple. Effets de drapés, noués et plissés. Liens et noeuds pour attaches en liberté.
D’un geste calligraphié, une écriture perso-arabe et la signature d’un peintre qui a posé ses motifs sur les robes : Jean-Marc Wachter.
L’imagination vagabonde. Des traces d’encre tournent en ronds noirs, danse de derviches ?
Un dragon (mirage dans le désert ?) mêle noir, rouge et blanc dans une harmonie de couleurs d’un maquillage kabuki.
Grand manteau jaune, un rêve.
Une collection empreinte de délicatesse, poétique et aérienne. Lentement, mais sûrement Stéphanie Coudert s’installe en couture en tant que membre invité. Mon coup de coeur de la saison.
Avec son truc en plumes, Serkan Cura remet sur le devant de la scène le travail précieux des plumassiers. Robes entièrement recouvertes de plumes pour le panthéon imaginaire de sa collection dédiée à la mythologie. Rangs de plumes travaillées comme dans un esprit fourrure et bottes assorties.
Manteau coquelicot duveteux
Quand il ne crée pas avec des plumes, Serkan Cura travaille dans la tradition de monsieur Pearl le corset. Sculptée et baleinée, sa femme joue les séductrices.
Sacre du printemps pour femmes fleurs, robes en corolle à imprimés botaniques géants, graphiques. Avec bouquets de tournesols, campagne, le souvenir de Van Gogh et des Pays-Bas plane sur la collection du duo Viktor & Rolf. Le défilé s’exprime en une idée, une seule, mais forte et ravissante. Des robes en A, évasées, amplement juponnées. Une impression de motifs 2D qui prend vie en 3D. Reliefs en pétales ourlés de cernes noirs (le japonisme des estampes revisités par le post-impressionnisme ?).
Fabriqués par VLISCO avec une technique « wax dyeing & block printing », les superbes imprimés font songer aux tissus Wax utilisés en Afrique et qui ont fait la renommée de la maison.
Explosion de fleurs bucoliques avec quelques bandes de tissus blancs et ruban noir. De gigantesques chapeaux de paille avec épis viennent convoquer joyeusement Cérès à une fête des moissons, l’été est là. HAPPY.
Photos Team Peter Stitger
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Hybrides, hermaphrodites, les tenues de « mariées » jouent sur deux tableaux chez Jean Paul Gaultier. Bipolaire, janusienne, la mode voit double ; l’un n’est pas l’autre. Demi jupe droite et demi corolle.
Costume mâtiné de robe avec gant glamour. Plissé soleil et jupe droite. Jean Paul Gaultier s’amuse dans la construction en asymétrie. Jeu de l’oeil créatif et superbement réussi avec des coupes parfaitement maîtrisées. Quand passent les mannequins d’hier, Christine Bergstrom, Violetta Sanchez et Claudia Huidobro, la salle s’enflamme et le rythme est donné.
Exubérance des modèles, imprimés animaliers. Hors du temps, une exquise “apicultrice”.
Une touche de Paris avec broderies façon Tour Eiffel.
Longs fourreaux du soir. Jean Paul Gaultier surfe sur ses classiques, jeux de laçage, des lanières et toujours une féminité revendiquée. Après la séduction, le mariage. Une mariée en voile, pièce montée de bigoudis sur la tête et un florilège de voiles et tulles pour mariées en devenir. L’esprit « White Wedding » en bande son pour que tous convolent. Et même des robes de divorce ! Le seul risque, avec ces tenues mixtes, est de se muer en machine célibataire et se suffire à soi-même. Un magnifique souffle de couture.
Photos Patrick Stable
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Rythmée et vive, la collection d’Alexandre Vauthier traverse le podium avec ses conquérantes toujours sexy et déterminées. Le vêtement met le corps en valeur, drapé, (en)lacé, entouré de bandes de tissus.
Des découpes géométriquement orchestrées laissent apparaître le corps par fragments entre transparence et opacité.
Cette saison, le vert est mis, superbe, émeraude ou sapin.
Travail de la coupe avec rigueur et sensualité. Choix des matières, peaux retravaillées, colorées. Veste de smoking au masculin qui devient robe.
Prouesse d’une robe sertie de milliers de cristaux.
Désormais membre officiel de la haute couture Alexandre Vauthier a tenu son rang avec éclat.
Photos Dominique Maitre
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Architecture, construction et déconstruction. En souvenir de l’esthétique japonaise s’esquisse la structure du vêtement kimono. La couture de Gustavolins est architecture douce avec ses drapés, ses jeux de liens qui s’attachent négligemment.
Grand manteau camel sous lequel se dessine un haut jaune et ceinture obi.
Tissus enroulés, drapés mais aussi traversés et figés par un vent imaginaire.
Peaux et fourrure, un poil.
Grande cape poncho. Souffle nippon.
En route vers l’Orient. Dans une palette de couleurs chaudes, sable et terre, surgit une pointe de rouge corail et un lumineux turquoise. Calligraphies d’un orientalisme revisité, drapés en tenue de soirée. Là bas l’Egypte peut-être avec les coiffures en carré à frisottis très Cléopâtre. Tissus à effet dévoré, paillettes, maille… les propositions sont nombreuses. Jeu de boutonnage oblique.
Silhouette en jupe crayon ou grand volume du soir. Cuirs brillants. Imprimés bariolés : le chocolat marié au turquoise.
Motifs ethniques, arabisants et abstraction de blanc éclaboussé de points noirs, peinture.
Danse des sept voiles de mousseline. Flotte un air de désert et se pavanent d’imposants bijoux ethnique.
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Photos Yannis Vlamos
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Maison de la radio, Tour Eiffel en ligne de mire pour une collection en suspension. Apesanteur d’amples jupes parfois sur grande crinoline. Volume de gaze et tulle. Noir et blanc en solo ou duo.
Les couleurs de terres de soleil font leur gamme : « terracotta ».
Transparence et légèreté. Géométrie et trait souligné d’or, graphique. Courbes et déliés. Entre transparence et rigueur.